SEANCE DU 7 JUIN 2001


M. le président. « Art. 2. - Les ressources budgétaires de l'Etat comprennent :
« 1° Des impositions de toute nature ;
« 2° Les produits de ses activités industrielles et commerciales, les rémunérations de services rendus par lui, les produits et revenus de son domaine, les produits et revenus de ses participations financières, les intérêts des prêts, avances et dotations assimilées consentis par lui, les retenues et cotisations sociales établies à son profit, le produit des amendes, des versements d'organismes publics et privés autres que ceux relevant des opérations de trésorerie et les produits générés par les opérations de trésorerie autres que les primes à l'émission d'emprunts de l'Etat ;
« 3° Les fonds de concours, ainsi que les dons et legs consentis à son profit ;
« 4° Les remboursements des prêts et avances prévus au 2° ;
« 5° Des produits divers. »
Je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 250 rectifié, MM. Fréville, Arthuis et Badré proposent de rédiger comme suit cet article :
« Les recettes budgétaires de l'Etat comprennent les catégories suivantes :
« - les recettes définitives de fonctionnement ;
« - les recettes définitives en capital ;
« - les ressources financières non visées à l'article 25.
« Les recettes définitives de fonctionnement regroupent :
« 1° Le produit des impositions de toute nature attribué au budget de l'Etat ;
« 2° Les revenus courants des activités industrielles et commerciales de l'Etat, de son domaine, de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits, les rémunérations des services rendus par lui, les retenues et cotisations sociales établies à son profit, le produit des amendes, les versements d'organismes publics et privés autres que ceux relevant des opérations de trésorerie et les produits résultant des opérations de trésorerie autres que les primes à l'émission des emprunts de l'Etat ;
« 3° Les fonds de concours affectés au financement des dépenses de fonctionnement de l'Etat, ainsi que les dons et legs consentis à son profit ;
« 4° Les revenus courants divers ;
« 5° Les recettes définitives en capital regroupent :
« Les produits de cessions des actifs physiques de l'Etat et les produits exceptionnels divers ;
« 6° Les fonds de concours affectés au financement des dépenses en capital de l'Etat.
« Les recettes financières regroupent :
« 7° Les remboursements des prêts et avances accordés par l'Etat ;
« 8° Les produits des cessions des participations financières et des autres actifs financiers de l'Etat. »
Par amendement n° 5, M. Lambert, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa de l'article 2, de remplacer le mot : « ressources » par le mot : « recettes ».
Par amendement n° 171 rectifié, MM. Charasse, Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le 1° de l'article 2 :
« 1° Le produit des impositions de toute nature perçues par l'Etat ; ».
Par amendement n° 6, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le troisième alinéa (2°) de l'article 2 :
« 2° Les revenus courants de ses activités industrielles et commerciales, de son domaine, de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits, les rémunérations des services rendus par lui, les retenues et cotisations sociales établies à son profit, le produit des amendes, les versements d'organismes publics et privés autres que ceux relevant des opérations de trésorerie, et les produits résultant des opérations de trésorerie autres que les primes à l'émission d'emprunts de l'Etat ; ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 172, présenté par M. Charasse et tendant, après les mots : « relevant des opérations de trésorerie », à rédiger comme suit la fin du texte présenté par l'amendement n° 6 pour le 2° de l'article 2 : « les produits résultant des opérations de trésorerie autres que les primes à l'émission d'emprunts de l'Etat et les versements des organismes internationaux ou européens ; ».
Par amendement n° 7, M. Lambert, au nom de la commission, propose d'insérer, après le quatrième alinéa (3°) de l'article 2, un alinéa ainsi rédigé :
« 3° bis Les revenus courants divers ; ».
Par amendement n° 8, M. Lambert, au nom de la commission, propose à la fin du cinquième alinéa (4°) de l'article 2, de supprimer les mots : « prévus au 2° ».
Par amendement n° 9, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa (5°) de l'article 2 :
« 5° Les produits des cessions de ses participations financières ainsi que de ses autres actifs et droits ; ».
Par amendement n° 10, M. Lambert, au nom de la commission, propose de compléter in fine l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« 6° Les produits exceptionnels divers. »
La parole est à M. Fréville, pour présenter l'amendement n° 250 rectifié.
M. Yves Fréville. Quelle est l'innovation de cet amendement par rapport aux propositions de la commission, qu'il reprend très largement en ce qui concerne la définition de chaque catégorie de recettes ? L'avancée réside dans le fait de rétablir, dans la loi organique, une distinction qui existait dans l'ordonnace portant loi organique. Dans cette dernière figuraient d'abord les opérations dites définitives, par opposition à des opérations qui étaient temporaires, et que je qualifie de financières. Les opérations définitives sont clairement définies. S'agissant des opérations financières, conformément au souhait de la commission qui veut se rapprocher, dans toute la nomenclature budgétaire, des propositions de la comptabilité nationale, ce sont les opérations qui font naître des créances et des dettes à la charge de l'Etat. Si vous faites un prêt, bien entendu, vous avez une créance sur le bénéficiaire du prêt.
