SEANCE DU 2 MAI 2001


M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 176, M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 122-34 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il rappelle également les dispositions relatives au harcèlement moral, telles qu'elles résultent notamment des articles L. 122-49 et L. 122-50 du présent code. »
Par amendement n° 249, Mme Dieulangard, MM. Cazeau et Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété par les mots suivants : "ainsi que les dispositions relatives à l'abus d'autorité et aux agissements de harcèlement moral telles qu'elles résultent des articles L. 122-49 et suivants du présent code". »
Par amendement n° 390, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété par les mots suivants : "et les dispositions relatives à l'interdiction et la condamnation de toute pratique de harcèlement moral". »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 176.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement vise à introduire dans le règlement intérieur de l'entreprise les dispositions du code du travail relatives au harcèlement moral. Il s'agit ici d'étendre pour le harcèlement moral ce qui existe déjà pour le harcèlement sexuel. Une telle mesure n'est pas seulement formelle. Elle s'intègre en effet dans le souci de développer la prévention.
Cette disposition conduira à améliorer l'information des salariés, car le règlement intérieur doit être affiché sur les lieux de travail. Surtout, elle se traduira par l'émergence d'un dialogue dans l'entreprise autour du harcèlement moral, car le règlement intérieur doit être soumis pour avis au comité d'entreprise et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT.
Cet amendement reprend une proposition du Conseil économique et social, ainsi que de l'association des directeurs des ressources humaines.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 249.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement vise à intégrer dans le règlement intérieur des entreprises les dispositions relatives au harcèlement moral, afin d'assurer l'information de l'ensemble des personnels, notamment ceux qui sont investis d'une autorité hiérarchique.
Le sujet, on le sait, n'est pas habituellement traité en termes d'information dans les entreprises. Un certain nombre d'orateurs ont même parlé, depuis le début de cette soirée, de « chape de plomb ». Il est important qu'aucun salarié n'ignore les droits et les interdits en la matière. Le règlement intérieur nous semble un excellent moyen pour informer l'ensemble des salariés de l'entreprise.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 390.
M. Guy Fischer. Comme le pointe très justement l'avis du Conseil économique et social, le règlement intérieur de l'entreprise, qui doit être affiché sur les lieux de travail, mais qui fait également l'objet de l'avis du comité d'entreprise et du CHSCT, apparaît comme un outil indispensable d'information pour l'ensemble des salariés, et par conséquent de prévention.
Notre amendement, qui a quasiment le même objet que les amendements de la commission et du groupe socialiste, vise à introduire dans le règlement intérieur, comme en matière de harcèlement sexuel, les dispositions relatives à l'interdiction et à la condamnation de toute pratique de harcèlement moral.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 249 et 390 ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Ces deux amendements sont satisfaits par l'amendement n° 176. Il s'agit bien de préciser que les dispositions relatives au harcèlement moral doivent figurer dans le règlement intérieur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 176, 249 et 390 ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis bien sûr favorable à l'idée d'introduire les dispositions relatives au harcèlement moral dans le règlement intérieur.
Cependant, la rédaction présentée par l'amendement n° 176, défendu par M. le rapporteur, ne me semble pas tout à fait adaptée. En effet, elle se borne à viser deux articles du code du travail, alors que d'autres articles traiteront du harcèlement moral.
Par ailleurs, la rédaction prévue par l'amendement n° 249, qui fait référence à la notion d'abus d'autorité, n'est plus adaptée à la nouvelle définition que nous proposons, qui, me semble-t-il, recueille l'approbation du Sénat et qui supprime la restriction à un lien d'autorité.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis favorable sur l'amendement n° 390, sous réserve de la suppression de la référence à la condamnation. En effet, la mention dans un texte de loi de la notion de condamnation, qui, en l'occurrence, ne vise pas le dispositif d'un jugement, me paraît impropre.
M. le président. Monsieur Fischer, que pensez-vous de la suggestion de Mme le ministre ?
M. Guy Fischer. Monsieur le président, j'accepte la suggestion de Mme la ministre, et je rectifie donc ainsi l'amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 390 rectifié, présenté par MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété par les mots suivants : "et les dispositions relatives à l'interdiction de toute pratique de harcèlement moral". »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 176, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater, et les amendements n°s 249 et 390 rectifié n'ont plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 389, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 230-2 du code du travail, après les mots : "protéger la santé" sont ajoutés les mots : "physique et mentale". »
Par amendement n° 429, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 50 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article L. 230-2 du code du travail, après les mots : "protéger la santé" sont insérés les mots : "physique et mentale".
