SEANCE DU 15 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 15. - I. - L'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° L'allocation de présence parentale. »
« II. - Le titre IV du livre V du code de la sécurité sociale est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Allocation de présence parentale
« Art. L. 544-1 . - Une allocation de présence parentale est attribuée à la personne qui interrompt ou réduit son activité professionnelle dans les conditions prévues à l'article L. 122-28-9 du code du travail, lorsque l'enfant dont elle assume la charge est atteint d'une maladie ou d'un handicap graves ou est victime d'un accident grave nécessitant une présence soutenue ou des soins contraignants pendant une durée prévisible minimale fixée par décret qui peut varier selon les pathologies.
« Ces dispositions sont également applicables à la personne qui interrompt ou réduit son activité professionnelle dans les conditions prévues aux articles 37 bis et 54 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, 60 bis et 75 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ainsi que celles prévues aux articles 46-1 et 64-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.
« Art. L. 544-2 . - Le montant de l'allocation varie en fonction de la durée d'activité restante appréciée par rapport à la durée légale du travail ou la durée considérée comme équivalente ou la durée fixée conventionnellement dans l'entreprise. Le montant de la prestation est majoré pour la personne assumant seule la charge de l'enfant, dans des conditions fixées par décret.
« Art. L. 544-3 . - Pour chaque période d'attribution de la prestation, la nécessité d'une présence soutenue ou de soins contraignants de la part des parents est attestée par un certificat médical détaillé et soumise à l'avis du service du contrôle médical prévu aux articles L. 315-1 et L. 615-13 ou du régime spécial de sécurité sociale. Le droit à la prestation est subordonné à un avis favorable dudit service.
« Art. L. 544-4 . - L'allocation est versée dans la limite d'une durée maximale fixée par décret pour un même enfant et par maladie, accident ou handicap.
« Art. L. 544-5 . - Lorsque les deux membres d'un couple réduisent leur activité professionnelle, ils peuvent bénéficier chacun d'une allocation à taux partiel dans les conditions prévues à l'article L. 544-2 même si le montant cumulé des deux prestations excède celui de l'allocation à taux plein.
« Les deux membres du couple ne peuvent cumuler le bénéfice de deux allocations de présence parentale à taux plein ni celui d'une allocation de présence parentale à taux plein et de l'allocation à taux partiel.
« Art. L. 544-6 . - L'allocation de présence parentale est due à compter du premier jour du mois civil suivant le début de la période de congé visée à l'article L. 122-28-9 du code du travail. En cas de changement de la durée d'activité restante, le montant de la prestation est modifié à compter du premier jour du mois civil suivant le changement.
« L'allocation cesse d'être due à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel les conditions de droit cessent d'être réunies.
« Art. L. 544-7 . - Les modalités selon lesquelles l'allocation de présence parentale à taux plein ou à taux partiel est attribuée aux personnes visées aux articles L. 751-1 et L. 772-1 du code du travail, aux 1° , 4° et 5° de l'article L. 615-1, à l'article L. 722-1 du présent code, à l'article L. 722-9 du code rural et les modalités selon lesquelles l'allocation de présence parentale est attribuée à taux plein aux travailleurs à la recherche d'un emploi visés aux articles L. 351-1 à L. 351-15 du code du travail ou en formation professionnelle rémunérée sont fixées par décret.
« Art. L. 544-8 . - L'allocation de présence parentale n'est pas cumulable avec :
« 1° L'indemnisation des congés de maternité ou d'adoption ;
« 2° L'allocation forfaitaire de repos maternel prévue aux articles L. 615-19 et L. 722-8 du présent code ou l'allocation de remplacement pour maternité prévue à l'article L. 732-10 du code rural ;
« 3° L'indemnisation des congés de maladie ou d'accident du travail ;
« 4° Les indemnités servies aux demandeurs d'emploi ;
« 5° Un avantage personnel de vieillesse ou d'invalidité ;
« 6° L'allocation parentale d'éducation ;
« 7° Le complément d'allocation d'éducation spéciale perçu pour le même enfant ;
« 8° L'allocation aux adultes handicapés.
« Toutefois, l'allocation de présence parentale à taux partiel est cumulable en cours de droit avec l'indemnisation mentionnée au 3° perçue au titre de l'activité exercée à temps partiel.
