SEANCE DU 5 AVRIL 2001


M. le président. « Art. 22. - I. - L'article L. 431-2 du code forestier est ainsi rédigé :
« Art. L. 431-2 . - Sur les dunes côtières fixées par des plantes aréneuses, qui peuvent inclure le cas échéant des arbres épars, à l'exclusion des terrains relevant du régime d'autorisation de défrichement prévue au titre Ier du livre III du présent code, aucune coupe de ces végétaux ne peut être réalisée sans autorisation préalable et spéciale de l'autorité administrative. L'autorisation de coupe de plantes aréneuses peut être refusée lorsque la conservation de ces végétaux est reconnue nécessaire au titre d'un ou plusieurs des motifs visés aux 1°, 2°, 4°, 8° et 9° de l'article L. 311-3.
« L'autorité administrative peut subordonner son autorisation au respect d'une ou plusieurs des prescriptions suivantes :
« 1° La cession à l'Etat, à une collectivité locale ou à un établissement public de dunes côtières fixées par des plantes aréneuses d'une surface au moins égale à celle faisant l'objet de l'autorisation ;
« 2° L'exécution de travaux de restauration dans un secteur de dunes comparable du point de vue de l'intérêt de l'environnement et du public, pour une surface correspondant à la surface faisant l'objet de coupes.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les formes, conditions et délais de délivrance de cette autorisation dont la durée de validité est limitée à cinq ans. »
« II. - L'article L. 431-3 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 431-3 . - Le fait de couper, sans autorisation préalable et spéciale de l'autorité administrative, des plantes aréneuses ou le cas échéant des arbres épars, qui fixent les dunes côtières, à l'exclusion des terrains relevant du régime d'autorisation de défrichement prévu au titre Ier du livre III du présent code, est puni d'une amende de 1 000 francs par mètre carré de dune parcouru par la coupe.
« Les peines prévues à l'article L. 313-1-1 sont applicables aux personnes physiques ou morales énumérées à l'article L. 313-1 en cas d'infraction aux dispositions de l'article L. 431-2.
« Les dispositions des articles L. 313-3, L. 313-5 à L. 313-7 sont applicables en cas d'infraction aux dispositions de l'article L. 431-2. »
« III. - L'article L. 432-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 432-1 . - Aucune fouille ne peut être effectuée dans les dunes de mer du Pas-de-Calais en dehors des espaces urbanisés au sens de l'article L. 146-2 et suivants du code de l'urbanisme, et ce jusqu'à la distance de deux cents mètres de la laisse de haute mer. Toutefois, des travaux de maintien ou de restauration des dunes peuvent faire l'objet d'une autorisation administrative lorsque la situation l'exige.
« Le fait de pratiquer une fouille malgré l'interdiction prévue à l'alinéa précédent est puni d'une amende de 1 000 francs par mètre carré fouillé. »
Par amendement n° 294, M. Poniatowski et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent, dans le troisième alinéa (1°) du texte présenté par le I de cet article pour l'article L. 431-2 du code forestier, de supprimer les mots : « au moins ».
La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. L'article 22 est consacré à la protection et à la stabilité des dunes.
Bien des dunes côtières sont stabilisées grâce à des plantes aréneuses. Il vaudrait mieux que l'on ne coupe pas ces plantes. Notre droit permet pourtant de réaliser des coupes, et c'est, en général, pour favoriser les constructions en bord de mer, ce qui n'est bon ni pour l'esthétique ni pour la protection de l'environnement.
Notre droit permet les coupes, disais-je, à condition de demander une autorisation administrative. Or le troisième alinéa de l'article L. 431-2 du code forestier ne me convient pas, à cet égard.
Quand un propriétaire veut construire, et donc réaliser une coupe sur une dune qui lui appartient, l'Etat demande en échange qu'il lui donne une surface « au moins » équivalente. Cela peut entraîner une dérive dangeureuse. Je propose donc de supprimer les termes « au moins ».
Le Conservatoire du littoral acquiert progressivement des terrains, mais il manque de moyens financiers pour répondre à toutes les opportunités. Je crains donc qu'on autorise un propriétaire à défricher 5 000 mètres carrés sur le bord de mer qu'en échange de trois hectares un peu plus loin. Je sais bien qu'il ne faut pas toujours soupçonner l'administration, mais il peut y avoir des dérives, des abus !
Cet amendement vise donc à supprimer les termes « au moins ». S'il s'agit d'une surface équivalente, il n'y aura pas d'abus.
Grâce à cette modification, il ne pourra pas non plus y avoir de règlements de comptes, et un propriétaire mal vu par l'administration ne courra pas le risque d'être sanctionné.
M. le président. Par un préfet qui ne l'aime pas, par exemple !
M. Ladislas Poniatowski. Absolument, monsieur le président, vous avez tout compris !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Oh !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François, rapporteur. Peut-être vais-je vous étonner, mon cher collègue, mais je suis particulièrement hostile à votre amendement.
En raison de l'importance des plantes aréneuses pour la fixation des dunes côtières qui protègent notre littoral, il ne paraît pas opportun d'atténuer la mesure compensatoire.
De plus, il me semble important de chercher à freiner autant que faire se peut le mitage qui risque de se produire et l'urbanisation sur le littoral. Or, une opération de coupe importante sur les dunes constitue bien souvent - nous l'avons vu, notamment, dans le Pas-de-Calais - le prélude à une opération immobilière.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Evidemment !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Tout d'abord, je tiens à défendre l'honneur des préfets, injustement soupçonnés. (Sourires.)
M. Ladislas Poniatowski. Ma remarque n'était pas agressive !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je le reconnais, monsieur le sénateur !
Ensuite, je fais mien le propos de M. le rapporteur, qui est fondé sur le bon sens.
M. Ladislas Poniatowski. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. En réalité, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je suis d'accord avec vous : il vaudrait mieux ne pas construire sur les dunes, il vaudrait mieux que le Conservatoire du littoral les achète progressivement et y fixe des plantes aréneuses.
En toute logique, il faudrait donc non pas modifier le texte comme je le propose par mon amendement, mais interdire purement et simplement toute coupe sur les dunes côtières françaises.
Mais ce n'est pas moi qui ai instauré le système permettant les coupes et les constructions. Ce n'est pas moi qui ai proposé ce système d'échange, c'est la loi. Je me borne aujourd'hui à défendre un amendement permettant d'éviter que certains ne puissent en tirer profit et abuser un propriétaire.
Monsieur le ministre, si vous nous soumettiez un amendement tendant à interdire les constructions et les coupes sur les dunes, je le voterais.
Monsieur le rapporteur, vous vous élevez, vous aussi, contre les coupes sur les dunes et les constructions en bord de mer. En disant cela, vous ne donnez pas l'avis de la commission sur mon amendement !
Quant à moi, je me fonde sur le texte qui nous est soumis et je propose, en toute logique, de protéger les propriétaires.
M. Philippe François, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Monsieur Poniatowski, dans la mesure où un ministre de la République vous assure qu'il n'y aura jamais de vengeance d'un préfet, vous pouvez retirer votre amendement ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 294, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 85, M. François, au nom de la commission des affaires économiques, propose de rédiger comme suit le début de la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par le III de l'article 22 pour l'article L. 432-1 du code forestier : « Toutefois, des fouilles nécessitées par des travaux de maintien ou de restauration des dunes peuvent faire l'objet... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel portant sur l'obligation de solliciter une autorisation pour effectuer tout type de fouilles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, ainsi modifié.

(L'article 22 est adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à la police des forêts

Article 23