Séance du 31 mai 2000







M. le président. « Art. 30. - I. - L'article 40 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 40. - I. - Les équipements nécessaires à la pratique de l'éducation physique et sportive doivent être prévus à l'occasion de la création d'établissements publics locaux d'enseignement, ainsi que lors de l'établissement du schéma prévisionnel des formations mentionné à l'article 13 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat.
« II. - Des conventions sont passées entre les établissements publics locaux d'enseignement, leur collectivité de rattachement et les propriétaires d'équipements sportifs afin de permettre la réalisation des programmes scolaires de l'éducation physique et sportive.
« III. - L'utilisation des équipements se fait conformément aux dispositions de l'article L. 1311-7 du code général des collectivités territoriales, sauf dans l'hypothèse où des conventions de mise à disposition gracieuse ont été négociées. »
« II. - Supprimé. »
Par amendement n° 48, M. Carle et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent :
A. - De rédiger ainsi le début du I du texte présenté par le I de cet article pour l'article 40 de la loi du 16 juillet 1984 : « Les équipements nécessaires doivent être prévus pour garantir la pratique de l'éducation physique et sportive à tous les élèves des établissements publics locaux d'enseignement,... » ;
B. - De compléter le III du texte proposé par le I de cet article pour l'article 40 de la loi du 16 juillet 1984 par une phrase ainsi rédigée : « Le transfert de compétence prévu par le présent article est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes, aux départements et aux régions, des ressources nécessaires à l'exercice normal de cette compétence. »
C. - De rétablir le II de cet article dans la rédaction suivante :
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du transfert aux collectivités territoriales des financements nécessaires à la réalisation d'équipements sportifs dans les établissements d'enseignement est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Par cet amendement, nous posons très clairement deux questions. La première : le sport est-il une discipline mineure ou majeure à l'école ? Seconde question : voulons-nous que tous les jeunes, qu'ils résident en ville ou à la campagne, pratiquent le sport ou puissent s'entraîner au sport, je pense en particulier à ceux qui devront passer les épreuves du baccalauréat ? Car, paradoxalement, pour une fois, ce sont les jeunes qui vivent à la campagne qui sont mieux lotis que les jeunes qui résident en ville.
Je m'explique. L'article 30 prévoit, à juste titre, que, chaque fois que l'on construit un nouvel établissement d'enseignement, que ce soit en primaire, dans le secondaire, dans le premier ou dans le deuxième cycle, il faut prévoir en même temps un local pour pratiquer le sport. Comme d'habitude, et une fois de plus, on ne parle pas des établissements existants et on ne règle pas le problème qu'ils rencontrent. Cela n'est d'ailleurs pas propre au gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre. En effet, tous les gouvernements qui se sont succédé au cours des deux dernières décennies ont eu, hélas ! un peu le même comportement.
C'est pourquoi, par notre amendement, nous voulons qu'il y ait des locaux pour pratiquer du sport dans tous les établissements, dans les nouveaux comme dans les anciens. Je suis conscient que cela a un coût. Celui-ci est même probablement plus élevé en ville, car quand on souhaite construire un gymnase se posent parfois des problèmes pour trouver un terrain, et, quand on l'a trouvé, il coûte cher. Le foncier en ville, on sait ce que c'est !
Par cet amendement, nous demandons qu'il y ait des locaux pour que la pratique du sport soit possible partout. Mais nous demandons aussi, bien sûr, que les lois de décentralisation s'appliquent, c'est-à-dire que l'Etat apporte sa compensation quand une commune construit un local pour une école primaire, lorsque le conseil général construit un gymnase pour un collège ou quand la région en construit un pour un lycée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. James Bordas, rapporteur. Cet amendement avait été adopté en première lecture. La commission lui a donné un avis favorable, même si elle ne se fait guère d'illusions sur son avenir... (Sourires.)
M. Henri de Raincourt. Il ne faut pas être pessimiste ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. M. le rapporteur me semble pessimiste,...