« II. - Le g du II de l'article L. 230-2 du code du travail est complété par les mots : " , notamment en ce qui concerne les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 122-49". »
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 389.
M. Guy Fischer. A juste titre, la commission des affaires sociales accorde une attention particulière au phénomène de harcèlement moral au travail. Considérant que la prévention devait demeurer la priorité, M. le rapporteur propose une série d'amendements que nous ne pouvons qu'appouver.
Pour autant, un aspect important de la question est éludé. A aucun moment, l'obligation générale de prévention pesant sur l'employeur n'est rappelée. A aucun moment, les violences ne sont traitées comme un risque professionnel, alors même que le harcèlement moral a lieu à l'occasion de l'exécution du contrat de travail.
C'est oublier bien vite qu'il est de la responsabilité de l'employeur doté du pouvoir de direction et d'organisation de s'assurer du respect des principes généraux de prévention tels qu'ils sont définis à l'article L. 230-2 du code du travail.
Afin d'ouvrir le champ de la prévention, nous proposons de préciser que la notion de santé des travailleurs ne s'entend pas strictement, c'est-à-dire qu'elle recouvre non seulement l'aspect physique mais également l'aspect mental, conformément d'ailleurs aux normes européennes et à la réglementation de l'Organisation internationale du travail et de l'Organisation mondiale de la santé. Par conséquent, le chef d'entreprise doit prendre un certain nombre de mesures afin de prévenir les risques liés au harcèlement moral.
M. le président. La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 429.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement, selon cette même préoccupation, souhaite favoriser la prise en compte du harcèlement moral dans la mise en oeuvre des principes généraux de prévention. D'une part, il convient de préciser que la notion de santé des travailleurs recouvre tant un aspect physique qu'un aspect mental. D'autre part, il s'agit d'indiquer que, dans le cadre des mesures prises par l'employeur, la planification de la prévention doit intégrer les risques liés au harcèlement moral, à travers les questions d'organisation, de relations sociales et d'ambiances de travail.
Si vous le permettez, monsieur le président, je donnerai dès à présent l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 389, présenté par M. Fischer. Cet amendement relève de la même inspiration. Néanmoins, l'amendement proposé par le Gouvernement me semble aller plus loin puisqu'il indique que, « dans le cadre des mesures prises par l'employeur, la planification de la prévention doit intégrer les risques liés au harcèlement moral, à travers les questions d'organisation, de relations sociales et d'ambiances de travail ». Voilà pourquoi le Gouvernement, tout en étant favorable à l'amendement n° 389, recommande l'adoption de l'amendement n° 429.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 389 et 429 ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'amendement n° 389 comme l'amendement n° 429 visent à préciser que la notion de santé recouvre à la fois la santé physique et la santé mentale. Cela semble aller de soi. La jurisprudence l'a déjà reconnu. Toutefois, il n'est pas absurde de le préciser. La commission s'en remet donc à la sagesse de notre assemblée, étant observé que l'amendement n° 429 est un peu plus précis.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, je ne conteste pas l'amendement n° 429. Cependant, lorsque nous avons examiné le texte relatif à l'interruption volontaire de grossesse, nous avons voulu y faire figurer le fait qu'il s'agissait de la santé physique et mentale. Vous nous aviez répondu que cette précision n'était pas utile, puisque la santé comprenait ces deux aspects. Or, aujourd'hui, vous nous présentez un amendement pour préciser que la santé comporte un aspect physique et un aspect mental. Madame la ministre, je tenais simplement à attirer votre attention sur ce qui, à mes yeux, est une contradiction.
M. le président. Monsieur Fischer, l'amendement n° 389 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer. Non, monsieur le président, nous le retirons, car l'amendement n° 429 est effectivement plus précis.
M. le président. L'amendement n° 389 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 429, pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 177 est présenté par M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 252 est déposé par Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le sixième alinéa de l'article L. 236-2 du code du travail est complété par les mots :" et de harcèlement moral ". »
Par amendement n° 391, MM. Fischer, Muzeau, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 236-2 du code du travail, après les mots : " protection de la santé " sont ajoutés les mots : " physique et mentale ". »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 177.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement tend à élargir les missions du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT, à la prévention du harcèlement moral.
