SEANCE DU 19 DECEMBRE 2000


M. le président. Par amendement n° 1 rectifié, M. Charasse et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré dans le code du domaine de l'Etat, après l'article L. 28, un nouvel article L. 28 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 28 bis. - Les cahiers des charges afférents aux appels d'offres et aux autorisations d'exploitation du domaine public des ondes accordées aux opérateurs de téléphonie mobile doivent comporter une clause imposant, aux bénéficiaires des nouvelles fréquences de toutes natures, d'assurer un égal accès des citoyens aux services qui leur sont ainsi offerts. Les opérateurs doivent donc s'engager à assurer, selon un calendrier préalablement fixé par l'Etat et dans un délai qui ne peut être supérieur à dix ans, une desserte normale, convenable et de qualité de l'ensemble du territoire de la République afin que les services concernés puissent bénéficier à plus de 95 % de la population sans que la desserte d'un département ou d'un territoire ne puisse être inférieure à 85 % de sa population.
« Les cahiers des charges prévoient également les conditions dans lesquelles les autorisations sont révoquées sans indemnisation par l'Etat en cas de non-respect des obligations de desserte de la population.
« Les avenants aux cahiers des charges conclus postérieurement à la date d'entrée en vigueur des autorisations visées au présent article ne peuvent avoir pour objet ou pour effet de prolonger les délais prévus au premier alinéa, sauf autorisation expresse et individuelle donnée par la loi. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Nous sommes un certain nombre - et pas seulement au sein de cette assemblée, ce serait très égoïste - en France à déplorer la manière dont la couverture du territoire par le téléphone portable est assurée par les différents opérateurs.
En ville, y compris dans Paris, nous sommes, d'une rue à l'autre, privés de la possibilité de téléphoner. Dans les zones rurales, que j'appellerai « de plaine », la transmission est souvent horrible et, dans les zones de montagne, elle est totalement indéfinissable. Je ne veux pas être désagréable, mais la communication ne passe pratiquement jamais ou elle passe vraiment par hasard.
M. Michel Moreigne. C'est vrai !
M. Michel Charasse. Telle est la situation actuelle pour ce qui est des téléphones portables existants.
Au moment où l'Etat lance un appel d'offres pour l'attribution de ce que l'on appelle les licences UMTS - je ne sais même pas ce que cela signifie ! -, nous sommes un certain nombre, en tout cas au groupe socialiste, à penser que l'on ne doit pas « louper » l'occasion d'imposer, dans les cahiers des charges, une desserte totale du territoire. Pourquoi ? Mes chers collègues, parce qu'il s'agit d'un dispositif privé utilisant une chose qui appartient à tout le monde : le domaine public des ondes.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Michel Charasse. A partir du moment où le domaine public est utilisé, il ne peut l'être que d'une façon égalitaire.
Madame la secrétaire d'Etat, depuis que j'ai déposé cet amendement, j'ai reçu un certain nombre de coups de téléphone - pas de votre part, je vous mets tout de suite à l'aise ; pour nous parler, nous n'avons pas besoin de nous téléphoner ! - pour me dire que le cahier des charges est déjà établi, que le Gouvernement s'est engagé à le soumettre à l'Assemblée nationale dans quelques mois - je ne sais pas comment, d'ailleurs, il peut être à la fois établi et soumis à l'Assemblée nationale dans quelques mois ! - et que l'appel d'offres est lancé, ce qui est la vérité.
Tout cela est bien gentil, mais je demande alors au Gouvernement de nous indiquer comment sera assuré le principe d'égalité au regard de l'utilisation du domaine public des ondes.
Je vais être très égoïste, monsieur le président, vous me pardonnerez, mais je pense qu'à ma place vous feriez pareil : moi qui suis l'un des 60 millions de propriétaires du domaine public des ondes, je n'accepte pas qu'il soit utilisé par d'autres sans que j'aie moi-même le droit de m'en servir !
Mon département est tellement mal desservi à l'heure actuelle par les téléphones portables existants - plusieurs membres de mon groupe pourraient d'ailleurs dire la même chose...
M. Michel Pelchat. Et d'autres groupes !
M. Michel Charasse. ... que nous ne souhaitons pas qu'il en aille de même avec les nouvelles licences.
On me rétorque : si l'on exige des nouveaux opérateurs une couverture pratiquement totale, cela leur coûtera tellement cher qu'ils ne seront plus preneurs. Très bien ! Mais nous sommes dans un système dans lequel l'intérêt public peut se heurter directement à l'intérêt privé ; dans ce cas, il faut trancher et il faut trouver une solution !
Pour ma part, je propose, m'inspirant d'ailleurs - M. le rapporteur général s'en souviendra puisqu'il est intervenu sur ce sujet - d'un amendement qu'a défendu notre collègue M. Cazalet lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001 mais qui était mal rédigé, qu'au terme de dix ans la desserte couvre 95 % de la population, ce qui est quand même la moindre des choses !
Dans son amendement, M. Cazalet prévoyait la couverture de 85 % ou 90 % du territoire de la République et des départements et territoires d'outre-mer. Son application aurait tout de même posé un problème en certains endroits, par exemple dans le territoire Inini, en Guyane, qui fait 90 000 kilomètres carrés. On ne peut pas exiger des opérateurs qu'ils couvrent ce territoire où n'habite personne ! Mais prévoir que, dans dix ans, 95 % de la population devra être desservi, étant entendu que la desserte d'un département ou d'un territoire ne pourra être inférieure à 85 % de la population, cela me paraît la moindre des choses !
Madame la secrétaire d'Etat, je suis prêt, naturellement, à engager toute conversation que le Gouvernement jugera utile sur ce sujet. J'ai, moi aussi, un certain sens de l'Etat et de l'intérêt national. En tout cas, je peux vous dire que, si le législateur n'intervient pas, un jour, au nom du principe d'égalité, c'est le Conseil d'Etat qui, saisi des réclamations individuelles, procédera aux annulations nécessaires.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le président, nous attendons avec beaucoup d'intérêt et d'impatience les explications que le Gouvernement voudra bien nous donner sur ce sujet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, elle aussi, souhaiterait entendre le Gouvernement.
Elle comprend fort bien les préoccupations développées par Michel Charasse, qui sont ressenties dans nombre de nos départements.
J'ajouterai que, dans un département comme l'Oise, qui est assez fortement urbanisé, certains villages ne sont même pas desservis par les moyens de téléphonie classiques et que, lorsque l'on traverse la forêt de Compiègne, les communications s'interrompent.
M. Michel Charasse. Voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est franchement déplorable !
Madame le secrétaire d'Etat, quelle réponse pouvez-vous apporter à nos légitimes préoccupations ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Comme vous le savez, les préoccupations d'aménagement du territoire sont très présentes dans les réflexions que mène le Gouvernement et dans les décisions qu'il prend.
En ce qui concene le réseau de deuxième génération de téléphonie mobile, que vous évoquiez, monsieur Charasse...
M. Michel Pelchat. De troisième génération !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Non ! ... de deuxième génération. M. Charasse a commencé par déplorer la qualité du service actuel.
M. Michel Charasse. Qui est lamentable !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je vous laisse le choix de vos qualificatifs, monsieur le sénateur !
Je commencerai donc mon propos par les réseaux de deuxième génération.
S'agissant de ces réseaux, un rapport est en cours d'élaboration, rapport que vous pourrez consulter très prochainement et qui montre à la fois les progrès accomplis dans ce domaine et les mesures que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour améliorer la couverture là où le besoin s'en fait sentir.
En ce qui concerne la troisième génération, le Gouvernement, vous le savez, a choisi une procédure de soumission comparative pour l'attribution des licences de téléphonie mobile, notamment pour privilégier les préoccupations d'aménagement du territoire, puisque celles-ci constituent l'un des critères de sélection déterminants pour le choix des exploitants de réseaux de troisième génération, qui doivent notamment respecter des obligations minimales de couverture de la population.
L'appel à candidatures qui a été lancé par le secrétariat d'Etat à l'industrie le 18 août dernier fixe d'abord des objectifs de couverture de la population à hauteur de 25 % à échéance de deux ans après l'attribution des autorisations, obligation qui passerait à 80 % à l'échéance de huit ans.
Les opérateurs ont aussi des obligations de qualité de service qui sont valables sur toute la zone de couverture car, comme vous le faisiez observer tout à l'heure, la question de la couverture quantitative est une chose, celle de la couverture qualitative en est une autre.
En fixant des objectifs de couverture à échéance de dix ans au niveau souhaité par les auteurs de l'amendement n° 1 rectifié, on imposerait aux opérateurs des contraintes nouvelles par rapport à celles qui ont été fixées lors de l'appel d'offres lancé par le Gouvernement. Il s'agirait, d'une certaine manière, d'une modification des règles du jeu en cours de procédure, ce qui aurait pour conséquence de gravement remettre en cause le dispositif de soumissions comparatives qui a été retenu et son calendrier.
Il ne reste que quelques semaines d'ici à la remise des offres par les opérateurs et la procédure nécessaire pour introduire la modification envisagée par M. Charasse ferait perdre au minimum six mois pour la mise à disposition auprès du public de cette nouvelle technologie.
Le Gouvernement a, par ailleurs, prévu plusieurs dispositions qui concernent les relations entre opérateurs et qui sont de nature à favoriser le déploiement des réseaux.
La première de ces dispositions vise à fortement inciter les opérateurs à partager avec leurs concurrents, et cela de manière systématique, leurs sites ou leurs pylônes radioélectriques.
La deuxième disposition fait en sorte que les opérateurs UMTS qui ne disposent pas au préalable d'un réseau GSM pourront bénéficier de l'acheminement de leurs communications sur les réseaux GSM existants de leurs concurrents.
La troisième disposition rend possibles des accords particuliers entre les opérateurs dans certaines zones pour des raisons économiques afin de permettre des compléments de couverture.
Enfin, l'expérience de téléphonie mobile de deuxième génération montre que les taux de couverture de la population ont été atteints à des niveaux tout à fait importants puisque la barre de 95 % de la population a déjà été dépassée : nous en sommes aujourd'hui à 99 %.
