Séance du 8 juin 2000







M. le président. Par amendement n° 65 rectifié, Mme Luc, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 11 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Sur les crédits ouverts au ministre de l'emploi et de la solidarité par la loi de finances pour 2000 précitée, est annulé au titre IV (Interventions publiques) un crédit de 1 000 000 000 F. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Avec la présentation de cet amendement, nous rejoignons le débat que nous venons d'avoir.
La technique budgétaire recèle, comme chacun sait, quelques limites et l'ordonnance portant loi organique relative aux lois de finances comme l'article 40 de la Constitution nous contraignent, a priori, pour faire valoir un certain nombre de demandes et de revendications légitimes, à procéder à des réductions de crédits portant sur d'autres postes de la dépense publique. Cet amendement s'inscrit dans cette démarche.
Pour autant, nous ne ferons pas de sa défense un débat assez technique et, pour tout dire, un débat d'initiés sur le bien-fondé de la dépense publique, sur la technique du redéploiement des crédits ou sur l'exercice périlleux de la révision des services votés.
Cela ne doit pas nous empêcher cependant d'indiquer que ce qui est précisément visé dans l'exposé des motifs de notre amendement concerne les sommes que le budget de l'emploi consacre encore, malgré la création du fonds de modernisation, à la compensation d'exonérations sociales ou au financement de certaines mesures spécifiques.
Pour être encore plus précis et lever toute ambiguïté, que certains pourraient utiliser, nous pensons plus particulièrement aux crédits dévolus au CIE, le contrat initiative-emploi, dont le montant s'élève à plus de 4 milliards de francs dans le chapitre concerné.
Nous ne considérons pas, compte tenu de la situation des entreprises, qu'une telle mesure soit encore aujourd'hui indispensable.
Le débat illustre que ce collectif budgétaire a, en effet, comme particularité d'être le produit à la fois de la majoration des recettes fiscales liées à la croissance et du souci de répondre aux attentes du mouvement social, telles qu'elles se sont exprimées ces derniers mois.
Les sommes que le collectif prévoit de consacrer à l'enseignement ou à la santé proviennent directement de la mobilisation de tous les acteurs de l'éducation et de la santé.
Nous pensons même que, au-delà de certains engagements pris par le Gouvernement en matière européenne, madame le secrétaire d'Etat, c'est aussi le respect des engagements pris devant le peuple au printemps 1997 qui doit guider les choix budgétaires de la France.
Répondre aux besoins collectifs, oeuvrer à rendre plus efficace la dépense publique, majorer, si besoin est, cette dépense en fonction des priorités que nous pose le développement social, que nous impose l'avenir et le développement de notre pays doit être au coeur de la démarche du Gouvernement de la gauche plurielle.
S'agissant de l'éducation, nous apprécions, bien sûr, l'effort qui est d'ores et déjà acquis et qui porte sur des ouvertures de crédits de 1 milliard de francs.
Au passage, je voudrais tout de même signaler que, selon une analyse publiée, chiffres à l'appui, par la FSU, le poids de l'éducation nationale dans le budget général demeure encore inférieur au pourcentage de 1993.
Des efforts nouveaux nous semblent encore s'imposer, tant sur le plan qualitatif - mais je ne vais pas engager le débat sur ce point - que sur le plan quantitatif.
De multiples défis sont en effet à relever : comment mieux former les jeunes aux métiers de demain sans moyens importants ?
Comment répondre, par exemple, au défi du collège unique qui, plus de dix ans après son application, continue de souffrir, dans de nombreuses académies, de retards ?
Si l'on prend, par exemple, l'académie de Créteil qui couvre, entre autres départements, le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis, il semble bien qu'un effort particulier doive encore être fourni afin que les moyens matériels et humains existent pour répondre au défi de la qualité de l'enseignement.
Nombre d'établissements sont aujourd'hui contraints, dans les faits, de procéder à une restriction des options de formation offertes aux élèves, ce qui ne peut que détériorer, en fin de compte, la formation initiale des jeunes.
De même, la persistance, voire l'aggravation, de la situation sociale de nombreuses familles appelle des réponses adéquates et volontaires en matière de suivi socio-éducatif, médical ou psychologique des élèves.
