SEANCE DU 19 NOVEMBRE 2002


M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 68, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Bernard Piras. Je tenais à attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur l'une des dispositions de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU ».
En effet, le plan local d'urbanisme comporte plusieurs zonages, dont la zone agricole dite « zone A ». Selon le second alinéa de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, « les constructions et installations nécessaires au service public ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées en zone A ».
Une application stricte de cette disposition conduit à ce qu'aucune autre construction ne puisse être édifiée dans ces secteurs. L'objet de mon intervention porte non pas sur les constructions nouvelles - puisqu'il est clair que la loi SRU a notamment pour finalité de lutter contre le mitage - mais sur les constructions existant déjà en zone agricole.
A ce titre, il s'avère que de nombreuses communes possèdent sur leur territoire des bâtiments qui étaient destinés auparavant à l'agriculture et, celle-ci ayant parfois déclinés, les propriétaires desdits bâtiments sont dans une impasse car ils ne peuvent même pas en changer la destination, que ce soit en habitation ou en activité autre.
Outre la difficulté de gestion créée pour les propriétaires, le risque bien présent est de voir apparaître des constructions se délabrant et finissant en ruine. Une telle issue n'est bien évidemment pas satisfaisante et de très nombreux élus locaux sont confrontés à ce genre de situation.
Je me permets donc de vous interpeller afin de connaître les dispositions que vous entendez prendre rapidement pour régler cette difficulté.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, je vous transmets les excuses de M. Gilles de Robien, qui aurait souhaité vous répondre personnellement. Je vais vous faire part de sa réponse à votre question extrêmement précise.
Vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, le code de l'urbanisme prévoit que les zones protégées en raison de la valeur agricole des sols - qu'il s'agisse des zones NC des anciens plans d'occupation des sols ou des zones A des plans locaux d'urbanisme, dits PLU, appellation que je n'apprécie guère -, ne peuvent recevoir que des constructions nécessaires à l'exploitation agricole. Cela exclut non seulement les permis de construire pour des bâtiments neufs non agricoles, mais aussi le changement de destination des anciens bâtiments agricoles. Un arrêt récent du Conseil d'Etat, qui concernait les zones NC des plans d'occupation des sols, a confirmé cette interprétation.
De fait, il convient de protéger les terres agricoles contre les risques d'urbanisation latente. Dans des secteurs qui font l'objet d'une forte pression foncière, il peut arriver que des permis de construire soient demandés pour des constructions dites agricoles qui, vous le savez bien, sont manifestement destinées à être transformées rapidement en résidences secondaires.
La protection des terres agricoles ne doit cependant pas se faire - vous l'avez souligné - au détriment des constructions préexistantes, et le Gouvernement partage votre préoccupation, monsieur le sénateur : il est indispensable de permettre le maintien et l'entretien de la plupart de ces constructions, qui constituent un patrimoine rural précieux.
Sur ce point, le code de l'urbanisme, dans sa rédaction actuelle, apporte une réponse. Il prévoit en effet la possibilité de créer au sein des zones agricoles des secteurs naturels de petite taille dans lesquels les constructions non agricoles sont autorisées. Techniquement, ce choix se traduit ensuite, dans nos documents d'urbanisme, par un classement de ces petits secteurs en zone N au sein de zones A.
Lors de l'élaboration ou de la révision de son plan local d'urbanisme, une commune a donc la possibilité, en concertation avec les représentants du monde agricole, de définir au sein des zones agricoles des secteurs, qui peuvent être réduits à une parcelle, dans lesquels les constructions à usage non agricole et le changement de destination de constructions existantes sont autorisés.
En particulier pour les constructions existantes, la commune peut, sur la base d'un inventaire, décider quelles sont les constructions qui méritent d'être conservées et dont le changement de destination est autorisé, et quelles sont les constructions dont le changement de destination doit être interdit afin de protéger l'activité agricole et qui ont vocation à être détruites lorsqu'elles ne seront plus nécessaires à celle-ci. La seule exigence, à l'égard des tribunaux administratifs, est que les critères sur lesquels la commune fonde son choix soient explicites.
Cette possibilité, monsieur le sénateur, existe donc, mais, votre question en témoigne, elle n'est pas suffisamment expliquée. Le Gouvernement, tirant les conséquences de votre question, fera en sorte de remédier à terme, notamment auprès des collectivités, à ce déficit d'explication.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. La possibilité existe donc pour les communes de résoudre certaines de leurs difficultés. Cependant, la situation évolue sans cesse (M. le secrétaire d'Etat approuve) , et il faudra que les choses se passent au rythme, que je souhaite le plus lent possible, de la disparition, malheureusement, d'un certain nombre d'exploitations agricoles.
Je souhaite donc vivement que le Gouvernement prenne rapidement des dispositions pour que les communes soient informées de ces possibilités, particulièrement les communes à vocation encore rurale. Cela est vraiment nécessaire. (M. le secrétaire d'Etat acquiesce.)

ORGANISATION DE LA CONSTRUCTION PUBLIQUE
ET PERSPECTIVES DE RÉFORME