Séance du 25 mai 2000
M. le président.
« Art. 10. - L'article L. 224-2 du code rural est ainsi rédigé :
«
Art. L. 224-2. - Nul ne peut chasser en dehors des périodes
d'ouverture de la chasse fixées par l'autorité administrative selon des
conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.
« Les oiseaux ne peuvent être chassés ni pendant la période nidicole ni
pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Les oiseaux
migrateurs ne peuvent en outre être chassés pendant leur trajet de retour vers
leur lieu de nidification.
« Toutefois, pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de
manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation
judicieuse de certains oiseaux migrateurs terrestres et aquatiques en petites
quantités, conformément aux dispositions de l'article L. 225-5, des dérogations
peuvent être accordées.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de cette
disposition.
« La pratique de la chasse à tir est interdite du mercredi six heures au jeudi
six heures ou à défaut une autre période hebdomadaire de vingt-quatre heures
comprise entre six heures et six heures, fixée au regard des circonstances
locales, par l'autorité administrative après avis du conseil départemental de
la chasse et de la faune sauvage. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux
espaces clos, ou aux postes fixes pour la chasse aux colombidés du 1er octobre
au 15 novembre. »
Sur l'article, la parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
L'article 10 nous plonge au coeur d'un problème essentiel, celui des dates
d'ouverture et de fermeture de la chasse du gibier d'eau et des oiseaux de
passage.
Ce problème est une véritable source de contentieux que détériore le climat et
génère, vous le savez, de graves tensions. Car c'est bien dans le contexte de
la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 que se situe l'origine du
principal contentieux : depuis des années, cette directive pose en effet un
problème d'interprétation, faute des discussions à Bruxelles qui auraient
permis de clarifier cette interprétation.
M. Raymond Courrière.
Exact !
M. Roland Courteau.
Le rapport de la commission des affaires économiques et du Plan le précise
bien, cette directive n'a posé que peu de problèmes jusqu'en 1990. Jusqu'à
cette date, en effet, le Conseil d'Etat estimait que les préfets étaient
autorisés à fixer des dates de fermeture échelonnées sur le mois de février,
considérant que la protection des oiseaux était raisonnablement assurée.
Ce n'est qu'ensuite que la Cour de justice des Communautés européennes s'est
livrée à une interprétation restrictive de l'article 7 de la directive, avec
toutes les conséquences que l'on sait.
Depuis lors, nous avons connu toutes les réponses juridiques possibles pour
retomber ensuite dans de nouveaux et interminables contentieux devant les
juridictions nationales ou devant les instances européennes.
Il est donc grand temps d'en finir aujourd'hui avec une telle situation si
l'on veut enfin atteindre, comme cela est souhaité de toutes parts ou presque,
l'objectif d'une chasse apaisée.
C'est pourquoi, avec mon collègue Raymond Courrière, nous avons déposé un
certain nombre d'amendements qui s'ajoutent à ceux qui ont déjà été présentés
par notre groupe. En ce qui nous concerne, nous pensons, Raymond Courrière et
moi-même, qu'il faut inscrire dans la loi tout ce qui peut mettre un terme à
ces contentieux.
Si la directive européenne fixe bien des principes mais pas de date, elle fixe
surtout les objectifs et les résultats à atteindre, sans imposer aux Etats
membres ni les moyens à utiliser ni le calendrier à établir. La fixation de ces
dates se trouve donc être du ressort de ces mêmes Etats membres, la directive
laisse toute liberté à ce sujet.
Alors, s'agit-il du domaine de la loi ou du domaine réglementaire ? Dans un
esprit d'apaisement, j'aimerais autant que le droit soit fixé par la loi, afin
d'éviter toute controverse par la suite, d'autant que nous nous appuyons sur
des considérations scientifiques fiables.
M. Raymond Courrière.
Irréfutables !
M. Roland Courteau.
J'entends, sur ce point, que l'on met en avant les arrêts défaborables du
Conseil d'Etat. Ce n'est pas, à mon avis, la bonne explication : si le Conseil
d'Etat a rendu des arrêts défavorables concernant, notamment, la loi de 1998,
c'est, selon moi, parce que, s'appuyant sur l'interprétation restrictive de la
Cour de justice des Communautés européennes, il exigeait que le choix des
dates, après le 31 janvier, soit conforme aux principes de la directive et soit
justifié ou motivé.
Aujourd'hui, à travers son avis motivé, nous savons ce que la Commission de
Bruxelles est disposée à accepter. Nous pouvons donc préciser des dates qui
tiennent compte de la biologie des espèces, de leur état de conservation et qui
sont conformes aux dates de migrations reconnues scientifiquement.
Nous proposons donc, par nos amendements, que la loi transpose dans notre
droit national les principes de la directive de 1979 et qu'elle fixe des dates
d'ouverture et de fermeture échelonnées jusqu'au 28 février selon les espèces
de gibiers d'eau ou d'oiseaux de passage.
Nous rappelons que ces oiseaux - je veux parler de l'avifaune migratrice - ne
peuvent être chassés ni pendant les différents stades de reproduction et de
dépendance, ni pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification.
Quant aux dates d'ouverture de la chasse au gibier d'eau, elles correspondent
à un seuil de protection de 99 % des jeunes volants.
Bien évidemment, nous précisons que l'échelonnement des dates de fermeture
entre le 31 janvier et le dernier jour de février peut donner lieu à
l'établissement de plans de gestion pour certaines espèces concernées. Cela
dit, en matière de conservation des espèces, je persiste à penser avec mon
collègue Raymond Courrière qu'il faudrait se pencher davantage sur la gestion
des prélèvements, ou encore sur le suivi scientifique des espèces, et ce à un
niveau qui dépasse très largement l'Europe.
Enfin, s'il est vrai que la chasse doit être légitimée dans sa diversité et
dans le respect de ses traditions, tout en lui accordant la reconnaissance
juridique, nous devons également tenir compte du droit à la nature et à son
partage exprimé par ceux qui ne pratiquent pas la chasse et qui souhaitent une
gestion partagée du temps et de l'espace.
Je rappelle que de nombreux départements appliquent déjà des jours que ce jour
de non-chasse, parfois même plusieurs jours par semaine : l'Aude prévoit ainsi
quatre jours de non-chasse. Il nous paraît donc juste quue ce jour de
non-chasse pour le gibier sédentaire soit fixé sur proposition de la fédération
départementale des chasseurs par le représentant de l'Etat dans le
département...
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Courteau.
M. Roland Courteau.
... après avis - je conclus, monsieur le président - du conseil départamental
de la chasse et de la faune sauvage.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Martin.
M. Pierre Martin.
Ai-je besoin d'insister sur l'intérêt que représente la chasse aux oiseaux
migrateurs et au gibier d'eau dans le département de la Somme ?
Cette passion mérite attention. On ne peut tout excuser, certes, mais il faut
parfois comprendre l'exaspération de certains.
