Séance du 25 mai 2000







M. le président. Par amendement n° 252 rectifié, MM. Bimbenet, Joly, de Montesquiou et Soucaret proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel rédigé comme suit :
« L'article L. 224-5 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne titulaire et porteuse du permis de chasser peut détenir ou être porteuse hors de son domicile d'armes d'épaule à répétition à canon lisse munies d'un dispositif de rechargement à pompe et dont le magasin ou le chargeur peut contenir trois cartouches ou plus, si ces armes ont été acquises avant le 16 décembre 1998. »
La parole est à M. Bimbenet.
M. Jacques Bimbenet. Le décret n° 98-1148 du 16 décembre 1998 a soumis au régime de l'autorisation les fusils de chasse munis d'un dispositif de rechargement à pompe. Cette mesure était d'autant plus justifiée que ces fusils étaient trop souvent utilisés à des fins criminelles.
Cependant, une circulaire ministérielle du 18 décembre 1998, prise en application de ce décret, prévoit, de façon arbitraire et en violation du principe de non-rétroactivité des normes pénales, que les personnes ayant acquis ces armes entre le 6 mai 1995 et le 16 décembre 1998 sont autorisées par l'administration à les conserver. La circulaire ne se réfère jamais à l'activité de la chasse, elle se rapporte uniquement au motif de défense. Par conséquent, cette disposition condamne près de 300 000 chasseurs à se faire injustement spolier ou à risquer des sanctions pénales. De plus, elle nous rappelle étrangement les mesures anti-armes prises dès juin 1940 par le gouvernement de l'époque, après la débâcle de nos armées.
C'est pourquoi cet amendement vise à protéger les chasseurs détenteurs de fusils à pompe des tracasseries qu'ils pourraient subir du fait d'une législation et d'une réglementation sur les armes trop souvent confuses.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Anne Heinis, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Cet amendement soulève un véritable problème, car le décret de 1998 a été pris par les ministres de l'intérieur et de la défense, a priori sans concertation avec leurs collègues de l'environnement et de l'agriculture. Le fusil à pompe est l'arme la moins chère pour la chasse populaire. Il est donc difficile de ne pas en tenir compte. Cependant, il faut aussi prendre en compte l'évidente nécessité de contrôler les armes. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Le décret n° 95-589 du 6 mai 1995 modifié par un décret du 16 décembre 1998 recherche l'amélioration de la sécurité publique.
En mars 1998, plusieurs faits divers dramatiques ont confirmé le développement de la diffusion des fusils à pompe. Le faible coût de cette arme et sa facilité de maniement, qui n'exige pas d'être un bon tireur, peuvent expliquer cet engouement. Cette arme était alors en vente libre, sur simple déclaration administrative. Ce modèle se retrouve dans 60 % des expertises judiciaires effectuées à la suite d'un crime ou d'un délit commis avec une arme à feu. Il était donc nécessaire de soumettre à autorisation l'acquisition de ces fusils à pompe de moins de cinq coups, ceux qui ont une capacité supérieure à cinq coups étant déjà soumis à autorisation depuis 1995.
Au demeurant, sur 1 500 000 chasseurs, un nombre relativement limité utilisent cette arme. Cette utilisation pose d'ailleurs des problèmes de sécurité, dont les fédérations se sont fait l'écho, car, contrairement au fusil de chasse classique, qui peut être cassé en dehors de l'action de chasse, il est impossible de s'assurer de la sécurisation d'un fusil à pompe et son transport présente donc des risques.
Cet amendement conduirait, en outre, à une rupture d'égalité des citoyens devant la loi. En effet, il permettrait la détention d'armes pour les seuls titulaires d'un permis de chasser ès qualités, alors que les autres citoyens seraient soumis à un régime d'autorisation individuelle.
De plus, le reclassement des fusils à pompe est effectif depuis plus d'un an et de nombreux détenteurs ont choisi de respecter la loi en faisant transformer leur fusil en arme à un coup. Ces citoyens qui ont choisi de se conformer à la règle de droit seraient victimes d'une sorte de rupture d'égalité à rebours.
Enfin, cette disposition, si elle devait être votée, serait inapplicable, car il sera matériellement impossible de s'assurer de la date d'acquisition de ces armes, dans la mesure précisément où elles étaient soumises à simple déclaration, laquelle ne précise pas la date d'acquisition.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 252 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 8 bis