Si l'on raisonne maintenant non plus en termes de pourcentage de la population couverte mais de pourcentage du territoire, ce qui était, je crois, l'approche que vous développiez, monsieur le sénateur, il est vrai que la couverture est encore incomplète, mais elle dépasse tout de même 90 %. Par conséquent, si l'inquiétude que vous manifestez est fondée, elle doit cependant être nuancée à la lumière des chiffres que je viens d'indiquer.
En outre, la menace de retrait automatique de l'autorisation que vous souhaitez mettre en oeuvre, monsieur Charasse, me paraît superfétatoire dans la mesure où il existe déjà un dispositif de sanctions qui peut aller jusqu'au retrait pur et simple de la licence prévue par le code des postes et télécommunications.
Les observations que vous avez formulées me paraissent concerner tout autant sinon plus le secrétariat d'Etat à l'industrie que le secrétariat d'Etat au budget. Croyez-bien que je me ferai votre interprète auprès de Christian Pierret.
En attendant, je souhaiterais que vous retiriez votre amendement.
M. Michel Pelchat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Comment ne pas souscrire à la proposition de notre collègue M. Charasse,... surtout après votre intervention, pourrais-je dire, madame le secrétaire d'Etat ?
Vous avez rappelé votre souci d'aménagement du territoire, qui est tout à fait louable et que nous partageons. A ce sujet, je voudrais simplement rappeler deux faits indéniables, qui témoignent du peu de cas que vous faites en réalité du souci que vous prétendez avoir.
Le premier concerne la télévision. Il s'agit, là aussi, de l'utilisation des réseaux hertziens. Je prendrai l'exemple d'un réseau que vous détenez depuis très longtemps, la cinquième chaîne, sur lequel, par la volonté du Sénat, se sont développées la chaîne de la connaissance et du savoir et la Sept-Arte. Ce sont des chaînes tout à fait spécifiques qui apportent un enrichissement au téléspectateur et qui serait ô combien intéressantes pour les habitants des zones rurales les plus reculées, où les éléments de formation et l'accès à la culture font le plus défaut ! Leur desserte sur tout le territoire constituerait un complément tout à fait utile dans un objectif d'aménagement du territoire.
Or, aujourd'hui, je constate que, plus de dix ans après, ce réseau dont pourtant vous avez la maîtrise ne couvre que 86 % du territoire.
J'en arrive à mon second exemple.
Toujours dans une logique volontariste d'aménagement du territoire, nous allons développer, dans les mois et dans les années qui viennent, ce que beaucoup attendent ; à savoir le réseau numérique hertzien. Quelles obligations avez-vous fixées dans le cahier des charges, y compris pour le service public de l'audiovisuel, qui va bénéficier de deux bouquets de ce réseau numérique hertzien ? Une couverture nationale de 70 % seulement !
Or ce réseau numérique hertzien va être un outil extraordinaire de développement dans tous les domaines, grâce notamment à la très forte présence du secteur public de l'audiovisuel. Et, comme toujours, 30 % de nos concitoyens, ceux qui sont les moins bien desservis, n'en profiteront pas. Ils forment beaucoup d'espoir sur l'arrivée de ce numérique hertzien et ils n'en auront jamais le bénéfice.
Voilà deux exemples, pris dans un secteur dont vous avez une maîtrise totale, qui démontrent combien le souci de l'aménagement du territoire n'est pas respecté par le Gouvernement. Comment dès lors l'imposer à des opérateurs privés sur le réseau UMTS ?
Pour ma part, je souscris totalement aux propositions de M. Charasse. Elles me paraissent fort judicieuses et opportunes. Elles devraient être retenues par notre assemblée.
Seulement, vous en conviendrez, madame le secrétaire d'Etat, cela modifierait complètement l'économie du projet. Comme vous le savez, les opérateurs vont devoir verser 130 milliards de francs, ce qui n'est pas négligeable. Pour développer leur licence, ils devront investir 30 milliards de francs, dans les conditions prévues actuellement au cahier des charges et que vous avez rappelées tout à l'heure.
Toutefois, lorsque vous avez indiqué qu'ils avaient l'obligation de couvrir 80 % de la population, vous avez oublié de mentionner que cela ne représentait que 27 % du territoire. Or il s'agit de téléphonie mobile : il faut donc considérer la population mobile et, dès lors, raisonner en termes de couverture du territoire. En effet, si je me déplace sur un territoire qui n'est couvert qu'à 27 %, je serai sans liaison téléphonique pendant 75 % de mon trajet.
M. Michel Charasse. Très bien ! C'est comme ça en Auvergne !
M. Michel Pelchat. Monsieur le président, excusez-moi d'avoir été un peu long dans mes explications, mais il fallait que les choses soient bien précisées. Je pense que vous comprendrez, madame, pourquoi je soutiendrai l'amendement de M. Charasse. En tout cas, je vous demande de revoir l'économie globale du projet de mise en service des réseaux UMTS. Cet objectif indispensable ne pourra être réalisé dans le contexte que vous avez présenté.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je suis, moi aussi, très favorable à l'amendement de M. Charasse.
Faisons un peu d'histoire.
Pendant quinze ans, nous avons entendu parler des zones d'ombre à propos de la réception de la télévision, et ce n'est pas tout à fait terminé. Les conseils généraux, parfois les petites communes, ont dû contribuer au financement d'équipements permettant à des populations rurales, notamment en zone de montagne, de recevoir la télévision, outil de culture et d'information devenu indispensable.
M. Michel Charasse. Et c'est un service public !
M. Gérard Delfau. Effectivement !
Ensuite, est apparu le réseau de deuxième génération, avec le développement des portables.
Là encore, il s'avère qu'une partie très importante du territoire n'est pas desservie.
Récemment, dans ma région de Languedoc-Roussillon, plus précisément en Lozère, des manifestations ont été organisées pour sensibiliser les pouvoirs publics en général et le Gouvernement en particulier au fait que, à tel col ou dans tel passage situés suffisamment loin d'habitations, pour que les secours ne puissent être sur place en peu de temps, il était impossible, en cas d'accident, d'alerter un médecin ou les pompiers au moyen d'un téléphone portable. Bref, l'égalité d'accès à ce service n'est pas assurée, contrairement à une revendication majeure dans l'histoire de notre pays : les citoyens n'acceptent pas que des entorses graves soient faites à ce principe.
Aujourd'hui, nous nous trouvons devant la troisième génération.
Quand nous avons inscrit dans notre législation - j'y avais moi-même souscrit, mais non sans de nombreuses réticences - la notion de service universel des télécommunications, nous avons demandé que les moyens modernes, ceux qui seront de plus en plus utilisés, soient inclus dans ce service universel, de manière qu'il ne soit pas le parent pauvre du service public. Cela n'a pas été fait et, aujourd'hui, nous devons trouver des palliatifs et faire en sorte que, par l'intermédiaire des opérateurs privés, ce service soit effectivement accessible à l'ensemble de la population.
Nous devons, par ailleurs, éviter que de nouveaux transferts de charges n'aient lieu.
Je ne vous ferai pas de procès d'intention, madame la secrétaire d'Etat, puisque la façon dont le Gouvernement conduit cet appel d'offres est sans commune mesure avec la façon dont, dans le reste de l'Europe, les gouvernements de droite ou des gouvernements dits de gauche ont procédé aux mêmes opérations. Il reste que l'inquiétude est réelle. Après tout, cela vaut la peine de prendre six mois de plus dans le déroulement de l'appel d'offres si cela doit permettre d'obtenir une amélioration de la desserte et un meilleur accès des citoyens à ce service devenu indispensable.
M. Michel Pelchat. Très bien !
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. J'ai bien entendu les arguments des uns et des autres, en particulier, que mes collègues me pardonnent, ceux de Mme le secrétaire d'Etat.
Madame le secrétaire d'Etat, vous dites : « Nous avons d'ores et déjà prévu que, dans les huit ans à venir, 80 % de la population seraient couverts. » Mais 20 % de 60 millions, cela fait tout de même 12 millions de personnes à qui la couverture ne sera pas assurée ! Ce n'est pas négligeable.
M. Michel Pelchat. Mais, par définition, c'est mobile !
M. Michel Charasse. Cela étant, quand je dis qu'il doit y en avoir 95 % en dix ans, au fond, je ne fais que prolonger le mouvement que vous avez décrit.
Concernant la génération actuelle des téléphones portables, vous affirmez que le taux de 95 % est largement dépassé, qu'on en est à 99 %. Peut-être mais avec 75 % du territoire où les communications sont totalement inaudibles ! Rue de Vaugirard, donc en plein Paris, entre la sortie du Sénat et le carrefour avec la rue Bonaparte, vous ne pouvez pas téléphoner ! Alors, je vous laisse imaginer ce qu'il en est en Auvergne ! Dans les trois quarts du département du Puy-de-Dôme, même si j'ai la liaison, je n'entends rien à ce qu'on me raconte sur mon portable !
Par conséquent, c'est une escroquerie majeure. Pour arriver à passer un coup de fil, il faut appeler quatre ou cinq fois, ce qui conduit l'opérateur à vous facturer quatre ou cinq unités.
Alors, madame le secrétaire d'Etat, je ne sais pas ce qu'il en est dans les autres régions mais, en Auvergne, payer quatre fois la même prestation, croyez-moi, cela leur arrache le coeur ! (Rires.)
M. Michel Pelchat. A un Auvergnat, oui !
M. Michel Charasse. Si vous ne comprenez pas ça, si, au secrétariat d'Etat à l'industrie, on ne comprend pas ça et si, chez les opérateurs, on ne comprend pas ça, Auvergnats nous sommes, Auvergnats nous resterons...
M. Michel Pelchat. Les Auvergnats, c'est pire que Bercy !
M. Michel Charasse. ... et rien ne nous changera, même pas les techniques nouvelles de télécommunication !
Quant au retrait des autorisations, permettez-moi de douter ! Quand on voit la lâcheté du CSA en matière d'autorisations, quand on sait qu'il s'est toujours couché depuis qu'il existe,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est excessif !