Toujours en Ile-de-France, je voudrais faire apparaître la situation dramatique dans laquelle se trouve le département du Val-d'Oise.
Avec un taux de réussite de 60 % au brevet des collèges, ce département est la lanterne rouge de tous les départements français : quatre-vingt-quinzième sur quatre-vingt-quinze. Quant au taux d'orientation en classe de seconde, il est en diminution régulière.
Par ailleurs, on note deux phénomènes très inquiétants : le nombre d'élèves « perdus de vue » augmente ; surtout, la scolarisation des enfants de deux ans recule. Vous le constatez, l'avenir est en jeu.
Aujourd'hui, 16 % des enfants sont admis en école maternelle, contre 30 % il y a quinze ans.
L'école ne répare pas, ne s'adapte pas. Elle assiste à la rupture, au retard, à la marginalisation et, de plus en plus souvent, à l'exclusion. D'après les estimations faites et admises par le ministère, le retard serait de 20 % dans tous les domaines.
Lors de la dernière année scolaire, 17 % des élèves étaient en zone d'éducation prioritaire ; ils sont maintenant 33 %.
L'Etat a donc consenti, dans le cadre de ses moyens habituels, des crédits importants, mais insuffisants, compte tenu de la réalité vécue dans ce département et des retards pris. Mais, il faut le constater, aucun résultat significatif n'a été obtenu.
La nécessité d'un nouveau plan d'urgence apparaît. Les méthodes connues ayant échoué, il nous faut imposer des mesures exceptionnelles et urgentes.
La situation est connue puisqu'elle a été confirmée, chiffres en main, par l'inspecteur d'académie qui, aujourd'hui, a rejoint le cabinet de M. Jack Lang, en compagnie, d'ailleurs, de M. le recteur de l'académie de Versailles.
M. Michel Charasse. Cela ne nous regarde pas !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Après un constat en dix-neuf points d'insuffisances notoires, le conseil général du Val-d'Oise fait une série de propositions sur la base de la création de 1 000 postes supplémentaires.
M. le président. Veuillez conclure, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Croyez-le bien, mes chers collègues, pour que le conseil général du Val-d'Oise fasse des propositions de ce niveau, il faut que les problèmes soient profonds et urgents à résoudre, puisque la majorité qui le dirige s'inscrit totalement, monsieur le rapporteur général, dans la démarche de baisse des dépenses publiques que vous défendez, je veux d'ailleurs le noter au passage, avec conviction et opiniâtreté.
Sur cette question de l'éducation des enfants et des adolescents, dépenser aujourd'hui est le plus sûr moyen de moins dépenser demain si, par exemple, nous sommes alors contraints de mettre en place tel ou tel dispositif d'insertion sociale et professionnelle visant à pallier l'échec scolaire.
Même si M. le ministre de l'éducation nationale s'est engagé dans un processus de large concertation avec l'ensemble des acteurs de l'éducation, nous estimons, pour notre part, utile que ce collectif budgétaire soit l'occasion de marquer plus nettement encore notre attachement commun à l'école de la réussite, en majorant d'un milliard de francs les crédits ouverts dans le projet de loi initial.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Madame Beaudeau, n'abusez pas trop de la bonté du président.
M. Jacques Oudin. Qui est grande !
M. le président. Je vous remercie de le reconnaître, monsieur Oudin.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 65 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaite entendre le Gouvernement.
Elle voudrait néanmoins rappeler, pour la bonne explicitation des débats, qu'il s'agit d'un amendement de réduction de crédits d'un milliard de francs sur le chapitre 44-70, qui comporte notamment les lignes suivantes : programmes en faveur des chômeurs de longue durée, programmes en faveur des chômeurs de longue durée dans les DOM, mesures d'accompagnement, primes des contrats initiative-emploi, exonérations des cotisations sociales des contrats initiative-emploi, contrats emploi-solidarité, emplois consolidés, emplois de ville, insertion par l'économique, fonds de soutien à l'insertion par l'activité économique, trajectoires d'accès à l'emploi, exonérations de cotisations sociales des contrats de retour à l'emploi, réseau d'accueil, d'information et d'orientation des jeunes.