Je pense que cette séparation entre les opérations définitives et les opérations financières mérite d'être retenue dans la loi organique telle que nous allons la voter. Telle est notre ambition. Cela a le mérite d'éviter toute difficulté ultérieure eu égard à des opérations de trésorerie dont nous ne savons pas toujours très bien ce qu'elles sont.
Un amendement que je présenterai plus tard prévoit que toutes les opérations qui ne sont pas classées comme des opérations de trésorerie dans le texte de la commission seront considérées comme des opérations financières budgétaires.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Alain Lambert, rapporteur. L'article 2 énumère les différentes catégories de ressources de l'Etat, mais, derrière cette question qui pourrait apparaître anodine, se cache un souci de précision à relier avec ce que je proposerai en matière comptable.
A ce stade, il me semble nécessaire de distinguer clairement dans les termes ce qui relève de la comptabilité de caisse, de la comptabilité budgétaire, des recettes et des dépenses, de ce qui relève de la comptabilité d'exercice, qui retrace les ressources et les charges. Ainsi, la distinction des modes de comptabilité, mais aussi la différence entre opérations budgétaires et opérations de trésorerie en seront rendues plus aisées.
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour présenter l'amendement n° 171 rectifié.
M. Michel Charasse. Il s'agit d'un amendement de pure précision.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Alain Lambert, rapporteur. Cet amendement a une portée plutôt rédactionnelle.
A nos yeux, l'Assemblée nationale a pris une bonne direction en proposant une nomenclature des recettes qui est inspirée de celle du fascicule « Voies et moyens ». Mais le présent amendement vise à simplifier les formulations en regroupant l'ensemble des produits courants des participations financières, des actifs et des autres droits de l'Etat qui figurent à cet article 2 et en supprimant les produits qui sont liés à leur cession, qui constitue une aliénation d'actifs, que je vous proposerai de faire figurer à l'article 5.
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour défendre le sous-amendement n° 172.
M. Michel Charasse. Il s'agit aussi d'un sous-amendement de précision qui vise à prévoir que c'est dans cette rubrique que seront inscrits les versements des organismes internationaux européens. Si ce n'est pas là, il faudra me dire où c'est !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 7, 8, 9 et 10, et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 250 rectifié, 171 rectifié et sur le sous-amendement n° 172.
M. Alain Lambert, rapporteur. L'amendement n° 7 tend à éclater les produits divers prévus par l'Assemblée nationale en des revenus courants divers susceptibles de récurrence et des produits exceptionnels divers que je vous proposerai d'insérer plus loin.
Il est utile, en effet, de distinguer parmi les ressources entre les revenus courants - je pense, par exemple, à des dividendes d'action - et les produits exceptionnels qui proviennent, par exemple, de la vente d'une action.
L'amendement n° 8 est rédactionnel.
Les amendements n°s 9 et 10 sont des amendements de coordination.
S'agissant maintenant de l'amendement n° 250 rectifié, je prendrai quelques précautions car je ne voudrais pas que M. Fréville pense que je le poursuis de mauvaise manière.
Il est vrai que son amendement est intéressant dans la mesure où il vise à établir une clarification en fonction de la nature de la recette, afin d'obtenir une énumération plus claire des recettes budgétaires. Il opère un éclatement des types de recettes en reprenant, d'ailleurs, le texte de l'Assemblée nationale, modifié par les amendements adoptés par la commission.
L'Assemblée nationale, suivie par notre commission des finances, a voulu supprimer l'ancienne distinction entre opérations définitives et opérations temporaires parce qu'elle était source de confusions. Ainsi, le texte adopté par l'Assemblée nationale opère un regroupement dans les opérations budgétaires des anciennes opérations temporaires non classées en opérations de trésorerie. L'amendement de M. Fréville prévoit de les distinguer sous le terme d'opérations financières.
Mais les amendements qui sont proposés par la commission des finances distinguent mieux, à ses yeux, les différents types de ressources selon qu'ils ont ou non un caractère reconductible. Ils nous semblent opérer la clarification que M. Fréville souhaite lui-même.
S'agissant des remboursements du capital des prêts et avances, que distingue M. Fréville, l'amendement n° 10 les comprendrait dans les produits exceptionnels divers.
Au total, il me semble que la clarification proposée par la commission des finances est sans doute plus satisfaisante que celle que propose M. Fréville. Elle a, en outre, l'avantage de ne pas introduire trois grandes catégories de ressources qui, n'ayant pas de portée dans le reste du texte, pourraient être source de confusion.
Aussi, il me semble que, puisque sa préoccupation est satisfaite, M. Fréville pourrait sans dommage retirer son amendement. A défaut, la commission serait condamnée à émettre un avis défavorable.
L'amendement n° 171 rectifié apporte une précision qui est apparue utile à la commission. Celle-ci émet donc un avis favorable.
S'agissant du sous-amendement n° 172, il est vrai que nos travaux sont de nature à apporter des précisions utiles.