« Le versement des indemnités dues aux demandeurs d'emploi est suspendu au début du versement de l'allocation de présence parentale et est, à la date de cessation de paiement de l'allocation de présence parentale, repris et poursuivi jusqu'à son terme.
« Lorsque le complément d'allocation d'éducation spéciale est attribué au titre d'une période pour laquelle un droit à l'allocation de présence parentale a déjà été ouvert, la prestation la plus favorable reste acquise au bénéficiaire. »
« III. - Au premier alinéa de l'article L. 552-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : "à l'exception de l'allocation de parent isolé", sont insérés les mots : "et de l'allocation de présence parentale". »
« IV. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 381-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« La personne bénéficiaire de l'allocation de présence parentale à taux plein est affiliée à l'assurance vieillesse du régime général, sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret.
« La personne bénéficiaire de l'allocation de présence parentale à taux partiel est affiliée à l'assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale, sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret. »
« V. - Au chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est créé un article L. 161-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-9-1 . - Les personnes bénéficiaires de l'allocation de présence parentale conservent leurs droits aux prestations en nature de l'assurance maladie, maternité, de leur régime d'origine pendant la durée de perception de l'allocation. A l'issue de cette période, elles retrouvent les droits aux prestations en espèces de l'assurance maladie, maternité, invalidité et décès, acquis antérieurement à l'ouverture du droit à l'allocation. »
« VI. - Le chapitre V du livre VII du code de la sécurité sociale est complété par une section 14 ainsi rédigée : "Section 14
« Allocation de présence parentale
« Art. L. 755-33 . - L'allocation de présence parentale est attribuée dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1. »
« VII. - A la section 5 du chapitre II du titre II du livre Ier du code du travail, l'article L. 122-28-9 est ainsi rédigé :
« Art. L. 122-28-9 . - Tout salarié dont l'enfant à charge au sens de l'article 513-1 du code de la sécurité sociale et remplissant l'une des conditions prévues par l'article 512-3 du même code est victime d'une maladie, d'un accident ou d'un handicap graves, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, et nécessitant la présence d'une personne à ses côtés, a le droit soit de travailler à temps partiel, soit de bénéficier d'un congé de présence parentale entraînant la suspension de son contrat de travail.
« La période d'activité à temps partiel, ou de suspension du contrat de travail, a une durée initiale de quatre mois au plus. Elle peut être renouvelée deux fois, dans la limite maximale de douze mois, renouvellements inclus.
« Le salarié doit envoyer à son employeur, au moins quinze jours avant le début du congé ou du travail à temps partiel, une lettre recommandée avec demande d'avis de réception l'informant de sa volonté de bénéficier des dispositions du premier alinéa du présent article, ainsi qu'un certificat médical établi selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Lorsque le salarié entend prolonger son congé ou son activité à temps partiel, il doit avertir l'employeur de cette prolongation, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au moins un mois avant le terme initialement prévu et l'informer, le cas échéant, de son intention soit de transformer le congé de présence parentale en activité à temps partiel, soit de transformer l'activité à temps partiel en congé de présence parentale. Toutefois, pendant la période d'activité à temps partiel ou à l'occasion des prolongations de celle-ci, le salarié ne peut pas modifier la durée du travail initialement choisie sauf accord de l'employeur ou si une convention ou un accord collectif de travail le prévoit expressément.
« A l'issue du congé de présence parentale ou de la période d'exercice de son activité à temps partiel, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente.
« Toutefois, en cas de décès de l'enfant ou de diminution importante des ressources du ménage, le salarié retrouve également son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente, s'il a accompli les formalités prévues à l'article L. 122-28-2. »
« VIII. - A l'article L. 122-28-6 du code du travail, les mots : "est prise en compte" sont remplacés par les mots : "et la durée du congé de présence parentale prévue au premier alinéa de l'article 122-28-9 sont prises en compte". »
« IX. - La loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 32 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° Dans le deuxième alinéa de l'article 37 bis, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 3° L'intitulé de la section 6 du chapitre V est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 54, un article 54 bis ainsi rédigé :
« Art. 54 bis. - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son administration ou service d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire, pour une durée initiale de quatre mois au plus ; il peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite.
