SEANCE DU 22 JANVIER 2002


M. le président. La parole est à M. Mouly, auteur de la question n° 1229, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, ma question et celle de M. Cleach sont quelque peu redondantes. Certains éléments de la réponse que vous avez apportée à M. Cleach sont intéressants, mais ma question a un caractère plus général.
La nécessité d'une réforme du dispositif de protection des majeurs fait aujourd'hui l'objet d'un large consensus.
Il faut dire que la question est d'importance. La protection des majeurs « incapables » - la tutelle au sens large - qui concerne aujourd'hui plus de 500 000 personnes a connu une forte augmentation depuis plus de dix ans. L'évolution de l'environnement démographique et social a engendré de nouvelles pratiques. Les comportements ont évolué, les attentes aussi.
Trente ans après les innovations législatives qui ont permis de mettre en place ce dispositif, original et pertinent, nombreux sont ceux qui appellent de leurs voeux une réforme.
Après de nombreuses études, inspections, auditions et un état des lieux complet, des propositions intéressantes ont été formulées dans le rapport élaboré par le groupe de travail interministériel présidé par M. Favard.
Ce rapport conclut, entre autres, que, « s'il n'y a pas lieu de remettre en cause l'économie générale de la loi du 3 janvier 1968, le temps est venu d'une consécration législative du principe selon lequel la protection des majeurs instaurée par cette loi a pour finalité la protection de leur personne tout autant que la sauvegarde de leurs biens ».
Le rapport réaffirme certains principes fondamentaux comme le respect de la dignité de la personne protégée, les notions de nécessité et de subsidiarité, l'accompagnement du majeur qui doit être global et intégrer la dimension personnelle et patrimoniale et la mise en place d'un réseau de proximité. Comment ne pas y adhérer ?
Pour reprendre les interrogations que j'ai déjà eu l'occasion de formuler lors de questions orales au Gouvernement, et que j'ai renouvelées par des correspondances qui sont restées sans réponse, et parce que chacun semble appeler de ses voeux une politique d'ensemble tenant compte des aspects humains, sociaux, juridiques, financiers et institutionnels du service de protection des majeurs, il me paraît essentiel de veiller à ce que ce rapport permette aux associations tutélaires de recevoir un financement à la hauteur de la tâche qui leur est confiée, mission d'intérêt général qu'elles remplissent souvent dans des conditions difficiles.
Mme Guigou, alors ministre de la justice, lors des assises nationales du mois de décembre 1999 avait affirmé qu'il « est bien de la responsabilité de l'Etat de veiller à ce que la loi soit adaptée aux besoins des citoyens ». Je crois donc pouvoir ajouter ma voix à celles et à ceux qui réclament d'urgence une loi, élaborée en concertation, dans le même esprit que celui qui a présidé à l'élaboration du rapport Favard. Il y a urgence parce que certaines associations sont en difficulté pour assumer correctement leurs missions au bénéfice d'une population particulièrement fragile.
Je me permets donc de vous demander si le Gouvernement envisage de présenter un projet de loi réformant le dispositif de protection des majeurs et, si possible, dans quels délais.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Monsieur le sénateur, vous nous interrogez sur l'éventuelle mise en oeuvre de la réforme du dispositif de protection juridique des majeurs, notamment après les conclusions du rapport Favard qui a été rendu public au mois de mai 2000. Il est vrai que les associations rencontrent des difficultés de fonctionnement et que le dispositif actuellement en vigueur est confronté à des dérives. Ces problèmes ont été exposés dans le rapport du groupe interministériel présidé par M. Favard, qui lui-même faisait suite au rapport conjoint des trois inspections générales : finances, services judiciaires et affaires sociales, déposé au mois de mai 1998.
Face à ces constats, des propositions ont été émises, qui serviront de base de travail pour le projet de réforme engagé par le Gouvernement. En effet, la réforme du dispositif de protection juridique des majeurs constitue une priorité gouvernementale pour 2002. Revêtant un caractère interministériel, elle fait l'objet d'une collaboration entre le ministère de la justice et ceux de l'emploi et de la solidarité, de l'économie, des finances et de l'industrie, et de l'intérieur.
Le calendrier établi prévoit une communication en conseil des ministres et le dépôt d'un projet de loi concernant les modifications du code civil au mois de mars.
Le projet de réforme du dispositif suit quatre axes.
Le premier consiste à redéfinir les contours et le contenu de la protection juridique afin d'assurer un meilleur respect des principes fondateurs de la loi du 3 janvier 1968. L'objectif est donc de renforcer la protection de la personne ainsi que de réaffirmer, d'une part, les principes de nécessité et de subsidiarité de la mesure de protection et, d'autre part, le principe du respect de la personne et de ses droits dans le processus judiciaire. Dans ce souci, sera mise en place une mission d'évaluation médico-sociale préalable à toute éventuelle saisine judiciaire.
Le deuxième axe vise à organiser le recrutement et à harmoniser la formation des délégués à la protection juridique des majeurs. Il est ainsi envisagé d'élaborer un référentiel commun de formation afin de permettre la meilleure gestion des mesures de protection de la personne et de ses biens. Cette formation unique sera sanctionnée par un certificat national de compétence et l'établissement d'une liste nationale unique de délégués.
Le troisième axe prévoit de renforcer le dispositif de contrôle des comptes de gestion des majeurs protégés qui n'est pas assez opérant, malgré les améliorations apportées par la loi du 8 février 1995 qui a confié aux greffiers en chef la mission jusqu'alors dévolue au juge des tutelles.
Enfin, le dernier axe consiste à remettre à plat le système de financement afin d'assurer une meilleure efficacité de l'action. L'objectif est d'harmoniser les rémunérations de tous les délégués et de mettre en place, après expérimentation, un financement par dotation globale permettant de doter les services gestionnaires des moyens financiers adaptés à l'action à conduire.
Les orientations de ce projet de réforme tendent à concilier, d'une part, l'exigence de la protection de la personne et de ses biens rendue nécessaire par les aléas de la vie et, d'autre part, le respect des libertés individuelles, dont le juge est garant, en aménageant le dispositif mis en place en 1968 afin de tenir compte de l'évolution sociale et économique.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, dont j'apprécie la teneur. Il est vrai que le rapport Favard est un rapport de qualité qui avait suscité beaucoup d'espoir. C'est une base de travail pour un projet de réforme. Un projet de loi doit d'ailleurs être présenté au mois de mars.
Concernant les quatre axes que vous avez développés - chacun ici peut les apprécier - il reste à espérer qu'en mars, période perturbée s'il en est, on puisse aboutir à des résultats concrets.

AMÉNAGEMENT DU TEMPS DE TRAVAIL
DANS LE SECTEUR DES TRANSPORTS SANITAIRES