SEANCE DU 26 JUIN 2001


M. le président. La parole est à M. Amoudry, auteur de la question n° 1106, adressée à M. le ministre délégué à la santé.
M. Jean-Paul Amoudry. En Haute-Savoie, département limitrophe de la Suisse, les responsables des établissements hospitaliers et d'accueil pour personnes âgées dépendantes et les élus concernés rencontrent les plus grandes difficultés en raison d'une très grave pénurie de personnels infirmiers et d'aides-soignantes.
Ainsi, les établissements hospitaliers de Thonon-les-Bains, d'Annemasse, de Sallanches et de Saint-Julien-en-Genevois sont contraints, pour tenter de maintenir la qualité des soins et la sécurité des malades, de fermer plusieurs dizaines de lits durant la période estivale, ce qui est invraisemblable dans une région touristique où la population double pendant les mois de juillet et d'août.
Pour ce seul département, près de 500 postes d'infirmier et plus de 350 postes d'aide-soignant ne peuvent actuellement être pourvus. Or le nombre des personnels infirmiers par millier d'habitants est déjà le plus faible de France dans ce département : on en compte en effet 362 pour 1 000 habitants, contre 621 en moyenne dans la région Rhône-Alpes.
Cette situation s'explique à la fois par le haut niveau du coût de la vie en Haute-Savoie et par l'existence simultanée, en Suisse, d'une pénurie similaire de ces catégories de personnels de santé.
Ce phénomène contrarie aujourd'hui la réalisation de projets de création ou d'extension de MAPAD - maisons d'accueil pour personnes âgées dépendantes - nécessités par le fait qu'en neuf ans la Haute-Savoie a vu sa population de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans augmenter de 56 %.
A brève échéance, la fermeture de structures de soins ou d'accueil existantes risque même de s'imposer, par manque de personnel qualifié.
Ce problème majeur de santé publique sera encore aggravé par la mise en application des 35 heures et par l'entrée en vigueur des accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne : tout donne à penser en effert que, avec quelque 8 000 habitants supplémentaires par an, venant s'ajouter aux 7 000 personnes qui, chaque année depuis dix ans, accroissent la population haut-savoyarde, ce département, déjà au troisième rang national pour la croissance démographique, risque bien de battre à l'avenir tous les records en ce domaine.
La Haute-Savoie connaît donc une situation grave et atypique, qui explique que les solutions qui ont pu être mises en oeuvre ailleurs avec plus ou moins de succès se révèlent inopérantes dans ce départemment.
C'est pourquoi je souhaite que, par des mesures volontaristes et appropriées, ce grave problème soit traité.
Quelles peuvent être ces mesures ?
D'abord, s'agissant de la formation, si le relèvement sensible des quotas d'élèves infirmiers traduit la volonté de résorber le déficit, il n'apporte, au cas particulier, aucune véritable solution. Sans doute 145 places supplémentaires ont-elles été attribuées aux trois instituts de formation aux soins infirmiers existants en Haute-Savoie, mais seules vingt d'entre elles ont pu être pourvues. Cet échec, ressenti comme la conséquence d'une moindre attractivité de la profession, semble également résulter d'une procédure de sélection très restrictive des candidats à la formation.
Il importe donc d'adapter les conditions d'entrée afin que les places disponibles dans les instituts de formation aux soins infirmiers soient réellement pourvues. De même, il faudrait augmenter la capacité des formations d'aides-soignantes et d'aides médico-psychologiques.
Ensuite, concernant plus spécifiquement les MAPAD, le statut de la fonction publique territoriale, dont relèvent les personnels employés par ces établissements lorsqu'ils sont gérés par des collectivités locales, retire, du fait de ses caractéristiques et de sa rigidité, toute possibilité de rendre ces métiers attractifs.
L'évolution de ce statut vers un régime de type hospitalier, sans résoudre à elle seule tous les problèmes, constituerait néanmoins un premier pas.
Enfin, l'attribution de logements liés au service serait sans nul doute l'un des moyens les plus pertinents pour fidéliser les personnels infirmiers. Mais, là encore, la rigidité statutaire bloque toute évolution.
C'est pourquoi tous les responsables haut-savoyards, qu'ils soient médicaux, sociaux, politiques ou administratifs, attendent d'urgence des mesures novatrices et appropriées pour résoudre ce problème de santé publique et de responsabilité sociale qui est aujourd'hui d'une extrême gravité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le sénateur, le ministre délégué à la santé est tout à fait conscient des difficultés rencontrées par les établissements hospitaliers et d'accueil de personnes âgées dépendantes pour recruter des personnels soignants - infirmières et aides-soignantes -, notamment dans les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie.