« A l'issue du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son corps d'origine. Il est réaffecté dans son ancien emploi. Dans le cas où celui ci ne peut lui être proposé, le fonctionnaire est affecté dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail. S'il le demande, il peut également être affecté dans un emploi le plus proche de son domicile sous réserve de l'application de l'article 60 ci dessous.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
« X. - La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 55 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° L'intitulé de la section 6 du chapitre V est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 3° Dans le deuxième alinéa de l'article 60 bis, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 75, un article 75 bis ainsi rédigé :
« Art. 75 bis. - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son administration ou service d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon les modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit sur demande écrite du fonctionnaire pour une durée initiale de quatre mois au plus et peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite
« A l'issue du congé de présence parentale, ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans sa collectivité ou établissement d'origine, sur sa demande et à son choix, dans son ancien emploi ou dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail ou de son domicile lors de sa réintégration, lorsque celui ci a changé pour assurer l'unité de la famille. » ;
« 5° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 136, les mots : "des articles 59, 75, 100" sont remplacés par les mots : "des articles 59, 75, 75 bis, 100". »
« XI. - La loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 39 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° Dans le deuxième alinéa de l'article 46-1, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 3° L'intitulé de la section 6 du chapitre IV est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 64, un article 64-1 ainsi rédigé :
« Art. 64-1 . - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son établissement d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire, pour une durée initiale de quatre mois au plus ; il peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite.
« A l'issue du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son établissement d'origine.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Si je me réjouis, effectivement, que le Gouvernement ait fait sien le principe d'une allocation de présence parentale, qui était l'objet de la proposition de loi créant une allocation de présence familiale adoptée à l'unanimité par notre Haute Assemblée le 15 juin dernier, je regrette que Mme le secrétaire d'Etat à la santé se soit opposée, à l'époque, à l'adoption des mesures budgétaires d'accompagnement que notre commission des affaires sociales avaient prévues en nous opposant l'irrecevabilité aux termes de l'article 40 de la Constitution.
Cela fait beaucoup de retard pris pour la mise en oeuvre de ce dispositif d'aide aux familles d'enfants malades, dont tout le monde, ici et ailleurs, s'accorde à dire qu'il doit être instauré rapidement ; il s'agissait en effet d'une lacune extrêmement regrettable dans notre système de protection sociale.
Je redis également mon regret que n'ait pas été repris par le Gouvernement le dispositif envisagé pour étendre l'allocation de présence familiale à une autre situation au moins aussi douloureuse, celle de l'accompagnement d'un proche en fin de vie.
Aujourd'hui, nous est donnée la possibilité d'entériner la création de cette allocation de présence parentale.
Nous pouvons toutefois nous poser la question de sa mise en oeuvre.
Reculée au 1er janvier 2001, prélevée sur les recettes de la branche famille à hauteur de 200 millions de francs, nous annonce-t-on. Mais qu'en sera-t-il dans la réalité ?
La présidente de la caisse nationale des allocations familiales, Mme Nicole Prud'homme, nous a rendu compte, en commission, de l'avis défavorable rendu par le conseil d'administration de la CNAF sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Mais, surtout, elle a regretté, madame le ministre, que l'annonce par le Gouvernement du congé et de l'allocation de présence parentale ait eu lieu avant même la saisine du conseil d'administration de la CNAF.
En réalité, où se trouve le vrai problème ? Il est d'ordre rédactionnel. Pourra-t-on vraiment compter sur cette enveloppe de 200 millions de francs, chiffre annoncé uniquement dans l'exposé des motifs de l'article 15 ? Un exposé des motifs n'est pas une loi !
Je vous rappelle en outre, madame le ministre, qu'un décret est encore nécessaire pour fixer les montants de l'allocation de présence parentale en fonction des variations de réduction de l'activité.
Nous venons de perdre six mois pour des raisons, disons d'appropriation d'effet d'annonce...
Pouvez-vous nous assurer, madame le ministre, d'une publication en urgence de ce décret et du déblocage de l'enveloppe dans des délais rapides ? Nous avons déjà perdu six mois. Il serait regrettable d'en perdre encore au moins autant.
Vous savez que « chat échaudé craint l'eau froide. » J'attends toujours, depuis un an et demi, d'autres décrets d'application, notamment sur la mise en oeuvre des soins palliatifs ; je voudrais bien qu'en ce qui concerne ce décret sur l'allocation de présence parentale les choses aillent un peu plus vite. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. La création d'une nouvelle allocation est rare, mon collègue Gilbert Chabroux l'a dit tout à l'heure avec conviction. Aussi, nous nous félicitons de la création de ce congé parental, assorti d'une allocation.