La loi de 1992 a déjà donné au CHSCT compétence pour proposer des actions de prévention en matière de harcèlement sexuel.
Il serait utile d'étendre ses attributions à la question du harcèlement moral, car le CHSCT constitue une instance appropriée de dialogue et de prévention des risques touchant à la santé ou aux conditions de travail. Il rassemble en outre les représentants des salariés et de l'employeur, l'inspecteur du travail et le médecin du travail, bref toutes les parties prenantes à la question du harcèlement moral.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 252.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement étant identique à celui de la commission, nous le retirons à son profit.
M. le président. L'amendement n° 252 est retiré.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 391.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, avec votre accord, je défendrai simultanément les amendements n°s 391, 392 et 394.
Comme nous l'avons déjà indiqué, il est primordial d'axer les efforts sur les actions préventives pour enrayer les agissements de harcèlement moral. Pour ce faire, il convient de s'appuyer sur les organismes existants compétents en matière de sécurité et d'hygiène qui servent déjà en interne de relais entre les salariés et le chef d'entreprise.
C'est pourquoi nos amendements « adaptent » les compétences, d'une part, des comités d'hygiène et de sécurité, dont le rôle est central en matière de risques professionnels et de conditions de travail et, d'autre part, des délégués du personnel, qui peuvent saisir directement le chef d'entreprise en cas d'atteinte aux droits des personnes et être à l'initiative d'une procédure devant les prud'hommes, en précisant qu'ils contribuent à la protection de la santé physique et mentale des salariés.
Enfin, par souci de cohérence, mais également parce que les médecins du travail sont amenés à connaître des cas de harcèlement moral, nous étendons leur habilitation à proposer au chef d'entreprise des mesures individuelles de mutation ou de transformation de poste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'amendement n° 177 de la commission, dont la rédaction est plus précise.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 177 et 391 ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Ces amendements procèdent de la même inspiration et j'y suis favorable, avec une petite préférence tout de même pour la rédaction de l'amendement n° 391, qui fait référence précisément à la santé physique et mentale dont nous venons de discuter à l'instant.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 177, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater et l'amendement n° 391 n'a plus d'objet.
Toujours après l'article 50 quater, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 392, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 241-10-1 du code du travail, après les mots : "l'état de santé" sont ajoutés les mots : "physique et mentale". »
Par amendement n° 178, M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 241-10-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : "Il est également habilité à proposer de telles mesures individuelles lorsqu'il constate l'existence d'agissements mentionnés à l'article L. 122-49 du présent code". »
L'amendement n° 392 a déjà été défendu.
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 178 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 392.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement tend à favoriser l'implication du médecin du travail dans les cas de harcèlement moral. Certes, il faut éviter, dans un souci de prévention, toute médicalisation excessive du phénomène qui concerne avant tout l'organisation du travail. Cela dit, l'intervention du médecin du travail peut être utile - je dirai même très utile - car il peut attirer l'attention du chef d'entreprise sur les cas de harcèlement dont celui-ci n'aurait pas connaissance.
Aussi, cet amendement a pour objet d'étendre explicitement son habilitation à proposer des mesures individuelles telles que mutation ou transformation de poste au chef d'entreprise lorsqu'il constate une situation de harcèlement. Cet amendement reprend des propositions déjà formulées par le groupe communiste républicain et citoyen et dans l'avis du Conseil économique et social.
S'agissant de l'amendement n° 392, il est satisfait par l'amendement n° 178 de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne suis pas favorable à l'amendement n° 178, parce que j'observe que l'article L. 241-10-1 du code du travail donne déjà au médecin du travail la possibilité de proposer des mesures individuelles.
Je lui préfère la formulation de l'amendement n° 392, qui apporte des garanties supplémentaires à ce qui existe déjà dans le code du travail, qui donne au médecin du travail toute latitude pour formuler des propositions de reclassement, et qui vise explicitement l'état de santé physique et moral du salarié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 392, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 178, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel aussi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater .
