SEANCE DU 2 DECEMBRE 2002


La parole est à M. Gérard Delfau. M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, sans doute pour des raisons de temps, vous n'avez pas répondu à ma question portant sur l'évolution de l'implantation territoriale des services de l'administration fiscale.
Votre expérience et votre autorité en la matière, d'abord en tant qu'élu local et sénateur et maintenant en tant que ministre, font qu'à l'occasion de ce débat nous ne pouvons pas ne pas avoir un échange sur ce sujet. Comme je vous l'ai dit en aparté, j'ai appris, par des procédures tout à fait inhabituelles, qu'il avait été décidé de fermer un certain nombre de perceptions, y compris dans des communes importantes, dont l'une au moins, que je connais bien, a 4 000 habitants et est aujourd'hui en forte croissance démographique.
Je ne vous interroge pas sur ce cas précis, monsieur le ministre, ce que je voudrais, c'est que vous me disiez quelle est la philosophie de votre politique, quelles sont les directives que vous donnez à vos services.
Comment voyez-vous le dialogue avec les élus locaux ? Dans le passé, il y a eu des moments de tension. Mais avec vous, qui êtes un homme de dialogue et d'expérience, je souhaiterais que la discusion s'engage désormais sur des bases équitables fondées sur la compréhension mutuelle avec pour objectif commun le maintien, voire le développement du service public territorial de l'administration fiscale et sa modernisation.
M. le président. La parole est à M. le ministre. M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur Gérard Delfau, c'est effectivement par manque de temps que je n'ai pas apporté une réponse précise à votre question.
Les services rendus à nos concitoyens soit par les services des impôts, soit par les services de la comptabilité publique sont, d'une part, l'accueil des contribuables et, d'autre part, le traitement des informations concernant les contribuables.
Vous avez raison d'insister sur la nécessité pour nos services d'être très proches de nos compatriotes et de leur rendre les services qu'ils sont en droit d'attendre. Mais l'administration fiscale se doit aussi de traiter l'information, ce qui peut se faire à des kilomètres sans incidence sur nos concitoyens.
L'objectif de notre ministère est, d'une part, de rester au plus près de nos compatriotes pour les services que nous devons leur rendre et, d'autre part, de bénéficer de l'ensemble des ressources des nouvelles technologies pour traiter, parfois à distance, les informations qui concourent à l'exercice de nos activités. Notre objectif est de concilier présence au plus près sur le terrain et meilleure organisation, en tout cas optimisation du service rendu par nos personnels.
Je ne crois pas qu'il faille vous inquiéter par avance d'un cas particulier, plus sensible à vos yeux. Cela dit, je suis prêt à entendre vos préoccupations à l'occasion d'une rencontre à Bercy.
M. Gérard Delfau. Merci, monsieur le ministre.
M. le président. L'amendement n° II-38, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre III de 1 000 000 euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'amendement que j'ai l'honneur de présenter et que j'ai déposé avec mon collègue le rapporteur général, Philippe Marini, tire les conséquences des dispositions que nous avons examinées en première partie du projet de loi de finances.
Marquant votre volonté de sincérité, monsieur le ministre, vous avez souhaité indiquer au Sénat que les prévisions de recettes sur lesquelles était fondée la loi de finances pour 2003 devaient être révisées à la baisse ; la moins-value étant de l'ordre de 700 millions d'euros. Pour respecter l'équilibre que nous avons voté, il convient donc de réviser à la baisse les crédits budgétaires.
Depuis jeudi matin, le rapporteur général, les rapporteurs spéciaux et moi-même essayons de convaincre les ministres et le Sénat de l'opportunité de réduire quelques lignes de crédits.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ils sont réticents !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce matin, j'ai conscience que M. le ministre du budget et de la réforme budgétaire, mon prédécesseur en tant que président de la commission des finances, se souvient de la difficulté de cet exercice, mais aussi de sa nécessité. Je pense donc que nous allons pouvoir nous comprendre.
Monsieur le ministre, nous souhaitons que votre ministère participe, lui aussi, à cet effort de compression des crédits. On ne peut pas annoncer - et c'est un geste sans précédent de la part d'un gouvernement - que les hypothèses de recettes sont révisées à la baisse sans en tirer les conséquences sur les dépenses.
Examinant votre budget, nous avons pensé que deux chapitres pouvaient faire l'objet de réductions. S'agissant de l'administration centrale, nous avons estimé que le chapitre 34-98, article 12, pouvait être réduit de 500 000 euros. La progression prévue était de l'ordre de 12 % ; il nous semble qu'un effort de 500 000 euros peut être consenti. Pour la direction de la communication, dont les crédits devaient progresser de 13 %, nous vous demandons également une réduction de 500 000 euros.
Au total, la contribution que nous vous demandons de consentir représente moins de 0,01 % de l'ensemble des crédits du titre III.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Monsieur le président de la commission des finances, j'ai deux raisons d'accueillir votre amendement avec intérêt et aussi, je le dis sans ambages, favorablement.
La première raison, c'est que je suis de ceux qui pensent que, comme un ménage, lorsque l'Etat connaît des déconvenues en matière de ressources, il doit faire le maximum pour optimiser ses dépenses et faire des économies, tout en maintenant le plus haut niveau de service possible à ses compatriotes. Ce serait faire injure à tous ceux qui servent l'Etat que de les croire incapables d'effectuer des gains de productivité, mais aussi des économies, au motif qu'il faut épargner nos compatriotes qui, eux aussi, subissent des difficultés liées au ralentissement de l'économie.
La deuxième raison est que c'est le Parlement qui donne l'autorisation. Tout au long du mois de juillet, je me suis épuisé à l'expliquer à mes collègues qui pensent que c'est le ministre du budget qui la donne.
