SEANCE DU 18 OCTOBRE 2001


M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Gournac pour explication de vote.
M. Alain Gournac. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le groupe du RPR du Sénat qui s'est toujours engagé dans la lutte contre toutes les formes de discrimination, qui ne peut être qu'en accord avec la volonté du Gouvernement de se doter d'un arsenal législatif à cet effet.
Comme l'a excellemment expliqué notre rapporteur, il demeure, après les deux premières lectures, deux séries de dispositions ayant donné lieu à un désaccord avec l'Assemblée nationale : le régime de la charge de la preuve et le rôle reconnu aux syndicats et aux associations pour se substituer aux salariés dans une procédure contentieuse.
Concernant le premier point d'achoppement, il nous semble que le texte proposé par notre rapporteur, que le Sénat vient d'adopter, constitue un arsenal équilibré qui devrait permettre de faire progresser considérablement l'état du droit. Reprenant littéralement le texte des directives européennes, qui correspondent au droit déjà appliqué par la plupart de nos partenaires européens, il évite l'écueil de la multiplication de contentieux au sein des entreprises, qui ne sont pas outillées pour y faire face. Il évite également l'instauration d'un climat de psychose, à l'occasion duquel certains employeurs pourraient être amenés à privilégier systématiquement les candidatures de personnes susceptibles d'être discriminées afin de se prémunir contre toute contestation ou, plus grave, pourraient renoncer à embaucher.
Quant au rôle des syndicats et des associations dans la défense du salarié présumé victime d'une discrimination, l'Assemblée nationale a finalement adopté les modifications proposées par le Sénat concernant l'encadrement de l'action des associations. Celles-ci devront pouvoir justifier de l'accord écrit du salarié et ce dernier pourra mettre un terme à tout moment à l'action de l'association. La liberté du salarié est ainsi reconnue. On peut, dans ces conditions, regretter que la même démarche n'ait pas prévalue concernant l'action du syndicat. Cela justifie le rétablissement du texte du Sénat sur ce sujet.
Pour toutes ces raisons, le groupe du RPR du Sénat votera cette proposition de loi telle qu'elle a été amendée par la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'une discussion qui a permis d'enrichir le texte sur un certain nombre de points grâce aux apports du Sénat.
En effet, la Haute Assemblée a pu intégrer, par exemple, parmi les motifs de discrimination, le motif de l'âge, qui s'est ajouté ainsi aux discriminations liées au sexe, à l'origine ou aux orientations personnelles.
Il est vrai qu'aujourd'hui une personne de cinquante ans a beaucoup plus de mal à retrouver un emploi qu'une personne de trente ans, même si elle peut présenter les compétences requises et une expérience confirmée.
Durant les deux lectures, le Sénat a eu à coeur d'imposer certains principes qui sont en conformité avec la directive européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes, sans distinction de race ou d'origine ethnique.
Il est surprenant que l'Assemblée nationale n'ait pas cru devoir suivre la même ligne. C'est la raison principale de l'échec de la commission mixte paritaire. En effet, nos deux assemblées ne se sont pas entendues sur la principale disposition du texte, je veux parler de l'aménagement de la charge de la preuve.
Par deux fois, le Sénat a souhaité que le salarié « établisse des faits » qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination. Cette rédaction est en conformité avec la directive européenne.
L'Assemblée nationale s'est pourtant opposée à cette exigence de bon sens et de sagesse. Sa position va indéniablement engendrer des abus au préjudice de l'employeur qui, perpétuellement, devra se justifier.
Par ailleurs, un second différend demeure entre les deux assemblées pour savoir si un syndicat peut se dispenser de l'accord du salarié pour intenter une action en justice.
Cette position est une atteinte au respect de la volonté de la personne. Le Sénat, respectueux des droits de la personne et du droit en général, n'a pu l'admettre.
Avec les membres du groupe de l'Union centriste, nous avons donc adopté les amendements proposés par le rapporteur de la commission des affaires sociales, notre excellent collègue et ami Louis Souvet, auquel je veux rendre hommage pour ses compétences en la matière.
Il a toujours su, avec modération et impartialité, orienter notre assemblée dans la voie de la sagesse et du respect du droit.
Avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, je voterai donc le texte amendé une troisième fois par la majorité sénatoriale. Celle-ci est consciente de la nécessité impérieuse de respecter le principe de l'égalité de traitement entre les personnes, en conformité avec les directives européennes, mais également de permettre une lutte plus efficace contre les discriminations en préservant non seulement les droits des victimes mais également ceux des responsables d'entreprise. En effet, dans cette affaire, il n'y a pas les bons, d'un côté, et les méchants, de l'autre, comme semblent le penser certains.
Si des progrès sont encore à faire dans la lutte contre les discriminations - il y en a, il y en aura toujours ! - il ne faut pas pour autant compromettre la nécessaire marge de manoeuvre des entreprises dans la gestion de leur personnel. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

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