SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002


M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Monsieur le ministre, au moment où la lutte contre l'insécurité et contre la violence scolaire est à l'ordre du jour, personne ne comprend votre décision de supprimer 5 600 postes de surveillant.
M. Didier Boulaud. Il n'a pas fait exprès !
M. le président. Laissez au moins parler l'orateur de votre groupe !
M. Jean-Pierre Sueur. Merci, monsieur le président.
Nous n'avons rencontré aucun élu, aucun maire, aucun chef d'établissement, aucun parent d'élève qui considère que, dans notre pays, il y a trop de postes de surveillant. Cette décision n'est comprise par personne aujourd'hui.
Si vous persévérez dans cette voie, monsieur le ministre, il y aura cinquante surveillants en moins dans chaque département. Comme vous avez de surcroît décidé de supprimer également des postes d'aide-éducateur, il y aura, au total, beaucoup moins d'adultes pour encadrer les jeunes dans les collèges et dans les écoles, là où c'est particulièrement nécessaire.
Vous avez déjà apporté des éléments de réponse à cette question, mais ils ont été considérés par vos principaux interlocuteurs comme flous, parfois contradictoires et embarrassés. Aussi, je souhaite vous poser deux questions très précises.
Pour lutter contre la violence scolaire, il est nécessaire que plus d'adultes soient présents dans les établissements pour encadrer les élèves. Il faudrait qu'il y en ait au moins autant à la prochaine rentrée que lors de la dernière. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que, à la rentrée 2003, les effectifs de surveillants et d'aides éducateurs soient au moins équivalents à ceux de la rentrée 2002 ?
Ma seconde question est la conséquence de la première. Il est évident que, si vous répondez positivement à la première, cela entraînera des conséquences financières. Je vous demande de bien vouloir nous indiquer si vous comptez présenter, dans quelques jours, lorsque nous examinerons le budget du ministère de l'éducation nationale, un amendement tendant à augmenter les crédits pour permettre de conserver ces postes d'aides éducateurs et de surveillants dans tous nos départements. Personne, en effet, ne comprendrait leur suppression. (Applaudisssements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le sénateur, vous connaissez admirablement notre système éducatif, je le sais par ailleurs. Vous savez que le dispositif des MI-SE, maîtres d'internat et surveillants d'externat, est mauvais et que chacun aujourd'hui le reconnaît, y compris mes prédécesseurs immédiats.
Mme Nicole Borvo. On le supprime avant de le remplacer !
M. Luc Ferry, ministre. Pourquoi est-il mauvais ? Si vous le permettez, je rappellerai la situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui.
Ce dispositif a été créé en 1937 pour servir d'aide sociale aux étudiants défavorisés. Ça, c'est le bon côté des choses et nous le conserverons, évidemment, dans le nouveau dispositif. Mais à l'université, en 1937 - et cela ne vous a pas échappé - il y avait pour l'essentiel des cours magistraux, les travaux dirigés et les travaux pratiques n'existaient pas et, par conséquent, les surveillants pouvaient suivre le peu de cours qu'ils avaient à suivre à l'université et être présents dans les établissements.
Aujourd'hui, nos surveillants, nos MI-SE, ne sont pas présents dans les établissements au moment des examens et ils ont beaucoup de cours à suivre à l'université ; et c'est donc mauvais pour les établissements. Par ailleurs, ils ratent leurs examens dans des proportions qui sont supérieures aux autres étudiants salariés. Je vous renvoie au rapport de 1999 qui a été remis à Mme Ségolène Royal et à M. Claude Allègre, qui sont parfaitement conscients du problème.
Par conséquent, il faut que nous mettions en place pour la rentrée 2003 un nouveau dispositif, les assistants d'éducation, qui devra améliorer le dispositif antérieur sur trois points. Je ferai d'ailleurs à cet égard, le 27 novembre prochain, des propositions aux partenaires sociaux, qui seront très concrètes et très précises. Je peux vous en indiquer dès maintenant le principe.
Premièrement, il faut renforcer le recrutement de proximité dans les établissements, ce qui sera atteint par un corecrutement entre recteurs et proviseurs ou chefs d'établissement en général.
Deuxièmement, il faut que les surveillants ne perdent pas de temps dans leurs études et que, par conséquent, ils puissent valider les acquis de leur expérience professionnelle, par exemple en obtenant des crédits pour le DEUG.
C'est une bonne solution, car elle leur permettrait de moins échouer aux examens.
Troisièmement, enfin, les surveillants doivent recevoir une meilleure formation, et cet aspect est fondamental. Quant au dispositif des emplois-jeunes, vous savez très bien qu'il était transitoire et, franchement, vous devriez être un petit peu plus prudent sur ce sujet !
M. Dominique Braye. Eh oui !
M. Luc Ferry, ministre. Vous n'avez même pas prévu la sortie du dispositif...
M. René-Pierre Signé. Si !
M. Luc Ferry, ministre. ... et nous sommes obligés de mettre en place en ce moment les indemnités de chômage ! Or vous savez à quel point c'est difficile.
Je vous donnerai un second exemple.
Lorsque vous avez mis ce dispositif en place, vous n'avez pas non plus réfléchi aux besoins réels des établissements. Un seul chiffre : aujourd'hui, 60 000 aides-éducateurs travaillent dans notre système scolaire. Savez-vous combien d'entre eux s'occupent de l'aide aux handicapés scolarisables ? Je vous l'indique : 1 101 très exactement. C'est ridicule !
Je prends donc l'engagement qu'à la rentrée prochaine les effectifs des surveillants seront renforcés dans les établissements et que le nombre des aides-éducateurs qui aideront à la scolarisation des enfants handicapés sera multiplié au moins par cinq. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

MENACE TERRORISTE