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 251, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 122-51 du code du travail, insérer un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Nul ne peut prendre en considération le fait que la personne intéressée a subi ou refusé de subir les agissements définis au premier alinéa de l'article L. 122-49, ou bien a témoigné de tels agissements ou les a relatés, pour décider notamment en matière d'embauche, de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation, de résiliation, de renouvellement de contrat de travail ou de sanctions disciplinaires.
« Pour les actions exercées en faveur d'un salarié, qui naissent du premier alinéa, les organisations syndicales doivent justifier d'un accord écrit de l'intéressé. »
Par amendement n° 179, M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 411-11 du code du travail, il est inséré un article L. 411-11-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 411-11-1. - Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise sous réserve qu'elles justifient d'un accord écrit de l'intéressé. L'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat et y mettre un terme à tout moment. »
Par amendement n° 393, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 411-11 du code du travail, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise, sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé, pourvu que celui-ci ait été averti par écrit et ne s'y soit pas opposé dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a notifié son intention. L'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat.
« Les associations régulièrement constituées depuis cinq ans au moins peuvent saisir les organisations syndicales pour leur demander d'exercer en justice les actions visées au premier alinéa. »
La parole est à Mme Dieulaugard, pour défendre l'amendement n° 251.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement tend à préciser que des personnes qui ont été victimes ou qui ont résisté à des agissements constituant un harcèlement moral, comme celles qui en ont témoigné, ne peuvent être victimes ensuite d'aucune forme de discrimination. Aucune action en justice ne doit pouvoir être engagée sans leur accord écrit afin de protéger, le cas échéant, leur souhait de discrétion.
M. le président. La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 179.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement vise à autoriser les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise à se substituer à un salarié victime de harcèlement pour ester en justice. Elles doivent toutefois justifier de l'accord écrit de l'intéressé.
Les organisations syndicales ont naturellement vocation à intervenir en faveur des victimes de harcèlement. C'est pourquoi il n'est pas inutile de leur reconnaître cette possibilité d'action de substitution. On remarque d'ailleurs qu'elle existe déjà en matière de harcèlement sexuel.
Pour autant, cette action de substitution ne doit pas déboucher sur une judiciarisation excessive. Elle doit rester dissuasive et, surtout, servir de fondement à un réel dialogue social dans l'entreprise sur les questions du harcèlement moral, lorsque besoin est.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 393.
M. Guy Fischer. Lorsqu'un salarié est victime de harcèlement moral sur son lieu de travail, il se retrouve particulièrement seul et fragilisé. Nous pensons donc qu'il convient de l'accompagner et de tout mettre en oeuvre pour faire cesser les agissements pervers dont il est victime.
Nous avions défendu, lors de l'examen de la proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations, une position très claire concernant l'importance du rôle des organisations syndicales et des associations dans la défense des salariés victimes de discrimination.
Il nous semble très opportun d'appliquer les dispositions prévues dans le cadre de la lutte contre les discriminations à la lutte contre le harcèlement moral. A cet effet, la possibilité pour les organisations syndicales d'exercer des actions en justice ou, pour les associations, d'alerter les syndicats, nous paraît primordiale. C'est à notre avis l'un des éléments essentiels pour lutter efficacement contre les dégâts sur la santé provoqués par le harcèlement moral.
Afin de mettre toutes les chances du côté des victimes et, ainsi, de permettre leur réinsertion à leur poste de travail, il est impératif de renforcer le rôle d'accompagnement des syndicats et des associations.
M. le président. Que est l'avis de la commission sur les amendements n°s 251 et 393 ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'amendement n° 251 paraît inutile, l'article 50 quater étant suffisamment explicite. En outre, il est pour partie satisfait par l'amendement n° 179 de la commission.
L'amendement n° 393 est également satisfait par l'amendement n° 179 de la commission.
Je considère par ailleurs que l'amendement de la commission est plus protecteur, car il exige un accord écrit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 251, 179 et 393 ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je suis favorable à l'amendement n° 251 présenté par Mme Dieulangard parce que je suis favorable à l'alignement de la protection des victimes ou témoins de harcèlement moral sur celle qui est prévue à l'article L. 123-1 du code du travail. Je suis également favorable à l'alignement du mécanisme du droit de substitution des organisations syndicales sur le mécanisme existant en matière de harcèlement sexuel.
En revanche, je ne suis pas favorable à l'amendement n° 179 présenté par M. Gournac parce que le droit de substitution dont l'objet est la défense des intérêts individuels des salariés ne saurait être confondu avec l'action syndicale dans l'intérêt collectif de la profession définie à l'article L. 411-11 du code du travail.
