Séance du 6 avril 2000







M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, vous avez placé la question des impôts au centre du débat politique de notre pays. Vous avez eu raison de le faire, et c'est probablement l'un des motifs du choix qui s'est porté sur vous et de votre nomination au poste que vous occupez.
Vous avez expliqué que la baisse des impôts devait profiter à chacun des Français ; nous aurons probablement l'occasion d'en reparler.
Aujourd'hui, je souhaite vous interroger sur la taxe d'habitation.
Vous avez pris position, au cours des derniers mois, sur cette taxe, en expliquant qu'il convenait probablement d'aller vers sa suppression.
Si chacun reconnaît que les modalités techniques de cet impôt sont mauvaises, on admet généralement que le fait de taxer l'habitation n'est pas en soi quelque chose de répréhensible.
Aujourd'hui, cet impôt est un impôt local, dont le produit est mis à la disposition des communes, des départements et des régions. Chaque assemblée délibérante de ces collectivités prend la responsabilité de voter l'impôt, de l'augmenter ou de le diminuer, en faisant des arbitrages.
Nous entendons dire que la taxe d'habitation serait remplacée par des dotations provenant directement du budget de l'Etat. Si ce mécanisme devait être mis en place, l'autonomie des collectivités locales serait réduite à une autonomie de dépense. L'Etat se verrait en quelque sorte confié le soin de fixer le montant des besoins des collectivités locales, qui perdraient cette responsabilité. Ce serait une régression de la politique de décentralisation mise en place depuis 1982.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire clairement aujourd'hui si le Gouvernement entend que les collectivités locales continuent à avoir une réelle responsabilité, celle de voter les dépenses et celle de fixer l'impôt qui correspond à ces dépenses ? Il ne faudrait pas que, au moment même où le Gouvernement a chargé une mission, sous l'autorité de M. Mauroy, de réfléchir sur l'avenir de la décentralisation, on remette celle-ci en cause. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d'abord de vous remercier de la gentillesse et de la chaleur de votre accueil. J'y suis extrêmement sensible.
Monsieur Mercier, il est vrai que j'ai beaucoup insisté, comme d'ailleurs nombre d'entre vous, sur le poids des charges et des prélèvements obligatoires de toute sorte. J'espère que, dans la période qui vient, nous allons pouvoir réduire leur part par rapport au produit intérieur brut, l'objectif que nous avons fixé étant, vous le savez, de redescendre au taux - au demeurant assez élevé ! - de 43,7 % d'ici à deux ans.
La taxe d'habitation est un impôt qui n'est pas satisfaisant, nous le savons tous - je suis moi-même élu local depuis quelque vingt ans ! Nous avons tous fait des efforts pour essayer de trouver des améliorations. C'est très compliqué.
Une première mesure va déjà vous être proposée, qui correspond à un allégement, puisque la part régionale de la taxe d'habitation va être supprimée, étant observé que tout le problème - nous en discuterons - est de trouver une ressource de compensation correcte : il ne faudrait pas que la région paie la décision prise par l'Etat.
Pour aller plus loin, il est vrai que j'avais envisagé, avant d'occuper mes nouvelles fonctions, deux hypothèses.
La première consistait à entreprendre une réforme peut-être plus modeste, qui compléterait celle que nous allons engager et qui concerne la part régionale. Mais, dans le même temps, je ne voulais pas m'interdire une réflexion plus vaste, en prenant un peu pour modèle ce qui se passe en Allemagne, où, vous le savez, les Länder, bien qu'autonomes, ne prélèvent pas de ressources parce qu'une dotation leur est garantie, constitutionnellement même, qui leur permet de conserver une responsabilité sur la base des dépenses. Là encore, nous aurons à en discuter.
Sachez, en tout cas, que cette notion de responsabilité est, à mes yeux, comme aux yeux de l'ensemble du Gouvernement, essentielle et que que nous veillerons à ce que, dans cette réforme des prélèvements obligatoires, loin de surcharger les contribuables locaux, on procède, si possible, à des allégements (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

CYCLISME ET SÉCURITÉ ROUTIÈRE