Certaines situations graves et douloureuses n'étaient jusqu'à présent couvertes par aucun dispositif. Cette création répond à un véritable problème, auquel notre assemblée avait déjà eu l'occasion de montrer à quel point elle était sensible. La proposition de loi de M. Neuwirth, déposée en juin dernier, a très certainement contribué à enrichir le débat.
Le Gouvernement avait promis de s'emparer de cette question. C'est aujourd'hui chose faite.
Pour la première fois, la primauté de la relation parentale lors d'une maladie grave d'un enfant est reconnue. Ce sont quelque 13 000 familles qui, chaque année, sont confrontées à cette douloureuse épreuve. Je me réjouis de pouvoir dire qu'enfin leur détresse est prise en compte.
Par ailleurs, ce dispositif offre un véritable cadre juridique protecteur : maintien de la protection sociale, légitimité à être absent sans risque de licenciement, possibilité d'opter pour un congé à temps plein ou d'aménager son activité professionnelle en fonction des besoins de l'enfant.
Le groupe socialiste votera donc, bien évidemment, l'article 15.
M. le président. Par amendement n° 14, MM. Lorrain et Descours, au nom de la commission des affaires sociales, proposent, à la fin du deuxième alinéa du IV de l'article 15, de supprimer les mots : « , sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret ».
La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je voudrais d'abord rappeler à Mme Campion la chronologie des faits : avant la conférence de la famille de 1999, le Sénat avait déjà accepté de prendre en compte l'allocation parentale d'éducation ainsi que l'accompagnement d'un proche en fin de vie.
Le Sénat souhaitait en effet que cette faculté d'obtenir un congé pour assister un proche en fin de vie soit offerte. Malheureusement, nous n'avions pas été entendus.
Mais je crois qu'une bonne idée est une idée qui ne vous appartient plus, qui n'appartient plus à personne, qui appartient à tous. Voilà qui, en définitive, est important.
Vous comprendrez donc que les déclarations d'autosatisfaction nous paraissent quelquefois un peu difficiles à supporter...
M. Henri de Raincourt. C'est misérable !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. J'en viens à l'amendement n° 14.
La commission propose de supprimer la condition de ressources s'agissant des parents bénéficiant de l'allocation de présence parentale au titre de l'assurance vieillesse. D'après ce que j'ai perçu, madame le ministre, dans votre propos tout à l'heure, je crois que nous allons dans le sens que vous souhaitez.
Cette allocation reprend en fait un dispositif voisin de l'APE. Les bénéficiaires perçoivent une allocation et sont affiliés à l'assurance maladie. Mais en ce qui concerne les cotisations vieillesse, cette prise en charge est assurée seulement sous condition de ressources.
On ne discutera pas ici à nouveau de la pertinence du dispositif s'agissant de l'APE, prestation qui relève du choix de vie des parents. Mais en ce qui concerne l'allocation de présence parentale qui est attribuée aux parents d'enfants malades, accidentés, handicapés, sont les accidents de la vie.
Cette allocation entre bien dans le cadre d'une prestation de solidarité nationale. Elle s'adresse à toutes les familles frappées par le malheur d'avoir un enfant malade ou handicapé. Il ne serait donc pas équitable que certains partent, parce que leurs revenus dépassent un montant déterminé, voient l'âge de leur retraite repoussé de la durée du congé.
De surcroît, il s'agit d'une affiliation au régime général, dont les cotisations sont calculées sur un montant plafonné du salaire - environ 14 000 francs - ce qui constitue déjà une forme de mise sous condition de ressources. L'article 15 propose d'y ajouter un effet de seuil.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Nous arrivons, avec l'article 15, à une mesure très importante, puisqu'il s'agit de la création d'une nouvelle allocation, l'allocation de présence parentale.
Je voudrais rappeler que le dispositif financier se double d'un dispositif juridique, puisque, dorénavant, le père ou la mère, ou les deux, lorsqu'ils travaillent à temps partiel seront des salariés protégés, c'est-à-dire qu'ils ne pourront plus être licenciés lorsqu'ils prendront, désormais légalement, un congé pour s'occuper de leur enfant gravement malade. C'est un aspect important du dispositif.