Quant à l'amendement n° 393, présenté par M. Fischer, je veux dire d'abord que je suis favorable au droit de substitution des organisations syndicales en matière de harcèlement moral. Mais, comme je viens de le rappeler, le droit de substitution dont l'objet est la défense des intérêts individuels des salariés ne peut être confondu avec l'action syndicale dans l'intérêt collectif de la profession.
C'est pourquoi, tout en retenant le principe de votre amendement, je vous propose, monsieur Fischer, de créer plutôt un nouvel article après l'article L. 122-51 du code du travail.
Par ailleurs, sur les modalités d'exercice de l'action substitutive, je préfère me référer au texte de l'amendement n° 251, qui pose le principe de l'exigence du mandat écrit donné par le salarié à l'organisation syndicale, de même qu'en matière de harcèlement sexuel.
Ainsi, je vous propose la rédaction suivante pour le premier alinéa de l'article additionnel : « Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise. L'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat. »
Quant à la disposition relative au droit de saisine par les associations, j'y suis également favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 251, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 179, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater, et l'amendement n° 393 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 394, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 422-1-1 du code du travail, après le mot : "personnes" sont ajoutés les mots : "à leur santé physique et mentale". »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 394, accepté par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater .
Par amendement n° 255, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans l'article L. 742-8 du code du travail, les mots : "de l'article L. 122-46" sont remplacés par les mots : "des articles L. 122-46 et L. 122-49".
« II. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 771-2 du code du travail, les mots : "L'article L. 122-46" sont remplacés par les mots : "Les articles L. 122-46 et L. 122-49".
« III. - Dans l'article L. 772-2 du code du travail, les mots : "de l'article L. 122-46" sont remplacés par les mots : "des articles L. 122-46 et L. 122-49".
« IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 773-2 du code du travail, les mots : "et L. 122-46" sont remplacés par les mots : ", L. 122-46 et L. 122-49". »
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Il s'agit d'un amendement de coordination qui tend à rendre applicables aux marins, concierges et gardiens d'immeubles, employés de maison et assistantes maternelles, les dispositions relatives au harcèlement moral à l'égal de celles qui sont relatives au harcèlement sexuel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. C'est une précision utile pour certaines professions particulières. Par conséquent, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 255, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50 quater.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 180, M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 6 quinquies ainsi rédigé :
« Art. 6 quinquies. - Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral d'un supérieur hiérarchique ou de toute personne abusant ou non de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à sa dignité, d'altérer gravement son intégrité physique ou morale ou de compromettre son avenir professionnel.
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
« 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ;
« 2° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou qu'il les a relatés.
« Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux agissements définis ci-dessus ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 455 rectifié, présenté par MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 180 :
« Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés du harcèlement moral d'un représentant de l'autorité administrative ou de toute personne visant à dégrader les conditions humaines, relationnelles, matérielles de son travail, de nature à porter atteinte à ses droits et à sa dignité, pouvant altérer gravement son état de santé et pouvant compromettre son avenir professionnel. »
Par amendement n° 253, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
« 1° Le fait qu'il a subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral d'un supérieur hiéarchique ou de toute personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, qui ont pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité et de créer des conditions de travail humiliantes ou dégradantes ;
« 2° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou les a relatés.
« Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux agissements définis ci-dessus. »
Par amendement n° 441 rectifié, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Est passible d'une sanction disciplinaire le fonctionnaire ayant procédé à des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'un agent ou d'altérer sa santé physique ou mentale en créant à son encontre des conditions de travail humiliantes ou dégradantes.
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
« 1° Le fait qu'il a subi des agissements répétés de harcèlement moral ;
« 2° Le fait qu'il a exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;
« 3° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou qu'il les a relatés.
« Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 180.
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement vise à étendre la nouvelle législation sur le harcèlement moral aux trois fonctions publiques. On voit mal, en effet, pourquoi la nouvelle législation sur le harcèlement moral s'appliquerait au secteur privé et ne concernerait pas la fonction publique. De nombreux experts considèrent même que le mal est sans doute encore plus profond dans l'administration. Il est donc nécessaire que les fonctionnaires et les agents des trois fonctions publiques bénéficient de la même protection.
