Séance du 21 juin 2000







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Pelletier, pour explication de vote.
M. Jacques Pelletier. Je considère que le maintien de la transmissibilité de la charge de la prestation compensatoire aux héritiers est une solution inique, comme l'a très bien fait remarquer tout à l'heure notre collègue Nicolas About.
J'avais proposé en première lecture, comme d'autres collègues, que cette transmissibilité n'ait lieu que si le ou la bénéficiaire de la prestation se trouvait vraiment dans une situation de précarité. Ces amendements ont été repoussés.
On nous dit qu'il y a possibilité de révision. C'est exact. Mais compte tenu de la lenteur de la justice et du nombre de mois, sinon d'années, nécessaires pour faire modifier un jugement, cette disposition ne me semble pas opérationnelle immédiatement.
Je suis conscient de l'amélioration que le texte de la commission mixte paritaire apporte à la législation actuelle. C'est pourquoi je ne voterai pas contre, mais je m'abstiendrai.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la réforme de la prestation compensatoire est une première étape de la réforme du droit de la famille - cela a été rappelé à plusieurs reprises cet après-midi - et il faut se féliciter aujourd'hui du climat consensuel dans lequel son examen s'achève.
Cela montre bien que sur le sujet de la famille, que l'on taxe souvent de « délicat », les clivages politiques peuvent se réduire et que la navette entre les deux assemblées peut enrichir le débat.
C'est, en effet, une proposition de loi de notre collègue Nicolas About qui a rouvert le débat sur les injustices résultant de la loi de 1975.
Le texte a été repris et inscrit à l'ordre du jour par le Gouvernement. L'Assemblée nationale a modifié l'architecture générale du texte en introduisant des dispositions concernant notamment le versement en capital. Cette architecture a été acceptée par le Sénat, qui a ensuite été appelé à voter un dispositif fiscal très avantageux proposé par Mme la garde des sceaux, avec l'accord, que nous devons saluer ici, de Bercy.
Dans ces conditions, il était presque évident que la commission mixte paritaire déboucherait sur un texte conforme et que la loi serait votée avant le 1er juillet, répondant ainsi aux souhaits émis par l'ensemble des parlementaires.
En effet, il était urgent de réformer la loi de 1975 et de mettre fin aux situations les plus iniques. Celles-ci résultaient à la fois d'une culture et de pratiques judiciaires privilégiant le versement sous forme de rente, permettant ainsi de conserver une dimension alimentaire à la prestation compensatoire, et d'une jurisprudence stricte interdisant, de fait, toute révision.
En levant cette impossibilité et en instituant le versement en capital comme la règle, nous modifierons, je l'espère, non seulement le texte de la loi, mais aussi les pratiques judiciaires et la manière de convevoir la prestation compensatoire.
Celle-ci doit en effet recouvrer pleinement son caractère indemnitaire, qui implique qu'elle soit le plus souvent versée en capital et que si, par exception, elle devait être versée sous forme de rente, elle ne soit jamais révisable à la hausse.
La réaffirmation de ce principe implique que, parallèlement, la rente viagère demeure transmissible aux héritiers. La loi ne peut, en effet, reconnaître le caractère indemnitaire de la prestation compensatoire et considérer, à la mort du débiteur, qu'il s'agit d'une obligation alimentaire. Je sais que cette position a suscité bien des rancoeurs et même de la colère - M. le rapporteur et plusieurs d'entre nous ont reçu des insultes - dans les rangs des associations de débirentiers.
Mais je crois vraiment que les parlementaires - et notre quasi-unanimité cet après-midi en est peut-être le signe - sont parvenus à un texte équilibré : celui-ci conserve nombre de droits aux créanciers tout en améliorant ceux des débiteurs ; il prépare un avenir plus en phase avec les évolutions de notre société tout en réglant les situations douloureuses créées par la loi de 1975.
Le groupe socialiste se satisfait du cheminement pris par cette réforme et votera le texte issu de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité des suffrages exprimés.

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