M. Michel Charasse. ... comme s'était couchée la CNCL, comme s'était couchée la Haute Autorité - parce que l'on peut diffuser sur les ondes n'importe quelle horreur, le CSA se contente de faire des « observations » : ce sont des « dégonflés », des paillassons ! - on se demande comment ceux qui siégeront demain à l'autorité de régulation des télécommunications pourraient être un peu plus courageux.
Le courage, c'est une vertu qui se perd. Elle existe sans doute encore au ministère des finances, au secrétariat d'Etat au budget, en particulier - vous le voyez, je vous rends grâce, madame le secrétaire d'Etat - mais pas ailleurs ! Ne faites pas confiance à tous ces gens-là : ils détestent l'Etat, ils n'ont aucun sens de l'Etat, aucun sens de l'autorité publique ; ils ne pensent qu'à leur publicité et à leur réputation personnelles !
La question qui se pose est celle-ci : arrivera-t-on ou non à faire plier le monde du fric ?
J'entends bien que l'appel d'offres est lancé, et il est vrai qu'il est sans doute difficile de changer le cahier des charges une fois que l'appel d'offres est lancé. Il n'empêche que, au-dessus du cahier des charges, il existe les principes fondamentaux de la République : le principe d'égalité, notamment en matière d'accès aux services publics, le fait que le domaine public appartient à tout le monde. Quoi qu'en pense le « monde du fric », ses valeurs à lui ne peuvent pas être supérieures à ces valeurs-là.
Madame le secrétaire d'Etat, je ne veux pas vous gêner, et je suis sûr que votre collègue chargé de l'industrie a fait pour le mieux dans cette affaire compliquée. Je me félicite que ce débat ait eu lieu.
Plusieurs sénateurs du RPR et des Républicains et Indépendants. Nous aussi !
M. Michel Charasse. Nous savons bien que, si cet amendement était adopté, un problème juridique se poserait dans la mesure où l'appel d'offres est lancé, et nous ne voulons pas tout perturber.
Cela étant, soyez-en certaine, il y aura un jour des recours devant le Conseil d'Etat au nom du principe d'égalité, au nom du principe de l'égal accès au domaine public, qui appartient à toute la nation, et dont vous ne pouvez pas exclure 12 millions de citoyens pour faire plaisir à la bourse et à ceux qui veulent se payer les licences UMTS. Eh bien, si je suis encore vivant le moment venu, je serai parmi les premiers requérants, et je gagnerai ! (M. Gérard Delfau applaudit.)
Quoi qu'il en soit, je retire l'amendement n° 1 rectifié. (Rires et exclamations sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'était bien la peine !
Mais nous avons passé un bon moment...
M. le président. L'amendement n° 1 rectifié est retiré.
M. Michel Pelchat. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 1 rectifié bis .
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié bis , repoussé par le Gouvernement.
M. Michel Charasse. Je m'abstiens.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
Récemment, dans une église de Gênes, le portable du prêtre qui célébrait la messe s'est mis à sonner. Le prêtre a répondu. L'évêque l'a sanctionné. Voilà au moins une chose qui n'arrivera pas à M. Charasse ! (Rires.)
M. Michel Pelchat. Dans une église d'Auvergne, peut-être...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'y a aucun risque : il ne va pas à la messe ! (Nouveaux rires.)
M. le président. Par amendement n° 2 rectifié, MM. Charasse et Moreigne proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le réseau du Trésor public doit garantir l'accès normal et égal de tous les citoyens au service bancaire de base, service d'intérêt général assimilable à un service public. En conséquence, les recettes-perceptions du Trésor public sont tenues de maintenir leurs activités bancaires actuelles lorsque leur suppression réduirait, dans leur aire de compétences, le nombre d'établissements bancaires et financiers, y compris La Poste, à moins de deux. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Je constate, monsieur le président, qu'à Gênes on sanctionne un prêtre parce qu'il a répondu sur son portable mais qu'en France on laisse en place les curés pédophiles ! (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ça devient la galéjade permanente, ici !
M. Michel Charasse. Cet amendement n° 2 rectifié est destiné moins à faire l'objet d'un vote du Sénat qu'à obtenir quelques indications du Gouvernement quant à la situation qui va être créée à partir du 1er janvier 2002, lorsque le réseau du Trésor public n'aura plus le droit d'exercer d'activités bancaires.
Dans de très nombreux cantons ruraux, il n'y a pas de banque. Les seuls guichets dont disposent alors les citoyens pour leurs opérations financières et bancaires sont donc ceux de La Poste et du Trésor public. Or, pour des raisons auxquelles le Gouvernement est étranger puisque c'est une décision européenne, le Trésor public doit, sous peine de condamnation de la France, cesser ses activités bancaires le 1er janvier 2002.
La question que je pose au Gouvernement est donc simple : si le Trésor public ne peut plus exercer ses activités bancaires - et encore n'offre-t-il pas un service bancaire complet, notamment parce qu'il ne consent pas de prêts -, si les citoyens n'ont plus d'autre solution que de s'adresser à La Poste - laquelle n'offre pas non plus toute la panoplie des activités bancaires, je le précise au passage - que va-t-il se passer dans un cinquième des cantons français, c'est-à-dire les cantons ruraux, où la population est en moyenne relativement âgée ? Est-ce que les gens vont être obligés de parcourir 60 kilomètres, voire 80 kilomètres aller-retour pour retirer 300 francs ou 500 francs à La Poste du coin ou à la banque, s'ils ont un compte en banque ? Bref, comment va-t-on assurer l'égalité des citoyens devant le service bancaire, étant entendu qu'aucune banque, on le sait bien, ne s'installera jamais dans les cantons ruraux ?
Mon amendement a donc pour objet de prévoir que, lorsqu'il y a moins de deux établissements qui proposent des services bancaires dans un canton, le Trésor public peut poursuivre ses propres activités bancaires.
On me dit que, malgré cette restriction, l'Europe, dont l'humanité est en la matière très relative - et qui ne se rend certainement pas compte qu'avec des décisions de ce genre elle finira par faire vomir l'Europe par les Européens -, resterait inflexible.
Fort bien, mais qu'est-ce qui se passe le jour où le Trésor public ferme - et cela nous a été annoncé par le ministre, qui respecte les directives européennes - après le 31 décembre 2001 ? Qu'est-ce qui se passe le jour où le Trésor public n'exerce plus ses activités dans ces cantons ruraux ? Est-ce que les citoyens de ces cantons ruraux sont encore des citoyens à part entière ou bien des citoyens à part réduite ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous comprenons bien à quelle situation difficile cet amendement fait allusion, et il est vrai que la politique d'aménagement du territoire est actuellement tout à fait insuffisante, que la défense de la ruralité est mal assurée : tout cela se paie par des déséquilibres graves, dont notre pays souffre et va souffrir de plus en plus si l'on n'y prend garde.
Cela étant dit, cher collègue, à quelles conséquences votre amendement conduit-il ? Je n'en sais trop rien. Est-il concevable de supprimer les activités bancaires ou quasi bancaires du Trésor public sauf dans les zones les plus déprimées, celles où, par définition, il y a le moins de clients ? Combien cela coûte-t-il ? Est-ce cohérent avec la nécessité d'une réforme de l'administration des finances que tout le monde, ou presque, semble appeler de ses voeux ? Est-ce cohérent, notamment, avec les travaux de notre commission ? Je pense en particulier ici à l'excellent rapport de Bernard Angels sur l'évolution des services financiers.
Il est relativement facile de susciter des réactions favorables sur la prise en compte de situations qui sont objectivement difficiles mais, au stade des solutions, au-delà des effets d'affichage, les choses paraissent un peu plus complexes. Aussi, pour mieux apprécier cette complexité, je souhaite entendre Mme le secrétaire d'Etat.
M. le président. Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cette question a retenu évidemment toute l'attention du Gouvernement parce qu'elle est importante : il s'agit de la présence des services publics de proximité en milieu rural.
Le présent amendement appelle de ma part plusieurs remarques.
La première, de forme, tient au fait que, sur le plan juridique, il ne paraît pas pouvoir s'insérer dans une loi de finances car son objet ne s'inscrit pas strictement dans le cadre de l'article 1er de l'ordonnance de 1959 portant loi organique.
En ce qui concerne le fond - et c'est cela qui nous intéresse - la décision de mettre un terme à l'activité bancaire concurrentielle du Trésor public a été prise à la suite, d'une part, d'études relatives aux fondements juridiques et comptables de l'intervention du Trésor public en matière bancaire et, d'autre part, des critiques formulées par la Cour des comptes depuis plusieurs années à l'encontre de cette activité, et ce compte tenu des contraintes prudentielles, concurrentielles et, notamment, des obligations communautaires qui s'imposent à nous.
Nous avons donc été conduits à envisager l'interdiction, pour le Trésor public, de poursuivre ses activités bancaires, car aucune autre solution satisfaisante ne permettait de concilier les impératifs de régularité juridique, de régularité budgétaire et de régularité comptable, ainsi que de viabilité financière, qui formaient le cadre dans lequel nous devions travailler.
Le maintien d'une activité bancaire en milieu rural ne me paraît pas pour autant directement menacé, car, avec un total de 43 000 guichets bancaires, y compris ceux de La Poste, et 2 300 habitants par guichet - certes, c'est une moyenne - la France dispose d'une densité bancaire importante, plutôt légèrement supérieure à celle que connaissent les autres pays de l'Union européenne. Au-delà de cette moyenne, il faut regarder la cartographie de la densité bancaire pour 1 000 habitants : celle-ci montre que le taux de bancarisation des zones rurales est plus élevé que celui des zones urbaines.
Nous avons poursuivi notre étude et nous avons noté que, dans la quasi-totalité des départements les plus ruraux de France, la présence d'établissements financiers - dont La Poste, qui comporte environ 17 000 guichets - est assurée au niveau du canton, ce qui garantit, vous en conviendrez, une offre de prestations bancaires que l'on peut qualifier de proximité. (M. Michel Charasse s'exclame.)
Dans quatre départements extrêmement ruraux qui ont été plus particulièrement étudiés - il s'agit du Gers, des Hautes-Alpes, du Cantal et de la Lozère - les habitants bénéficient, dans la commune même où est implanté le Trésor public, de services bancaires proposés par d'autres organismes financiers.