Cette passion est nourrie par les informations, et les chasseurs de gibier
d'eau de la baie de Somme sont à l'écoute de tout ce qui peut concerner cette
chasse. Or, le 20 mai, dans le quotidien départemental
Le Courrier
picard, on trouvait le titre suivant : « Chasse ; vers le consensus », puis
en première page ce texte : « Chahutés par les chasseurs, Vincent Peillon et
les députés de gauche reprennent la main après la révélation du projet de
décret signé par Lionel Jospin qui prévoit d'autoriser la chasse au gibier
d'eau du 20 juillet au 28 février. »
Suivait alors un article intitulé : « Exclusif : chasse au gibier d'eau du 20
juillet au 28 février », dans lequel il était précisé : « Un avant-projet de
décret signé de Lionel Jospin fixe des dates de chasse qui correspondent à ce
que demandent les chasseurs de gibier d'eau. »
Ce fut une surprise pour les chasseurs, d'autant plus que ces informations
étaient accompagnées d'un courrier du député Vincent Peillon aux présidents de
sociétés de chasse et aux maires.
Mais l'article se poursuivait ainsi : « Un avant-projet de décret est
actuellement sur le bureau de Dominique Voynet, ministre de l'environnement.
»
Je voudrais savoir, madame le ministre, ce qu'il en est. Alors que nous sommes
en train de discuter de cet article 10, vous comprendrez notre intérêt,
d'autant plus que l'article du
Courrier picard cite les propos du député
Vincent Peillon : « Lors du vote du texte de loi qui était intervenu en avril
dernier à l'Assemblée nationale, certains responsables de la chasse nous
avaient accusés de trahir la chasse. Ils se sont lourdement trompés. A l'issue
d'une interruption de séance au cours de laquelle nous avions rencontré
Dominique Voynet, nous avions été accusés de nous coucher. C'est justement à ce
moment que nous avions obtenu le projet de décret de la part de la ministre. Ce
sont bien les députés de gauche qui ont obtenu gain de cause. »
Nous aimerions bien savoir ce qu'il en est et, surtout, lever les incertitudes
afin que, si exaspération il y a, elle s'appuie sur des données fondées et non
pas, peut-être, sur des données que l'on annonce pour nous faire plaisir.
(Très bien ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de
l'Union centriste.)
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur
le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne
vais pas reprendre le discours que j'ai fait devant vous au début de la
discussion générale, où j'ai rappelé assez longuement l'historique de ce
dossier, les nombreuses démarches engagées auprès de la Commission pour
obtenir, sinon une révision de la directive dont j'avais démontré le caractère
irrationnel, du moins des marges de manoeuvre, de discussion, de
négociation.
Je me limiterai donc à rappeler que le Parlement a déjà adopté deux lois, en
1994 et en 1998, dont les termes étaient contraires à la directive de 1979 et
que le Gouvernement vous a présenté un projet, adopté par l'Assemblée
nationale, qui offre enfin une solution à ce conflit qui n'en finit pas et qui
empoisonne les relations entre chasseurs et non-chasseurs, entre élus locaux et
citoyens sur le terrain.
La question qui est posée maintenant est de savoir si nous voulons persévérer
dans une voie dont tout a démontré qu'elle était sans issue ou si nous
cherchons réellement à trouver une issue.
La première question à laquelle il nous faut répondre est de savoir si les
périodes d'ouverture de la chasse doivent être fixées par la loi ou par voie
réglementaire.
Pour le Gouvernement, la réponse est claire. La détermination des périodes de
chasse est une modalité d'application de l'exercice du droit de chasse dont les
principes doivent être fixés par la loi mais dont les spécificités doivent
pouvoir évoluer en fonction des circonstances, J'en citerai deux : les données
disponibles sur l'état de conservation des espèces, et l'évolution des
connaissances scientifiques.
A ce titre, ces modalités relèvent des compétences de l'autorité
administrative. C'est donc par voie réglementaire que doit être définie la
période d'ouverture de la chasse.
Beaucoup d'entre vous invoquent la sécurité que conférerait la loi et le souci
d'éviter les controverses. Cela me paraît une idée fausse, d'une part, parce
que le vote par la loi des dates d'ouverture en 1994 puis en 1998 n'a donné
aucune sécurité et n'a pas permis d'éviter les controverses et, d'autre part,
parce que ce qui compte surtout, c'est la conformité des dates à la directive.
Soit c'est acquis, et la sécurité de ces dates l'est aussi, que les dates
soient fixées par la loi ou par un décret ; soit les dates ne sont pas
conformes, et qu'elles soient fixées par une loi ou par un règlement, elles
seront pareillement remises en cause par des recours contentieux, comme le
passé récent nous l'a amplement démontré.
Je ne pourrai donc pas donner mon accord à une solution d'inscription dans la
loi de dates car elles devront être définies avec soin, espèce par espèce, en
fonction de leur réalité biologique, et établies par décret.
Deux voies nous sont proposées.
La commission des affaires économiques amende le texte de l'Assemblée
nationale en fixant des dates d'ouvertue pour chaque espèce.
Les sénateurs socialistes proposent, eux, des dates butoirs encadrant une
plage de temps très large, laissant le soin à l'autorité administrative de les
réduire le cas échéant.
Aucune de ces propositions n'apparaît recevable.
Celle de la commission, tout d'abord, consiste à déterminer des dates
d'ouverture et de fermeture de la chasse pour chaque espèce chassable. Les
dates retenues sont, dans la plupart des cas, celles qui ont été avancées par
la Commission européenne dans son avis motivé adressé à la France en 1998. En
réalité, les dates proposées correspondent à celles de l'avis motivé en
question dans quarante-cinq cas sur cinquante pour les dates de fermeture.
Elles en sont loin pour les dates d'ouverture. Il y a donc à nouveau, de ce
seul point de vue, matière à un important contentieux.
De plus, les connaissances scientifiques ont progressé. Vous invoquez souvent
le comité Ornis, mais vous savez qu'il réévalue lui-même en permanence ses
connaissances, et ceux qui suivent ses travaux savent qu'il proposerait
aujourd'hui, pour certaines espèces, des dates plus restrictives.
Par ailleurs, nos scientifiques français ont aussi travaillé. Je tiens ainsi à
votre complète disposition un tableau tout à fait exhaustif qui rassemble les
connaissances et les propositions formulées à la fois par la loi de 1998 -
c'étaient, pour schématiser, les propositions Ornis -, par le professeur
Lefeuvre en 1999, par un groupe de scientifiques sollicités cette année par mon
ministère, et en provenance du Muséum national d'histoire naturelle, de l'ONC,
du CNRS et de l'INRA.
Ces scientifiques n'ont pas travaillé tout à fait de la même façon, ce qui
explique quelques différences dans leurs propositions.
En effet, le rapport Lefeuvre prend en considération les caractéristiques de
chaque espèce prise isolément, tandis que le groupe dont je viens de rappeler
la composition s'est livré à une approche par grands milieux et par groupes
d'espèces. Dans les deux cas, les périodes considérées comme acceptables sont
différentes de celles que propose la commission.
Je pourrais donner de très nombreux exemples. Dans certains cas, les
différences sont minimes ; il arrive aussi très souvent, qu'il y ait
concordance ; il arrive même, madame le rapporteur, que les dates proposées
soit par M. Lefeuvre, soit par le groupe de scientifiques mixte, soient plus
laxistes que celles que formule le projet de loi, ce qui démontre
a
posteriori que, si l'on veut pouvoir les adapter aux connaissances, on a
tout à fait intérêt à les fixer par décret.
