SEANCE DU 12 JUIN 2001


M. le président. « Art. 26. - Les opérations prévues à l'article 25 sont effectuées conformément aux dispositions suivantes :
« 1° Le placement des fonds, disponibilités et encaisses de l'Etat est effectué conformément aux autorisations générales ou particulières données par la loi de finances de l'année ;
« 2° Aucun découvert ne peut être consenti aux correspondants prévus au 3° de l'article 25 ;
« 3° Sauf disposition expresse d'une loi de finances, les collectivités territoriales et les établissements publics sont tenus de déposer toutes leurs disponibilités auprès de l'Etat ;
« 4° L'émission, la conversion et la gestion des emprunts sont faites conformément aux autorisations générales ou particulières données par la loi de finances de l'année. Sauf disposition expresse d'une loi de finances, les emprunts émis par l'Etat sont libellés en euros. Ils ne peuvent prévoir d'exonération fiscale. Les emprunts émis par l'Etat ou toute autre personne morale de droit public ne peuvent être utilisés comme moyen de paiement d'une dépense publique. Les remboursements d'emprunts sont exécutés conformément au contrat d'émission. »
Par amendement n° 80, M. Lambert, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa (1°) de cet article, de supprimer les mots : « fonds, » et les mots : « et encaisses ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. C'est un amendement qui vise à alléger la rédaction de l'Assemblée nationale, en mentionnant uniquement les disponibilités de l'Etat.
En effet, la mention des fonds et des encaisses n'a pas d'incidence sur la portée du dispositif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 197 rectifié, MM. Charasse, Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le quatrième alinéa (3°) de l'article 26, de remplacer les mots : « disposition expresse d'une loi de finances » par les mots : « dérogations accordées par le ministre chargé des finances ».
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Sans avoir nullement été influencé par le syndicat Force ouvrière du Trésor, qui a écrit à tous les parlementaires - j'ai reçu sa lettre plusieurs jours après avoir déposé mon amendement - je suggère, dans l'amendement n° 197 rectifié, en ce qui concerne les dérogations à l'obligation de dépôt de la trésorerie des collectivités locales au Trésor public, que nous maintenions le système actuel, pour des raisons pratiques et qui touchent surtout au droit des collectivités locales.
Je considère en effet que le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale restreint les possibilités aujourd'hui offertes aux collectivités locales dans ce domaine.
Ainsi, lorsqu'une collectivité reçoit une ressource importante, inattendue, qui gonfle sa trésorerie pour plusieurs semaines ou plusieurs mois, elle demande aujourd'hui au ministre des finances de l'autoriser à effectuer un placement total ou partiel de ses fonds exceptionnels en dehors du Trésor public et dans des conditions plus avantageuses puisque les placements au Trésor public ne sont pas productifs d'intérêts. Le ministre, si la situation le justifie, ce qui est assez fréquent, donne son accord.
Or l'Assemblée nationale propose que, désormais, il faudra une disposition expresse dans la loi de finances. Je ne sais pas si l'Assemblée nationale visait un régime d'autorisation prévu par la loi de finances et explicité par elle ou une autorisation au cas par cas, mais j'ai peur que ce ne soit au cas par cas.
Mes chers collègues, considérons une ville de la région parisienne qui, dans le cadre d'une opération d'urbanisme, vend en février, pour 1 milliard de francs, un terrain ou un groupe de terrains dont elle était propriétaire. Elle a elle-même une opération à financer à partir du mois de novembre, ou de décembre, et, jusque là, elle n'a pas besoin de ces fonds.
Aujourd'hui, elle demande au ministre l'autorisation de les placer et le ministre accepte. Demain, si le système de l'Assemblée nationale est retenu, il faudra que la ville attende la loi de finances de l'année suivante, ou un collectif en cours d'année, s'il y en a un - généralement, ils ont lieu en novembre ou en décembre - pour être autorisée à placer ces fonds. Ainsi, pour placer des fonds rentrés en février, la ville devra attendre la fin de l'année ou le début de l'année. Entre-temps, ils auront dormi au Trésor public, ils n'auront rien rapporté et la ville n'aura pas pu utilement bénéficier des intérêts qu'auraient pu rapporter des placements avantageux.
Je propose donc, je le répète, que l'on maintienne le système actuel. C'est l'intérêt des collectivités locales que je défends, car on rogne sur leurs possibilités financières avec cette disposition votée par l'Assemblée nationale.
Si mon amendement était adopté, je souhaiterais qu'à l'occasion de la navette on examine la possibilité d'autoriser à ce sujet une information des commissions des finances des assemblées.
Manifestement, la rédaction proposée visait à contrôler les opérations en cause. Mais, plutôt que d'empêcher qu'elles se fassent tant que la loi de finances ne l'a pas autorisé, il vaut mieux en rester au système actuel, quitte à ce que le Gouvernement en rende compte aux commissions des finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur. La commission n'est pas en désaccord avec Michel Charasse, mais elle lui propose une autre solution.
Dans la proposition de loi, il est proposé d'aménager le régime en loi de finances. Donc, dans une prochaine loi de finances, on pourra aménager le régime en introduisant ce que vous proposez mon cher collègue, c'est-à-dire des dérogations particulières.