A cette fin, l'amendement s'appuie sur les diverses propositions en ce sens du Conseil économique et social, de la Commission nationale consultative des droits de l'hommet et de l'Association des DRH.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre le sous-amendement n° 455 rectifié.
M. Guy Fischer. Autant le dire tout de suite - une fois n'est pas coutume ! - nous approuvons le principe énoncé par M. le rapporteur de la commission des affaires sociales d'étendre la législation sur le harcèlement moral aux trois fonctions publiques ; il nous apparaît en effet légitime de lutter contre le harcèlement moral partout où il se produit.
La fonction publique n'est malheureusement pas exempte de reproches en la matière. Certaines études révèlent que plus d'un tiers des cas de harcèlement moral la concerneraient. Il convient donc de protéger les fonctionnaires contre ces pratiques, au même titre que les salariés du secteur privé.
Notre sous-amendement, en cohérence avec l'amendement n° 387 que nous avons déposé sur l'article 50 quater , vise à définir le harcèlement moral selon les critères retenus par le récent avis du Conseil économique et social.
Il nous paraît notamment important de faire référence à la notion d'atteinte à la dignité des victimes.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 253.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement est de même inspiration que les précédents. Il tend à assurer aux fonctionnaires une protection analogue à celle des salariés du secteur privé en matière de harcèlement moral.
Il s'agit manifestement d'une préoccupation partagée par l'ensemble du Sénat et par le Gouvernement. Les termes des amendements sont analogues. L'intérêt primordial de l'amendement du Gouvernement est qu'il s'applique aussi aux contractuels.
M. le président. La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 441 rectifié et pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 180 et 253, ainsi que sur le sous-amendement n° 455 rectifié.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. L'amendement n° 441 rectifié permet d'introduire le harcèlement moral dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Inséré à l'article 29 de cette loi, relatif à la responsabilité disciplinaire des fonctionnaires, il précise que le harcèlement moral constitue une faute disciplinaire en identifiant les comportements prohibés et il protège les fonctionnaires ainsi - que Mme Dieulangard vient de le souligner - les agents non titulaires de droit public qui sont victimes de harcèlement moral ou qui sont appelés à en témoigner contre tout risque de sanction.
Les deux autres amendements et le sous-amendement sont de même inspiration.
Il me semble toutefois que la définition que propose le Gouvernement est plus large.
En premier lieu, la définition du Gouvernement rend passible de sanctions disciplinaires tout auteur de harcèlement moral, et pas seulement le détenteur d'autorité, ce qui permet d'assurer la transposition de la directive européenne.
En second lieu, notre proposition vise aussi les mesures disciplinaires qui seraient prises à l'encontre d'un fonctionnaire soit constitutives des agissements de harcèlement moral, soit en représailles contre un refus de subir ces agissements.
Enfin, au-delà des fonctionnaires, elle s'applique aussi aux agents non titulaires de droit public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 455 rectifié et sur les amendements n°s 253 et 441 rectifié ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'amendement n° 253 est satisfait par l'amendement n° 180 de la commission. Les rédactions diffèrent sur la définition du harcèlement.
L'amendement n° 441 rectifié est incompatible avec l'amendement de la commission. En outre, les définitions proposées du harcèlement moral divergent également.
Enfin, la définition donnée par notre amendement nous semble meilleure que celle que propose le sous-amendement n° 455 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 455 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 180.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel, ainsi rédigé, est inséré dans le projet de loi après l'article 50 quater, les amendements n°s 253 et 441 rectifié n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 254, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa de l'article 2-6 du code de procédure pénale, les mots : "quatre alinéas" sont remplacés par les mots : "huit alinéas" ».
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement, conséquence du précédent, tend à permettre à toute association déclarée depuis cinq ans à la date des faits et se proposant, par ses statuts, de combattre les discriminations, d'exercer les droits reconnus à la partie civile de la même manière qu'en matière de discrimination sexuelle en ce qui concerne les fonctionnaires, c'est-à-dire en justifiant avoir reçu l'accord écrit de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, et après son avis, celui du titulaire de l'autorité parentale ou de son représentant légal.
Cette disposition est parallèle à celle qui figure dans le code du travail pour les affaires concernant les agissements de harcèlement sexuel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement vise à autoriser des associations à exercer les droits reconnus à la partie civile, avec l'accord écrit de l'intéressé, en cas de harcèlement moral. Une telle possibilité peut sembler intéressante.