Ces remarques étant faites, je souhaite indiquer, monsieur le sénateur, que nous comprenons votre amendement comme une incitation pour le Gouvernement à porter une attention toute particulière aux conditions de mise en oeuvre de l'arrêt de l'activité bancaire du Trésor public à compter du 1er janvier 2002,...
M. Michel Charasse. C'est exactement cela !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... ce afin de tenir compte, notamment, de la situation des personnes qui vivent en milieu rural et qui doivent continuer à disposer d'un service bancaire de qualité et de proximité.
Par conséquent, Laurent Fabius et moi-même avons demandé au Trésor public de proposer très rapidement un dispositif d'accompagnement personnalisé à chacun des titulaires de comptes de dépôts de fonds particuliers. Ce dispositif aura trois objets : tout d'abord, limiter et simplifier le plus possible les démarches de titulaires de comptes en prenant notamment en charge les formalités liées au changement de domiciliation bancaire ; nous savons combien ces opérations peuvent parfois être lourdes ; ensuite, offrir à ces personnes un choix réel entre plusieurs établissements ; enfin, limiter les éventuelles incidences financières qui pourraient en résulter.
Nous ne doutons pas que, de son côté, La Poste s'attache à renforcer la qualité des prestations d'ores et déjà servies à ses clients, particulièrement lorsqu'ils résident en milieu rural.
Pour ce qui me concerne, j'espère vous avoir convaincu du fondement de notre démarche et de notre souci permanent de maintenir, voire de renforcer la qualité du service public en milieu rural en centrant, comme cela me paraît légitime, l'activité des administrations sur le service public, ce qui n'est pas à proprement parler, vous en conviendrez, la caractéristique de l'activité bancaire.
Je souhaite donc, monsieur le sénateur, qu'à la lumière des explications que je viens de vous apporter vous retiriez cet amendement.
M. le président. Monsieur Charasse, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Charasse. Je sais que cette question de l'arrêt des activités bancaires du Trésor public préoccupe beaucoup M. Laurent Fabius et Mme Florence Parly. Ce n'est pas une querelle que j'ai avec eux puisqu'ils ne sont pas à l'origine de cette affaire, qui est partie de la Cour des comptes et a été relayée par l'Union européenne.
J'ai bien entendu ce qu'a dit Mme le secrétaire d'Etat et, pour être moi-même titulaire d'un compte de dépôt de fonds particulier, je reçois les courriers qui sont adressés pour expliquer comment cela va se passer.
Madame le secrétaire d'Etat, il y a quand même un problème qu'il faut prendre en compte et qui ne figurait pas dans votre propos, c'est celui de la distance. Que l'on aide les titulaires de comptes de dépôts de fonds particuliers à choisir une autre solution, un autre compte, une autre banque, un autre organisme financier, etc., c'est très bien, notamment pour les personnes âgées. Mais si ceux-ci doivent passer d'une perception qui se trouve à cinq ou dix kilomètres de chez eux à une banque qui est à quarante ou cinquante kilomètres, je ne vois pas très bien où est l'avantage.
Je voulais simplement, au travers de cet amendement, sensibiliser le Gouvernement à cette question. En effet, la fermeture des perceptions, qui détiennent actuellement 700 000 ou 800 000 comptes, va intervenir un mois et demi avant le changement de billets de banque dans le cadre de l'euro. Tout ou presque en même temps, madame le secrétaire d'Etat, cela fait beaucoup ! S'agissant de l'Europe, à laquelle je suis personnellement très attaché, cela fait beaucoup. Ce n'est peut-être pas le meilleur moyen de démontrer à des gens qui ont mis presque cinquante ans pour se familiariser au nouveau franc que l'Europe est un bienfait.
Cela étant, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. Gérard Delfau. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 2 rectifié bis.
Le débat ayant déjà eu lieu, je vais le mettre aux voix.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je comprends parfaitement que, dans cette affaire, nous devions accepter le règlement communautaire. Toutefois, cet amendement rappelle que deux difficultés majeures subsistent.
La première, qui a été sensible dans tout votre propos, madame le secrétaire d'Etat, c'est que l'on surcharge La Poste, qui doit assurer une présence permanente soit dans les lieux les moins peuplés - les cantons ruraux - soit dans les quartiers urbains difficiles. Il s'agit d'une question récurrente, madame le secrétaire d'Etat, et il faudra bien que le Gouvernement la prenne en compte et nous fasse des propositions à cet égard dans l'année à venir.
J'en arrive à la deuxième difficulté. Le Gouvernement a annoncé, lors d'un débat au Sénat au mois de novembre 2000, que le décret concernant la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions s'agissant du service bancaire de base paraîtrait au Journal officiel. Cette loi - vous n'y êtes pour rien, madame le secrétaire d'Etat - a été votée par le Parlement en 1998. Or, de mois en mois, nous attendons, nous guettons, nous lisons avec intérêt le Journal officiel - cette lecture est passionnante ! - mais rien ne vient.
Je n'adhère pas au fond de l'amendement, pour les motifs que je viens de donner, mais je souhaitais rappeler ces deux éléments. Je sais que Mme le secrétaire d'Etat a conscience du fait que les deux questions que je pose sont deux vraies questions. Je retire donc cet amendement, monsieur le président. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié bis est retiré.
En fait, monsieur Delfau, vous avez repris l'amendement afin de pouvoir disposer d'un temps de parole.
Vous ne m'y reprendrez pas ! (Sourires.)
Par amendement n° 7, M. Pelchat et le groupe des Républicains et Indépendants, MM. Mouly, Joly, Oudin, Legendre, Donnay et Herment proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est complété par les mots : ", et sous réserve que les dispositions suivantes ne soient pas contraires au principe d'égalité devant les charges publiques". »
La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat. Il s'agit pour moi non pas d'obtenir un temps de parole, mais bien de défendre une position que j'avais déjà eu l'occasion d'expliciter lors du débat sur le projet de loi de finances.
L'Assemblée nationale vient de supprimer une nouvelle fois l'amendement, pourtant adopté à l'unanimité par le Sénat, mettant un terme au taux réduit de TVA pour les produits alimentaires tels que le chocolat ; nombre de mes collègues s'en souviennent.
C'est plus qu'une simple différence d'appréciation entre le Sénat et l'Assemblée nationale sur l'opportunité d'une baisse de TVA : pour le Sénat, il s'agit de faire appliquer le principe à valeur constitutionnelle d'égalité devant les charges publiques ; pour l'Assemblée nationale, il s'agit de passer outre ce principe pour considérer que cette situation, qui fait pourtant l'objet de débats année après année, et qui n'a jamais reçu la moindre justification, soit maintenue en l'état pour des raisons budgétaires. On ne peut pas violer les principes constitutionnels parce que les faire respecter aurait un coût important !
Lorsque la Cour de justice des Communautés européennes, au nom des mêmes principes, impose la TVA sur les péages autoroutiers ou la récupération de la TVA sur la restauration pour les entreprises, cela a un coût, et le budget de l'Etat s'adapte pour respecter les principes généraux du droit.
L'amendement présenté aujourd'hui s'inscrit dans le même souci de vérifier si le principe d'égalité devant les charges publiques est ou non respecté en matière d'exceptions au taux réduit de TVA pour les produits alimentaires.
Lors de la discussion d'un amendement similaire dans le cadre du projet de loi de finances, M. Charasse a défendu l'idée que s'il y avait eu un problème de constitutionnalité le Conseil constitutionnel l'aurait sanctionné lors de l'adoption des exceptions à la TVA réduite sur les produits alimentaires.
C'est oublier que, dans les années soixante, lorsque fut adopté l'article 278 bis du code général des impôts, le Conseil constitutionnel ne pouvait pas être saisi aussi aisément qu'aujourd'hui, de sorte qu'il n'a jamais pu se prononcer sur les exceptions qui frappent le chocolat et la margarine.
L'amendement proposé devrait lui donner la possibilité d'exercer ce contrôle pour dire si ces exceptions respectent ou non le principe d'égalité devant les charges publiques.
Cet amendement permet également de redonner la main à nos institutions nationales face à Bruxelles, qui finit par détenir une exclusivité en termes de contrôle du droit positif français au regard des principes généraux du droit.
S'agissant de souveraineté nationale et de subsidiarité, il est particulièrement insatisfaisant de constater que c'est la Cour de justice des Communautés européennes qui vient imposer le respect du principe d'égalité devant les charges publiques et celui de la neutralité de la TVA en matière de péages ou de TVA de la restauration, avec pourtant un coût budgétaire de plusieurs milliards de francs, alors que le Conseil constitutionnel aurait toute compétence pour vérifier le respect de ces mêmes principes dans notre droit interne.
Faut-il que ce soit des institutions communautaires qui mettent de l'ordre dans notre droit, ou peut-on souhaiter que nos propres institutions nationales puissent le faire ? Tel est bien le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances est naturellement très attachée au principe d'égalité devant les charges publiques. Dès lors, elle ne peut s'opposer à l'amendement qui a été fort excellement présenté par notre collègue, lequel a rappelé opportunément les débats que nous avons déjà eus lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2001.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous avons eu, en effet, cette discussion lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001. Le Gouvernement avait alors émis un avis défavorable, pour au moins deux raisons.
Tout d'abord, cet amendement n'apporte aucune modification réelle au code général des impôts. Par conséquent, il n'a pas de portée normative et n'a donc pas vocation à figurer dans la loi.
Ensuite, et surtout, les mesures proposées ont plutôt pour objet d'adresser une sorte d'injonction au Conseil constitutionnel,...
M. Michel Pelchat. Ce n'est pas une injonction !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... ce qui me paraît bien délicat. Il s'agit, en effet, d'invoquer devant la Haute juridiction...
M. Michel Pelchat. Offrir une possibilité, ce n'est pas faire obligation !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. C'est une possibilité d'invocation devant la Haute Juridiction, pour être tout à fait exacte, monsieur le sénateur,...
M. Michel Pelchat. Voilà !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... de la non-conformité d'une loi promulguée à l'occasion d'une saisine qui tend à faire échec à une disposition législative nouvelle ce qui suppose que cette disposition nouvelle modifie un texte antérieur, et ce n'est pas le cas ici.
