SEANCE DU 5 AVRIL 2001


M. le président. La parole est à M. Raoult.
M. Paul Raoult. Ma question rejoint celle de mon collègue Jean-Pierre Raffarin, même si je n'utiliserai pas le même lyrisme pour la poser. (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Henri de Raincourt. Ce n'était pas du lyrisme !
M. Charles Descours. Pas le même réalisme, vous voulez dire !
M. Paul Raoult. Monsieur le ministre, vous avez engagé depuis plusieurs mois une politique courageuse pour combattre ces deux fléaux qui se sont abattus sur notre élevage : l'encéphalopathie spongiforme bovine et la fièvre aphteuse.
Vous avez su prendre les mesures qui s'imposaient : contrôle par des tests systématiques pour les animaux de plus de trente mois dès le mois de janvier 2001 dans le cas de l'ESB ; embargo et abattage systématique dès qu'apparaissent un foyer ou la suspicion de l'existence d'un foyer de fièvre aphteuse.
L'opinion publique et la profession agricole ont souvent mal réagi face à ces contraintes draconiennes que vous avez su imposer.
Aujourd'hui, nous récoltons les fruits de cette politique déterminée avec la levée prochaine et totale de l'embargo et la possibilité de reprendre nos exportations agro-alimentaires.
Souhaitons que, progressivement, les consommateurs reprennent confiance, achètent davantage de viande et relancent ainsi le marché.
Quoi qu'il en soit, les éleveurs se trouvent aujourd'hui dans une situation financière désastreuse. Nombre d'entre eux sont au bord de la faillite ; les cours sont insuffisants pour contrebalancer les charges qu'ils supportent.
Aussi, la colère gronde dans nos campagnes.
Monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant de bien vouloir accélérer de toute urgence l'instruction des dossiers d'aide financière aux éleveurs ; ils attendent cette aide avec une très grande impatience. Il ne faudrait pas que, au nom d'une sévérité administrative nécessaire pour lutter contre la fraude, l'administration paralyse l'instruction des dossiers et que, de ce fait, l'Etat ne verse l'argent aux éleveurs qu'avec beaucoup de retard.
La deuxième demande que j'exprime avec force concerne la nécessaire augmentation de l'enveloppe financière de 1,4 milliard de francs prévue pour indemniser les éleveurs touchés par cette crise.
Le nombre de dossiers à instruire sera plus important qu'initialement prévu. De plus, les critères d'attribution induisent parfois des effets de seuil très fâcheux pour les petits éleveurs qui produisent à la fois du lait et de la viande.
Au nom de la solidarité nationale, une rallonge financière est souhaitable. J'espère, monsieur le ministre, que vous prendrez ma requête en considération. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Pierre Raffarin. C'est une requête commune.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous pouvez applaudir, alors !
M. Henri de Richemont. Vous n'aviez pas applaudi, vous !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Il est vrai que ces deux crises, celle de l'ESB et celle de la fièvre aphteuse, ont cumulé leurs effets, à la fois, dans l'esprit des agriculteurs et dans leurs comptes bancaires.
Cela étant, je tiens à vous faire observer que ces deux crises n'ont pas grand-chose en commun.
L'ESB est une maladie qui pose un vrai problème de santé publique puisqu'elle a entraîné des morts d'homme,...
M. Henri de Richemont. On ne sait pas !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... en nombre très limité dans notre pays mais plus important au Royaume-Uni, alors que la fièvre aphteuse ne présente aucun danger pour l'homme.
Il ne faut donc pas mélanger les deux. Il faut surtout dire à nos concitoyens que la fièvre aphteuse ne peut en rien menacer la santé et que la consommation de viande n'est absolument pas dangereuse à cet égard.
En revanche, avec la crise de l'ESB, nous gérons l'incertitude dans la mesure où la connaissance scientifique est très loin d'être achevée. La fièvre aphteuse, elle, est une vieille maladie bien connue, bien maîtrisée et bien dominée.
Enfin, autre différence : l'ESB est en quelque sorte la conséquence d'un dérapage du productivisme - j'ose employer le mot - alors que la fièvre aphteuse est, d'une certaine manière, une maladie de pays pauvres.
Mais si ces deux crises n'ont rien à voir entre elles, leurs effets se sont bien cumulés.
En écho à ce que je disais à l'instant à M. Raffarin, j'ajouterai que, si les Français, si nos, vos électeurs, veulent témoigner leur solidarité à l'égard des éleveurs, qu'ils mangent de la viande, pour que la consommation retrouve le niveau qu'elle avait avant le mois de novembre dernier ! ( Applaudissements sur l'ensemble des travées.) Je vous assure que l'on sortira alors beaucoup plus vite de cette crise. Je dis cela parce que la viande produite en France présente certainement les meilleures garanties de sécurité au monde.
M. Henri de Richemont. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Raffarin. Tout à fait !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Dans ces conditions, il n'y a aucune raison d'avoir la moindre défiance à l'égard de sa consommation. (Nouveaux applaudissements.)
Au demeurant, monsieur Raoult, je prends note de vos souhaits à propos de la distribution des enveloppes. J'ai dit tout à l'heure à quel point je voulais qu'elles soient très vite affectées, mais il faut pour cela que les éleveurs déposent leurs dossiers. Dans la mesure où la France est un état de droit, pour bénéficier d'une aide, il faut justifier de son éligibilité à cette aide.
Il ne faudrait pas que les éleveurs se plaignent des retards alors qu'ils n'auraient même pas déposé leurs dossiers. Qu'ils les déposent dans les tout prochains jours de manière que les aides leur soient versées à la fin d'avril, ou au début de mai ! C'est l'engagement que j'ai pris devant vous et que je renouvelle aujourd'hui. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)

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