Les exemples sont si nombreux que je ne suis pas sûre qu'il soit intéressant
de les citer tous. Je préfère donc faire distribuer le tableau pour que les
sénateurs puissent le consulter.
En tout cas, il n'est pas besoin de chercher beaucoup pour trouver des cas où
les propositions faites aujourd'hui par la commission pourraient être remises
en cause devant les tribunaux.
Les sénateurs socialistes, eux, proposent une autre méthode : la fixation de
dates butoirs à l'intérieur desquelles l'autorité administrative définirait de
façon plus précise les périodes effectives de pratique de la chasse. Cette
proposition souffre des mêmes faiblesses que celle de la commission parce que
les dates butoirs proposées sont incompatibles avec celles que les
scientifiques considèrent comme acceptables. Dès lors, nous aurions les mêmes
difficultés qu'avec les lois de 1994 et de 1998.
Les choses sont heureusement plus simples qu'il n'y paraît lorsqu'on examine
les liasses d'amendements qui nous sont proposées.
La loi fixe des principes : pas de chasse pendant les périodes de reproduction
et de nidification ni pendant le retour vers les lieux de nidification. Dans un
souci de rigueur et de simplicité, nous avons repris mot à mot le dispositif de
la directive.
Puis, nous disposons de l'avis des experts sur les périodes de l'année
concernées pour chacune des espèces. Le décret relatif aux périodes d'ouverture
de la chasse sera établi sur la base des connaissances scientifiques
disponibles, dans le respect des principes posés par la directive.
Cela, c'est donc la transposition de la directive, qui nous permet de nous
mettre, pour la première fois dans l'histoire, d'équerre avec les exigences
communautaires.
Après, il y a autre chose : la directive prévoit explicitement la possibilité
de demander des dérogations dans un nombre réduit de cas, avec des
justifications concernant l'état de conservation des espèces et un encadrement
assez strict - des petites quantités, etc.
Contrairement à ce que j'entends souvent dire, on ne négocie pas des
dérogations. On décide de dérogations, et on le fait sur des bases argumentées,
qui permettent, en cas de sollicitation par la Commission, qui nous demande de
nous justifier, de le faire.
Exemple : la régulation des cormorans,...
M. Michel Charasse.
Gros succès !
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... pour
laquelle la démarche de la France n'a pas été contestée par la Commission.
Contre-exemple : les dispositifs mis en place pour la chasse aux alouettes,
qui font l'objet, aujourd'hui, d'une contestation par la Commission.
A nous de faire en sorte que d'éventuelles dérogations, dont j'ai admis le
principe devant l'Assemblée nationale, puisque aucun Etat membre n'a transposé
en l'état la directive sans avoir recours, de façon marginale, limitée et bien
cadrée, à des dérogations ponctuelles pour certaines espèces, soient
argumentées sérieusement.
Monsieur le sénateur, Vincent Peillon n'est pas porte-parole du ministère de
l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il ne figure pas sur les
effectifs de mon cabinet.
M. Michel Charasse.
Cela rassure !
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il a rendu
public l'un des innombrables documents de travail qui ont été élaborés dans des
démarches de concertation, de consultation très large.
Loin de moi l'idée d'arrêter le moindre dispositif avant la tenue de la
réunion de concertation à laquelle nous avons invité et les associations de
protection de l'environnement, et les chasseurs, et, bien sûr, les responsables
de l'administration pour essayer de confronter les données et de retenir les
dates qui nous permettront de respecter la directive et de mettre un terme aux
contentieux.
Ceux qui pensent que l'on peut s'en sortir uniquement par la voie
juridico-juridique se trompent. Dans la quasi-totalité des pays européens,
c'est parce qu'un dialogue de qualité entre protecteurs de l'environnement et
chasseurs a permis de porter ensemble les éventuelles demandes de dérogation
que les contentieux ont été limités.
Il est fondamental qu'aucune des parties ne joue la politique de la chaise
vide lors de cette réunion de concertation. C'est peut-être, en effet, la
première fois que l'on disposera de l'ensemble des éléments et pour l'ouverture
et pour la fermeture : M. Lefeuvre a fait un travail tout à fait considérable ;
les scientifiques sollicités au début de l'année ont eu le souci d'enrichir
encore cette réflexion et ce travail.
Finalement, dans la quasi-totalité des cas, on doit pouvoir trouver un accord
sur les dates d'ouverture et de fermeture qui ne nous expose plus à des
contentieux communautaires, contentieux qui sont, certes, désastreux pour les
espèces vivantes, mais qui le sont aussi pour la chasse et pour les
chasseurs.
M. le président.
Sur l'article 10, je suis saisi de dix-sept amendements et de trois
sous-amendements.
Si tout le monde en est d'accord, pour la clarté du débat, je vais appeler les
amendements successivement, et lorsqu'un amendement sera assorti d'un ou de
plusieurs sous-amendements, je ferai trancher sur le ou lesdits
sous-amendements avant d'aller plus loin, de manière qu'au moment où nous
arriverons au vote sur les amendements nous sachions très exactement sur quoi
nous nous prononçons.
(Assentiment.)
Je suis d'abord saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 30 rectifié
ter est présenté par MM. Vasselle,
François, César, Martin, Bernard, Bizet, Cornu, Demilly, Doublet, Fournier,
Ginésy, Gournac, Hugot, Joyandet, Larcher, Lassourd, Leclerc, Lemaire, de
Montesquiou, Murat, Ostermann, Rispat, Goulet, Valade, Vial et Soucaret.
L'amendement n° 150 est déposé par MM. Souplet, Hérisson, Amoudry, Deneux,
Branger, Bécot, Arnaud, Huchon, Machet, Vecten, Badré, Hyest, Baudot, Jarlier,
Mme Bocandé, MM. Moinard, Herment, Monory, Le Breton, Fauchon, Maman, Huriet,
Malécot, Franchis, Lambert, Faure, Blin, de Villepin et Louis Mercier.
Tous deux tendent à rédiger ainsi l'article 10 :
« A. - Avant l'article L. 224-2 du code rural est insérée une sous-section
ainsi rédigée :
« Sous-section 1 : Oiseaux migrateurs.
« B. - L'article L. 224-2 du code rural est ainsi rédigé :
«
Art. L. 224-2. - I. - Lorsqu'il s'agit de l'avifaune migratrice,
gibier d'eau et oiseaux de passage, la chasse s'exerce pendant les périodes
fixées par le présent article dont l'objet est de maintenir ou d'adapter la
population des espèces d'oiseaux concernées à un niveau qui correspond
notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu
des exigences économiques et récréationnelles.
« La législation nationale entend veiller à ce que la chasse ne soit pas
pratiquée pendant la période de reproduction comprenant la ponte, la couvaison
et l'élevage des jeunes jusqu'à l'envol ainsi que durant le trajet de retour
vers les lieux de nidification.
« II. - A l'exception de l'huîtrier-pie, la chasse du gibier d'eau ouvre le
troisième samedi de juillet, sur le domaine public maritime, dans les
départements suivants : Calvados, Charente-Maritime, Eure, Gard, Gironde,
Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Manche, Nord,
Pas-de-Calais, Pyrénées-Atlantiques, Seine-Maritime, Somme.