Enfin, si, comme M. le rapporteur général, je suis très attachée au respect du principe de l'égalité devant l'impôt, en l'espèce, ce principe s'apprécie en fonction de la situation des personnes et non en fonction de la qualité des produits, fussent-ils aussi dignes d'intérêt que le chocolat.
Dans ces conditions, je souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
Par amendement n° 49, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La dotation comprend également les sommes reçues au titre du surclassement des communes dont le territoire est situé dans le périmètre de plans d'exposition au bruit. »
« II. - Le taux prévu à l'article 978 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Par cet amendement, nous revenons sur une question que nous avions déjà abordée la semaine dernière, lors de la discussion des articles non rattachés de la deuxième partie du projet de loi de finances, celle des contraintes de développement rencontrées par les communes situées à proximité des grands aéroports internationaux de Paris, qu'il s'agisse d'Orly ou Charles-de-Gaulle, à Roissy.
Dans sa version précédente, cet amendement tendait à majorer le montant des sommes centralisées dans le fonds de compensation qui a été créé par la loi de finances rectificative pour 1999, fonds destiné à aider les communes riveraines à faire face, dans leurs investissements et dans leurs choix d'aménagement, aux contraintes nées de la pollution par le bruit.
Cette semaine, c'est dans une autre direction que nous invitons nos collègues à réfléchir.
En effet, nous proposons, par cet amendement, que les communes riveraines d'aéroports bénéficient d'un surclassement au titre de la dotation globale de fonctionnement leur permettant de récupérer une partie des moyens que le gel du développement du territoire le plus directement exposé au bruit, en pratique celui qui est situé en zone A, ne leur permet plus ou pas d'avoir.
On le voit dans certaines communes du Val-d'Oise ou du Val-de-Marne, on ne peut plus continuer à mener une politique de développement urbain harmonieuse quand on est soumis à une polution sonore telle - de 115 à 120 décibels - que la population résidente finit par quitter les lieux.
C'est le cas d'une commune comme Villeneuve-le-Roi qui a connu, entre les deux derniers recensements, une baisse de 10 % de sa population, avec toutes les conséquences que cela peut avoir, notamment sur le subtil échafaudage des dotations aux collectivités locales.
Une mesure comme celle que nous proposons est, au demeurant, déjà largement prise en compte en matière de dotation globale de fonctionnement quand il s'agit, par exemple, d'établissements ou d'infrastructures militaires, d'établissements de santé ou d'établissements pénitentiaires.
Sur le fond, adopter cette mesure permettrait de rendre justice à ces collectivités qui n'ont guère tiré jusqu'ici de retombées positives de la présence des grandes plates-formes aéroportuaires.
Enfin, l'adoption de cet amendement pourrait anticiper la mise en chantier du futur troisième aéroport parisien ou les conséquences d'une autre utilisation de certains de nos grands aéroports de province.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On n'a pas besoin d'un troisième aéroport !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un dispositif spécifique pour traiter de situations très locales.
La commission n'a pas été absolument convaincue par l'argumentation présentée.
De plus, le gage proposé ne lui paraît pas acceptable.
Son avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il est défavorable, dans la mesure où cet amendement va à l'encontre de la philosophie qui sous-tendait la réforme de la dotation forfaitaire de la DGF intervenue en 1993.
Je rappelle qu'il s'agit d'une dotation libre d'emploi. On ne peut donc l'affecter, comme le suggèrent les auteurs de cet amendement, à une destination particulière pour compenser des nuisances spécifiques - des nuisances tout à fait réelles, en l'occurrence, puiqu'il s'agit de celles que subissent les communes riveraines d'aéroports - sauf à susciter d'importantes demandes reconventionnelles de la part d'autres communes, exposées, elles aussi, à d'autres types de désagréments.
Comme Mme Beaudeau le sait, deux fonds de compensation des nuisances aéroportuaires ont été mis en place en 1999. Ils sont dotés de plus de 60 millions de francs. Il me paraît donc un peu prématuré d'envisager des mesures nouvelles supplémentaires, alors même qu'il n'a pas encore été matériellement possible d'établir le moindre bilan des dispositions adoptées dans la loi de finances rectificative pour 1999.
Au-delà du problème que vous soulevez, il en existe un autre, celui de la réforme de la DGF, notamment la dotation forfaitaire. Ce problème, d'ordre plus général, sera posé dans le cadre de la réflexion annoncée par le Premier ministre sur la structure des dotations de l'Etat aux collectivités locales.
Pour toutes ces raisons, madame Beaudeau, je souhaite que vous retiriez cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 49.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous avons souvent abordé ce problème des nuisances constatées autour des deux grands aéroports parisiens, mais je me dois d'éclairer une fois de plus le Sénat ainsi que vous, madame le secrétaire d'Etat. Cela étant, ce débat aura lieu à un autre échelon, très certainement gouvernemental.
Tout le monde doit bien comprendre de quoi nous parlons quand nous évoquons les nuisances sonores autour d'Orly et, surtout, de Roissy, que je connais mieux.
Il est vrai que des mécanismes de compensation financière existent, fondés sur le potentiel fiscal pour un certain nombre de communes concernées par de fortes nuisances aéroportuaires ; c'est l'article 37 de la loi du 30 décembre 1999. Cependant, un an après, aucun versement n'est encore intervenu. De premières notifications sont faites par Aéroports de Paris sur une partie des sommes estimées et promises, de l'ordre de 50 %. La loi n'est donc pas encore pleinement appliquée, aucune notification de la compensation provenant de l'Etat ne nous ayant été communiquée.
Par ailleurs, depuis un an, autour de Roissy, les nuisances se sont accentuées. Le nombre des vols s'est accru de près de 10 % en ce qui concerne les passagers, mais d'autant en ce qui concerne le fret, ce qui ne va pas manquer de créer une situation nouvelle beaucoup plus grave. Ainsi, une compagnie étrangère comme Fedex envisage de créer un hub nocturne, tant l'accroissement des vols se précise, alors même que le gouvernement Juppé avait exonéré Fedex de taxe professionnelle, décision toujours en vigueur aujourd'hui, madame le secrétaire d'Etat. La nécessité d'agir contre les nuisances s'est donc confirmée.
A Roissy, toujours, l'étude assurée par la mission de Roissy sur la réhabilitation des bourgs anciens touchés par les nappes de nuisances est achevée.
Je le répète, cette étude est de grande qualité. Elle vise à permettre à ces bourgs dégradés, ayant perdu leurs commerces et une partie de leur population, de redéfinir les conditions d'une survie et d'activités nouvelles leur permettant de sortir d'une léthargie, de plus en plus paralysante et de préparer leur renaissance. Or, madame le secrétaire d'Etat, aucun financement n'a été signifié aux communes concernées pour ces opérations de « renaissance » ; aucune promesse, aucune décision n'est encore intervenue.
En outre, autour d'Orly et de Roissy, sous l'effet des nuisances et des contraintes d'urbanisme, des phénomènes de départ ou de paupérisation d'une partie de la population ont pour conséquence la non-éligibilité de certaines communes à diverses mécanismes de solidarité financière comme la dotation de solidarité urbaine ou le fonds national de péréquation.
Enfin, le retard dans la publication d'un nouveau plan d'exposition au bruit attendue depuis quatre ans devient insupportable. Où se situent les zones A, B, C, D d'interdiction ou de réduction du droit à construire ? On l'ignore. Les élus n'en sont toujours pas informés. Ils les supposent, et cela les conduit à arrêter leurs programmes de construction et d'implantation nouveaux habitants.
A ce propos, et je veux éclairer mes collègues, nous ne pouvons pas admettre les affirmations qu'on entend ici ou là, et que l'on a pu lire dans un grand journal du dimanche, avant-hier, sur une page entière, selon lesquelles le plan d'urbanisme du SIEVO, le syndicat intercommunal des trente-deux communes les plus exposées autour de Roissy, prévoirait 15 000 logements autour de l'aéroport.
Cette affirmation est contraire aux décisions des communes qui, d'elles-mêmes, dans la plupart des cas, ont stoppé les programmes de développement de leur ville. Je voudrais dénoncer de tels propos, en ajoutant que les communes et le SIEVO doivent plutôt résister aux incitations de l'Etat, qui les pousse à construire de nouveaux logements sociaux dans cette région.
Souvent les décisions prises par les communes sont lourdes de conséquences. Des ZAC équilibrées et qui le seraient restées avec les constructions et ventes prévues vont avoir à gérer des déficits, dont il serait injuste que les populations déjà touchées par les nuisances fassent les frais.
Ces déficits peuvent être estimés à un million de francs pour 1 000 mètres carrés à construire. Qui paiera ? L'Etat a approuvé l'équilibre financier des programmes. Il prend la responsabilité de stopper ces opérations à juste titre ; mais il doit en assumer les conséquences financières.
Vous le voyez bien, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, tout commande que des aides financières de l'Etat viennent apporter des ressources nouvelles aux communes concernées, et ce évidemment sans attendre.
C'est pourquoi je maintiens l'amendement n° 49, que nous avions déjà déposé lors de la discussion du projet de loi de finances.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 49, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 61, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1522 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 2002, l'assiette de la taxe est égale au revenu net servant de base à la taxe foncière divisé par le nombre d'habitants de la commune ou, le cas échéant, de l'établissement public de coopération intercommunale, multiplié par le nombre d'habitants de la propriété imposée. »
« II. - Le Gouvernement déposera en annexe au projet de loi de finances pour 2002 un rapport relatif aux résultats de l'application des dispositions du dernier alinéa de l'article 1522 du code général des impôts dans sa rédaction résultant des dispositions du I ci-dessus.
« III. - La perte de recettes éventuelle pour les collectivités locales résultant de la modification de l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties prévue au I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.
« IV. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des dispositions du III est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 83, présenté par M. Miquel, et tendant à supprimer les III et IV du texte proposé par l'amendement n° 61.
La parole est à M. Charasse, pour défendre l'amendement n° 61.
M. Michel Charasse. Au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, nous avons été saisis par notre collègue M. Miquel d'un amendement mais surtout d'un problème que cet amendement tentait de résoudre : il s'agit des modalités de calcul de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, un impôt qui se surajoute, comme vous le savez tous, au foncier bâti dans les groupements de communes.
