Séance du 7 juin 2000







M. le président. « Art. 2. - I. - A l'article 278 du code général des impôts, le taux "20,60 %" est remplacé par le taux "19,60 %" ».
« II. - A l'article 296 du code général des impôts, le taux "9,50 %" est remplacé par le taux "8,50 %".
« III. - Les dispositions des I et II s'appliquent aux opérations pour lesquelles la taxe est exigible à compter du 1er avril 2000. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le Gouvernement, à la date du 1er avril, a donc opté, parmi d'autres mesures, pour un allégement général du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée, en ramenant ce taux à 19,6 %. Cette mesure revient, dans les faits, sur une partie de la hausse appliquée au taux normal en juillet 1995 par le collectif budgétaire Juppé, hausse dont l'effet, on s'en souvient, avait été particulièrement négatif sur la croissance économique de l'époque.
On soulignera également que, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, notre groupe avait proposé une telle réduction, première étape vers un retour au taux de 18,6 % qui doit être directement visé, nous semble-t-il, dans la programmation de la réforme fiscale dont notre pays a besoin pour les prochaines années.
Il est sans doute trop tôt aujourd'hui pour mesurer les effets de la mesure de réduction du taux normal. On ne peut toutefois manquer d'observer qu'elle semble n'avoir de portée que pour les transactions concernant des biens et des services dont la valeur est assez élevée. Dans l'absolu, nous le savons, toute baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée peut se traduire de trois manières : tout d'abord, par la baisse du prix de la prestation ou du bien assujetti, cas de figure a priori le plus automatique ; ensuite, par l'accroissement de la marge brute du collecteur d'impôt, c'est-à-dire de l'entreprise soumise à la déclaration de TVA ; enfin, par l'utilisation de la marge financière créée pour embaucher de nouveaux salariés, susceptibles notamment de répondre à l'augmentation éventuelle de la demande, consécutive à la réduction du prix.
S'agissant de la réduction du taux de la TVA pour l'activité de second oeuvre du bâtiment, dont nous avons discuté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, ses effets doivent être analysés en tenant compte de ces trois facteurs.
Dans le cas de la réduction d'un point du taux normal, il semble bien que la portée de la mesure, que nous n'apprécierons en dernière instance que dans quelques mois, soit assez strictement limitée aux deux premiers termes que j'évoquais à l'instant, singulièrement au second, à savoir l'accroissement de la marge brute.
Tout au plus, cette réduction du taux normal permettra de limiter une poussée inflationniste, mais elle n'aura que peu de portée sur le niveau de l'emploi.
Pour notre part, nous aurions préféré que le Gouvernement s'engage plus directement dans la voie d'une réduction du taux normal plus audacieuse et plus sensible, en le ramenant, dans un premier temps, à 18,6 % et en envisageant, dans un second temps, de placer notre pays plus près du plancher autorisé par la directive « TVA », c'est-à-dire 15 %.
A ce propos, la France, qui va exercer dans quelques jours et pour six mois la présidence de l'Union européenne, devrait, nous semble-t-il, prendre l'initiative d'une réflexion et de propositions sur de nouvelles modifications de la directive concernée, en vue, notamment, de permettre que le taux réduit s'applique à un niveau encore plus faible et, éventuellement, pour un nombre de produits plus important ou que certains secteurs dont l'activité est aujourd'hui soumise au taux normal bénéficient d'un reclassement au taux réduit.
Telles sont les quelques observations que nous souhaitions formuler à l'occasion de l'examen de cet article 2, aux objectifs duquel nous souscrivons, mais qui doit faire l'objet de prolongements dans les mois à venir.
M. le président. Par amendement n° 51, M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - De compléter l'article 2 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... 1. Les ventes d'immeubles à construire au sens des articles L. 261-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, réalisés par un vendeur n'ayant pas été autorisé à acquitter la taxe selon les encaissements, bénéficient du taux de 19,60 % ou de 8,50 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, pour les encaissements intervenus à compter du 1er avril 2000, lorsque les conditions suivantes sont remplies :
« - l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 ;
« - l'achèvement de l'immeuble intervient à compter du 1er avril 2000.
« 2. Pour chaque vente d'immeuble à construire dont le prix ou la fraction du prix doit être acquitté à compter du 1er avril 2000, le vendeur, autorisé ou non à acquitter la taxe selon les encaissements, adresse à l'acquéreur, au plus tard lors du dernier appel de fonds, une facture rectificative faisant apparaître l'incidence de la réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du 1 ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour le budget de l'Etat résultant de l'application de la baisse du taux de la taxe à la valeur ajoutée sur les ventes d'immeubles à construire est compensée par le rélèvement à due concurrence de la taxe intérieure sur les produits pétroliers visée à l'article 265 du code des douanes. »
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel. Le présent amendement vise à garantir l'application de la baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée aux ventes d'immeubles à construire.