« La chasse des canards de surface, des oies et des limicoles est ouverte le
10 août dans les départements ci-après : Ain, Aisne, Allier, Ardèche, Ardennes,
Aube, Bouches-du-Rhône, Calvados, Cher, Haute-Corse, Corse-du-Sud, Côte-d'Or,
Côtes-d'Armor, Eure, Eure-et-Loir, Finistère, Gard, Haute-Garonne, Gironde,
Hérault, Ille-et-Vilaine, Indre, Indre-et-Loire, Landes, Loir-et-Cher, Loire,
Loire-Atlantique, Loiret, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Manche, Marne,
Haute-Marne, Mayenne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Morbihan, Nièvre, Nord, Oise,
Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Rhône,
Haute-Saône, Saône-et-Loire, Sarthe, Paris, Seine-Maritime, Seine-et-Marne,
Yvelines, Deux-Sèvres, Somme, Tarn, Vendée, Vosges, Yonne, territoire de
Belfort, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d'Oise.
Dans ces mêmes départements, l'ouverture de la chasse des canards plongeurs et
des rallidés intervient le 1er septembre.
« Dans les autres départements, l'ouverture de la chasse du gibier d'eau
intervient à la date de l'ouverture générale de la chasse fixée par l'autorité
administrative.
« III. - La chasse des oiseaux de passage est autorisée à compter d'une date
déterminée par l'autorité administrative départementale.
« La période de chasse des oiseaux de passage est clôturée le dernier jour de
février sauf en ce qui concerne l'alouette des champs, le merle noir dont la
chasse se termine le 10 février.
« A compter du 31 janvier, la chasse des grives n'est autorisée par la
présente législation qu'à poste fixe matérialisé de main d'homme. De même, la
chasse de la bécasse des bois ne peut-être pratiquée que dans les bois de plus
de trois hectares.
« IV. - Le calendrier de clôture de la chasse au gibier d'eau s'établit comme
suit pour l'ensemble du territoire national :
« - au 31 janvier pour le canard colvert, la barge à queue noire et le vanneau
huppé, le fuligule milouin ;
« au 10 février pour le canard chipeau, la sarcelle d'hiver, le canard pilet,
la foulque macroule et la poule d'eau ;
« - au 20 février pour l'oie cendrée, l'oie rieuse, l'oie des moissons, le
canard souchet, le canard siffleur, la fuligule morillon, la fuligule
milouinan, la nette rousse, le garrot à l'oeil d'or, l'eider à duvet, la
bécassine des marais, la bécassine sourde, la macreuse brune, le courlis
cendré, le chevalier gambette, le chevalier combattant, le chevalier aboyeur,
le chevalier arlequin, le pluvier doré et le pluvier argenté ;
« - au 28 février pour la sarcelle d'été, l'huîtrier-pie, la barge rousse, la
bécassine maubèche, le courlis corlieu, l'harelde de Miquelon, la macreuse
noire, le râle d'eau.
« V. - Cet échelonnement des dates de fermetures entre le 31 janvier et le
dernier jour du mois de février vise à assurer l'exploitation équilibrée et
dynamique des espèces d'oiseaux concernées.
« Toutefois pour les espèces dont le statut de conservation est à surveiller
et chassées pendant cette période des plans de gestion sont institués.
« Ces plans visent à contrôler l'efficacité de l'échelonnement des dates de
fermeture.
« Ils contribuent également à rétablir ces espèces dans un état favorable de
conservation. Ils sont fondés sur l'état récent des meilleures connaissances
scientifiques et sur l'évaluation des prélèvements opérés par la chasse.
« Les modalités d'élaboration de ces plans de gestion sont déterminées par
arrêté ministériel après avis du Conseil national de la chasse et de la faune
sauvage.
« VI. - La présente loi abroge l'article R. 224-6 du code rural ainsi que les
articles R. 224-3, R. 224-4 et R. 224-5 du code rural en tant qu'ils prévoient
l'intervention de l'autorité administrative en matière d'ouverture anticipée de
la chasse du gibier d'eau et de clôture de la chasse du gibier d'eau et aux
oiseaux de passage.
« Les dispositions du présent article s'appliquent à l'ensemble du territoire
métropolitain à l'exception des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la
Moselle en ce qui concerne les dates d'ouverture anticipée de la chasse au
gibier d'eau et la clôture de la chasse des oiseaux de passage.
« VII. - Le Gouvernement transmettra à la Commission européenne toutes les
informations utiles sur l'application pratique de cette législation nationale
relative à la chasse des oiseaux migrateurs. »
« C. - Dans la section 2 du chapitre IV du titre II du livre II du code rural,
après l'article L. 224-2, il est créé une sous-section 2 ainsi rédigée :
« Sous-section 2 : Gibier sédentaire, oiseaux et mammifères.
«
Art. L. ... - Les périodes de chasse du gibier sédentaire, oiseaux et
mammifères sont fixées par l'autorité administrative. »
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 30 rectifié
ter.
M. Alain Vasselle.
La rédaction de cet amendement est, à peu de choses près, quasiment identique
à celle de nombreux autres amendements. Aussi, j'espère que nous arriverons à
dégager une position consensuelle, en retenant l'une ou l'autre de ces
propositions, si possible, d'ailleurs - ce serait le plus logique et le plus
cohérent -, celle de la commission.
Le présent amendement reprend les termes de la loi de 1998, adoptée - je vous
le rappelle, mes chers collègues - à l'unanimité des membres de la Haute
Assemblée, en y ajoutant les dates d'ouverture et de fermeture, la référence au
carnet de prélèvement, ainsi que tous les éléments législatifs qui tendent à
permettre une conformité à la directive européenne.
Certes, sa rédaction peut toujours être améliorée pour éviter les écueils
éventuels d'un recours devant les tribunaux administratifs, voire d'une
annulation, mais il faut que Mme le ministre prenne conscience ou arrive à se
convaincre qu'ici, dans cette Haute Assemblée, nous n'avons pas la volonté de
nous « asseoir » sur les données scientifiques qui sont portées à la
connaissance du monde de la chasse.
Je puis d'ailleurs lui dire - M. du Luart pourrait en témoigner - que nous
avons souvent eu l'occation d'accueillir, au sein de notre groupe d'étude, des
scientifiques ou des hommes compétents sur tous ces sujets, et que c'est
toujours en nous fondant sur des données scientifiques, et non pas de manière
farfelue ou pour répondre à un
lobby quelconque de telle ou telle partie
du territoire, que nous avons fait des propositions.
J'entends bien que l'idéal aurait été de réformer la directive européenne,
mais, pour le moment, à notre connaissance, aucun conseil des ministre européen
n'a eu le courage d'en prendre l'initiative.
On nous dit parfois que les autres pays de l'Union européenne savent mieux
faire que la France.
M. Michel Charasse.
Tu parles !
M. Alain Vasselle.
En ma qualité de président du groupe d'amitié France-Europe du Nord, j'ai eu
l'occasion de me rendre, pas plus tard qu'en septembre dernier, en Norvège et
en Suède. J'ai pu y rencontrer des parlementaires et des membres des
gouvernements de ces deux pays. Pour les avoir interrogés sur les
préoccupations qui étaient les leurs au regard de la directive, je puis vous
dire que ces préoccupations sont exactement les mêmes que les nôtres.