Lorsque les groupements de communes, et je parle sous le contrôle de notre collègue M. Miquel, qui a bien étudié cette question, décident de percevoir la taxe à la place des communes, la taxe est assise sur le foncier bâti. Mais tout le monde sait que les évaluations des bases d'imposition au foncier bâti sont tellement disparates d'une commune à l'autre que, d'un côté à l'autre de la rue, pour le même service et pour la même prestation, la taxe réclamée peut varier du simple au double !
Le Gouvernement avait parfaitement compris cette situation.
La solution proposée par M. Miquel n'était pas la meilleure - nous sommes les uns et les autres quelquefois réduits à préparer des amendements à toute allure ! - et nous ne l'avons pas gardée, tout en retenant le problème, bien réel, que posait notre collègue.
J'ai donc essayé de trouver, ou plutôt de proposer - soyons modestes - une solution qui consisterait à asseoir désormais la taxe sur une valeur locative du foncier bâti qui soit égale à la moyenne par habitant de la valeur locative de l'ensemble du foncier bâti dans l'ensemble du groupement de communes.
Je ne sais pas du tout ce que cela peut donner. J'ai le sentiment que cela rabote beaucoup les inconvénients actuels, c'est-à-dire que les différences d'une commune à l'autre seraient moins fortes. Il n'empêche que, d'une année sur l'autre, quand on passera au nouveau système, il pourra y avoir une forte augmentation.
C'est pourquoi, madame le secrétaire d'Etat, j'ai suggéré que ce système ne soit appliqué qu'en 2002 - c'est l'objet de l'amendement n° 61 - et que, préalablement, le Gouvernement nous présente une simulation. Si la solution que je propose se révèle acceptable, elle pourra, le moment venu, être confirmée par le Parlement. En revanche, si elle se révèle mauvaise - vous le voyez, monsieur le président, je suis modeste ! - il faudra alors chercher une autre solution.
Cet amendement a simplement pour objet d'essayer de contribuer à la recherche de la solution parce que l'intercommunalité, à laquelle, si je m'en tiens à ce qui a été dit tout à l'heure, nous sommes tous très attachés, est menacée sur ce plan dans le système actuel. En effet, le passage de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères à l'échelon de l'agglomération ou de la communauté, alors qu'elle était établie commune par commune jusqu'à présent, est absolument impossible et aboutit à réclamer aux contribuables des sommes qui suscitent de leur part non seulement des interrogations mais aussi, véritablement, une protestation.
Ce qui m'intéresse, c'est de savoir ce que pense le Gouvernement de la formule que je suggère et, surtout, s'il serait d'accord pour procéder à des simulations. C'est l'objet du paragraphe II de mon amendement, étant entendu que, pour 2001, nous prendrions, le moment venu et au vu desdites simulations, les décisions nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Miquel, pour défendre le sous-amendements n° 83.
M. Gérard Miquel. La solution proposée par M. Michel Charasse me paraît intéressante. Toutefois, je considère que l'on peut très facilement supprimer les paragraphes III et IV de son amendement, qui représentent en fait le gage. En effet, il s'agit là d'une recette attendue et, étant donné le système de calcul que l'on met en place, nous n'avons pas à prévoir de gage dans cet amendement.
Je veux, une fois encore, revenir sur l'intérêt que présente un nouveau dispositif en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères. En effet, depuis l'entrée en application de la loi de 1992, les collectivités ont été contraintes de mettre en place des systèmes de traitement répondant aux normes environnementales, ce qui est bien normal. En 2002, échéance fixée par cette loi, les dispositifs de traitement des déchets qui auront été mis en place couvriront la quasi-totalité de notre territoire.
Le coût du traitement ayant beaucoup augmenté, les collectivités, surtout dans des départements à faible densité de population, sont actuellement obligées de se regrouper dans le cadre de syndicats intercommunaux ou de communautés de communes pour gérer le problème des déchets. C'est là que se situe l'inconvénient de la différence des bases, qui aboutit, pour le paiement d'un même service, à un écart pouvant varier de un à trois pour la même habitation. Cela n'est donc pas supportable. En l'occurrence, il s'agit d'une injustice fiscale, à laquelle nous devons mettre un terme.
L'amendement qui est proposé par M. Michel Charasse va dans le bon sens. Il nous permet de prendre un peu de temps pour s'assurer qu'il peut être mis en application et, si tel est le cas, qu'il ne bousculera pas trop les recettes des collectivités, en particulier celles qui appliquent la taxe sur des bâtiments commerciaux ou industriels. Mais ces dernières peuvent instaurer la redevance spéciale pour compenser la perte de recettes consécutive à la mise en oeuvre de ce dispositif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 61 et sur le sous-amendement n° 83 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons déjà eu l'occasion de débattre de ce sujet lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, à l'occasion d'un amendement présenté par M. Miquel.
En l'occurrence, il s'agit des modalités de calcul de l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Comme chacun le sait, il existe deux modalités de financement : la taxe et la redevance.
La redevance, par définition, est proportionnelle au service, mais elle pose des problèmes d'administration et de recouvrement, notamment pour les communes rurales, et elle suppose que l'on se dote d'un échelon administratif approprié.
S'agissant de la taxe, son rattachement à l'assiette de la taxe foncière engendre en effet des difficultés ou des iniquités. Dans les propositions faites par M. Michel Charasse, la séparation entre locaux habités et ceux qui ne le sont pas est une nécessité ; cela semble tomber sous le sens. Sur cet aspect, nous voudrions, madame le secrétaire d'Etat, que vous puissiez nous donner des assurances.
Par ailleurs, il paraît intéressant d'asseoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le nombre d'habitants des immeubles assujettis, car on a tendance à considérer que plus le nombre d'habitants est élevé plus le volume de déchets est important. Ce faisant, on se rapproche plutôt d'une logique de redevance que d'une logique de taxe.
Vous avez raison de dire que des simulations sont nécessaires. En effet, il va falloir voir en grandeur réelle comment le dispositif s'applique dans des communes qui feront l'objet de ces simulations. Il faut bien avoir présent à l'esprit que ce dispositif sera favorable aux personnes âgées vivant seules dans une grande maison et défavorable aux familles nombreuses occupant une petit appartement. Je ne sais pas si cette disposition vous paraîtra toujours aussi sociale lorsque vous disposerez des résultats des simulations.
En résumé, madame le secrétaire d'Etat, que pouvez-vous nous dire sur la séparation des locaux habités et des locaux non habités ? Que pouvez-vous nous dire sur les simulations portant sur la possibilité de mise en oeuvre de l'hypothèse envisagée par M. Charasse ? S'agissant de l'ensemble du dispositif et de la nécessité de procéder à un réexamen des bases de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, pouvez-vous nous assurer de la bonne volonté du Gouvernement de travailler, le cas échéant avec le Sénat, pour aboutir à des textes plus satisfaisants ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cet amendement a pour objet de modifier les modalités de calcul de l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui constitue, avec la redevance et la subvention directe du budget de la commune, l'une des trois possibilités dont dispose une collectivité locale pour financer ce service.
Nous connaissons tous les critiques qui sont faites à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui est assise sur le revenu servant la base au calcul de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Ces critiques sont les suivantes : le poids croissant dû aux investissements qui sont réalisés par les collectivités locales pour la collecte et le traitement des déchets, l'imposition de locaux non productifs de déchets, l'absence d'adéquation entre la taxe payée par chaque contribuable et le service qui lui est rendu, encore que, sur ce point, la taxe ne soit pas, contrairement à la redevance, directement liée à l'importance du service rendu.
Comme le démontrent amplement les amendements qui ont été déposés lors de la présente session, en particulier par M. Miquel, le développement rapide de l'intercommunalité qui est souhaité par le Gouvernement pose aussi, j'en suis bien consciente, des problèmes de répartition des compétences et des produits entre les communes et les groupements malgré l'effort de rationalisation qui a été entrepris dans le cadre de la loi de juillet 1999.
Tout cela nous interpelle et votre amendement, monsieur le sénateur, permet d'amorcer une réflexion sur les problèmes soulevés par cette taxe. Si je vous comprends bien, il s'agirait donc de moduler le montant de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères en fonction du nombre d'habitants des locaux imposables. L'idée est empreinte de bon sens, c'est le moins que l'on puisse dire. Cependant, le mécanisme que vous avez envisagé conduit à s'interroger sur un certain nombre de points.
D'abord, tel qu'il est rédigé, l'amendement conduirait donc à diviser le revenu servant de base à la taxe foncière de chaque local par le nombre d'habitants de la collectivité, et donc à obtenir une base d'imposition faible. Si la collectivité est très peuplée, l'assiette de la taxe sera déterminée à partir d'un montant inférieur à un franc et comportant de nombreux chiffres après la virgule. Converti en euros, les chiffres après la virgule seront encore plus nombreux.
Si, en revanche, vous souhaitez déterminer une base moyenne communale par habitant...
M. Michel Charasse. Ou intercommunale !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En effet !
Si vous souhaitez déterminer, disais-je, une base moyenne au sein d'un intercommunalité qui serait multipliée par le nombre d'habitants du local imposable, cette proposition pénaliserait les familles avec des enfants occupant des locaux modestes. Nous devons y être attentifs. C'est, je le sais, un point qui retient toute votre attention.
Il faudrait ensuite définir le nombre d'habitants de la collectivité. On peut, pour cela, se référer au dernier recensement. Il faudrait aussi définir le nombre d'habitants de la propriété imposée, en se référant, par exemple, à la notion de foyer fiscal en matière d'impôt sur le revenu.
Enfin, on ne voit pas très bien comment votre proposition s'appliquerait à la taxe due par les propriétaires de locaux à usage industriel ou commercial.
Aussi, je considère votre amendement comme un amendement d'appel (M. Michel Moreigne opine) qui soulève une très bonne question. Cependant, le dispositif qu'il prévoit présente encore quelques faiblesses sur le plan technique. (M. Michel Charasse fait un signe d'assentiment.) Au fond, peu importe, puisque la réflexion est lancée.
