Séance du 14 juin 2000







M. le président. « Art. 22. - Il est inséré, dans le chapitre Ier du titre IV du livre IV de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, les articles L. 3441-2 à L. 3441-6 ainsi rédigés :
« Art. L. 3441-2 . - Le conseil général de chaque département d'outre-mer peut adresser au Gouvernement des propositions en vue de la conclusion d'engagements internationaux concernant la coopération régionale entre la République française et, selon le cas, les Etats de la Caraïbe, les Etats voisins de la Guyane et les Etats de l'océan Indien.
« Art. L. 3441-3 . - Dans les domaines de compétence de l'Etat, les autorités de la République peuvent délivrer pouvoir au président du conseil général des départements d'outre-mer pour négocier et signer des accords avec un ou plusieurs Etats ou territoires situés, selon le cas, dans la Caraïbe, au voisinage de la Guyane ou dans la zone de l'océan Indien, ou avec des organismes régionaux des aires correspondantes, y compris des organismes régionaux dépendant des institutions spécialisées des Nations unies.
« Dans le cas où il n'est pas fait application des dispositions de l'alinéa ci-dessus, le président du conseil général ou son représentant peut être associé, ou participer au sein de la délégation française, aux négociations d'accords de même nature.
« Le président du conseil général peut être chargé par les autorités de la République de les représenter au sein d'organismes régionaux relevant des catégories mentionnées au premier alinéa du présent article. Les autorités de la République le munissent des instructions et pouvoirs nécessaires.
« Art. L. 3441-4 . - Dans les domaines de compétence du département, les conseils généraux des départements d'outre-mer peuvent, par délibération, demander aux autorités de la République d'autoriser leur président à négocier, dans le respect des engagements internationaux de la République, des accords avec un ou plusieurs Etats, territoires ou organismes régionaux définis à l'article L. 3441-3.
« Lorsque cette autorisation est accordée, les autorités de la République sont, à leur demande, représentées à la négociation.
« A l'issue de la négociation, le projet d'accord est soumis à la délibération du conseil général pour acceptation. Les autorités de la République peuvent ensuite donner, sous réserve du respect des engagements internationaux de celle-ci, pouvoir au président du conseil général aux fins de signature de l'accord.
« Art. L. 3441-5 . - Les accords internationaux portant à la fois sur des domaines de compétence de l'Etat et sur des domaines de compétence du département sont, dans les cas où il n'est pas fait application du premier alinéa de l'article L. 3441-3, négociés et signés par les autorités de la République. A sa demande, le président du conseil général ou son représentant participe, au sein de la délégation française, à la négociation de ces accords et à leur signature.
« Les présidents des conseils généraux d'outre-mer, ou leurs représentants, participent, au sein de la délégation française, à leur demande, aux négociations avec l'Union européenne relatives aux mesures spécifiques tendant à fixer les conditions d'application du traité instituant la Communauté européenne dans le cadre du paragraphe 2 de l'article 299 de ce traité.
« Les présidents des conseils généraux d'outre-mer peuvent demander à l'Etat de prendre l'initiative de négociations avec l'Union européenne en vue d'obtenir des mesures spécifiques utiles au développement de leur territoire.
« Art. L. 3441-6 . - Les conseils généraux des départements d'outre-mer peuvent saisir le Gouvernement de toute proposition tendant à l'adhésion de la France aux organismes régionaux mentionnés au premier alinéa de l'article L. 3441-3. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 154, Mme Michaux-Chevry et M. Reux proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 10, M. Balarello, au nom de la commission des lois, propose de compléter le texte présenté par l'article 22 pour l'article L. 3441-2 du code général des collectivités territoriales par les mots : « , ou d'accords avec des organismes régionaux des aires correspondantes, y compris des organismes régionaux dépendant des institutions spécialisées des Nations unies. »
Par amendement n° 243, MM. Lise, Désiré, Larifla et les membres du groupe socialiste proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 22 pour l'article L. 3441-6 du code général des collectivités territoriales :
« Art. L. 3441-6 . - Les départements d'outre-mer peuvent, avec l'accord des autorités de la République, être membres associés des organismes régionaux mentionnés au premier alinéa de l'article L. 3444-3 ou observateurs auprès de ceux-ci.