Je ne doute que, si un gouvernement d'un des pays membres de l'Union
européenne prenait l'initiative d'engager une concertation avec ces pays, on
pourrait obtenir, un jour ou l'autre, une modification de la directive
européenne. Encore faudrait-il qu'un gouvernement en ait la volonté politique,
et vous n'avez pas donné, madame le ministre, l'impression d'avoir cette
volonté politique !
Je ne reviens pas sur les dérogations.
J'en terminerai par une considération que j'aurai l'occasion de développer
dans quelques instants en défendant un sous-amendement. Il est bien évident -
Mme le ministre l'a dit - qu'il y a deux formules : celle qui consiste à
introduire des dates butoirs et celle qui consiste à encadrer la période de
chasse, comme le suggéreront nos collègues socialistes. Il appartiendra au
Sénat de trancher.
M. le président.
La parole est à M. Souplet, pour défendre l'amendement n° 150.
M. Michel Souplet.
Je fais miens les propos de mon collègue et ami Alain Vasselle.
Comme lui, je rappellerai d'abord que la loi de 1998 a été votée à l'unanimité
et que les dates étaient bien inscrites dans cette loi. Nous devons donc,
aujourd'hui, de nouveau faire en sorte qu'elles y figurent. Je préfère de
beaucoup un calendrier avec des dates précises à des marges trop grandes
laissées à un choix qui ne serait pas celui des parlementaires.
En commission, nous avons oeuvré à l'amélioration de l'amendement de la
commission, qui intègre donc nos propositions.
Aussi vais-je retirer le présent amendement à son profit, non sans avoir
ajouté, en guise de conclusion, que nous devons, ici, exprimer la volonté du
Parlement français, qui défend les intérêts écologiques et cynégétiques que les
chasseurs tiennent à défendre, et que nous n'avons pas à nous plier
systématiquement à un diktat de la Commission et de ses technocrates.
J'entends donc que nous puissions inscrire dans le projet de loi les dates que
nous avons choisies.
M. le président.
L'amendement n° 150 est retiré.
Par amendement n° 197 rectifié, Mme Heinis, au nom de la commission, propose
de rédiger comme suit l'article 10 :
« A. - Dans la section II du chapitre IV du titre II du livre II du code
rural, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Sous-section 1. - Oiseaux migrateurs.
« B. - L'article L. 224-2 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 224-2. - I. - La chasse des espèces appartenant à l'avifaune
migratrice, tant du gibier d'eau que des oiseaux de passage, s'exerce pendant
les périodes fixées par le présent article dans le respect des principes fixés
à l'article L. 220-1 afin de maintenir ou d'adapter la population des espèces
d'oiseaux concernées à un niveau permettant de répondre aux objectifs
écologiques, scientifiques et culturels, compte tenu des exigences économiques
et récréationnelles.
« Ces oiseaux ne peuvent être chassés ni pendant la période nidicole, ni
pendant les différents stades de reproduction et de dépendance, ni pendant leur
trajet de retour vers leur lieu de nidification.
« Toutefois, pour permettre de manière sélective, et dans des conditions
strictement contrôlées, la capture, la détention ou toute autre exploitation
judicieuse de certains oiseaux migrateurs terrestres et aquatiques en petites
quantités, conformément aux dispositions des articles L. 224-4 et L. 225-5, des
dérogations peuvent être accordées.
« II. - La chasse au gibier d'eau, à l'exception de l'huîtrier-pie, ouvre le
troisième samedi de juillet, sur le domaine public maritime, dans les
départements suivants : Calvados, Charente-Maritime, Eure, Gard, Gironde,
Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Manche, Nord,
Pas-de-Calais, Pyrénées-Atlantiques, Seine-Maritime, Somme.
« La chasse des canards de surface, des oies et des limicoles est ouverte le
10 août dans les départements ci-après : Ain, Aisne, Allier, Ardèche, Ardennes,
Aube, Bouches-du-Rhône, Calvados, Cher, Haute-Corse, Corse-du-Sud, Côte-d'Or,
Côtes-d'Armor, Eure, Eure-et-Loir, Finistère, Gard, Haute-Garonne, Gironde,
Hérault, Ille-et-Vilaine, Indre, Indre-et-Loire, Landes, Loir-et-Cher, Loire,
Loire-Atlantique, Loiret, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Manche, Marne,
Haute-Marne, Mayenne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Morbihan, Nièvre, Nord, Oise,
Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées, Rhône,
Haute-Saône, Saône-et-Loire, Sarthe, Paris, Seine-Maritime, Seine-et-Marne,
Yvelines, Deux-Sèvres, Somme, Tarn, Vendée, Vosges, Yonne, territoire de
Belfort, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Val-d'Oise.
Dans ces mêmes départements, l'ouverture de la chasse des canards plongeurs et
des rallidés intervient le 1er septembre.
« Dans les autres départements, l'ouverture de la chasse au gibier d'eau
intervient à une date fixée par le représentant de l'Etat dans le
département.
« III. - La chasse des oiseaux de passage est autorisée à compter d'une date
déterminée par le représentant de l'Etat dans le département.
« IV. - Le calendrier de clôture de la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux
de passage est fixé comme suit par le présent article sur l'ensemble du
territoire national :
« - 31 janvier : colvert milouin, tourterelle des bois, tourterelle turque,
caille des blés ;
« - 10 février : pilet, barge à queue noire, barge rousse, sarcelle d'hiver,
vanneau, foulque, alouette des champs, merle noir, pigeon colombin,
huîtrier-pie ;
« - 20 février : oie rieuse, oie cendrée, oie des moissons, souchet, poule
d'eau, siffleur, morillon, milouinan, nette rousse, chipeau, garrot à l'oeil
d'or, macreuse brune, eider, chevalier gambette, chevalier aboyeur, chevalier
arlequin, chevalier combattant, pluvier doré, pluvier argenté, bécassine des
marais, bécassine sourde, grive litorne, grive musicienne, grive mauvis, grive
draine ;
« - 28 février : sarcelle d'été, macreuse noire, courlis cendré, courlis
corlieu, harelde de Miquelon, bécasseau maubèche, râle d'eau, pigeon ramier,
pigeon biset, bécasse.
« - A compter du 31 janvier, la chasse des grives n'est autorisée qu'à partir
d'un poste fixe matérialisé de main d'homme. De même, la chasse de la bécasse
des bois ne peut être pratiquée que dans les bois de plus de trois hectares.
« - V. - L'échelonnement des dates de fermeture de la chasse entre le 31
janvier et le dernier jour de février peut donner lieu à l'établissement de
plans de gestion pour certaines des espèces concernées. Ceux-ci sont fondés sur
l'état récent des meilleures connaissances scientifiques et sur l'évaluation
des prélèvements opérés par la chasse.
« - VI. - Les dispositions du présent article s'appliquent à l'ensemble du
territoire métropolitain à l'exception des départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et de la Moselle. »
« - C. - Le présent article abroge l'article L. 224-1 du code rural ainsi que
les articles R. 224-3, R. 224-4, R. 224-5 et R. 224-6 du même code en tant
qu'ils prévoient l'intervention de l'autorité administrative en matière
d'ouverture anticipée de la chasse du gibier d'eau et de clôture de la chasse
au gibier d'eau et aux oiseaux de passage. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le premier, n° 361, présenté par M. Vasselle, tend :
I. - A la fin du deuxième alinéa du II du texte proposé par le B de
l'amendement n° 197 rectifié pour l'article L. 224-2 du code rural, à remplacer
les mots : « le 1er septembre » par les mots : « au plus tôt le 1er septembre
».
