SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000


M. le président. La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre de l'agriculture, je vous prie de m'excuser de parler, moi aussi, de la maladie de la vache folle, des inquiétudes qu'elle engendre et des problèmes de santé publique qui s'y rattachent.
Le Gouvernement a pris acte de la volonté de l'opinion d'accélérer et d'intensifier la prévention de la transmission à l'homme. Devant la multiplication de nouvelles alarmantes et de discours alarmistes, il a décidé de proposer sept nouvelles mesures concrètes, à commencer par l'interdiction générale d'utilisation des farines animales dans l'alimentation de tous les animaux non ruminants.
Les Français ont besoin d'une pédagogie pour l'ESB. Il s'agit donc - le Gouvernement l'a compris - d'envoyer un message fort à l'opinion publique, un message fort mais responsable et méthodique. Ce nouveau plan s'articule autour d'un souci de faisabilité, sans pour autant faire appel à des mesures d'abattage trop radicales et mal comprises des éleveurs. Il nécessite aussi qu'avant toute déclaration péremptoire on mesure bien l'étendue du problème.
L'interdiction va conduire le Gouvernement à trouver, d'une part, de nouvelles capacités d'incinération des farines et, d'autre part, des produits de substitution. La culture d'oléoprotéagineux, la production de farines végétales devront être très sensiblement augmentées, avec, bien entendu, l'aide de l'Union européenne.
Par ailleurs, le plan prévoit d'intensifier le dépistage du prion responsable.
Nous continuerons d'assurer ainsi aux Français une sécurité alimentaire maximale, puisque toujours fondée sur les dernières avancées scientifiques. Notre pays demeure, plus que jamais, la nation pilote en termes de protection de santé.
Mes questions portent sur les conséquences pratiques de ce plan et non sur ces principes, qui font l'unanimité.
La consommation de viande rouge s'est effondrée ces dernières semaines, entraînant dans sa chute les cours et confrontant les éleveurs à une crise très grave.
Comment comptez-vous mettre en oeuvre la solidarité nationale et la solidarité européenne pour ces éleveurs ?
Sécuriser la chaîne alimentaire a un coût qu'ils ne peuvent assumer seuls. L'augmentation des frais d'équarrissage, en particulier, devra faire l'objet d'un abondement de la dépense publique.
Par ailleurs, au-delà de ce plan, comment le Gouvernement entend-il rassurer l'opinion publique. Il doit poursuivre la politique engagée depuis trois ans, qui fait de la santé publique un impératif moral ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Gournac. Il n'a plus rien à dire ! (Sourires.)
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Sur ce sujet, hélas ! il y a toujours à dire.
Monsieur le sénateur, je sais que vous êtes non seulement un élu du bassin allaitant, mais aussi un défenseur des races allaitantes, notamment du Charolais. J'ai bien conscience que les producteurs du bassin allaitant ont d'autant moins bien vécu cette crise qu'ils avaient engagé des efforts de qualité depuis des années. Ils ont en particulier mal vécu la proposition, que je ne commenterai pas, émanant d'une organisation professionnelle, consistant à abattre tous les animaux nés avant une certaine date et en faisant l'amalgame, de manière assez paradoxale, entre des bêtes qui peuvent-être soumises au risque de l'ESB et des bêtes qui ne peuvent pas l'être en raison de la qualité de l'élevage.
M. René-Pierre Signé. Absurde !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Il faut faire preuve de beaucoup de prudence en la matière. En tout état de cause, dans la mesure où nous avons lancé un programme de test à très grande échelle, nous devons en attendre les résultats pour mieux cibler notre action et savoir quelle priorité nous allons développer.
Pour le reste, je n'ai rien à ajouter à vos propos. Oui, ce plan en sept volets est de grande envergure, et il comporte de nombreuses mesures de sécurité sanitaire des aliments et de santé publique. Mais il aura un certain nombre de conséquences, je pense notamment à l'interdiction des farines animales.
Nous allons ainsi avoir à faire face à des stocks considérables qui, si l'on n'y prend pas garde, peuvent, en termes de stock, de transport ou d'incinération, poser des problèmes environnementaux et de santé publique plus importants encore que ceux que nous essayons de traiter par ailleurs.
Je lisais à la une d'un quotidien du matin « Farines : poubelle ». Mais notre pays n'est pas assez mûr dans la gestion des déchets. Il est facile de jeter les farines à la poubelle. Mais que ferons-nous devant ces montagnes de farine.
Le Gouvernement doit prendre le temps de la réflexion et de l'action afin d'être en mesure de présenter un dispositif crédible, qui, de toute façon, sera très difficile à mettre en oeuvre.
C'est pourquoi le Premier ministre a voulu mettre en place une mission interministérielle, confiée au préfet Jean-Paul Proust, qui commence à travailler aujourd'hui et qui est essentielle pour assurer la sécurité de nos concitoyens compte tenu des très graves difficultés auxquelles nous sommes confrontés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. René-Pierre Signé. A bonne question, bonne réponse ! (Rires.)

CRISE DE LA « VACHE FOLLE »