« Les conseils généraux de ces départements peuvent saisir le Gouvernement de toutes propositions tendant à l'adhésion de la France à de tels organismes. »
Par amendement n° 11, M. Balarello, au nom de la commission des lois, propose :
I. - De compléter l'article 22 par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 3441-7 . - Les conseils généraux des départements d'outre-mer peuvent recourir aux sociétés d'économie mixte locales et aux sociétés d'économie mixte régies par la loi n° 46-860 du 30 avril 1946, pour la mise en oeuvre des actions engagées dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues en matière de coopération régionale. »
II. - En conséquence, dans le premier alinéa de l'article 22, de remplacer la référence : « L. 3441-6 » par la référence : « L. 3441-7 ».
Par amendement n° 223, MM. Bret, Autexier, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mmes Bidard-Reydet, Borvo, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Loridant, Muzeau, Ralite, Renar et Mme Terrade proposent de compléter l'article 22 par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L... . - Pour le cas particulier des relations entre Saint-Martin et Sint Maarten, le maire de Saint-Martin peut être substitué au président du conseil général selon les dispositions des articles L. 3441-2 à L. 3441-6. »
La parole est à M. Reux, pour défendre l'amendement n° 154.
M. Victor Reux. L'action internationale des départements d'outre-mer dans leur environnement régional relève de la compétence de la collectivité régionale, les autres collectivités n'ayant ici qu'un rôle consultatif.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. José Balarello, rapporteur. Cet amendement tend à permettre aux conseils généraux des DOM de formuler des propositions au Gouvernement en vue de la conclusion d'engagements internationaux non seulement avec les Etats voisins mais aussi avec des organisations internationales régionales.
Le projet de loi prévoyant que les présidents de conseil général des départements d'outre-mer pourront être autorisés à négocier de tels accords avec les organismes régionaux, il paraît logique qu'ils puissent aussi en avoir l'initiative.
M. le président. La parole est à M. Lise, pour défendre l'amendement n° 243.
M. Claude Lise. Je ne comprends pas : certains présidents de région, qui n'ont pas voulu d'un partage et d'une clarification des compétences que j'ai eu l'occasion de proposer, notamment dans le rapport que j'ai remis au Premier ministre, veulent faire semblant de croire, aujourd'hui, qu'il y a une sorte de compétence particulière de nos régions en matière de coopération.
Dans nos départements, qui sont des régions monodépartementales, nous avons deux assemblées, deux exécutifs, qui ont la même légitimité. De plus, nombre de compétences sont enchevêtrées. Ainsi, les deux assemblées s'occupent des problèmes économiques, des problèmes d'éducation, de coopération etc.
La coopération, notamment, a commencé bien avant le dépôt de ce texte. Depuis des années, les exécutifs des départements se déplacent, rencontrent des responsables de pays voisins. Des accords, qui n'ont peut-être pas de valeur internationale, ont même été passés. Voilà un an, j'ai eu l'occasion d'en conclure un avec le Premier ministre de l'île de Sainte-Lucie pour un transfert de technologie en matière d'irrigation. Le conseil général, en effet, maîtrise l'irrigation, gère un barrage et tout un périmètre d'irrigation dans le sud-est de la Martinique. Je ne vois pas bien quel intérêt aurait le Premier ministre de Sainte-Lucie à aller discuter de ce sujet avec le président de région, qui n'a aucune expérience en la matière.
Chaque assemblée a ses compétences et, dans le cadre de ses compétences, peut très normalement continuer - je dis bien « continuer », car ce n'est pas nouveau - à avoir des relations internationales.
Je suis donc fondamentalement opposé à l'amendement n° 154, qui prévoit la suppression d'un article qui se trouve précisément dans le projet pour confirmer la place des exécutifs départementaux en matière de coopération régionale.
Je demande, au contraire, le rétablissement du texte initial, qui permettait aux deux exécutifs de siéger dans des organismes extérieurs - pas en même temps, bien sûr, mais l'un ou l'autre, en s'entendant, selon les problèmes posés - de rencontrer les différents responsables d'organismes régionaux, voire d'occuper un siège d'observateur, par exemple, en tant qu'associé.