II. - Au début du deuxième alinéa du IV du même texte, à insérer les mots : «
au plus tard ».
III. - En conséquence, à procéder à la même insertion au début des troisième,
quatrième et avant-dernier alinéas du même IV.
Le second, n° 249 rectifié
bis, déposé par MM. Larcher, François et
César, vise à compléter le paragraphe V du texte proposé par le B de
l'amendement n° 197 rectifié pour l'article L. 224-2 du code rural par un
alinéa ainsi rédigé :
« En cas de circonstances exceptionnelles ayant une incidence majeure sur le
rythme biologique des oiseaux migrateurs, le représentant de l'Etat dans la
région peut, après avis motivé de la fédération régionale des chasseurs,
modifier les dates de fermeture de la chasse. »
La parole est à Mme le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 197
rectifié.
Mme Anne Heinis,
rapporteur. Monsieur le président, je souhaite apporter une modification
à l'amendement n° 197 rectifié.
Au V du texte proposé pour l'article L. 224-2, il convient de lire : « donne
lieu » à la place de : « peut donner lieu ».
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 197 rectifié
bis.
Veuillez poursuivre, madame le rapporteur.
Mme Anne Heinis,
rapporteur. L'article 10 fixe les temps de chasse, et, à ce sujet, la
commission se félicite de ce que les principes contenus dans la directive «
Oiseaux » soient repris dans un article du code rural, tout en rappelant que
cette directive était d'application immédiate et ne dépendait pas de l'adoption
de mesures spécifiques de transposition.
Il importe désormais que la réglementation des périodes de chasse des oiseaux,
et plus particulièrement de celles des oiseaux migrateurs, soient conformes aux
objectifs ainsi rappelés.
De plus, l'unique solution tient dans la fixation législative du calendrier de
chasse, en répondant à deux exigences absolues : le choix de dates
indiscutables sur le plan biologique ; l'abrogation des articles législatifs ou
réglementaires susceptibles de provoquer des contentieux.
Sur cet aspect fondamental de la réglementation, la commission propose de
réécrire totalement cet article en créant deux sous-sections dans le code
rural, l'une consacrée au temps de chasse des oiseaux migrateurs et l'autre au
gibier sédentaire, oiseaux et mammifères.
Sur l'avifaune migratrice, gibiers d'eau et oiseaux de passage, sont rappelés
les principes de la directive ainsi que les critères de dérogations autorisés
par l'article 9 de cette même directive.
Les dates d'ouverture anticipées de chasse du gibier d'eau établissent une
distinction entre le domaine public maritime et le reste du territoire national
en faisant des propositions différentes par espèces et selon les
départements.
Ce calendrier d'ouverture tel qu'il vous est proposé permet d'atteindre un
seuil de protection de 99 % des jeunes volants.
Par ailleurs, l'amendement fixe le calendrier des clôtures de la chasse au
gibier d'eau et au gibier de passage et les dates sont échelonnées par décade
entre le 31 janvier et le 28 février. Elles permettent de regrouper les
fermetures en fonction des familles d'espèces, pour éviter le risque de
confusion.
A partir du 31 janvier, sont également retenues des restrictions pour les
grives, chassées à partir de postes fixes, et les bécasses qui ne peuvent être
chassées que dans des bois de plus de trois hectares.
Enfin, entre le 31 janvier et le 28 février, il est également prévu, si
besoin, l'instauration d'un plan de gestion, qui est l'outil indispensable pour
le suivi des espèces concernées, en tout cas pour la plupart d'entre elles.
Avec ce dispositif, la plupart des espèces sur les cinquante chassées voient
leurs dates de fermeture conformes aux dates de migration reconnues
scientifiquement, et exposées dans l'avis motivé de la Commission européenne.
Les espèces qui dérogent quelque peu aux recommandations de l'avis motivé sont
en bon état de conservation. Il s'agit en particulier du pigeon ramier, de la
bécassine des marais, du colvert, de l'oie rieuse et de la grive.
En revanche, vous noterez que nous avons adopté un régime très protecteur de
l'huîtrier-pie, compte tenu de ses très faibles effectifs et de ses difficultés
à nicher et à se reproduire sur nos côtes.
Enfin, le dispositif adopté par la commission ne conserve pas le principe de
l'interdiction de la chasse le mercredi. Outre les objections d'ordre
constitutionnel déjà longuement énumérées s'agissant des atteintes injustifiées
au droit de propriété, cette disposition induit les effets pervers sur
l'organisation de la chasse. En précisant que cette mesure ne s'applique pas
aux espaces clos, on va entraîner le mitage des territoires naturels avec la
multiplication des enclos et nuire à la libre circulation des hommes et des
animaux. De plus, l'exception faite à la chasse aux colombidés du 1er octobre
au 15 novembre porte gravement atteinte, et sans justification, au principe
d'égalité devant la loi.
Telles sont les considérations générales qui ont trait à cet amendement n° 197
rectifié
bis.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, pour présenter le sous-amendement n° 361.
M. Alain Vasselle.
Ce sous-amendement, que j'ai exposé sommairement voilà quelques instants en
présentant mon amendement n° 30 rectifié
ter, tend simplement à encadrer
les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse.
Il s'agit d'un sous-amendement de repli par rapport à la proposition présentée
par la commission, dans l'hypothèse ou la preuve pourrait être apportée qu'en
fixant des dates précises dans la loi nous risquerions d'entrer dans un domaine
d'ordre réglementaire et non d'ordre législatif, alors qu'il importe
essentiellement d'encadrer les périodes de chasse, et qu'il appartient au
pouvoir réglementaire de fixer les dates.
Je ne peux pas imaginer que le Gouvernement ne tienne pas compte de l'avis des
milieux cynégétiques et des chasseurs pour retenir d'autres dates que celles
que nous proposons à travers ce texte.
Bien entendu, reste le problème de la compatibilité du décret avec la
directive européenne. Le décret pourrait être cassé par la Cour européenne,
mais cela reste encore à démontrer.
Mon sous-amendement apporte une garantie supplémentaire, en aménageant le
texte de la commission. Pourquoi s'en priver ? Je soumets cette réflexion à
l'appréciation de la commission, de son rapporteur, du Gouvernement et,
surtout, de tous les membres de notre Haute Assemblée.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Larcher, pour présenter le sous-amendement n° 249
rectifié
bis.
M. Gérard Larcher.
Ce sous-amendement vise à introduire une clause de sauvegarde qui doit nous
permettre de concilier les dates proposées par notre commission avec la réalité
de la directive européenne.
Je crois qu'il faut revenir quelques instants à la directive, quels que soient
ses qualités et ses défauts. Que dit-elle ? Certaines espèces peuvent faire
l'objet d'actes de chasse, ce qui constitue une exploitation admissible, pour
autant que certaines limites soient établies et respectées, ces actes de chasse
devant être compatibles avec le maintien de la population de ces espèces à un
niveau satisfaisant. C'est un préambule, le niveau des populations « prélude »
à un certain nombre d'articles de la directive.