L'Etat ne reste cependant pas inerte et s'attache au contraire à améliorer la situation de ces établissements au travers de programmes d'actions concernant aussi bien les infirmières que les aides-soignantes.
S'agissant des infirmières, le programme d'action s'articule sur trois points.
En premier lieu, le quota régional d'étudiants admis à entreprendre une formation d'infirmier dans la région Rhône-Alpes a été fixé à 1810 en 1999 et à 2 600 en 2000 et en 2001, ce qui représente une augmentation de 43,65 % en deux ans. Dans ce cadre, le département de la Haute-Savoie a bénéficié d'une augmentation substantielle, passant de 176 étudiants en 1999 à 321 en 2000 et en 2001, soit une croissance de 82,39 % pour ce seul département, ce qui représente une croissance qui est le double de la moyenne régionale.
Ensuite, et dès 2002, les effets du protocole d'accord de mars 2001 renforceront l'attractivité de la profession infirmière.
Je citerai notamment à cet égard : le relèvement de l'échelon terminal du premier grade ; la réforme de la structure du classement indiciaire intermédiaire de trois à deux grades, qui contribuera à améliorer la promotion à l'intérieur du corps ; l'augmentation de 34 points majorés de l'indice terminal ; enfin, la création d'un corps de débouché de cadre de santé, classé en catégorie A.
Des mesures spécifiques concerneront également les étudiants en institut de formation en soins infirmiers. Il s'agit de la revalorisation des bourses d'études de 3,3 %, de l'indemnisation des stages pratiques appliquée sur les trois années de formation et de la prise en charge des frais de déplacements occasionnés pour les stages se trouvant en dehors de la commune où est situé l'institut.
Enfin, deux mesures visent à favoriser le développement du recrutement du personnel infirmier.
La première concerne l'accueil d'infirmiers en provenance de pays membres de la Communauté européenne, espagnols et portugais en particulier. Une expérimentation avec des infirmiers espagnols est en cours dans la région Midi-Pyrénées et est susceptible d'être étendue à d'autres régions dans les mois à venir.
La seconde a trait à l'instauration d'un programme de retour à l'emploi à destination des infirmiers ayant cessé leur activité depuis plus de cinq ans. Leur population est évaluée à 50 000 candidats. La mise en oeuvre de ce programme débutera au dernier trimestre de 2001. Six régions ont été ciblées comme prioritaires, notamment la région Rhône-Alpes.
Les aides-soignantes seront également concernées. Un projet est à l'étude pour renforcer le quota d'entrée aux écoles d'aide-soignant, de façon à ouvrir plus largement la formation aux publics concernés, notamment aux élèves de BEP médico-social. Cette mesure s'appliquerait dès 2002 et aurait un effet rapide compte tenu de la brièveté de la formation : un an.
Par ailleurs, une relance de la promotion professionnelle au sein des établissements est à l'étude.
Vous voyez, monsieur le sénateur, que c'est une stratégie globale que met en oeuvre le Gouvernement pour ramener une partie des étudiants potentiels vers ces professions.
M. Jean-Paul Amoudry. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Monsieur le ministre, j'ose espérer que votre réponse annonce une solution à court terme au problème du recrutement des infirmiers et des aides-soignants. Je n'en suis pourtant pas certain compte tenu du caractère d'urgence et de l'extrême gravité de la situation, qui va très vite devenir carastrophique.
Il faut mettre un terme à l'extrême tension vécue par les chefs d'établissement, confrontés à des responsabilités qui ne sont pas les leurs, par les cadres dirigeants, voire par les élus en charge des CCAS, les centres communaux d'action sociale.
Je souhaite que l'actuelle pénurie de personnel ne se double pas d'une pénurie durable de crédits. Le département que je représente est le seul de la région Rhône-Alpes à devoir créer des capacités importantes d'accueil pour personnes âgées dépendantes. Or, aujourd'hui, la répartition de l'enveloppe régionale ne permet pas de tenir compte de cette nécessité. Je vous remercie de bien vouloir être mon porte-parole auprès de M. le ministre délégué à la santé pour envisager la création d'une enveloppe spécifique correspondant à ces données nouvelles.

REVALORISATION DES PRIX DE JOURNÉE
DANS LES CLINIQUES DE MÂCON