Comme je le disais en introduction de mon propos, cette réflexion me paraît devoir être élargie au fonctionnement de la taxe dans le cadre de l'intercommunalité. Dans ce contexte, vous proposez de procéder à des évaluations qui conduiraient à l'établissement d'un rapport. Pour ma part, je suggère que nous constituions un groupe de travail associant des représentants du ministère des finances, du ministère de l'intérieur et des membres du comité des finances locales, autour d'un thème qui pourrait être « l'adaptation de la taxe et de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères au financement du service rendu et à l'évolution des structures intercommunales ».
Plutôt qu'un rapport qui risquerait de ne pas être conclusif, nous pourrions, dans le cadre de ce groupe de travail, progresser vers une solution, car c'est, je crois, ce que vous attendez tous, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez dans cet hémicycle.
Compte tenu de cette suggestion, dont vous pourriez accepter le principe, je vous demande, monsieur Charasse, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Charasse, accédez-vous à la demande de Mme le secrétaire d'Etat ?
M. Michel Charasse. Oui, monsieur le président, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 61 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 83 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 65, M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés propose d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 5334-7 du code général des collectivités territoriales est ainsi complété :
« 1) Après la référence : "1472 A", la fin du premier alinéa et du dernier alinéa est ainsi rédigée : ", 1472 A bis du code général des impôts et au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999" ;
« 2) Dans le dernier alinéa du 1°, avant les mots : "égal à 70 %", sont insérés les mots : "au moins" ;
« 3) Après le dernier alinéa du 1° sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le conseil d'agglomération ou le comité syndical peut, à la majorité des trois quarts de ses membres, décider d'abonder ce prélèvement.
« Cette disposition n'est pas applicable lorsque la communauté ou le syndicat d'agglomération nouvelle bénéficie, ou a bénéficié, depuis moins de cinq années, d'avances remboursables accordées par l'Etat afin d'équilibrer son budget de fonctionnement. »
« II. - L'article L. 5334-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi complété :
« 1) Le troisième alinéa est complété par les mots : "sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 5334-8-1" ;
« 2) Le premier alinéa du 3° est complété par les mots : "sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 5334-8-2" ;
« III. - Après l'article L. 5334-8 du code général des collectivités territoriales, sont insérés deux articles ainsi rédigés :
« Art. L. 5334-8-1. - Le conseil d'agglomération ou le comité syndical peut, à la majorité des trois quarts de ses membres, décider de majorer l'attribution de péréquation mentionnée au 3° de l'article L. 5334-8. Dans ce cas, l'ordre de priorité des attributions prévues aux 2° et 3° de l'article L. 5334-8 est inversé.
« Art. L. 5334-8-2. - Le conseil d'agglomération ou le comité syndical peut, à la majorité des trois quarts de ses membres, modifier ou compléter les critères prévus pour l'attribution de péréquation mentionnée au 3° de l'article L. 5334-8, ainsi que leur pondération, afin de renforcer le caractère péréquateur de cette attribution. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Cet amendement vise à répondre à un problème auquel sont confrontés les syndicats d'agglomération nouvelle qui présentent la double caractéristique d'une augmentation de leur population et d'un affaiblissement, voire d'un recul, du produit de leur taxe professionnelle. Il nous semble, madame la secrétaire d'Etat, que cette difficulté pourrait être surmontée par la mise en place d'un dispositif à travers lequel la péréquation serait plus marquée que ne le prévoient les dispositions législatives actuelles. Il va de soi, bien sûr, que ce dispositif ne saurait être appliqué sans l'assentiment des communes membres du syndicat concerné.
L'amendement que nous présentons est le résultat d'une réflexion sur le caractère sans doute trop contraignant des règles actuelles, qui ne sont pas forcément adaptées à la spécificité de chaque collectivité.
D'ailleurs, les établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique et, en particulier, les communautés d'agglomération bénéficient d'une application sensiblement plus souple.
Nous proposons donc d'augmenter la part de la dotation de coopération qui est réservée à la péréquation. Actuellement, la dotation de coopération comprend trois attributions versées dans l'ordre de priorité suivant : attribution de garantie de ressources, attribution pour accroissement de population, attribution de péréquation.
Pour favoriser la péréquation, l'amendement prévoit donc d'aménager, dans le sens d'un assouplissement, les critères servant à la répartition de l'attribution de péréquation. Pour ce faire, il s'agit de permettre au conseil d'agglomération ou au comité syndical d'accroître le pourcentage de taxe professionnelle que le syndicat d'agglomération nouvelle veut injecter dans le dispositif. Ainsi, le comité syndical pourrait, à la majorité des trois quarts de ses membres, décider de majorer l'attribution de péréquation, inversant par là même l'ordre de priorité des attributions que j'ai mentionné à l'instant.
Dans un souci de cohérence et de responsabilité, nous avons souhaité, vous le comprendrez fort bien, limiter cette disposition aux syndicats n'ayant pas bénéficié, au cours des cinq années précédentes, d'avances remboursables accordées par l'Etat afin d'équilibrer leur budget de fonctionnement.
Nous connaissons, madame la secrétaire d'Etat, la volonté du Gouvernement de donner aux structures intercommunales les moyens d'assurer leur développement, et c'est dans ce sens que nous avons déposé l'amendement n° 65.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout cela est d'une clarté limpide, d'une simplicité extrême et chacun, ici, aura bien compris tous les détails de ce dispositif. (Sourires.)
Pour ma part, je pense qu'il doit répondre à des besoins concrets et bien localisés, qu'il est puisé à bonne source, et, sur le plan technique, je n'ai pas d'observation particulière à présenter, m'en remettant à l'avis du Gouvernement.
M. Bernard Angels. Merci, monsieur le rapporteur général.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, je m'interroge sur la portée des mesures prévues par les amendements n°s 65 et 66 rectifié, que nous allons examiner dans un instant.
En effet, une jurisprudence récente en matière de compensation de taxe professionnelle, liée à un recours formulé devant le Conseil d'Etat par la ville de Pantin, dans le département de la Seine-Saint-Denis, a modifié les conditions d'appréciation de la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Dans ce contexte, cette jurisprudence doit-elle être prise en compte dans le cadre du calcul des potentiels de taxe professionnelle des communes adhérant aux nouveaux EPCI ou des communautés d'agglomérations nouvelles ?
Je souhaiterais, madame la secrétaire d'Etat, que vous m'éclairiez sur ces deux amendements et sur leur portée exacte par rapport à cette jurisprudence.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
Par amendement n° 66 rectifié, M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 5211-35 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2332-2, avant le vote de son budget, l'établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé et soumis aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts perçoit des avances mensuelles, dès le mois de janvier, dans la limite du douzième du montant des taxes et impositions transférées, perçues par voie de rôle au titre de l'année précédente pour le compte de ses communes membres et, le cas échéant, du ou des établissements publics de coopération intercommunale avec ou sans fiscalité propre préexistants.
« En contrepartie, les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale soumis au régime fiscal de l'article 1609 nonies C du code général des impôts et les établissements publics de coopération intercommunale préexistants ne perçoivent plus les douzièmes, à hauteur de ceux versés au nouvel établissement public de coopération intercommunale au titre de la taxe professionnelle transférée, mais bénéficient mensuellement de l'attribution de compensation versée par celui-ci.
« La régularisation est effectuée dès que le montant des taxes, impositions et attributions de compensation prévues au budget de l'année en cours est connu, respectivement pour chaque collectivité et établissement public de coopération intercommunale. »
La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Actuellement, aucun texte de loi ne prévoit le versement d'avances sur le produit de la fiscalité locale au profit d'un établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé avant le vote de son budget.
L'amendement que nous proposons vise à verser à l'établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé les douzièmes de taxe professionnelle perçus par les communes précédant sa création.
S'il existait, à l'intérieur du périmètre du nouvel EPCI, d'autres EPCI plus anciens, ce sont les douzièmes perçus par ces derniers que recevrait le nouvel établissement de coopération intercommunale, afin que celui-ci ne soit pas privé de ressources et qu'il puisse ainsi fonctionner dès le mois de janvier.
La mesure proposée vise donc à assurer une continuité entre les communes ou d'anciens établissements de coopération intercommunale et les établissements nouvellements créés soumis à la taxe professionnelle unique.
M. Michel Charasse. Très bon amendement !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à éviter la rupture du versement des douzièmes de fiscalité lors de la création d'un établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, en prévoyant que les douzièmes perçus par les communes ou les groupements préexistants seront perçus par le nouvel EPCI jusqu'au vote de son budget.
La commission est favorable à cette disposition si, et seulement si, elle est de portée générale, car elle n'est pas favorable, au-delà de la limite acceptable, à des articles sur mesure élaborés pour résoudre le problème d'une ou de deux collectivités. C'est une question de principe de notre part !
Nous avons été extrêmement accommodants à l'égard d'un certain nombre de propositions, que nous avons acceptées dans le cours du débat, mais nous ne pouvons être favorables à l'amendement n° 66 rectifié en l'état.
La commission dépose donc un sous-amendement, monsieur le président, afin de généraliser la portée de la disposition proposée : nous proposons, dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 66 rectifié pour l'article L. 5211-35 du code général des collectivités locales, de supprimer les mots : « et soumis aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts ».
La commission souhaite que ce sous-amendement soit adopté par scrutin public et, s'il est adopté, elle émettra alors un avis favorable sur l'amendement n° 66 rectifié.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 84, présenté par M. Marini, au nom de la commission, et tendant, dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 66 rectifié pour l'article L. 5211-35 du code général des collectivités territoriales, à supprimer les mots : « et soumis aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 66 rectifié et sur le sous-amendement n° 84 ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 66 rectifié, mais défavorable au retour à l'amendement n° 66 original qui résulterait de l'adoption du sous-amendement n° 84. Il s'agit non pas de morale, mais de pratique : en l'occurrence, le mieux risque d'être l'ennemi du bien.
La raison pour laquelle l'amendement n° 66 rectifié nous paraît préférable est qu'il est ciblé sur les EPCI à taxe professionnelle unique, pour lesquels l'établissement se substitue entièrement aux communes. Dans ce cas, le calcul par douzième est à la fois simple et rapide, ce qui n'est pas le cas, aux moins pour 2001, pour les autres EPCI à fiscalité additionnelle.