L'article 2 dispose que les Etats membres prennent toutes les mesures
nécessaires pour maintenir ou adapter la population de toutes les espèces
d'oiseaux visées à l'article 1er à un niveau qui corresponde, notamment, aux
exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences
économiques et récréationnelles. La chasse - la tradition - relève donc bien de
l'article 2.
Nous passons ensuite à l'article 7, aux termes duquel les espèces migratrices
auxquelles s'applique la législation de la chasse ne doivent être chassées ni
pendant leur période de reproduction, ni pendant leur trajet de retour vers
leur lieu de nidification.
Considérons que tous ces articles s'imposent à nous. Je vais maintenant
comparer les réponses législatives qu'ont apportées, depuis 1979, certains de
nos voisins européens.
La législation britannique,
Wild Life Act, de 1981, retient les mois
d'août et de février, ce qui s'apparente un peu à ce que souhaitent nos
collègues socialistes.
Un décret-loi du Portugal de 1986 retient, lui aussi, les mois d'août et de
février.
Il n'est donc pas incompatible de proposer des dates à l'intérieur de ces
fourchettes, ce que font peu ou prou les auteurs des deux amendements en
question.
En ce qui concerne le plan de gestion, je me réjouis que Mme le rapporteur
n'ait pas donné que
possumus, la possibilité, mais qu'il s'applique,
notamment, pour les cinq ou six espèces sur les cinquante - non pas celles dont
la population est en péril, mais celles dont les dates de chasse peuvent varier
à cause d'une sensibilité liée, notamment, aux phénomènes météorologiques.
Nous pouvons donc résoudre le problème en retenant la proposition rectifiée de
la commission prenant en compte le plan de gestion - nous avions introduit, dès
1998, cette notion de gestion - accompagnée de cette clause de sauvegarde qui
permettra au préfet de région, dans des circonstances exceptionnelles et après
avis des institutions de la chasse, de suspendre la chasse.
Pourquoi le préfet de région ? Je fais un parallèle avec les demandes de
dérogation présentées par le gouvernement régional flamand et le gouvernement
régional wallon. La dimension régionale - l'Aquitaine peut être comparée à la
Wallonie ou à la Flandre en termes de territoire - a été reconnue valide. Elle
est donc plus pertinente que la dimension départementale eu égard aux réalités.
Je parle de trajet réel vers la nidification. Ceux qui sont attentifs savent
que des mouvements internes se produisent, car les espèces avec lesquelles nous
vivons s'adaptent aux réalités biologiques qui les entourent.
Cette clause de sauvegarde, mes chers collègues, donne, c'est vrai, au préfet
le moyen de suspendre la chasse. Nous l'avons d'ailleurs toujours fait. Je ne
connais pas de président de fédération qui ne soit pas allé tirer la sonnette
de son préfet.
M. Roland du Luart.
Absolument !
M. Gérard Larcher.
J'ai le souvenir de problèmes survenus dans les Yvelines : je suis allé tirer
la sonnette du préfet bien avant qu'il ne réagisse et que toutes les directions
régionales de l'environnement, les DIREN, nous aient sollicité parce que le
garde particulier de l'ACCA en poste le long de la Seine avait avisé la
fédération qu'il se passait certaines choses.
Je crois, mes chers collègues, qu'il faut régler cette question passionnelle
en ne se fondant pas uniquement sur des rapports scientifiques.
J'ai participé, madame le ministre, à l'élaboration d'un certain nombre de
rapports scientifiques. J'ai même conduit le rapport scientifique sur
l'écologie de la perdrix grise. J'ai lu les rapports du Museum national
d'histoire naturelle et ceux de l'Office national de la chasse. Ils étaient
tous de qualité. Leur interprétation peut, comme les Evangiles, donner lieu à
des schismes permanents et je voudrais que l'on tienne aujourd'hui un concile
de conciliation.
Je crois que l'on peut conjuguer les dates, la gestion et la sauvegarde avec
la réalité de nos pratiques et la préservation des espèces, et répondre ainsi à
une directive qui est tout de même approximative car elle a été faite de mots
et d'assemblages plus technocratiques que réels. C'est pourquoi je pense que
nous pouvons conjuguer sans nous affronter la réalité des dates et un respect
de la directive.
M. Gérard César.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendement n°s 361 et 249
rectifié
bis ?
Mme Anne Heinis,
rapporteur. La commission est défavorable au sous-amendement n° 361 et
favorable au sous-amendement n° 249 rectifié
bis.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements n°s 361 et 249
rectifié
bis ?
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur
le président, ce ne sera pas une surprise, je suis défavorable à tout
amendement ou sous-amendement visant à modifier çà et là les dates d'ouverture
et de fermeture de la chasse pour telle ou telle espèce en proposant un
dispositif qui me paraît très rigide.
Le sous-amendement n° 249 rectifié
bis, présenté par M. Gérard Larcher,
constitue une excellente illustration du caractère non opérationnel de
l'inscription des dates dans la loi. Il insiste sur le caractère contestable,
évolutif des données apportées par les scientifiques.
Le concile, monsieur Larcher, il a lieu régulièrement puisque nous faisons le
point, que ce soit au sein du comité Ornis ou avec les scientifiques consultés
par le ministère et qui ont examiné la situation au niveau national.
Nous tenons compte effectivement du climat, de l'état de conservation des
espèces, mais aussi de la situation géographique. Les dates qui sont proposées
par les scientifiques, dans les régions de nidification sur le domaine public
maritime ou dans les autres régions, ne sont pas les mêmes. Elles ne sont pas
identiques, évidemment, au nord ou au sud de notre pays.
Je plaide donc, encore une fois, pour la souplesse qu'offre le décret et
j'émets un avis défavorable sur ces deux sous-amendements.
M. le président.
Le sous-amendement n° 361 est-il maintenu, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle.
J'ai dit tout à l'heure, en présentant ce sous-amendement, que je m'en
remettrais à l'avis de la commission. Cet avis étant défavorable et souhaitant
que le plus large consensus se dégage sur l'amendement sur lequel la Haute
Assemblée va se prononcer, je retire mon sous-amendement et j'annonce, dès à
présent, le retrait de l'amendement n° 30 rectifié
ter de manière que
nous puissions concentrer nos travaux sur l'amendement de la commission.
M. le président.
Le sous-amendement n° 361 est retiré, de même que l'amendement n° 30 rectifié
ter.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 249 rectifié
bis.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Si ce sous-amendement était adopté, le représentant de l'Etat au niveau
régional pourrait-il prendre un arrêté qui s'imposerait aux deux, trois ou
quatre départements d'une région ?
Dans une région comme la Picardie, dont une partie est en front de mer et dont
le sud touche l'Ile-de-France, le bassin parisien, la migration des oiseaux ne
se fait pas de la même manière partout. Convient-il dès lors de prendre, à
l'échelon régional, un arrêté qui s'imposerait pour des espèces migratrices de
la même manière dans les trois départements de la région ? Cela ne me paraît ni
réaliste ni fondé. Ce serait un point faible du dispositif.
Il serait plus judicieux que la réflexion se fasse certes à l'échelon
régional, mais que les arrêtés soient pris à l'échelon départemental.