J'ai voulu encourager la parité parentale en augmentant le niveau de l'allocation lorsque les deux parents suspendent leur activité. Il faut revaloriser le rôle du père, et c'est une façon d'y parvenir. Un enfant gravement malade a autant besoin de son père que de sa mère. C'est pourquoi le montant cumulé des deux allocations pour une réduction de l'activité à mi-temps atteindra 4 000 francs, au lieu de 3 000 francs si un seul des parents s'arrête totalement.
L'activité à 80 % sera également autorisée. Ce dispositif, qui était très attendu par les associations, pourra soulager les parents, et éviter qu'ils ne se sentent culpabilisés s'ils s'absentent de leur travail.
Jusqu'à présent, les parents s'arrêtaient en utilisant parfois des dispositifs qui n'étaient pas prévus pour cela ; je me réjouis donc que certaines propositions rejoignent la volonté du Gouvernement.
Je précise que le dispositif prévu à l'article 15 a été retenu tout simplement parce que c'est celui dont relèvent les parents qui bénéficient de l'allocation d'éducation spéciale et qui s'arrêtent de travailler pour donner des soins à un enfant handicapé.
Créer deux dispositifs différents ne semblerait pas équitable. C'est pour ne pas traiter plus favorablement des interruptions ou des réductions d'activité de quelques mois afin d'assurer des soins à un enfant gravement malade que le dispositif a été « calé » sur celui qui existe déjà.
Je tiens cependant à préciser que l'expérience et les témoignages des associations montrent que, dans la plupart des cas, les parents choisissent de s'arrêter partiellement de travailler sauf s'ils sont contraints de se déplacer pour aller dans les centres hospitaliers, et donc d'abandonner totalement leur travail, dans la plupart des cas, ils se « raccrochent » à leur activité professionnelle, même à temps très partiel, pour pouvoir « tenir le coup » ; ils sont conduits alors à partager les charges. C'est ce à quoi vise cette prestation, qui pourra être versée si les parents réduisent leur activité à 80 % ou à 50 %.
Il est clair, monsieur le rapporteur, que, même dans ce cas, le régime financier de l'allocation reste très favorable, notamment les règles de validation des droits à retraite : il n'y a pas remise en cause des droits à retraite pour des parents qui bénéficient de cette allocation de présence parentale.
J'espère avoir répondu à vos préoccupations et vous avoir éclairé sur les raisons pour lesquelles ce dispositif a été mis en place.
Quant à notre volonté politique de prendre les textes d'application, monsieur Neuwirth, je dirai que les dernières réunions ont eu lieu cette semaine au ministère. Les décrets sont prêts et seront adressés la semaine prochaine au conseil d'administration de la CNAF. Je n'ai pas l'habitude de faire des annonces qui ne soient pas suivies d'effet. Je puis affirmer solennellement ici que le dispositif sera, comme prévu, applicable au 1er janvier.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Autant je critique sévèrement ce qui m'apparaît ne pas correspondre à ce qu'attend la société française sur le plan législatif, autant je tiens à saluer ici cette initiative, qui me paraît tout à fait heureuse.
Elle ne me semble cependant pas absolument complète.
Je rappelle à cet égard à la Haute Assemblée que la majorité sénatoriale avait déposé une proposition de loi relative à la famille dans laquelle était prévu un dispositif qui étendait le bénéfice du congé parental aux descendants de personnes âgées devenues dépendantes. Nous savons que, aujourd'hui, pratiquement cinq générations coexistent dans la même famille et que, si nous allons apporter une solution au problème posé par les enfants, plus particulièrement par les enfants malades, reste pendant celui des personnes qui deviennent dépendantes ou qui sont en fin de vie, comme l'a rappelé très justement M. Neuwirth.
Je pense pouvoir réaffirmer ici que cette idée n'est pas nouvelle en soi. Il est heureux que le Gouvernement ait repris à son compte notre initiative au travers de ce texte. Ce que je regrette, c'est qu'il n'aille pas encore plus loin. Mais je ne désespère pas que, rapidement, le Gouvernement sache tenir compte des propositions avancées par l'opposition nationale, qui ne sont pas toutes à rejeter. Il faut savoir en prendre en compte, parce qu'elles ont tout autant de légitimité que celles du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 15, ainsi modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Article 16