SEANCE DU 21 JUIN 2001


M. le président. « Art. 3 bis. - Après le premier alinéa de l'article L. 132-7 du code des assurances, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article sont d'ordre public. »
Par amendement n° 6, M. About, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi cet article :
« L'article L. 132-7 du code des assurances est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots : "et consciemment" sont supprimés ;
« 2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'assurance en cas de décès doit couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat. » ;
« 3° Le début du second alinéa est ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables... (le reste sans changement). »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 63, présenté par M. Machet, et tendant à compléter in fine l'amendement n° 6 par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° Le second alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas d'augmentation des garanties en cours de contrat, le risque de suicide, pour les garanties supplémentaires, est couvert à compter de la deuxième année qui suit cette augmentation. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Nicolas About, rapporteur. Cet amendement porte sur la couverture du risque décès en cas de suicide à l'issue d'une année après la signature du contrat.
L'amendement a un double objet : d'une part, contraindre les assureurs à couvrir le suicide à partir de la deuxième année à compter de la signature du contrat et, d'autre part, permettre l'exclusion effective du suicide pendant la première année du contrat.
Nous avons prévu de supprimer le mot « consciemment » du premier alinéa de l'article L. 132-7 du code des assurances afin de contrer des jurisprudences. En effet, il était impossible de prouver que l'assuré était conscient au moment où il s'était donné la mort.
Nous voulons donc à la fois protéger les assureurs pendant la première année et les assurés au-delà de cette première année.
M. le président. La parole est à M. Machet, pour défendre le sous-amendement n° 63.
M. Jacques Machet. Le contrat d'assurance est un contrat aléatoire, ce qui signifie qu'il ne couvre pas les sinistres volontairement créés par l'assuré. C'est la raison pour laquelle le suicide est exclu en assurance décès dans tous les pays d'Europe.
L'article L. 132-7 du code des assurances, modifié par l'article 3 bis de la proposition de loi, prévoit toujours la non-couverture du risque de suicide la première année du contrat pour des raisons techniques et morales évidentes, d'autant qu'il faut rappeler que notre pays est très concerné par ce fléau. Plus de onze mille décès sont enregistrés par an, en majorité des jeunes, chiffre supérieur au nombre de tués par accident de la circulation.
Toutefois, pour résoudre les difficultés dans lesquelles le suicide d'un époux peut placer le conjoint survivant, l'amendement à l'article 3 bis modifie l'article L. 132-7 du code des assurances afin d'obliger l'assureur à couvrir le risque de suicide dès la deuxième année du contrat.
Cependant, comme l'assureur s'engage à couvrir le suicide dès la deuxième année, il faut éviter qu'un souscripteur puisse majorer les garanties d'un contrat en cours afin de contourner le dispositif. Tel est l'objet de ce sous-amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 63 ?
M. Nicolas About, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et sur le sous-amendement n° 63 ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. L'objet de l'amendement est double : d'une part, préciser, pendant la première année du contrat, les conditions de mise en jeu des exclusions de garanties prévues par l'article L. 132-7 du code des assurances, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, et, d'autre part, introduire de façon expresse, au même article, l'obligation pour l'assureur de couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat.
Sur le premier point, le mécanisme proposé s'écarte de celui qui a été retenu par l'Assemblée nationale. Cette dernière a voté, en première lecture, un amendement reconnaissant un caractère d'ordre public aux dispositions de l'article L. 132-7, voulant interdire toute dérogation conventionnelle à cette disposition.
L'amendement n° 6 de la commission des lois repose sur un autre mécanisme, puisqu'il consacre une exclusion générale de garanties en cas de suicide survenu pendant la première année du contrat et décharge l'assureur d'avoir à apporter la preuve de son caractère conscient. Il laisse par ailleurs libre place à la liberté contractuelle.
Cette rédaction ne me semble pas de nature à bien résoudre cette question ni à répondre au souci de concilier les impératifs de lutte contre la fraude à la loi avec la nécessaire protection de l'assuré.
Je souhaite que cette disposition intéressante et particulièrement délicate puisse être réexaminée de manière plus approfondie au cours de la navette parlementaire. En l'état, je suis donc défavorable à l'amendement et au sous-amendement, mais je m'engage à participer à ce travail de réflexion.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 63, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 bis est ainsi rédigé.

Article additionnel après l'article 3 bis