SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2002


M. le président. La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. René-Pierre Signé. Cela fait beaucoup !
M. Bernard Angels. Monsieur le ministre, nous aborderons dans quelques jours la discussion du projet de loi de finances pour 2003. Or, depuis son adoption en première lecture par l'Assemblée nationale, l'environnement économique s'est fortement dégradé. La situation de la France et la conjoncture internationale ont changé. (M. le ministre fait un signe d'assentiment.)
M. le ministre acquiesce : tout à l'heure, il a formulé quelques remarques sur ce sujet.
Mme Nicole Borvo. Ah oui !
M. Bernard Angels. L'INSEE, L'OCDE, le FMI, la Commission européenne, hier encore, ont dressé un tableau extrêmement pessimiste de la situation de notre économie, tableau qui nous indique que les déficits sont en dérapage important, que les dépenses publiques explosent, que les recettes sont en chute libre...
M. Gérard Cornu. La faute à qui ?
M. Bernard Angels. ... et, surtout, que le taux de croissance du produit intérieur brut pour 2003 ne dépassera pas 2 %.
M. René-Pierre Signé. Même pas !
M. Bernard Angels. Vous en conviendrez, nous sommes loin de vos prévisions. (Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Gérard Cornu. A cause de qui ?
M. Bernard Angels. Attendez, chers collègues ! Je suis sur le point de vous expliquer ce que vous avez fait !
M. Jean Chérioux. Avec une grande objectivité, comme d'habitude !
M. Bernard Angels. En décidant des baisses d'impôts qui profitent surtout...
Plusieurs sénateurs du RPR. ... aux riches ! (Rires sur les mêmes travées.)
M. Bernard Angels. ... aux hauts revenus (Exclamations, toujours sur les mêmes travées) , en n'investissant pas massivement dans la lutte contre le chômage,...
M. Gérard Cornu. Qu'avez vous fait pendant cinq ans ?
M. Dominique Braye. Alors que vous aviez la croissance !
M. Bernard Angels. ... vous avez fait des choix qui ne correspondent ni aux besoins des Français ni à la réalité du pays. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Aussi, vous allez devoir procéder à des ajustements, monsieur le ministre - et, devrais-je dire, monsieur le Premier ministre, car c'est vous qui prendrez la décision en dernier ressort. Vous pouvez soit attendre et prendre le risque de laisser se dégrader plus encore la santé de notre économie,...
M. René-Pierre Signé. C'est vraiment cruel !
M. Bernard Angels. ... soit faire preuve de raison et profiter de la prochaine discussion budgétaire au sein de notre assemblée pour rectifier le tir.
M. René-Pierre Signé. La raison, ils ne connaissent pas !
M. Bernard Angels. Vous avez huit jours devant vous ! (Rires et exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Gérard Cornu. Vous, vous avez eu cinq ans !
M. Bernard Angels. La situation est grave, et les Français sont inquiets, les enquêtes d'opinion le montrent. Vous ne pouvez plus vous contenter d'attendre le mois de janvier 2003 pour effectuer un éventuel rattrapage budgétaire.
M. Jean Chérioux. Le ridicule ne tue pas, heureusement !
M. Bernard Angels. Etes-vous prêt, monsieur le ministre, à modifier sensiblement votre projet de budget lorsqu'il sera discuté par le Sénat, en tenant compte du seul moteur disponible pour relancer la croissance : la consommation, en particulier celle des familles, qui choisiront de consommer plutôt que d'épargner ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Gérard Cornu. Pourquoi n'avez-vous rien fait en cinq ans ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La situation est peut-être grave, mais elle n'est pas désespérée, comme disaient certains. Donc, lorsque nous passons d'une croissance qui, certes est inférieure, cette année, à ce que nous espérions mais reste supérieure à celle de tous les autres pays européens,...
M. Didier Boulaud. Grâce à qui ?
M. René-Pierre Signé. Grâce aux socialistes !
M. Francis Mer, ministre. ... même si elle est à peine supérieure à 1 %, quand nous passons d'un taux de croissance de 1 % à un taux d'au moins 2 %, version Commission européenne, de 2,3 %, version FMI ou version OCDE, voire de 2,5 %, version Gouvernement, on ne peut quand même pas dire que la situation de croissance se détériore.
Elle s'améliore ; certains ont même dit qu'elle doublait.
M. Bernard Angels. Les dépenses !
M. Francis Mer, ministre. Dans ce contexte-là, il est clair que nous traversons actuellement une période incertaine, liée à des événements qui nous dépassent tous.
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas ce qu'ils ont dit pendant la campagne !
M. Francis Mer, ministre. Il est clair également - nous l'avons dit plusieurs fois - que les hypothèses sur lesquelles repose le projet de budget doivent nous permettre de proposer des plafonds de dépenses,...
MM. Didier Boulaud et René-Pierre Signé. Paniers perçés !
M. Francis Mer, ministre. ... ce qui ne veut pas dire, mesdames et messieurs les sénateurs, que nous sommes obligés de dépenser toutes les sommes que vous nous avez autorisés à dépenser. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Paul Raoult. C'est un budget virtuel !
M. Francis Mer, ministre. Nous avons donc l'intention, peut-être de manière innovante, de commencer en 2003 à conduire l'exécution de notre budget...
M. Didier Boulaud. Pied au plancher !
M. Francis Mer, ministre. ... comme nous conduisons les uns et les autres une voiture : un pied sur le frein, un pied sur l'accélérateur !
Un sénateur socialiste. Attention au tête-à-queue !
M. Claude Estier. Si on a un pied sur l'accélérateur et un pied sur le frein, on n'avance pas !
M. Gérard Cornu. Ils n'ont rien compris !
M. Francis Mer, ministre. L'accélérateur, c'est tout ce qui touche à la consommation : le frein, ce sont les mesures que nous devons prendre pour éviter des situations dangereuses du point de vue du déficit.
Quand vous appuyez non pas simultanément, mais successivement et à bon escient sur le frein et sur l'accélérateur, vous conduisez. C'est ce que nous allons faire ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. René-Pierre Signé. Explication insuffisante !

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