Séance du 9 mars 2000







M. le président. La parole est à M. Fournier.
M. Bernard Fournier. Madame la ministre, votre venue au salon de l'agriculture samedi dernier à vingt heures trente (Rires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants), après la fermeture de la manifestation, n'a pas été appréciée, c'est le moins qu'on puisse dire, par le monde rural. Vous faire photographier avec des animaux en voie de disparition (Exclamations sur les mêmes travées) et éviter les producteurs a légitimement été interprété comme une stratégie que je qualifierai de « hasardeuse ».
Devant l'Assemblée nationale, vous avez tenté d'expliquer que vous étiez victime de l'incompréhension générale. Vous n'avez convaincu personne.
M. Henri Weber. C'est du machisme « beauf » !
M. Bernard Fournier. Une fois encore, les agriculteurs se sentent provoqués.
S'agit-il d'un nouveau faux pas du même ordre que celui qui vous a conduit récemment à déclarer que les conséquences du naufrage de l' Erika ne constituaient pas une catastrophe écologique ou est-ce une volonté manifeste d'ignorer le travail des agriculteurs et de ne pas engager de dialogue avec eux ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est du harcèlement !
M. Bernard Fournier. Le dogmatisme qui anime votre action au sein du Gouvernement et qui, d'ailleurs, reste diversement apprécié par les membres de votre majorité, va à l'encontre de la nécessaire maturité qui doit accompagner l'exercice du pouvoir.
Le temps du rôdage depuis que vous êtes aux affaires est achevé ! C'est aujourd'hui le temps de l'action et de la concertation.
M. Henri Weber. Assez de condescendance !
M. Bernard Fournier. Et sachez aussi, madame la ministre, que les Verts n'ont pas le monopole de la préoccupation environnementale.
M. Henri Weber. Pour qui vous prenez-vous ?
M. Bernard Fournier. Les agriculteurs, eux, ont une culture de l'environnement qui est celle du quotidien, qui est celle de la gestion et non celle de la théorie.
C'est à vous, madame la ministre, de faire le premier pas en direction des paysans, des chasseurs, des ostréiculteurs.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est de la provocation !
M. Bernard Fournier. Solennellement, madame la ministre, je vous le demande : comptez-vous revoir votre stratégie de dialogue avec le monde rural ? Comptez-vous oublier vos a priori théoriques pour revenir à la réalité ? Enfin, pensez-vous sincèrement qu'il était opportun de faire l'apparition furtive que vous avez faite samedi dernier ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, permettez-moi, malgré mon indignité, de vous donner un conseil : épargnez-moi et épargnez-vous surtout le ton patelin et paternaliste avec lequel vous vous permettez de parler aux femmes en général et à moi en particulier ! (Vives protestations sur les travées du RPR et des Républicain et Indépendants. - Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Josselin de Rohan. Vous êtes au Sénat !
M. Jean Chérioux. On parle comme on veut !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, j'ai fait partie de ceux qui, hier, pointaient... (Brouhaha prolongé sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, si vous voulez entendre la réponse, faites un peu de silence !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Ils ne le veulent pas, c'est clair !
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de faire un peu de silence.
M. Jean Chérioux. Elle ne doit pas agresser le Sénat !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il ne fallait pas poser la question si on ne veut pas écouter la réponse !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, j'ai fait partie de ceux qui, hier, pointaient le caractère non durable d'une agriculture qui produisait beaucoup, certes, mais qui se préoccupait peu du maintien des emplois et de l'impact de ses activités sur l'environnement.
Ceux qui, à l'époque, plaidaient pour une redistribution plus juste des aides publiques, pour la reconnaissance de la multifonctionnalité de l'agriculture étaient qualifiés de provocateurs. Aujourd'hui, cette analyse est largement partagée par le monde agricole, tous syndicats confondus, et je me réjouis que le dialogue nourri que nous avons mené avec le monde agricole depuis si longtemps...
M. Jean Chérioux. Au salon ! Porte de Versailles !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... ait permis cette mutation.
Simplement, monsieur le sénateur, je doute que le dialogue avec les agriculteurs soit plus facile dans le brouhaha qui a accompagné ma visite l'an dernier que dans le calme des groupes de travail qui animent cette concertation au sein de mon ministère. Je veux parler du groupe de travail sur l'eau, du comité national de suivi du plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole, du comité sur l'épandage des boues des stations d'épuration, du groupe de travail sur les organismes génétiquement modifiés ; du groupe de travail sur Natura 2000, des groupes de travail existant au sein des agences de l'eau, et j'en passe !
Ces contacts sont réguliers ; ils sont hebdomadaires, voire quotidiens puisque ma dernière rencontre avec Luc Guyau date du 16 février et celle avec les représentants de la fédération paysanne de la semaine suivante.
Je voudrais donc vous le redire : je tiens énormément à avancer sur les chantiers qui intéressent, à la fois et le monde agricole et le ministère de l'environnement. J'y crois fort.
M. Dominique Braye. Vous êtes la seule !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je tiens par ailleurs à vous informer, monsieur le sénateur, que je n'ai prévu de me rendre ni au salon de la randonnée et des sports de nature, ni au salon du thermalisme, ni au salon de l'artisanat, ni à celui des vins, du tourisme ou du livre, mais cela ne devrait pas vous amener à nourrir des inquiétudes exagérées quant à la nature des relations que j'ai avec les animateurs de cette profession. Je fais mon travail et j'aimerais que les sénateurs de l'opposition sachent parfois le reconnaître ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

FISCALITÉ ET PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES