Séance du 25 avril 2000







M. le président. La parole est à M. de Richemont, auteur de la question n° 776, adressée à M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.
M. Henri de Richemont. Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question concerne le refus opposé par le Premier ministre à toute mise en place d'un système de retraite par capitalisation dans les entreprises privées.
Or il se trouve que l'ensemble de la fonction publique de ce pays dispose d'une caisse de prévoyance, la PRÉFON, qui fonctionne par capitalisation. Cette caisse permet notamment à tout fonctionnaire d'effectuer librement des versements individuels qui sont non seulement productifs en vue de sa retraite, mais, de plus, immédiatement déductibles de ses revenus imposables.
J'ai devant moi la brochure de la PRÉFON intitulée : « Accordez-vous une retraite harmonieuse » ; « PRÉFON, votre avenir sécurité ». L'argument publicitaire indique :
« PRÉFON-Retraite s'adapte à vous : vous constituez votre retraite à votre rythme en choisissant librement une classe de cotisation et en en changeant à votre guise.
« PRÉFON-Retraite vous donne la possibilité de racheter les années antérieures à votre affiliation pour compléter votre retraite.
« PRÉFON-Retraite vous permet de déduire intégralement toutes les cotisations que vous versez.
« PRÉFON-Retraite comporte une option facultative de réversion au profit du conjoint, ou, à défaut, d'une autre personne.
« PRÉFON-Retraite vous donne la possibilité de fixer librement votre retraite entre 55 et 70 ans. »
Monsieur le secrétaire d'Etat, je me réjouis que nos fonctionnaires puissent profiter des avantages qui sont énumérés dans cette brochure, mais je voudrais savoir au nom de quel principe de solidarité le Gouvernement refuse le bénéfice de ces mêmes avantages aux salariés des entreprises privées.
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Monsieur le sénateur, votre question porte en fait sur l'esprit qui anime le Gouvernement pour traiter l'ensemble du dossier des retraites.
Les choses ont été clairement dites par M. le Premier ministre lui-même : l'objectif est de consolider les régimes par répartition. Or ce n'est pas en introduisant des systèmes de capitalisation, fondés sur la seule épargne individuelle, que l'on pourra résoudre les difficultés auxquelles nos régimes de retraite vont être confrontés. Quel que soit le système, des prélèvements sur l'économie doivent être effectués pour faire face aux évolutions démographiques.
Constituer des fonds de pension nécessite donc, de la part des Français, des efforts équivalents à des hausses de cotisations. D'ailleurs, substituer la capitalisation à la répartition aboutirait à faire payer deux fois une même génération. Ce n'est pas la solution miracle et indolore que nous présentent certains.
En outre, on sait bien que la capitalisation individuelle favorise toujours les plus aisés et reviendrait à instituer un système à deux vitesses. Ainsi, la loi Thomas, que vous avez votée sous la précédente législature, non seulement remettait en cause les principes de solidarité qui fondent nos régimes de retraite, mais en plus menaçait notre système de protection sociale. En effet, cette loi accordait des avantages sociaux et fiscaux importants aux seules personnes qui avaient les moyens d'épargner et privait les régimes sociaux des recettes de cotisation correspondantes, contribuant ainsi à creuser les déséquilibres de régimes.
Mais le Gouvernement n'est pas opposé à développer l'épargne de long terme pour consolider les systèmes de retraite par répartition. Il propose de s'engager dans cette voix de deux manières : en abondant le fonds de réserve et en réfléchissant à la création d'instruments d'épargne collectifs.
Le fonds de réserve constitue non pas une épargne individuelle qui dépend des revenus de chacun, mais un effort global de solidarité de la nation mis au profit de l'ensemble des retraités de notre pays.
Conforme au principe de solidarité, qui est au coeur des convictions du Gouvernement, il permettra que les excédents d'aujourd'hui servent à assurer les retraites de nos enfants à partir de 2020. Avec les sources d'alimentation mises en place par les lois de financement de la sécurité sociale pour 1999 et 2000, ce fonds devrait atteindre 1 000 milliards de francs en 2020, soit l'équivalent de la moitié des déficits prévus entre 2020 et 2040.
En ce qui concerne les instruments d'épargne à long terme, ceux-ci doivent se situer clairement dans un cadre collectif. Ils doivent pouvoir bénéficier à tous les Français et pas seulement aux plus aisés d'entre eux. Enfin, ils ne peuvent venir qu'en complément des systèmes par répartition et en aucun cas se substituer à eux ou les mettre en péril.
En ce qui concerne la PRÉFON, que vous citez et qui est réservée aux fonctionnaires, je n'entrerai pas dans le débat visant à opposer telle catégorie à telle autre. Mais vous n'êtes pas sans savoir que les salariés ont déjà des possibilités en matière d'épargne retraite. Il s'agit des contrats dits article 83, qui, dans le cadre d'une négociation collective, permettent aux salariés de se constituer une épargne déductible des impôts et abondée par les employeurs. En revanche, dans le cas de la PRÉFON, il n'y a pas d'abondement de l'Etat.
M. Henri de Richemont. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Richemont.
M. Henri de Richemont. Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne s'agit pas, dans notre idée, de remplacer la répartition par la capitalisation. Il s'agit, compte tenu du vieillissement de la population, de conforter les retraites et de permettre aux employés et aux salariés qui le souhaitent de se constituer une retraite complémentaire par capitalisation.
Nous ne voulons, en aucune manière, supprimer le principe de la retraite par répartition, qui doit perdurer. Je reste donc un peu sur ma faim, car nous demandons que les salariés du privé puissent bénéficier des mêmes avantages que ceux du public avec la PRÉFON ; je ne vois en effet pas pourquoi ce qui est valable pour les fonctionnaires ne le serait pas pour les salariés du privé ! (M. Philippe de Gaulle applaudit.)

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