Voilà l'ensemble des crédits qu'il est préconisé de réduire de un milliard de francs... Je souhaiterais maintenant entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. J'entends bien sûr les amendements n°s 65 rectifié et 64 rectifié comme des amendements d'appel.
Vous souhaitez redéployer des crédits au profit des priorités que vous avez exprimées. Mme Luc et vous-même, madame Beaudeau, ne manquez jamais d'évoquer avec moi les problèmes que vous rencontrez sur le terrain dans vos départements respectifs, le Val-de-Marne et le Val-d'Oise.
Croyez que j'y suis sensible et que le Gouvernement est très attaché, comme vous le savez, à l'éducation nationale, dont la priorité budgétaire est réaffirmée dans le cadre de la préparation du budget pour 2001. De plus, M. Jack Lang est engagé dans une concertation avec les organisations syndicales pour préparer un plan pluriannuel.
Cette démarche me paraît donc s'inscrire dans la ligne des préoccupations qui sont les vôtres. Aussi, je vous demande de bien vouloir attendre la discussion du prochain budget et, compte tenu de ces éléments, de retirer l'amendement n° 65 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 65 rectifié est-il retiré ?
Mme Hélène Luc. Non !
M. le président. Quel est donc, maintenant, l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances se réjouit que Mme Beaudeau se rallie à sa ligne majoritaire de réduction de la dépense publique puisque, après un effort de 10 milliards de francs, on va faire un effort supplémentaire de 1 milliard de francs. Par conséquent, nous, nous ne pouvons qu'encourager le Sénat à suivre Mme Beaudeau dans le sens du redéploiement des crédits publics pour plus d'efficacité, comme le préconise d'ailleurs l'exposé des motifs de cet amendement qui précise qu'il s'agit de poser la question de l'efficacité de la dépense publique. Nous sommes totalement d'accord. Merci, chère collègue, de cette initiative heureuse !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65 rectifié.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen veut-il doubler le montant des crédits alloués à l'éducation dans ce collectif budgétaire ?
M. Michel Charasse. On se le demande ! (Sourires.)
Mme Hélène Luc. Nous pensons, tout d'abord, qu'un seul milliard de francs apporté à l'éducation nationale ne suffit pas à couvrir les besoins considérables en créations de postes, pour envisager réellement, par un soutien individualisé et par petits groupes des élèves, un encadrement structuré.
M. Michel Charasse. Ce n'est jamais assez !
Mme Hélène Luc. Les parents d'élèves, les enseignants et les personnels non enseignants sont en effet confrontés, comme vous le savez, à une situation nouvelle de crise, avec de nombreux élèves en difficulté, victimes de l'échec scolaire, issus de milieux sociaux défavorisés.
Comment sortir de la spirale de l'échec scolaire, de la violence, sinon en créant des postes partout où il en manque, y compris pour appliquer les réformes décidées ? Nous savons, bien sûr, que la réforme de l'école est non seulement un problème quantitatif mais également un problème qualitatif. Ce qui est en jeu, c'est effectivement la qualité de l'enseignement pour la réussite de chaque élève. Je crois que cette exigence de qualité, la majorité des enseignants et des personnels non enseignants en sont porteurs et s'engagent au quotidien, au niveau individuel et collectif, pour édifier des projets, élaborer des contrats spécifiques entre eux et leurs élèves, transmettre leurs connaissances de manière attractive, et c'est, bien sûr, la motivation profonde des parents.
Mais les conditions de travail ne sont pas satisfaisantes et ne permettent pas de réaliser toutes ces exigences de qualité. La précarité de la situation des enseignants et des personnels non enseignants, les retards accumulés dans de nombreux départements, le problème des classes surchargées représentent un handicap lourd, qui entrave non seulement la mission classique de l'enseignant mais également la possibilité d'envisager autrement cette mission, de manière moderne et conquérante.
