SEANCE DU 11 DECEMBRE 2000


M. le président. Par amendement n° II-105 rectifié, M. Fréville et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après l'article 48 sexies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera avant le 1er juin 2001 au Parlement un rapport précisant les effets sur la répartition des dotations versées par l'Etat aux collectivités locales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, de diverses modalités d'intégration dans leur potentiel fiscal de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) :
« 1° Le potentiel fiscal est majoré de la compensation précitée.
« 2° Le potentiel fiscal est majoré de la compensation précitée, pondérée par le rapport entre le taux moyen national de taxe professionnelle pour la catégorie de collectivités ou d'établissements publics locaux concernée et le taux voté par la collectivité ou l'établissement.
« 3° Le potentiel fiscal est majoré de la compensation précitée, pondérée par le rapport entre le taux moyen national de taxe professionnelle pour la catégorie de collectivités ou d'établissements publics concernée et le taux voté par la collectivité ou l'établissement, sous réserve que ce rapport est inférieur à 1.
« Ce rapport sera établi à partir de simulations prenant en compte la suppression de la totalité des bases salaires de la taxe professionnelle sur le fondement des données fiscales de 1999 et des taux de 1998 d'un échantillon représentatif de collectivités et d'établissements publics et pour les dotations les plus sensibles aux différences de potentiel fiscal. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. En demandant le dépôt de ce rapport, notre objectif est naturellement de voir clair dans les conséquences du changement de la définition du potentiel fiscal.
Avant la suppression des bases salaires, le potentiel fiscal correspondant à ces bases de chaque commune ou collectivité territoriale était obtenu en multipliant les bases salaires par le taux moyen national de taxe professionnelle.
La substitution à ce mode de calcul du potentiel fiscal du montant de la compensation versée par l'Etat, comme l'a montré M. le rapporteur général, consiste à faire dépendre la correction du potentiel fiscal du taux voté par la collectivité territoriale.
Ainsi, les collectivités territoriales qui ont des taux de taxe professionnelle faibles, généralement les plus riches, verront naturellement leur potentiel fiscal diminuer. La situation sera inverse pour les collectivités locales qui ont un taux de taxe professionnelle supérieur à la moyenne nationale de leur catégorie.
Etant donné les conséquences en chaîne qu'implique ce calcul sur les dotations de l'Etat, j'ai envisagé trois hypothèses à prendre en compte dans les simulations.
La première est la situation actuelle.
La seconde, qui est proposée par M. Bonrepaux à l'Assemblée nationale, prévoit le retour à la notion traditionnelle de potentiel fiscal.
La troisième, que je propose, est une solution de compromis entre les deux précédentes.
Je souhaite que le Gouvernement nous fournisse, pour le 1er juin, une simulation. Celle-ci n'a pas besoin d'être très compliquée. J'ai dit très clairement qu'elle devrait se fonder sur des échantillons significatifs de collectivités locales.
Nous voyons bien que le problème se situe entre les collectivités qui ont des taux de taxe professionnelle faibles et celles qui ont des taux élevés. Il s'agit d'envisager les conséquences qui découleront de la modification sur les différentes dotations que le rapporteur général a précisées tout à l'heure, à savoir, notamment, sur l'éligibilité à la dotation de solidarité urbaine, la DSU, sur l'éligibilité à la dotation de solidarité rurale, la DSR, sur le montant de la DSU, sur le montant de la DSR. Nous verrons alors plus clair et nous pourrons prendre, avant la fin de 2001, une mesure en attendant que le champ d'application de la suppression des bases salaires ne s'étende aux communes qui ont les plus fortes bases salaires, celles qui ont des entreprises réalisant plus de six millions de francs de chiffre d'affaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je réitère l'avis favorable que j'ai déjà formulé tout à l'heure.
Il est nécessaire de tester différents schémas et, bien sûr, à partir de là, de travailler en concertation avec les associations d'élus locaux pour déterminer dans quelles conditions il serait possible, dans le cadre d'une démarche plus globale, de faire évoluer la notion de potentiel fiscal pour les communes, les département et les EPCI.