M. Michel Charasse. Mais c'est voté maintenant !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas favorable à cet amendement, et je partage le point de vue exprimé à l'instant par M. le rapporteur.
Cela étant, la date de mise en oeuvre de ce nouveau dispositif me pose un problème. Si je comprends bien, elle devrait intervenir dès la loi de finances pour 2002. Or 2002, c'est demain ! Je souhaiterais donc que nous puissions nous donner un peu d'air. Je ne sais pas quelle serait la bonne date. Peut-être 2004. Nous avons en effet de très lourds travaux à mener pour permettre la mise en application de ce nouveau texte organique. En tout cas, je suis certaine qu'une mise en oeuvre en 2002 soulèverait de réelles difficultés. Je propose que nous recherchions ensemble le bon calendrier.
M. Alain Lambert, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il me semble que, à l'article 54, nous pourrions donner satisfaction à Mme la secrétaire d'Etat.
Je veux convaincre Michel Charasse que nous ne sommes absolument pas en désaccord. Pour l'intant, tout cela relève de la loi organique et nous avons pu constater, à une ou deux reprises, que nous ne pouvions pas en sortir sans réformer la loi organique. Je lui propose donc d'aménager le régime en loi de finances et, à ce moment-là, le cas qu'il a évoqué pourra être pris en compte.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Charasse ?
M. Michel Charasse. Peut-être suis-je borné, mais je ne comprends rien dans cette affaire.
Aujourd'hui, nous pouvons obtenir à tout moment du ministre des finances une dérogation de dépôt au Trésor public. Sera-ce toujours le cas demain, sans être obligé d'attendre le vote d'une loi de finances ?
Monsieur le rapporteur, si vous me répondez par l'affirmative, je veux bien, mais cela signifie que le texte que vous nous proposez, ou que vous soutenez prévoit en fait que la loi organique, qui ouvre aujourd'hui cette possibilité, déterminera demain les modalités selon lesquelles le ministre accorde ces autorisations, mais ne donnera pas des autorisations au cas par cas.
Si vous me dites qu'il s'agit de réglementer la pratique sans que l'on soit obligé d'attendre qu'une loi des finances intervienne pour donner cette autorisation à la ville d'Alençon, ou, si vous préférez, à la commune de Puy-Guillaume - vous vous êtes vexé tout à l'heure parce que je citais votre ville - ou au village dans lequel habite Mme Parly -, si on énumère ces autorisations dans la loi de finances, on ne s'en sort pas ! - s'il s'agit de laisser aux lois de finances le soin de poser les règles générales selon lesquelles le ministre accorde les autorisations, alors, je n'ai plus d'objection. Seulement, il faut quand même revoir la rédaction qui nous vient de l'Assemblée nationale parce qu'elle est si générale qu'on pourrait en déduire en toute rigueur qu'elle vise les autorisations individuelles, ce que nous ne souhaitons évidemment pas.
Sous le bénéfice de ces observations, je veux bien retirer l'amendement n° 197 rectifié, mais je dis amicalement à Alain Lambert qu'on lui pardonnerait mal dans cette assemblée de « raboter », pour cause de rédaction « mal fichue », les possibilités dont disposent aujourd'hui les collectivités locales.
M. le président. L'amendement n° 197 rectifié est retiré.
Par amendement n° 81, M. Lambert, au nom de la commission, propose, dans le quatrième alinéa (3°) de l'article 26, de remplacer les mots : « les établissements publics » par les mots : « leurs établissements publics ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. A la lecture de cet amendement, on pourrait penser qu'il ne s'agit que d'une modification rédactionnelle. En réalité, nous visons à exclure les établissements publics nationaux de l'obligation de dépôt. Celle-ci, dès lors, ne s'appliquerait plus qu'aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics.
Il semble en effet souhaitable que le régime des dépôts puisse, s'agissant des disponibilités des établissements publics nationaux, être décidé au cas par cas par voie réglementaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 82, M. Lambert, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du cinquième alinéa (4°) de l'article 26, de remplacer le mot : « faites » par le mot : « effectuées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 82, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 83, M. Lambert, au nom de la commission, propose, à la fin de la quatrième phrase du cinquième alinéa (4°) de l'article 26, de supprimer les mots : « d'une dépense publique ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert, rapporteur. Le texte adopté par l'Assemblée nationale précise que les emprunts émis par l'Etat ou toute autre personne morale de droit public ne peuvent être utilisés comme moyens de paiement d'une dépense publique. Cet amendement vise à interdire de manière générale l'utilisation de ces titres comme moyen de paiement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. J'avoue que je suis un peu perplexe, car cet amendement introduit une restriction qui n'existait pas jusqu'à présent et dont je ne perçois pas l'utilité.
Autant il me paraît tout à fait sain d'empêcher l'Etat d'utiliser ses propres titres de dette en paiement de ses propres dépenses, autant je crois inutile d'étendre cette restriction à l'ensemble des transactions, y compris aux personnes privées, ou d'en donner le sentiment.
Si c'est la première interprétation qui prévaut, cet amendement ne nous pose pas de difficulté ; si ce devait être la seconde, le Gouvernement y serait défavorable.
M. Alain Lambert, rapporteur. C'est la première interprétation qui est la bonne, madame la secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26, modifié.

(L'article 26 est adopté.)

Division additionnelle après l'article 26