M. James Bordas, rapporteur. Cela m'arrive de l'être !
M. Henri de Raincourt. C'est dommage ! (Sourires.)
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. ... ce qui m'inquiète ! (Nouveaux sourires.)
Je ne peux toutefois qu'émettre un avis défavorable. L'enseignement de l'éducation physique et sportive est une discipline à part entière, qui a déjà fait l'objet d'un transfert de compétence accompagné d'un transfert de ressources, à travers l'éducation nationale.
Autre chose, monsieur le sénateur, est, bien sûr, la question des équipements en général pour la pratique sportive, qu'il s'agisse de la construction ou de la rénovation de ces équipements. Nous serons certainement amenés à revenir sur ce problème lors de l'examen du budget du ministère de la jeunesse et des sports.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 48.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Je voudrais m'associer aux propos tenus par M. Poniatowski sur cet amendement, qui émane d'ailleurs d'un de mes collègues de Haute-Savoie.
Ceux qui ont été ou qui sont aujourd'hui conseillers régionaux connaissent les difficultés que nous avons rencontrées sur le terrain au moment du tranfert des lycées, particulièrement des lycées existants qui ont dû faire l'objet d'une réhabilitation très coûteuse. Nous n'avons jamais pu régler correctement ce problème des équipements sportifs d'accompagnement, ou bien parce qu'ils étaient existants et vétustes, ou bien parce qu'ils étaient inexistants. Il y a donc lieu de soutenir cet amendement, qui aura également pour effet de clarifier la situation respective des conseils régionaux, des conseils généraux et, bien entendu, des communes.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Je soutiendrai l'excellent amendement excellemment défendu par mon collègue M. Poniatowski et par mon éminent collègue de la Haute-Savoie. Si je le fais, ce n'est pas parce qu'il émane d'un collègue de la Haute-Savoie, c'est parce qu'il pose un véritable problème, vous l'avez bien compris, madame la ministre, M. le rapporteur, malgré son pessimisme,...
M. Ladislas Poniatowski. Sa lucidité !
M. Louis de Broissia ... verra sans doute la Haute Assemblée suivre l'avis qu'il a émis et soutenir cette disposition.
Cet amendement pose la question que vous évoquez souvent dans cette discussion, madame la ministre, du sport pour tous. Cela renvoie au rôle du Gouvernement. Celui-ci doit-il avoir un rôle normatif en matière de sport ou un véritable rôle de régulation pour tous, d'encouragement au sport ?
Il y a les lois de décentralisation, avez-vous dit. N'oubliez pas, madame la ministre, qu'il y a aussi la dotation générale de décentralisation, la DGD, qu'il y a également des DGF, des dotations globales de fonctionnement, et des dotations globales d'équipement. Voilà dix-huit ans que les grandes lois de décentralisation ont été votées. Je pense que le Gouvernement - je l'espère du moins, car, pour l'instant, je ne vois rien venir - passera à ce que nous appelons tous l'« acte II de la décentralisation », c'est-à-dire à la majorité de la décentralisation. Eh bien ! il y a là un encouragement puissant pour les écoles des communes, pour les collèges des conseils généraux et pour les lycées des conseils régionaux, sans oublier, madame le ministre, les installations de l'enseignement supérieur, qui, très souvent, sont gravement déficientes.
En d'autres termes, dans mon département, il y a, comme c'est un peu partout le cas, à peu près tout à la fois. Si nous, les élus locaux, nous ne « bricolons » pas les lois de décentralisation, il n'y a plus rien, que ce soit en ville ou à la campagne ! Il y a sur notre territoire national des injustices flagrantes. Déposé à l'occasion de l'examen d'un projet de loi visant à encourager les activités physiques et sportives, cet amendement est donc le bienvenu et, je le répète, il a été fort bien défendu !
M. Ladislas Poniatowski. Merci !
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Le groupe communiste républicain et citoyen votera cet amendement.
M. Louis de Broissia. Ah !
M. Pierre Hérisson. Voilà une bonne nouvelle !
Mme Hélène Luc. Cependant, je tiens à rappeler que la majorité sénatoriale a été au Gouvernement pendant de très longues années...