Je tenais à attirer l'attention de Mme le rapporteur sur ce point et je serais
heureux d'entendre l'avis du Gouvernement sur les aspects juridique et
réglementaire de ces questions.
Mme Anne Heinis,
rapporteur. Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Anne Heinis,
rapporteur. Monsieur Vasselle, les circonstances exceptionnelles ne se
limitent pas forcément à l'échelon d'un département. En revanche, vous avez
raison, elles ne couvrent pas nécessairement la totalité de la région.
Toutefois, le besoin de coordination est nécessaire.
A cet égard, je suppose que le préfet de région ne manquerait pas, avant de
prendre son arrêté, de consulter les représentants des fédérations des
chasseurs pour savoir, pour chaque département, où il faut exactement faire
porter son effort, où il faut éventuellement mettre des limites, afin de
s'adapter aux nécessités du terrain.
Les conséquences des circonstances exceptionnelles, il faut les traiter avec
précision. Mais comme on ne peut pas savoir à l'avance si le problème portera
sur le territoire d'un seul département, il convient de prendre la décision à
l'échelon régional.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je dirai
simplement que la sagesse est souvent l'ingrédient le plus nécessaire. Un
exemple récent de circonstances exceptionnelles en témoigne. Ainsi, après
l'accident survenu à l'
Erika sur le littoral Atlantique, les préfets des
départements ont décidé la suspension de la chasse dans ces départements de
façon presque simultanée. Cela n'a provoqué aucun conflit ni aucune
contestation de la part des fédérations en raison de ces circonstances
exceptionnelles.
Je ne suis pas sûre que l'on puisse définir dans la loi ce qu'est la sagesse,
le bon sens ou le souci de coordonner les efforts de l'Etat !...
M. Gérard Larcher.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher.
Je vais proposer une rectification de mon sous-amendement qui deviendrait
ainsi le sous-amendement n° 249 rectifié
ter. Le rythme ternaire est
finalement plus agréable que le rythme binaire !
(Sourires.)
Je ne souhaite pas du tout retirer la dimension régionale, compte tenu du
parallélisme que j'ai fait avec d'autres régions d'Europe. Quand on nous oppose
l'Europe, nous répondons aussi Europe !
Je propose donc la rédaction suivante : « En cas de circonstances
exceptionnelles ayant une incidence majeure sur le rythme biologique des
oiseaux migrateurs, le représentant de l'Etat dans la région peut, après avis
motivé de la fédération régionale des chasseurs, demander au préfet des
départements constituant la région de modifier les dates de fermeture de la
chasse. »
Nous éviterions ainsi des conflits futurs, mais nous maintiendrions la
dimension de l'appréciation régionale, qui est indispensable pour les oiseaux
migrateurs. J'y tiens d'autant plus que d'autres pays nous ont montré que cette
voie est possible.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 249 rectifié
ter, présenté
par MM. Gérard Larcher, François et César, et visant à compléter le paragraphe
V du texte proposé par le B de l'amendement n° 197 rectifié pour l'article L.
224-2 du code rural par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de circonstances exceptionnelles ayant une incidence majeure sur le
rythme biologique des oiseaux migrateurs, le représentant de l'Etat dans la
région peut, après avis motivé de la fédération régionale des chasseurs,
demander aux préfets des départements constituant la région de modifier les
dates de fermeture de la chasse. »
Quel est désormais l'avis de la commission ?
Mme Anne Heinis,
rapporteur. Il demeure favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Défavorable.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je demande à M. Gérard Larcher, sans préjuger la position que l'on peut avoir
sur le fond, de bien vouloir modifier sa rectification, et ce pour une raison
très simple. Ce serait en effet la première fois dans le droit français que
l'on donnerait à un préfet de région le droit d'intervenir dans le domaine de
la police générale, qui relève, depuis Napoléon Ier, du seul préfet des
départements !
Par conséquent, cher Gérard Larcher, à partir du moment où vous avez compris
que le préfet de région ne peut pas intervenir dans ce domaine, mieux vaut
écrire : « le ministre compétent peut donner aux préfets des départements...
».
Mes chers collègues, ne créez pas cette innovation, sous peine de faire du
préfet de région une autorité quasiment déléguée en matière de police
départementale, alors qu'il ne peut pas donner des instructions en matière de
police aux préfets des départements.
Si Gérard Larcher, puisqu'il a déjà fait un pas, accepte ma proposition - « le
ministre compétent peut donner aux préfets des départements... » - le
dispositif sera plus clair, et l'on ne remettra pas en cause deux cents années
non seulement de pratique, mais de droit en matière de police en ce qui
concerne les compétences des préfets des départements.
M. Ladislas Poniatowski.
Je ne suis pas sûr qu'il ait raison !
M. Gérard Larcher.
Je demande la parole.
M. le président.
A titre exceptionnel, je vous donne la parole, monsieur Larcher.
M. Gérard Larcher.
Cher Michel Charasse
(Exclamations amusées sur les travées du RPR),
votre proposition ne maintient pas l'échelon de la région. Or, si nous
n'innovons pas, si nous n'adoptons pas des schémas nouveaux, nous retomberons
dans les mêmes ornières.
Selon moi, la dimension régionale est la bonne dimension...
M. Hubert Haenel.
C'est l'avenir !
M. Gérard Larcher.
... pour apprécier les mouvements des espèces migratoires, notamment.
M. Michel Charasse.
Sauf que l'article 72 de la Constitution ne vise que les départements !
Monsieur le président, je demande la parole.
M. le président.
Monsieur Charasse, exceptionnellement, je vais vous donner la parole pour un
très bref instant, ce qui est parfaitement contraire au règlement mais peut
être conforme à la nécessité de sortir de l'imbroglio dans lequel nous nous
trouvons.
Si nous n'y parvenons pas, je suspendrai la séance pour permettre une
concertation.
Vous avez la parole, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse.
Je vous en remercie beaucoup, monsieur le président, parce qu'il s'agit d'une
question très importante : il faut que le Sénat fasse attention sur la
rédaction et sur l'organisation de la police générale ou spéciale.
Pourquoi « les préfets des départements » ? Mais, chers amis, parce que c'est
l'article 72 de la Constitution. Le préfet de département existe en vertu de la
Constitution, le préfet de région n'existant qu'en vertu d'un décret.
M. Raymond Courrière.
Eh oui !
M. Michel Charasse.
Par conséquent, celui qui est chargé du respect des lois dans la
circonscription selon le découpage habituel de l'Etat, en vertu de l'article 72
de la Constitution, c'est le préfet de département !
M. Ladislas Poniatowski.
C'est lui qui modifiera les dates !
M. Michel Charasse.
Qui peut donner des instructions au préfet de département ? Pas le préfet de
région !
On peut évidemment ajouter : « après avis motivé ou sur proposition, le
ministre compétent peut, sur proposition du préfet de région, donner au préfet
de département... »
M. le président.
Je vous en prie, monsieur Charasse !
Je vais suspendre la séance quelques instants pour que l'on tente de trouver
une rédaction qui recueille un accord à peu près général de la Haute Assemblée.
On fait du travail de commission en séance, ce qui est très mauvais !
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept
heures trente-cinq.)