Séance du 21 mars 2000







M. le président. « Art. 8. - Le titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, est ainsi modifié :
« 1° Non modifié ;
« 2° Le deuxième alinéa de l'article 1er est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sont considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, prévisions et décisions, qui émanent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes de droit public ou privé chargés de la gestion d'un service public. Ces documents peuvent revêtir la forme d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels, de documents existant sur support informatique ou pouvant être obtenus par un traitement automatisé d'usage courant.
« Ne sont pas considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, les actes des assemblées parlementaires, les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 140-9 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés à l'article L. 241-6 du même code, les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République et les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé visé à l'article L. 710-5 du code de la santé publique. » ;
« 3° L'article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2 . - Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre.
« Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Il ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Il ne s'applique pas aux documents réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de services exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées.
« L'administration sollicitée n'est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, en particulier par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. » ;
« 4° Non modifié ;
« 5° Les deux premiers alinéas de l'article 5 sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Une commission dite "Commission d'accès aux documents administratifs" est chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques, dans les conditions prévues par le présent titre et par le titre II de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. Elle émet des avis lorsqu'elle est saisie par une personne qui rencontre des difficultés pour obtenir la communication d'un document administratif ou pour consulter des documents d'archives publiques, à l'exception des documents mentionnés au 3. de l'article 3 de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. La saisine de la commission pour avis est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux.
« Elle conseille les autorités compétentes sur toute question relative à l'application du présent titre et des dispositions susmentionnées de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. Elle peut proposer, à la demande de l'autorité compétente ou à son initiative, toutes modifications de ces textes et toutes mesures de nature à faciliter l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques et à renforcer la transparence administrative.
« La commission établit un rapport annuel qui est rendu public. Ce rapport retrace notamment les principales difficultés rencontrées par les personnes, au regard des différentes catégories de documents ou d'archives. » ;
« 6° Après l'article 5, il est inséré un article 5-1 ainsi rédigé :
« Art. 5-1 . - La Commission d'accès aux documents administratifs est également compétente pour examiner, dans les conditions prévues aux articles 2 et 5, les questions relatives à l'accès aux documents administratifs mentionnés aux dispositions suivantes :
« - l'article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales,
« - l'article L. 28 du code électoral,
« - le b de l'article L. 104 du livre des procédures fiscales,
« - l'article L. 111 du livre des procédures fiscales,
« - l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association et l'article 2 du décret du 16 août 1901,
« - l'article 79 du code civil local d'Alsace-Moselle,
« - les articles L. 213-13 et L. 332-29 du code de l'urbanisme. » ;
« 7° à 9° Non modifiés. »
Par amendement n° 4, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par le 3° de l'article 8 pour l'article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 :
« Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'article 8 modifie la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs.
Les principaux points de divergence entre les deux assemblées, au stade de la nouvelle lecture, sont au nombre de deux.
Le Sénat a adopté la rédaction de la loi en vigueur, mettant en exergue le caractère communicable de plein droit des documents administratifs. L'Assemblée nationale a prévu que les autorités concernées sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent, même sans en être l'auteur. Le Sénat a souhaité conserver les exceptions à la pratique, couramment admise par la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, selon laquelle les administrations détenant un document sans en être l'auteur le communiquent au demandeur. Il s'agit notamment de préserver l'interdiction pour le préfet de communiquer certains actes des collectivités territoriales qui lui ont été transmis au titre du contrôle de légalité.
L'Assemblée nationale a prévu la compétence de la CADA pour l'application de l'article L. 111 du livre des procédures fiscales, c'est-à-dire pour la communication de la liste des personnes assujetties à la taxe départementale sur le revenu. Avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé cet ajout de l'Assemblée nationale, qui risque de restreindre l'accès effectif aux documents fiscaux.
La commission des lois vous soumet deux amendements tendant à confirmer les positions de principe adoptées par le Sénat en deuxième lecture. Pour le reste - non-communicabilité des contrats réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de service et rapport de la CADA - elle vous propose d'adopter la rédaction proposée par l'Assemblée nationale.