La rédaction proposée soulève cependant deux difficultés. D'abord, elle ne vise, curieusement, que les fonctionnaires. On voit mal pourquoi les salariés du secteur privé ne pourraient bénéficier de ce droit. Surtout, les associations ici visées sont seulement celles qui sont censées combattre les discriminations fondées sur le sexe ou sur les moeurs. Or le harcèlement moral ne relève pas de la même logique que le harcèlement sexuel. Il n'y a pas lieu, dès lors, de réserver cette possibilité à ces seules associations.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Cette disposition relative au droit d'agir en justice des associations de lutte contre les discriminations a davantage sa place dans la proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations, où elle a été prévue.
Dans sa rédaction actuelle, elle ne concerne d'ailleurs pas les associations dont l'objet est limité à la lutte contre le harcèlement moral.
Enfin, il me semble que, dans la loi de 1983, c'est l'article 29 qu'il faudrait viser plutôt que l'article 6.
Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, madame Dieulangard ?
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 254 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 250, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 50 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« La section 3 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal est complétée par une sous-section intitulée : "Du harcèlement moral", comportant un article ainsi rédigé :
« Art. ... Le fait de harceler autrui par des agissements ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa diginité ou de créer des conditions de travail humiliantes ou dégradantes, par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende. »
Par amendement n° 395, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le chapître V du titre II du livre II du code pénal est complété par un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Le fait de harceler un salarié dans le but de porter atteinte à sa dignité ou à son intégrité psychique est puni de deux ans d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende. »
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 250.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement tend à intoduire dans le code pénal, pour le harcèlement moral, une peine équivalente à celle qui est prévue en cas de harcèlement sexuel. Il nous semble en effet qu'il y aurait une double incohérence à ne pas le faire.
Premièrement, pourquoi prévoir une disposition pénale réprimant le harcèlement sexuel et aucune contre le harcèlement moral ? Le harcèlement moral n'a-t-il pas le même degré de gravité ? Ce serait précisément le contraire de ce que nous affirmons tous depuis plusieurs heures, en évoquant la gravité des faits et des troubles qui affectent les victimes.
Si l'on ne veut pas multiplier au fil des années les dispositions réprimant des agissement de cette nature, peut-être faudra-t-il même prévoir une disposition générale s'appliquant au droit du travail. Nous pourrons revoir cette question en deuxième lecture.
En toute hypothèse, il serait tout à fait logique et cohérent, au regard de la gravité des faits, dès lors que ceux-ci sont établis, et des troubles provoqués, dès lors que ceux-ci sont reconnus, de prévoir une sanction pénale contre les auteurs du harcèlement. C'est l'aboutissement logique qui conduit à réprimer les faits les plus graves.
Ce serait un signe fort donné à la fois aux victimes et aux coupables, la plupart étant d'ailleurs parfaitement conscients de la nature perverse et volontairement nuisible à autrui de leurs actes.
Il importe aussi de marquer qu'en toute situation, même au travail - faut-il le dire ? - toute personne a droit au respect de sa dignité.
Cela ne traduit pas une volonté de judiciariser la vie de l'entreprise. Au demeurant, celle-ci l'est déjà de bien des façons, et il ne faudrait pas que cette méfiance à l'égard du droit ne se manifeste qu'en matière de droit du travail.
Les dispositifs de prévention, sur lesquels chacun s'accorde, sont indispensables. Ils marquent la prise de conscience des chefs d'entreprise et leur souhait de venir à bout d'un problème qui n'améliore certes pas la productivité et peut leur créer des difficultés.
Mais le dispositif n'est pas complet si une sanction pénale ne vient pas le compléter. En effet, l'entreprise n'est pas un espace juridique autonome où les sanctions disciplinaires seraient à la fois nécessaires et suffisantes. Le salarié reste en toute situation et en tout lieu une personne et un citoyen. L'employeur n'a sur lui qu'une autorité hiérarchique, qui doit s'exprimer dans le respect de la personne et se limiter à l'objet du travail.
Conformément à ces principes, il est donc primordial que la reconnaissance des droits du travaileur ne soit pas limitée et que la sanction de ceux qui y portent atteinte puisse être complète. Cette décision appartient à l'autorité judiciaire, à laquelle il convient, en l'espèce, d'accorder toute latitude.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 395.