Cet amendement nous semble donc particulièrement opportun.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Il va de soi que les réflexions sur les modalités de calcul du potentiel fiscal seront au nombre des sujets qui seront traités dans le rapport que le Gouvernement présentera au Parlement à la fin de l'année 2001.
Dans ce cadre, des simulations seront bien sûr effectuées.
Mais il serait un peu dommage de dissocier les simulations relatives à l'impact de la modification des règles de calcul du potentiel fiscal de la réflexion sur l'utilisation qui peut être faite du potentiel fiscal, c'est-à-dire, au fond, du rôle et de la place des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Par conséquent, sans être en contradiction avec M. Fréville, j'estime préférable de mener cette réflexion à l'intérieur du rapport que le Gouvernement s'engage à déposer avant la fin de 2001. Ce délai est peut-être un peu plus long que celui que souhaite M. Fréville, mais il est utile pour mener à bien cette réflexion.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-105 rectifié.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Mes amis et moi-même ne sommes pas opposés à la simulation demandée par M. Fréville. Je dirais même : mieux vaut simuler avant de voter. C'est quand même plus utile, même si la simulation n'est pas toujours parfaite et repose, comme l'a dit notre collègue, sur des échantillons, parce que c'est la règle du jeu.
Ce que je voudrais dire, c'est que nous sommes un certain nombre, dans cette assemblée comme dans l'autre, à réclamer depuis longtemps la stabilité des règles du jeu. C'est dans cet esprit que M. Juppé avait mis en oeuvre le premier contrat de stabilité, en 1995. Ce contrat de stabilité a été ensuite suivi par un autre, qui s'achève et qui va être reconduit : il concerne les rapports financiers entre l'Etat et les collectivités locales.
Mais la stabilité concerne aussi les règles en matière de financements, notamment de dotations.
Madame le secrétaire d'Etat, vous nous annoncez un travail de réflexion de la part du Gouvernement. Nous l'attendons avec beaucoup d'intérêt.
Mais je veux ajouter que, une fois que nous aurons tiré les conséquences législatives des propositions ainsi faites, il serait quand même souhaitable que, pendant quelques années, nous arrêtions de changer les règles du jeu tous les ans ! Moi qui siège avec plusieurs de nos collègues au comité des finances locales, je peux vous dire que c'est infernal et que nous avons le plus grand mal à suivre. Si nous n'avons pas nos notes sous le nez, nous sommes maintenant, dans l'incapacité d'expliquer aux maires quelles sont les règles du jeu en matière de dotation globale de fonctionnement et autres... j'en passe et des meilleures.
Aussi, je souhaite que nous réfléchissions ensemble afin de parvenir un jour à bloquer le compteur pendant une période significative de trois ou quatre ans. Il faut que nos collègues qui, dans leur département, notent deux ou trois anomalies, ou une petite anomalie dans leur propre commune cessent d'imaginer qu'il est possible de lancer une réforme sur l'ensemble de la France parce que cela leur permettra de résoudre un problème ponctuel. J'ai beaucoup de sympathie pour les problèmes ponctuels, nous en avons tous dans nos propres communes, mais il est un moment où il faut savoir regarder au-delà de ses propres limites communales et de son budget municipal.
Madame le secrétaire d'Etat, je forme le voeu que le rapport que vous préparez « liste » bien les aménagements techniques. Il ne s'agit plus de politique ni de clivage gauche-droite ; il s'agit d'aménagements techniques afin d'éviter les anomalies, les inégalités, tout ce qui peut être choquant. Ensuite, pendant deux ou trois ans, il faudra arrêter, parce que c'est infernal !
Le comité des finances locales se réunit demain matin. Il va encore passer des heures à analyser un certain nombre de textes et leurs conséquences au niveau des décrets d'application. De grâce, épargnons-nous cela pendant quelque temps ! Il est bon d'exiger du Gouvernement la stabilité, mais il serait bien aussi que, de notre côté, nous ne tenions plus de discours contradictoire et que nous appliquions la stabilité aux domaines qui entrent dans nos propres compétences !
M. Bernard Angels. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-105 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 48 sexies .

Article 48 septies