En nouvelle lecture, avec avis de sagesse du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé que les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé, visés à l'article L. 710-5 du code de la santé publique, ne sont pas des documents administratifs. La commission des lois regrette l'accumulation des dérogations et souligne que toute énumération appelle l'exhaustivité. Il serait regrettable que le législateur revienne sans cesse sur ce texte pour le compléter, au lieu de s'en tenir à quelques principes simples et concis.
La commission des lois vous propose d'adopter l'article 8, ainsi modifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. L'adoption de l'amendement n° 4 aurait pour effet de supprimer le principal intérêt de l'article 8 : à savoir la mention expresse que l'obligation de communiquer pèse sur l'administration qui, je le souligne, détient le document, qu'elle en soit ou non à l'origine.
L'objectif - et c'est tout l'intérêt du texte - est de permettre à l'usager de savoir à qui il doit s'adresser pour obtenir un document.
Le Gouvernement est donc défavorable à la suppression, au 3° de l'article 8, de l'identification de l'autorité administrative tenue de communiquer le document.
Si cette suppression est votée, l'usager risque de se trouver - excusez-moi l'expression - « dans le brouillard » vis-à-vis des administrations concernées !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Cet amendement vise à supprimer l'obligation de communication qui pèse sur l'administration détentrice du document, qu'elle en soit ou non l'auteur. Or, l'objectif de l'article 8 est de faciliter l'accès des citoyens aux documents administratifs.
L'amendement n° 4 restreint cet accès. Dès lors qu'une administration détient un document administratif communicable, il n'y a aucune raison qu'elle renvoie la personne qui lui en fait la demande vers une autre administration ou vers l'auteur de ce document.
Ainsi, le demandeur sera moins « baladé » et pourra obtenir satisfaction plus rapidement.
En conséquence, nous sommes franchement contre cet amendement.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je ferai un simple commentaire sur ce sujet. Je crois que le droit commun, avec contrôle de la CADA, permet d'avoir très facilement accès aux documents administratifs.
La proposition qui est faite par la Sénat vise justement à éviter la diffusion de documents qui pourraient être détenus par une administration et qui seraient protégés pour telle ou telle raison, soit tenant au secret, soit parce qu'ils ne sont pas achevés.
M. Jacques Mahéas. Ils sont non communicables !
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Oui, mais, souvent, les administrations interrogent la CADA pour connaître la nature d'un document et savoir s'il est ou non communicable.
Dans l'option qui est proposée par le Sénat, ou bien l'administration est sûre de son fait - elle renvoie à l'autorité émettrice du document et il n'y a aucun problème - ou bien il y a un doute et on saisit la CADA, qui fonctionne bien. Cela nous prémunit contre tout risque de diffusion de documents dont la transmission pourrait ensuite donner lieu à problème.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Nous réfutons un tel argument. En fait, il paraît naturel au commun des mortels de demander un document, que ce soit à une autorité détentrice, tel un préfet ou un maire, ou à l'auteur de ce document. C'est une simplification !
Vous compliquez les choses en limitant la demande au seul auteur, qui est d'ailleurs parfois réticent ; nous le voyons notamment dans les communes.
L'exemple que vous avez cité en commission des lois, celui de la chambre régionale des comptes, nous paraît mal choisi puisque vous avez fait allusion à un document de travail concernant les premières observations. Or, ce document n'est pas communicable. Seules les observations définitives sont publiques.
J'imagine les réticences et l'entrave à la vie démocratique qu'entraînerait l'adoption de votre amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Amoudry au nom de la commission, propose de supprimer le cinquième alinéa du texte présenté par le 6° de l'article 8 pour l'article 5-1 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je me suis déjà exprimé sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Sur cet article 8, et plus particulièrement sur la référence à l'article 111 du livre des procédures fiscales, le point de vue des députés divergeait de celui des sénateurs et le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée nationale. Il maintient cette position devant le Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8 bis