L'article 2 du projet de loi de finances rectificative prévoit l'abaissement du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée à compter du 1er avril 2000.
Ce dispositif conduit à faire application du nouveau taux lorsque la taxe est exigible à compter de cette même date.
Or, s'agissant d'immeubles à construire, c'est-à-dire les ventes à terme ou en état futur d'achèvement, deux situations peuvent se présenter. La première : l'exigibilité intervient au moment de la signature de l'acte. Il en est ainsi lorsqu'un promoteur n'a pas opté pour acquitter la taxe selon les encaissements. Seconde situation : l'exigibilité intervient au fur et à mesure des encaissements lorsque cette option a été exercée.
Afin de donner à la mesure un effet aussi large que possible, une instruction du 27 mars 2000 a précisé que le nouveau taux s'applique à compter du 1er avril 2000, que le vendeur ait ou non été autorisé à acquitter la taxe selon les encaissements lorsque l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 et que l'achèvement de l'immeuble intervient à compter du 1er avril 2000.
L'application du taux de 19,6 % ou de 8,50 % aux sommes encaissées à compter du 1er avril 2000 lorsque le vendeur n'a pas exercé l'option pour la taxation selon les encaissements constitue une mesure favorable pour l'acquéreur.
Le présent amendement a pour objet de donner un fondement incontestable à la mesure dans cette situation.
Par ailleurs, il convient d'apporter une sécurité juridique suffisante aux parties en présence - vendeur, acquéreur, administration - sans formalisme excessif et sans coût supplémentaire pour l'acquéreur.
A cet égard, au lieu d'un acte notarié rectificatif, l'émission par le vendeur d'une simple facture rectificative faisant apparaître l'incidence de la réduction du taux de la TVA peut répondre à ces préoccupations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame le secrétaire d'Etat, dans son paragaphe 1, cet amendement permet le passage à 19,6 % des encaissements de TVA à compter du 1er avril 2000 pour les ventes d'immeubles à construire lorsque l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 et lorsque la date d'achèvement de l'immeuble intervient après cette date. Il s'agit donc de permettre aux opérations immobilières engagées de bénéficier du nouveau taux de TVA alors que la mutation est intervenue auparavant. Le contribuable non sousmis au régime des encaissements aurait, si cette mesure n'est pas prise, l'obligation de payer une TVA à 20,6 % sur la totalité du prix de vente en raison du fait générateur de la taxe.
Quant au paragraphe 2, il déroge au principe général de parallélisme des formes. En effet, la modification du taux de TVA devrait entraîner la rédaction d'un nouveau contrat de mutation. L'amendement prévoit qu'une simple facture rectificative, c'est-à-dire un acte unilatéral, sera suffisante, ce qui évitera des frais supplémentaires.
Madame le secrétaire d'Etat, j'ai cru comprendre que cet amendement puisait à bonne source puisque, si je ne me trompe, une instruction fiscale du 29 mai 2000 évoque cette mesure. La commission y est favorable, tout en souhaitant que vous lui indiquiez le coût estimé de la mesure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. J'ai bien entendu les observations de M. Fischer.
S'agissant de la répercussion de la baisse du taux de TVA, je la crois bonne dans un certain nombre de secteurs, notamment dans celui de la distribution, c'est-à-dire des biens de consommation.
Sur les aspects de second oeuvre que vous avez évoqués, je ne peux que me féliciter que cette mesure limite aussi les pressions inflationnistes que l'on peut constater dans ce secteur.
Enfin, vous avez souhaité que le taux normal de TVA soit ramené vers 15 %. La moyenne européenne est de 19,4 %. Grâce à la baisse du taux de un point que nous vous proposons, nous revenons à 19,6 %, ce qui nous place véritablement dans la moyenne. C'est là un point important qu'il fallait souligner.
J'en viens à l'amendement n° 51. Le Gouvernement ne peut que se féliciter d'une disposition visant à donner une base légale à une correction qu'il avait d'ores et déjà fait figurer dans une instruction de la direction générale des impôts. Il émet donc un avis favorable sur cet amendement, qui vise à garantir la répercussion effective de la baisse du taux de la TVA au profit de l'acquéreur et qui simplifie, comme M. le rapporteur général vient de le souligner, le formalisme lié à cette réduction du taux. Par conséquent, il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 51 rectifié.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. S'agissant du coût estimé de la mesure, j'avoue ne pas pouvoir répondre pour l'instant ; mais le renseignement vous sera apporté un peu plus tard, au cours de ce débat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3