SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 7. - Après l'article 78-2-3 du code de procédure pénale, il est créé un article 78-2-4 ainsi rédigé :
« Art. 78-2-4 . - Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent procéder non seulement aux contrôles d'identité prévus au septième alinéa de l'article 78-2 mais aussi, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
« Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes.
« Les alinéas 2, 3 et 4 de l'article 78-2-2 sont applicables aux dispositions du présent article. »
La parole est à M. Jacques Mahéas, sur l'article.
M. Jacques Mahéas. Nous n'avons pas déposé d'amendement à l'article 7, qui vise à insérer un article 78-2-4 dans le code de procédure pénale afin d'accorder une faculté d'autorisation générale de contrôle d'identité et de visite de véhicules, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instruction du procureur de la République, pour prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes et des biens.
Comme dans l'article 78-2-2, il s'agit de « véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ».
« Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes. »
Monsieur le président, je vais m'exprimer globalement sur l'article, ce qui m'évitera d'intervenir sur les amendements n°s 139 et 74.
Les auteurs de l'amendement n° 139 jugent que la notion d'atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens est trop vague.
Toutefois, je signale que les garanties apportées par l'article 5 du projet de loi s'appliquent : temps de visite limité ; établissement du procès-verbal adressé au procureur de la République ; véhicules d'habitation exclus du champ de l'article. En ce qui concerne l'amendement n° 74, je pense que M. Charasse pourrait le retirer. En effet, proposer de telles dispositions, c'est méconnaître la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à la visite des véhicules.
M. le rapporteur le rappelait : en 1995, le législateur avait décidé de permettre au représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, au préfet de police, d'interdire le port et le transport, sans motif légitime, d'objets pouvant constituer une arme en cas de manifestation sur la voie publique. Le texte permettait aux officiers de police judiciaire, sur instruction du préfet, de fouiller les véhicules circulant sur la voie publique et de saisir les objets détenus en contravention avec l'interdiction édictée par le préfet. L'application de ces règles était soumise au contrôle des autorités judiciaires, après avis donné sans délai au procureur de la République des instructions formulées par le préfet.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Je vais le retirer, mon cher collègue.
M. Jacques Mahéas. Je vous remercie !
M. Michel Charasse. J'ai effectivement déposé un amendement sur l'article 7, mais, en le relisant, je l'ai trouvé idiot, et ce pour une raison très simple : à partir du moment où l'on décèle la présence d'une arme à travers la vitre d'un véhicule que l'on arrête, on se trouve dans une situation de flagrance.
M. Jacques Mahéas. Bien sûr !
M. Michel Charasse. Je n'entrerai pas davantage dans le détail.
Cet amendement est soit idiot, soit inutile. En fait, il est idiot parce qu'il est inutile, puisque les textes permettent déjà d'agir.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, il est inutile parce qu'il est idiot !
M. Michel Charasse. Ce n'est pas la même chose ! Je ne qualifierai pas de stupides des textes qui permettent déjà d'agir, ce que vous faites, monsieur Dreyfus-Schmidt, en inversant la proposition.
Cela étant, et pour ne pas retarder nos travaux, monsieur le président, je retire l'amendement n° 74.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 139, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mmes Luc et Mathon, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme Terrade, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 74, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 78-2-4 du code de procédure pénale :
« Dans l'attente des instructions du procureur de la République, et sauf si des éléments de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens sont visibles de l'extérieur du véhicule, celui-ci peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes. »
Je rappelle que M. Charasse vient de retirer cet amendement.
La parole est à Mme Josiane Mathon, pour présenter l'amendement n° 139.
Mme Josiane Mathon. Nous demandons la suppression de l'article 7, qui tend à insérer un article 78-2-4 dans le code de procédure pénale donnant aux officiers de police judiciaire le droit de procéder à la visite des véhicules pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens.
Certes, nous le réaffirmons, nous considérons que cette notion d'atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens est bien trop vague pour autoriser des contrôles d'identité et des fouilles de véhicules qui constituent, nous avons déjà eu l'occasion de le dire et nous y insisterons encore et encore, des atteintes au respect de la vie privée.
Cependant, une question se pose : la charge de travail des substituts ne va-t-elle pas augmenter, notamment la nuit ? Nous sommes donc en train de légiférer sans prendre les mesures qui s'imposent. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 139 ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'article 7 permet de procéder à des visites de véhicules en cas de risque d'atteinte grave à la sécurité des personnes ou des biens. Cet article peut présenter une très grande utilité dans certaines circonstances d'urgence. Il faut rappeler que les visites de véhicules ne pourront avoir lieu qu'avec l'accord du procureur de la République.
Par conséquent, nous émettons un avis très défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Défavorable.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'évidence, il y aura du travail pour le parquet, encore que, là, les instructions du procureur de la République peuvent être communiquées par tous moyens, notamment par téléphone.
Toutefois, une question se pose. On va arrêter M. Hilaire Flandre, par exemple, et on va lui dire : on voudrait fouiller votre voiture.
M. Hilaire Flandre. Je suis d'accord !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il demandera alors si cette fouille intervient dans le cadre de tel article parce que le procureur de la République l'a décidé, ou bien parce qu'il y a eu flagrant délit, ou bien encore parce qu'il s'agit de prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes. C'est tout de même extrêmement compliqué, c'est le moins qu'on puisse dire !
On ne saura pas pourquoi on est contrôlé et en vertu de quoi. Il faudrait peut-être prévoir l'information des personnes, leur fournir un document écrit, par exemple, pour que puisse s'exercer un certain contrôle.
M. Hilaire Flandre. Monsieur Flandre a l'esprit plus simple ; c'est un bon citoyen qui dit aux représentants de l'ordre : « Tenez, voilà les clefs de mon véhicule ! » (Sourires.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est ça ! Je vous ai déjà pourtant dit que cela pouvait se produire, pour certains, dix fois par jour !
D'ailleurs, vous m'avez vous-même répondu que les criminels, les délinquants, les voleurs et les receleurs se feraient dorénavant contrôler le matin, de manière à ne plus être inquiétés ensuite. Donc, certains seront contrôlés, mais pas vous, soyez tranquille, surtout pas avec la cocarde sur la voiture. Vous aurez bien des PV de stationnement, mais vous ne serez pas contrôlé dix ou quinze fois par jour !
M. Gérard Braun. Ridicule !
Mme Nelly Olin. Oui, vraiment !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela étant, il serait tout de même nécessaire de savoir pourquoi et en vertu de quoi l'on est fouillé. A défaut, aucun contrôle ne sera possible.
M. Robert Bret. Et c'est l'arbitraire total !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par conséquent, nous voterons l'amendement de suppression de l'article 7.
M. Hilaire Flandre. Pas nous !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article additionnel après l'article 7