Un milliard de francs ne suffit pas, car cela représente seulement 2 % de 50 milliards de francs de ce collectif. L'éducation nationale représente un investissement positif, porteur pour le présent et pour l'avenir, qui réclame des efforts beaucoup plus importants. Deux milliards de francs, ce n'est pas trop pour répondre aux besoins urgents et enclencher le plan pluriannuel, comme s'y sont engagés le Premier ministre et le ministre de l'éducation nationale, après la grande manifestation du 16 mars, qui a mobilisé plus de 800 000 enseignants. Les emplois-jeunes démontrent leur utilité, mais ils ne doivent pas remplacer les emplois stables, toutes catégories confondues. Un premier geste a été fait avec le déblocage de un milliard de francs, mais ce geste concerne surtout la situation dans les établissements professionnels et le nouveau statut des professeurs des lycées professionnels. Cela ne suffit pas pour répondre aux attentes multiples des parents, des enseignants et des personnels non enseignants, qui continuent d'ailleurs à se battre dans de nombreux départements, comme le Gard, l'Hérault et le Val-d'Oise.
Pour terminer, j'évoquerai évidemment la situation dans mon département, le Val-de-Marne, où, comme vous le savez, un mouvement unitaire de grande ampleur rassemblant tous les syndicats, ainsi que la FCPE, la Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques, se poursuit pour demander un plan d'urgence, et l'on peut dire que c'est du jamais vu : trois mois de manifestations, de grèves, d'occupations de bureaux d'inspections académiques, d'opérations spectaculaires, par exemple à Beaubourg. Hier encore, les parents et les enseignants se sont installés durant vingt-quatre heures devant le rectorat de Créteil, pour débattre et préparer ensemble la rentrée.
Toutes ces actions témoignent d'un grand malaise, mais aussi - je le souligne - d'une grande volonté d'en sortir, notamment grâce à des moyens supplémentaires. Je suis aujourd'hui, en quelque sorte, la messagère de ces parents et de ces enseignants, et je relaie leur combat, madame le secrétaire d'Etat.
Trois mois de grèves et d'actions ont permis d'obtenir quelques petits résultats : trente postes supplémentaires ont été attribués par le ministère pour le premier degré et trente-huit postes ont été répartis immédiatement sans attendre la rentrée, tandis que six cents heures ont été dégagées au bénéfice du second degré, réparties sur cinquante collèges.
Il demeure cependant que ces premières réponses du Gouvernement ne sont pas à la hauteur des besoins et des espérances. Les manifestants, les grévistes ne veulent pas de miettes ; ils veulent réellement partager les parts du « gâteau » de la croissance et mettre ces parts au service d'une éducation de qualité pour tous. C'est pourquoi, mon amie Odette Terrade et moi-même les soutenons quand ils demandent un plan d'urgence estimé à 2 000 postes, comprenant des enseignants mais aussi des médecins, des infirmières, des assistantes sociales, des surveillants et des personnels d'entretien.
Je le redis : le Val-de-Marne, c'est vrai, ne connaît pas la même situation que la Seine-Saint-Denis, mais un nombre assez important de communes connaissent une situation analogue.
Le malaise est grand, et je crois que les attentes ne doivent pas être déçues plus longtemps. Un geste supplémentaire doit être fait pour enrayer pratiquement et concrètement la crise de l'école. Ce geste nécessaire impose de doubler, pour le moment, les crédits du collectif alloués à l'école.
Trois ans de gestion de la gauche plurielle n'ont pas suffi, loin s'en faut, à améliorer de manière significative la situation à l'école.
Madame le secrétaire d'Etat, un défi est lancé à la gauche plurielle : elle doit le relever, elle doit le réussir. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est pour cela qu'il faut réduire les crédits d'un milliard de francs ! Tout le monde a compris !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 11 bis.
Par amendement n° 64 rectifié, MM. Renar, Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 11 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Sur les crédits ouverts au ministre de l'emploi et de la solidarité par la loi de finances pour 2000 précitée, est annulé au titre IV (Interventions publiques) un crédit de 150 000 000 F. »
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Mon ami Ivan Renar aurait dû défendre cet amendement, mais il a dû se rendre dans le Nord en raison de la grève de la faim de Colette Dessaint, qu'il a évoquée tout à l'heure.
Sur un plan purement technique, cet amendement participe de la même procédure que le précédent, concernant les questions de l'éducation et de l'enseignement. Je ne reviendrai donc pas sur les motivations qui peuvent nous guider et en étonner quelques-uns, lorsque nous sollicitons une réduction des crédits ouverts dans tel ou tel chapitre ou article budgétaire.