D'ailleurs, nos partenaires - c'est en tout cas ce que je constate dans la zone Caraïbe - qui ont pris l'habitude de rencontrer les uns et les autres, s'attendent à nous voir siéger les uns et les autres.
Je ne vois donc pas de raison, je le répète, de donner un rôle spécifique à la région dans le domaine de la coopération.
Le jour où nous aurons une assemblée unique, ce que je souhaite, nous aurons un seul exécutif, qui, bien entendu, représentera chacun de nos départements dans les zones concernées. Mais, pour l'instant, je plaide, en ce qui me concerne, pour un retour au texte initial.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. José Balarello, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que les conseils généraux des départements d'outre-mer pourront recourir aux sociétés d'économie mixte en matière de coopération régionale, c'est-à-dire utiliser ces sociétés pour mener à bien des projets même en terre étrangère.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 223.
M. Robert Bret. Cette explication vaudra également pour l'amendement n° 224, qui porte sur l'article 23, et qui ressemble comme un frère jumeau à celui-ci.
Ces deux amendements témoignent de la nécessité de prendre en compte, de façon concrète, la spécificité des situations qui caractérisent les îles du nord de l'archipel de la Guadeloupe, et plus particulièrement, en l'espèce, de Saint-Martin.
L'île de Saint-Martin est binationale, avec libre circulation des biens et des personnes, mais avec deux statuts administratifs différents, et qui le sont également au regard de l'Europe.
Le différentiel du coût du travail avec la partie néerlandaise est de l'ordre de un à trois, quel que soit le niveau des salaires ou le domaine d'activité. Les entreprises de Saint-Martin souffrent donc d'une concurrence particulièrement forte.
De plus, il nous faut tenir compte, pour Saint-Martin, de son caractère d'île ultrapériphérique d'un département, la Guadeloupe, considéré lui-même comme ultrapériphérique par rapport à la métropole.
L'éloignement de l'archipel guadeloupéen, les multiples spécificités de l'île binationale de Saint-Martin ne peuvent permettre une gestion « à distance » des domaines essentiels au développement économique et social.
Cet isolement conduit à la nécessité de mettre en place des mesures parfaitement adaptées aux multiples contraintes.
D'où le dépôt de ces deux amendements, qui visent à permettre une plus grande responsabilisation et à donner à la collectivité la maîtrise effective de son développement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 154, 243 et 223 ?
M. José Balarello, rapporteur. La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 154 et un avis favorable aux amendements n°s 243 et 223.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 154, 10, 243, 11 et 223 ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement, tout comme la commission, est défavorable à l'amendement n° 154, qui aurait pour conséquence de priver les conseils généraux de toute action extérieure.
Il est favorable aux amendements n°s 10 et 243, ainsi qu'à l'amendement n° 10, qui a trait aux possibilités offertes aux sociétés d'économie mixte.
En revanche, le Gouvernement, conscient des problèmes qui se posent en raison de la partition de l'île, n'est pas favorable à l'amendement n° 223, qui conférerait au maire de Saint-Martin un pouvoir de négociation qui est, pour l'autre partie, celui d'une province, ce que serait plutôt la Guadeloupe.
Il est même possible que, dans les prochaines semaines, la partie néerlandaise de Saint-Martin soit rattachée à la couronne, auquel cas, on verrait mal le maire de Saint-Martin négocier directement avec le gouvernement néerlandais !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 154.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Suivant en cela le Gouvernement, j'estime qu'il convient de repousser l'amendement n° 154 et d'adopter les amendements n°s 10, 243 et 11.
En revanche, contrairement au Gouvernement, j'estime qu'il faut adopter également l'amendement n° 223. En effet, quelle que soit l'évolution de Saint-Martin - on verra bien ! -, sa spécificité doit être reconnue. L'île doit donc disposer de moyens de contact, et c'est ce à quoi tend très justement l'amendement de M. Bret.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 154, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux vois l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 243, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 223, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Article 23