Plusieurs sénateurs du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants. Non !
Mme Hélène Luc. Si ! ... et j'ai interrogé tous vos ministres successifs - vous pouvez consulter le Journal officiel - sur le fait que les transferts n'ont ou jamais été opérés ou jamais été augmentés. Cela signifie que ce que reçoivent maintenant les établissements sportifs correspond à peine à un dixième de la valeur de l'équipement sportif,...
M. Pierre Hérisson. Très bien !
Mme Hélène Luc. ... c'est-à-dire pratiquement rien ! Comme je suis logique, je continue à demander que le Gouvernement - et je le demanderai au ministre de l'économie et des finances, M. Fabius - institue en faveur des départements, des régions et des communes une dotation particulière pour faire en sorte qu'ils soient capables de doter les établissements scolaires des équipements sportifs nécessaires.
MM. Pierre Hérisson et Henri de Raincourt. Très bien !
M. Henri de Raincourt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Je suis tout à fait d'accord avec les arguments développés par mes collègues. Madame Luc, la ligne budgétaire existe. Pour les départements, c'est la dotation départementale d'équipement des collèges, la DDEC.
Certes, comme l'a dit Mme la ministre voilà quelques instants, les transferts de compétences ont eu lieu et les transferts de ressources ont également eu lieu, mais dans quelle proportion ?
S'agissant du modeste département de l'Yonne où vous nous avez fait l'honneur de venir récemment, madame la ministre, je voulais simplement rappeler qu'au moment du transfert de compétences, l'Etat avait mis l'année précédente 500 000 francs. Or, pour 2000, le conseil général a inscrit pour les établissements scolaires - collèges et gymnases, car nous sommes en train de construire des gymnases pour des collèges qui en étaient dépourvus avant le transfert de compétences - 57 millions de francs alors que l'Etat, généreusement, nous accorde, au titre de la DDEC, à peine 8 millions de francs.
Donc, je crois, comme Mme Luc, qu'il y a un énorme progrès à faire. Je compte sur son appui et sur celui de Mme la ministre pour que l'on rétablisse les choses dans les prochaines lois de finances. Il est vrai qu'en ce qui concerne les lycées et l'enseignement supérieur, nous avons encore beaucoup à faire.
Telle est la raison pour laquelle il faut absolument voter cet excellent amendement, qui n'est pas du tout démagogique, qui, au contraire, prend bien en compte les besoins des jeunes, c'est-à-dire une éducation et une formation complètes jusques et y compris sur le plan sportif. (MM. Hérisson et de Broissia applaudissent.)
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. J'exprimerai la même opinion que tout à l'heure. Le dernier orateur l'a prouvé, il s'agit d'un discours démagogique. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Je maintiens ce terme !
Je pense que l'application des lois de décentralisation pose certes problème. Mais, à l'heure actuelle, une commission travaille sur ce sujet, et c'est à travers le débat que nous pouvons avoir sur l'application des lois de décentralisation que nous pourrons éventuellement trouver des solutions aux problèmes que nous soulevons les uns et les autres.
En matière de financement de la décentralisation, on peut effectivement évoquer les équipements sportifs, universitaires ou scolaires. D'énormes problèmes se posent, chacun le sait. On peut aujourd'hui tenir les propos que vous avez tenus, monsieur Poniatowski, et déposer un amendement en sachant que, de toute façon, comme l'a dit M. Bordas - je ne reprendrai pas ses propos - il sera extrêmement difficile à appliquer, à cause d'un retard, parce qu'il y a des inégalités et parce que, sur cette question, il faut un plan général sur l'application des lois de décentralisation.
Je maintiens, monsieur Poniatowski, que vous avez présenté un amendement démagogique, ...
M. Ladislas Poniatowski. Pas du tout !
M. Serge Lagauche. ... mais cela ne m'étonne pas de votre part.
M. Ladislas Poniatowski. Les socialistes sont contre le sport à l'école ! C'est ce que l'on retiendra !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, ainsi modifié.

(L'article 30 est adopté.)

Article 31 bis