Comme pour le précédent amendement, nous nous interrogeons en effet sur la pertinence de la dépense que le budget de l'Etat continue à consacrer en l'espèce au financement d'exonérations de cotisations sociales dont la portée effective sur l'emploi n'est pas totalement évidente.
Pour autant, le plus important, dans la démarche qui nous anime, réside dans ce que nous souhaiterions voir faire des 150 millions de francs ainsi dégagés. En l'espèce, il s'agit de sommes que nous souhaiterions voir consacrer au financement de l'intervention publique en direction de la culture.
Dans l'exercice obligé que représente la discussion du collectif budgétaire, mon ami Ivan Renar, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, proteste habituellement contre les coupes et les gels budgétaires effectués dans le budget de la culture.
Cette fois, nous ne pouvons que nous réjouir de voir apparaître une ouverture de crédits supplémentaires de 50 millions de francs destinés à la création artistique.
Effectivement, aujourd'hui, les politiques culturelles nouvelles rendent plus que jamais nécessaire une augmentation significative du budget de la culture. La seule application des charges de service public appelle à elle seule une enveloppe importante.
Mais, dans l'ensemble du secteur, les besoins sont grands : les théâtres nationaux, les compagnies, les opéras et les orchestres doivent ainsi faire face à des demandes urgentes dans un contexte où les négociations sur la réduction du temps de travail se révèlent difficiles.
S'il est une bonne chose de consacrer 500 millions de francs pour réparer les dégâts causés par la tempête à notre patrimoine monumental et végétal, le spectacle vivant vit dans une tourmente permanente.
La réforme des aides des jeunes compagnies théâtrales a pour résultat de réduire les moyens qui leur sont dévolus, de les fragiliser, à terme de faire disparaître nombre d'entre elles.
Les nouvelles mesures fiscales qui ne tiennent pas compte de la spécificité culturelle font peser des charges supplémentaires sur nombre de structures au détriment de l'artistique.
Malgré l'engouement du public pour la danse contemporaine, bien des chorégraphes, bien des danseurs ne disposent pas de lieu pour créer, travailler, répéter.
Les musiques actuelles restent encore trop marginalisées, malgré les déclarations d'intention qui se multiplient à leur égard. Elles ne trouvent pas les traductions budgétaires pour répondre aux aspirations de nombreux jeunes.
Il s'agit moins de réclamer plus, que de réclamer justice : le partage du beau, de l'émotion, de l'imaginaire ne coûte pas cher, compte tenu des enjeux de civilisation qu'il représente. On nous parle souvent de coût de la culture. On ne calcule jamais assez le coût de l'absence de culture.
Cinquante millions de francs ne seront pas suffisants pour tenir compte de l'évolution des charges supportées par les institutions culturelles et pour que soient pris en compte des formes émergentes, des nouveaux talents qui s'appuient sur des pratiques interdisciplinaires. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement.
Le collectif budgétaire peut être le signal d'une volonté d'aller dans le sens d'un renforcement des crédits de la culture pour s'approcher et dépasser le 1 % du budget, si souvent promis et annoncé, mais qui n'a jamais été atteint.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous poursuivons dans le sens un peu surréaliste - il faut bien en convenir - qui était déjà esquissé par l'amendement précédent.
S'agissant d'un amendement de réduction des crédits en vue d'un redéploiement visant à une plus grande efficacité des dépenses publiques, la commission y est favorable.
Le groupe communiste républicain et citoyen nous explique qu'il propose de réduire pour augmenter. Naturellement, ce sont les bizarreries de l'ordonnance organique et de la pratique parlementaire ; mais je ferai quand même remarquer à nos collègues que le chapitre 44-77 que cet amendement vise à réduire de 150 millions de francs comprend notamment les exonérations de cotisations sociales au titre de l'incitation à la réduction du temps de travail - c'est la loi du 13 juin 1998 sur les 35 heures. Martine Aubry appréciera sans doute !
En tout état de cause, la commission, attachée à plus de rigueur, à une meilleure organisation et à plus d'efficacité de la dépense publique, émet un avis favorable sur l'amendement n° 64 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, j'avais exprimé sur l'amendement précédent une demande de retrait ; je ne peux que la réitérer.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de quelques minutes.
M. le président. Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures quinze.)