M. Guy Fischer. Avec cet amendement, nous abordons un autre volet important du dispositif relatif au harcèlement moral au travail, celui de la sanction.
Dans la proposition de loi que nous avions déposée en décembre 2000, le principe d'une sanction à la fois civile et pénale avait été retenu pour donner un signe fort aux victimes d'agissements mais aussi à leurs auteurs.
Le présent amendement reprend la disposition de cette proposition de loi prévoyant une incrimination et une sanction spécifique du harcèlement moral au travail dans le code pénal, intégrée à la section « conditions de travail et d'hébergement contraire à la dignité de la personne », calquée, quant à l'échelle des peines sur celles qui sont prévues à l'article L. 225-14 du code pénal autorisant la répression de tout acte par lequel une personne en soumet une autre à des conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine.
Pour justifier la nécessité et l'utilité de sanctionner pénalement le harcèlement moral, je reprendrai les arguments avancés par Sandy Lacari, docteur en droit, dans un article intitulé « De la nécessité d'une légalisation spécifique au harcèlement moral au travail », publié en mai 2000 dans La Revue de droit social. « La sanction pénale conserve encore incontestablement un effet dissuasif et le fait d'ériger un certain comportement en infraction pénale démontre définitivement qu'il s'agit là d'agissements intolérables aux yeux de la société. »
Je renvoie ceux qui doutent de l'opportunité d'une telle démarche, la qualifiant de néfaste - notamment le groupe des entreprises privées, au sein du Conseil économique et social - car source de juridiciarisation de la vie de l'entreprise, au précédent plutôt positif de la répression pénale du harcèlement sexuel.
Enfin, je souhaite que celles et ceux qui renvoient à l'application des sanctions pénales introduite en 1994 contre l'atteinte à la dignité puissent me donner la garantie que l'utilisation de l'article L. 225-14 du code pénal permet d'incriminer toutes les situations de harcèlement moral et non pas uniquement celles dont sont victimes les salariés vulnérables ou en situation de dépendance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 250 et 395 ?
M. Alain Gournac, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 250, il est inutile de prévoir une nouvelle sanction pénale, le code pénal prévoyant déjà des incriminations pouvant être retenues en cas de harcèlement moral. La remarque vaut également pour l'amendement n° 395.
Il est, en outre, peu souhaitable de judiciariser à l'excès cette question, qui doit principalement être abordée en amont.
Je rappelle, au surplus, que le Gouvernement, par la voix de Mme la ministre, s'est opposé à l'introduction d'une nouvelle sanction pénale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame Dieulangard, les incriminations pénales sont très nombreuses dans notre droit, puisque nous en comptons plusieurs milliers. Certes, matière de harcèlement moral, quelques condamnations ont pu déjà être prononcées sur le fondement des textes existants, mais elles sont rares. Cependant, il convient de ne pas pénaliser à l'extrême les relations de travail, « pénaliser » et non pas « judiciariser » car, comme je l'ai dit dans mon propos liminaire tout à l'heure, des actions en dommages et intérêts peuvent être portées devant le juge civil, actions en réparation qui sont évidemment « judiciaires ».
Je considère aussi qu'il convient de tenir compte de l'attachement des victimes à la voie pénale - le procès pénal a évidemment une force symbolique à nulle autre pareille - et à la condamnation des auteurs de harcèlement moral.
Je suis également sensible à l'argument qui consiste à aligner les sanctions en matière de harcèlement moral sur celles qui existent en matière de harcèlement sexuel. Il est vrai que, dès lors que l'on a un précédent, il est très difficile de ne pas s'y référer.
Pour ces différentes raisons, je m'en remettrai à la sagesse de votre assemblée sur cet amendement. Cependant, si le principe d'une sanction nouvelle était retenu, il conviendrait de supprimer la référence à l'abus d'autorité afin de faire apparaître plus clairement l'intention, qui est un élément caractéristique du délit. Donc, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement n° 250.
L'amendement n° 395 présenté par M. Fischer ne suscite aucun problème sur le principe. Cependant, sur la peine encourue, il vaudrait mieux s'aligner sur les dispositions concernant le harcèlement sexuel. Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 250, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 395, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

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