Séance du 25 mai 2000







M. le président. La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Le 12 décembre dernier, nous assistions au naufrage de l' Erika . Cinq mois plus tard, la marée noire est toujours une réalité et les vieux pétroliers identiques à l' Erika continuent de naviguer aux abords de nos côtes, laissant redouter un nouvel accident tant les risques sont importants.
Où en est l'indemnisation des victimes de l' Erika par le FIPOL, le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures ? Que vont devenir tous ces artisans de la mer privés de revenus et qui, marée après marée, constatent les dégâts provoqués sur leur outil de travail ? Et que penser de l'activité touristique - hôteliers, restaurateurs, campings - sachant que les emprunts pour investissements devront être remboursés ?
Madame le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, vous avez fait état de près de 200 000 tonnes de déchets pétroliers collectés depuis le naufrage du 12 décembre dernier. Vous avez confirmé que des déchets des deux anciennes marées noires, celle de l' Amoco-Cadiz, en 1978, et celle du Tanio, en 1980, se trouvaient encore dans l'estuaire de la Seine, ainsi qu'à La Rochelle.
Il y a là un véritable drame pour la sauvegarde de notre environnement.
Madame le ministre, que fait le Gouvernement pour le traitement de ces déchets pétroliers et pour la dépollution complète des sites de l' Amoco-Cadiz, du Tanio et de l' Erika ?
Le Gouvernement va-t-il profiter de la présidence française de l'Union européenne pour prendre - enfin ! - les décisions politiques qui s'imposent ?
Allez-vous faire pression sur l'OMI, l'Organisation maritime internationale, premièrement, pour exiger que les navires de plus de vingt ans ne puissent plus être utilisés pour transporter des hydrocarbures, deuxièmement, pour demander l'inspection des pétroliers naviguant à moins de 200 milles des côtes, troisièmement, pour labelliser une liste de sociétés de classification des navires, quatrièmement pour faire porter sur l'affréteur, et non plus sur le propriétaire d'un pétrolier, la responsabilité pénale des marées noires et des dégazages illicites ?
J'ai le souvenir d'une militante écologiste qui n'aurait eu de cesse de réclamer des actions rapides, précises et contraignantes. J'aimerais, en cette occasion, retrouver dans la ministre la même détermination pour prendre des mesures d'urgence, comme celles que le Gouvernement, auquel vous appartenez encore (Exclamations sur les travées socialistes), sait si bien engager dans d'autres domaines. Ces mesures diminueraient sans doute les risques que font courir aux populations côtières certaines compagnies ou affréteurs peu respectueux de la sécurité et de l'environnement maritime et côtier. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Ce ne sont pas des mesures d'urgence qui seraient nécessaires, monsieur Nogrix, pour mettre en oeuvre le volumineux programme de travail que vous venez de résumer et qui nécessite une mobilisation générale de tout le Gouvernement avec, très probablement, le lancement de chantiers à très court terme, à court terme, à moyen terme et à long terme.
En vous écoutant, la militante écologiste que je fus et que je reste, puisque vous avez salué cet engagement, ancien chez moi, n'a pu manquer de se poser quelques questions sur l'engagement de gouvernements antérieurs qui auraient effectivement été bien inspirés de reprendre, par prévention, les éléments essentiels des trois mémorandums que le Gouvernement français a adressés à l'Organisation maritime internationale, à la Commission européenne et au FIPOL.
M. Claude Estier. Eh oui !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Aux quelque dix questions que vous m'avez posées, je ne pourrai évidemment répondre que de façon très lapidaire et très rapide.
Sécurité maritime : les trois mémorandums ont déjà porté leurs fruits. Au niveau de la commission européenne, le soutien de la commissaire est acquis. Les réactions des pays de l'Union européenne sont contrastées, mais ce sera une des grandes priorités de la présidence française, ainsi que M. Gayssot l'a annoncé.
FIPOL : la proposition d'augmentation du plafond d'indemnisation fait son chemin. Malheureusement, ce sera pour l'avenir. Cela ne concerne pas l'Erika.
Amélioration du dispositif de crise au niveau français : nous y travaillons.
Préparation du pompage : des rumeurs persistantes font état de fuites. La préfecture maritime n'en confirme pas l'ampleur. En tout cas, nous continuons à préparer le pompage, qui demande non seulement des outils de pompage proprement dit, mais aussi des moyens de réaction rapide au fond de l'eau et des moyens en surface pour éviter des pollutions ultérieures. C'est un travail énorme ! Il n'a jamais existé de chantier de cette ampleur dans le monde jusqu'à présent. La convention qui a été préparée entre l'Etat et TotalFina fait le point de l'ensemble des impondérables.
Devenir des déchets : nous avons obtenu de la société TotalFina qu'elle assume l'élimination des déchets qui lui incombent. Nous sommes en train de finaliser le bilan des sites qui ont accueilli des déchets, et qui auraient pu nous préoccuper plus tôt puisque certains de ces déchets ont été produits voilà plus de vingt ans.
Nettoyage des plages : 2 500 professionnels sont en permanence sur les sites, accomplissant un travail épuisant, décourageant, compte tenu de l'arrivée pratiquement quotidienne de plaques de polution. Nous attendons une grande marée pour les 9 et 10 juin. Nous savons qu'il y aura encore des arrivées de plaques, qui exigeront encore plus de mobilisation pour restaurer l'état des plages avant la venue des vacanciers.
Pour ce qui est de l'indemnisation, l'Etat a annoncé, lors de la réunion des ministre du 12 janvier, lors du comité interministériel de la mer, lors du CIADT du 28 février et encore lors de celui qui s'est tenu la semaine dernière, le déblocage de sommes considérables. Le plan POLMAR, plan de lutte contre les pollutions marines, a déjà mobilisé 560 millions de francs. Nous avons de grandes difficultés avec le FIPOL et l'assureur du navire. L'assureur n'a versé que 3 millions de francs sur les 82 millions de francs qu'il devrait engager. C'est pourquoi nous avons mis en place les avances remboursables de l'Etat permettant de faire face à la difficulté...
M. le président. Madame le ministre, je suis obligé de vous interrompre, car, au cours de cette séance, le temps de réponse de deux minutes trente doit être rigoureusement respecté.
M. Philippe Labeyrie. Si on pose une question et qu'on ne peut pas entendre toute la réponse, cela ne sert à rien !

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