Le dispositif de l'amendement n° 66 rectifié, s'il était modifié par le sous-amendement n° 84, ne pourrait pas être appliqué, pour des raisons pratiques : n'oublions pas que les premiers versements doivent intervenir au début du mois de janvier 2001, c'est-à-dire dans peu de jours !
A l'inverse, pour 2002 - et je m'y engage - cette facilité pourrait être ouverte à l'ensemble des EPCI, qu'ils soient soumis au régime de la taxe professionnelle unique ou à celui de la fiscalité additionnelle.
Compte tenu des explications que je viens de fournir, monsieur le rapporteur général, je souhaiterais que vous puissiez retirer votre sous-amendement n° 84.
M. Michel Charasse. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, je répète que la commission a l'esprit très ouvert vis-à-vis de toutes les adaptations qui pourraient être reconnues nécessaires par les uns ou par les autres.
Toutefois, si le sous-amendement de la commission n'était pas adopté, alors seule une partie des EPCI serait concernée par notre vote, qui serait donc un vote de convenance, ce que je ne peux pas accepter.
Dans certains cas, madame le secrétaire d'Etat, par exemple en cas de dissolution puis de recréation d'un EPCI à fiscalité additionnelle, si l'on vote l'amendement n° 66 rectifié sans le sous-amendement n° 84, il y aura rupture de trésorerie. Nous allons donc résoudre un cas particulier mais créer des difficultés dans un certain nombre d'autres EPCI.
Très sincèrement, nous serions prêts à aller dans le sens que souhaitent les auteurs de l'amendement n° 66 rectifié pour contribuer à résoudre des problèmes de trésorerie dans un certain nombre d'endroits, mais à condition que la mesure soit de portée suffisamment générale.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je souhaite simplement rappeler au Sénat que la commission mixte paritaire qui doit examiner le projet de loi actuellement en discussion doit se réunir à dix-neuf heures. Afin que l'ensemble des textes qui doivent être examinés avant la fin de la session puissent l'être dans de bonnes conditions, nous avons tous intérêt, autant que possible, à nous en tenir à la plus grande concision.
S'agissant de l'amendement n° 66 rectifié, la commission des finances souhaite satisfaire les préoccupations qui ont été exprimées et auxquelles M. le rapporteur général a répondu, mais, si le sous-amendement n° 84 venait à être repoussé, alors nous serions contraints à un scrutin public sur l'amendement n° 66 rectifié, ce qui n'irait pas dans le sens de la rapidité de nos travaux.
En tout état de cause, puisqu'il reste une quinzaine d'amendements à examiner, à l'allure à laquelle nous allons, nous allons être obligés de reporter la réunion de la commission mixte paritaire. Mais je ne voudrais pas que le Gouvernement ou le Sénat nous reprochent ensuite de retarder nos travaux !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Sans vouloir allonger nos débats, je voudrais faire une proposition que j'espère être de compromis et qui devrait nous permettre d'éviter un scrutin public, répondant ainsi au souhait de M. Lambert.
Je veux bien aller dans le sens souhaité par M. le rapporteur général, mais à une condition : la mesure doit être applicable au 1er janvier 2002 ; en effet, comme je l'ai indiqué précédemment, nous ne pourrions pas mettre en oeuvre cette disposition dès le 1er janvier 2001.
Encore une fois, qu'il n'y ait pas méprise sur la position du Gouvernement : il s'agit non pas d'une disposition sur mesure, mais d'une disposition à caractère général, et l'obstacle qui s'oppose à son application immédiate est de nature technique et matérielle. Les lois qui sont votées dans cette assemblée doivent, pour être effectives et entrer en vigueur, être applicables matériellement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame le secrétaire d'Etat, j'accepte tout à fait de rectifier mon sous-amendement dans le sens que vous souhaitez.
Peut-être devrions-nous interrompre nos travaux quelques instants, monsieur le président, pour que nous puissions nous mettre d'accord sur une rédaction commune ?
M. Jacques Chaumont. Il n'y a qu'à remplacer 2001 par 2002 !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non ! Il faut que le texte que nous allons adopter soit écrit en français pour pouvoir, ensuite, être appliqué. C'est notre intérêt à tous !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Peut-être M. Demerliat pourrait-il rédiger ainsi le premier paragraphe de l'article additionnel qu'il est proposé d'insérer après l'article L. 5211-13 du code général des collectivités territoriales : « Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2332-2, avant le vote de son budget, l'établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé et, à compter du 1er janvier 2002, pour ceux soumis... (Le reste sans changement.) »
M. le président. Monsieur le rapporteur général, acceptez-vous la suggestion de Mme le secrétaire d'Etat ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si M. Demerliat acceptait de rectifier son amendement en ce sens, je retirerais alors mon sous-amendement n° 84.
M. le président. Monsieur Demerliat, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par Mme le secrétaire d'Etat ?
M. Jean-Pierre Demerliat. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 66 rectifié bis, présenté par M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés et tendant à insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 5211-35 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2332-2, avant le vote de son budget, l'établissement public de coopération intercommunale nouvellement créé et, à compter du 1er janvier 2002, pour ceux soumis aux dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, perçoit des avances mensuelles dès le mois de janvier, dans la limite du douzième du montant des taxes et impositions transférées, perçues par voie de rôle au titre de l'année précédente pour le compte de ses communes membres et, le cas échéant, du ou des établissements publics de coopération intercommunale avec ou sans fiscalité propre préexistants.
« En contrepartie, les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale soumis au régime fiscal de l'article 1609 nonies C du code général des impôts et les établissements publics de coopération intercommunale préexistants ne perçoivent plus les douzièmes, à hauteur de ceux versés au nouvel établissement public de coopération intercommunale au titre de la taxe professionnelle transférée, mais bénéficient mensuellement de l'attribution de compensation versée par celui-ci.
« La régularisation est effectuée dès que le montant des taxes, impositions et attributions de compensation prévues au budget de l'année en cours est connu, respectivement pour chaque collectivité et établissement public de coopération intercommunale. »
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Favorable, ce qui me permet de retirer le sous-amendement n° 84.
M. le président. Le sous-amendement n° 84 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66 rectifié bis, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
Par amendement n° 67, MM. Moreigne et Charasse proposent d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les comptes des groupements d'intérêt public de développement local mentionnés à l'article 25 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire sont gérés par un comptable public désigné par arrêté du ministre chargé du budget. »
La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne. Pour répondre au voeu de M. Lambert, je serai bref : cet amendement se justifie par son texte même.
Qu'il me soit simplement permis d'ajouter que, s'il était adopté, nous établirions alors une symétrie de traitement avec les syndicats mixtes, autre moyen de gestion des pays, ce qui ne pourrait que conforter certaines trésoreries rurales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souhaiterait entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Sur ce point, je n'ai pas d'opposition de fond. La loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire prévoit déjà que les groupements d'intérêt public de développement local sont gérés par un comptable public.
Par conséquent, la proposition de M. Moreigne me paraît plus redondante que nécessaire. Mais je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission s'en remet, elle aussi, à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 67, pour lequel la commission et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.
Par amendement n° 80, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 33, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le huitième alinéa de l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale faisant application du régime fiscal prévu à l'article 1609 nonies C du code général des impôts, issu de la transformation d'un syndicat ou d'une communauté d'agglomération nouvelle et qui faisaient antérieurement partie de ce syndicat ou de cette communauté, il est ajouté à leurs bases de taxe professionnelle calculées selon les modalités prévues à l'article L. 5334-16 du code général des collectivités territoriales l'année précédant la transformation, une quote-part, déterminée au prorata de leur population, de l'augmentation ou de la diminution totale des bases de taxe professionnelle de l'ensemble des communes membres de l'ancien SAN par rapport à l'année précédente. »
« II. - En conséquence, le septième alinéa du même article est complété par les mots : « , sous réserve des dispositions du neuvième alinéa du présent article ; ».
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Les règles de calcul du potentiel fiscal spécifiques aux syndicats d'agglomération nouvelle, les SAN, rendent actuellement difficile la transformation de ces syndicats en établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI, de droit commun. En effet, les bases de taxe professionnelle des communes membres des syndicats d'agglomération nouvelle sont calculées de façon spécifique par rapport à celles des autres communes membres d'un EPCI à taxe professionnelle unique. Dès lors, lorsque le SAN se transforme en communauté d'agglomération, le potentiel fiscal des communes membres revient dans le droit commun, ce qui peut induire des variations très importantes de potentiel fiscal et donc rendre plus difficile la sortie du régime spécifique des SAN.
L'amendement n° 80 vise à prévoir un mode de calcul spécifique du potentiel fiscal des communes membres de SAN lorsque ceux-ci décident de se transformer. Ainsi, au lieu de calculer au moment de la transformation le potentiel fiscal à partir des bases réelles, les bases de taxe professionnelle calculées l'année précédente selon les règles en vigueur aujourd'hui dans les syndicats seront consolidées. Par la suite, l'évolution des bases se fera évidemment selon les règles de droit commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sur le fond, la commission est d'accord. Sur la méthode, elle considère que les choses auraient pu mieux se passer.
En effet, l'éventualité de la transformation du syndicat d'agglomération nouvelle d'Evry ne fait pas de doute depuis un certain nombre de mois puisque l'achèvement des opérations de construction est dûment constaté.
Or, nous voyons les conséquences fiscales de cette transformation s'opérer à trois niveaux : un amendement gouvernemental au projet de loi de finances pour 2001 relatif au versement transport, un amendement sur le même sujet dans le collectif budgétaire et, aujourd'hui, cet amendement sur le potentiel fiscal des communes membres d'un syndicat d'agglomération nouvelle qui se transforme.
Avouez, madame le secrétaire d'Etat, qu'on aurait pu faire plus élégant, plus simple et plus bref. La procédure pose un problème de lisibilité dans la politique du Gouvernement et de bonne accessibilité des textes.
Mais, sur le fond, le dispositif est raisonnable, et la commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 33.

Articles 34 et 35