M. Michel Charasse. Oui !
M. Alain Lambert, rapporteur. Ce sont des éléments de référence pour interpréter la loi.
Nous visons, à l'amendement n° 6, les versements d'organismes publics ou privés, parmi lesquels figurent, à nos yeux, sans aucune ambiguïté, les organismes internationaux. Donc, nous estimons, monsieur Charasse, que votre préoccupation est satisfaite et que vous pouvez retirer votre sous-amendement.
M. Michel Charasse. Je le retire.
M. le président. Le sous-amendement n° 172 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 250 rectifié, 5, 171 rectifié et 6 à 10 ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je serai extrêmement brève. Je partage l'avis de M. le président de la commission sur les amendements n°s 250 rectifié et 171 rectifié et j'accepte les amendements qu'il a présentés au nom de la commission.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 250 rectifié.
M. Michel Charasse. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. L'amendement n° 250 rectifié ne me paraît pas pouvoir être accepté, en tout cas pas par nous !
D'abord, il revient sur le principe général de la non-affectation des recettes à des dépenses, sauf exception. Or, là, d'une manière générale, il y a une affectation : les impôts, c'est les recettes définitives de fonctionnement ; les recettes définitives en capital, c'est je ne sais quoi le produit des cessions, etc. J'ajoute que les emprunts ne sont plus des recettes budgétaires.
Ensuite, l'amendement interdit l'autofinancement des investissements, puisqu'on ne peut pas affecter ce qui reste du produit des impôts, lorsque les dépenses de fonctionnement ont été couvertes, à l'investissement. (M. Yves Fréville s'exclame.)
Veuillez m'excuser, cher ami, je lis. J'ai d'ailleurs du mal, décidément, à lire ce que vous écrivez ! (Sourires.)
En tout cas, tout cela ne me paraît pas d'une pureté et d'une orthodoxie absolues. Le principe général de non-affectation est aussi un principe d'ordre public et de paix publique.
Pour ces motifs, je ne peux pas accepter l'amendement n° 250 rectifié.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. D'abord, je dirai qu'il n'y a pas d'affectation. C'est un classement qui consiste à dire qu'il y a deux façons d'énoncer quelles sont les recettes budgétaires : on peut procéder par voie d'énumération ou fixer des principes selon lesquels, dans les impositions, dans les recettes de l'Etat, il y a des recettes en capital, des recettes définitives, des recettes de fonctionnement, et on en énumère certaines.
L'intérêt de la présentation que j'ai faite, c'est que, si certaines catégories ont été mises dans l'énumération, elles entrent dans l'appellation générale des recettes définitives. Je ferme la parenthèse.
Ce qui me paraît grave, c'est que nous abandonnons ici, en rase campagne, une distinction fondamentale des finances publiques qui a fait l'objet de discussions très nombreuses quand le budget de l'Etat comprenait des prêts et avances importants - je pense aux prêts du FDES.
Il s'agissait de savoir où était la « ligne ». Il y avait le budget au-dessus de la ligne, qui comprenait les opérations définitives et qui devait être financé d'une certaine manière, et le budget en dessous de la ligne.
Cette ligne de partage, qui avait été reprise dans l'ordonnance organique, n'est d'ailleurs pas du tout une spécificité de la France. C'est une règle générale qui vaut dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, parce que le besoin net de financement qui sert à calculer les normes européennes au regard de Dublin et de Maastricht, c'est le solde des opérations définitives.
Je suis tout à fait d'accord pour abandonner, pour dire que la France aura un système autonome et indépendant. Et l'on verra apparaître, dans les comptes de la nation, ce qui existe encore aujourd'hui, c'est-à-dire deux ou trois pages dans lesquelles on explique en long, en large et en travers comment on peut passer des définitions franco-françaises à des définitions plus européennes.
Je sais bien qu'il n'y a pas exactement adéquation entre solde des recettes et dépenses définitives et besoin net de financement. On s'en rapprochait. Je regrette très vivement que cet effort de rapprochement, entrepris depuis de longues années, soit abandonné.
M. Jean Arthuis. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arthuis.
M. Jean Arthuis. Je m'interroge sera sur ce que sur le résultat de nos travaux.
Tout d'abord, je regrette que Michel Charasse ait cru pouvoir donner une interprétation quelque peu caricaturale de notre amendement. Il est dommage que je ne lui aie pas remis le document que j'ai fait transmettre à Mme Parly en début de la séance ; il aurait pu constater que cette interprétation caricaturale n'avait pas de fondement.
Ma préoccupation, c'est la lisibilité et la clarté, c'est-à-dire celle que chacun, ici, a proclamée solennellement au cours de la discussion générale. Mais je veux bien que l'on réserve certains propos à la discussion générale et qu'on agisse autrement lorsqu'il s'agit de voter les dispositions juridiques, qui seules, finalement, comptent !
En l'instant, je dis simplement que le frémissement de la rénovation parlementaire me paraît encore un peu hésitant. Il s'agit certainement d'un texte de progrès, mais je vais attendre l'examen des autres dispositions pour me faire une opinion.
Cela étant dit, monsieur le président, en accord avec M. Fréville, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 250 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 171 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article additionnel après l'article 2