Pour ma part, je me présente respectueusement devant le Parlement pour lui dire que, puisqu'il a placé sa confiance dans le ministère des finances pour réaliser des économies, il ne sera pas déçu : nous les ferons.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l'amendement n° II-38.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-38.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe CRC vote contre.
M. Roland Courteau. Le groupe socialiste également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement II-39, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre III de 3 500 000 euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cet amendement s'inscrit dans la même logique que celle qui nous avait amenés à souhaiter une réduction des crédits de l'administration centrale et de la communication au titre III.
Il s'agit maintenant des fonds mis à la disposition du budget annexe des Monnaies et médailles. Il s'agit incontestablement d'un établissement de qualité : il a à son actif des réussites indéniables, notamment la frappe des pièces d'euros. Nous pensons néanmoins qu'il a lui aussi des obligations de progression en termes de compétitivité. Aussi est-ce un appel à la modernisation qui lui est lancé.
Sur les 30 millions d'euros de subventions qui apparaissent dans le projet de loi de finances, nous souhaitons réduire ses crédits de 3 500 000 euros.
Monsieur le ministre, j'ai entendu la réponse que vous venez d'apporter. En effet, les droits du Parlement doivent être soulignés : pour tout ministre, quel qu'il soit, la discussion ne s'arrête pas aux arbitrages estivaux de Matignon, l'examen du projet de loi de finances par le Parlement est un moment extrêmement exigeant et un arbitrage intervient aussi devant le Parlement, surtout lorsque les prévisions de recettes font l'objet d'une correction.
Tel est l'objet de cet amendement de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert ministre délégué. C'est simplement parce qu'il s'agit d'une subvention que l'amendement n° II-39 de la commission des finances vient en discussion en cet instant, mais je répondrai tout à l'heure à votre question, madame Beaudeau. Ce n'est pas un oubli de ma part, cela s'inscrit dans une logique de déroulement de la discussion.
S'agissant de l'amendement n° II-39, je ne reviens pas sur ce que j'ai dit à l'occasion de l'amendement n° II-38.
Cela dit, je tiens à rendre hommage au directeur des Monnaies et médailles, M. Dov Zerah. Il a entendu l'appel que vous avez lancé avec cet amendement. Je considère en effet que son service peut apporter sa contribution à l'effort que vous souhaitez voir accomplir par tous les ministères, sans exception, pour aider à contenir les déficits publics. C'est ce qui m'autorise aujourd'hui à émettre un avis favorable sur l'amendement n° II-39.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, contre l'amendement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous dirons tout à l'heure, lors de la discussion du budget annexe des Monnaies et médailles, ce que nous avons à dire sur le fonctionnement de cette direction. Mais j'indique d'ores et déjà que la subvention de 30 millions d'euros qui est proposée pour 2003 est, à notre avis, notablement insuffisante pour faire face à la crise que traversent les Monnaies et médailles.
Si je me souviens bien, les prévisions de dépenses ont été divisées par deux par rapport à 2002.
Les achats diminuent de 76,5 %. Pour l'établissement monétaire de Pessac, les achats baissent de 89 %. Par ailleurs, les recettes qui sont divisées par trois atteignent 66 millions d'euros.
Monsieur le président de la commission des finances, la situation est déjà inquiétante et vous l'aggravez encore en proposant une réduction des crédits destinés à la subvention du budget annexe des Monnaies et médailles en raison de l'équilibre voté par le Sénat.
Avec cette réduction de 1,5 million d'euros en charges et autant en traitements externes, de 0,2 million d'euros de primes et indemnités et de 0,3 million d'euros pour les prestations et cotisations sociales, certains vont finir par penser que, si la commission des finances voulait saboter la politique du Gouvernement, elle ne s'y prendrait pas de meilleure façon !
Pour notre part, nous ne souhaitons pas aggraver la situation des Monnaies et médailles. Mais vous, avec cet amendement, justifié par un plan de réorganisation, trop timide certes, de l'établissement, vous allez ruiner l'espoir des organisations syndicales qui croient en une possibilité de renouveau des Monnaies et médailles.
C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas l'amendement de suppression des crédits.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je voudrais demander à M. le ministre s'il peut nous dire, sur ce sujet précis, qui est moins vaste que le précédent, quelle est la politique du Gouvernement.
En effet l'explication donnée pour la diminution de la subvention concernant l'établissement des Monnaies et médailles est d'ordre général. Mais que veut le Gouvernement pour ce secteur important du ministère de l'économie et des finances ? Tel est le fond du problème et, sur ce point précis, la Haute Assemblée n'est pas encore éclairée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais brièvement répondre, en particulier, aux préoccupations exprimées par Mme Beaudeau.
L'administration des Monnaies et médailles fait l'objet d'un budget annexe. Il s'agit, en réalité, d'une gestion proche de ce que serait une gestion à caractère industriel et commercial et la responsabilité de cette administration et de son directeur est une responsabilité globale.
Lorsqu'on examine les perspectives d'activité sur 2003, on peut penser que, selon le contexte économique, selon les programmes de fabrication, en particulier pour des Etats étrangers, des facteurs de souplesse permettront de piloter cet établissement.
Notre conviction est que la réduction de crédits de 3,5 millions d'euros est tout à fait tenable à l'intérieur de cette gestion globale. C'est sans doute en fonction de cela, et après avoir examiné l'ensemble des données de sa gestion, que le directeur des Monnaies et médailles a fait connaître à M. le ministre l'avis que ce dernier a bien voulu formuler.
Les craintes qui ont été exprimées sont donc, à ce stade, excessives, et l'amendement de la commission est, en revanche, tout à fait raisonnable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous examinerons tout à l'heure le budget annexe des Monnaies et médailles. Il me paraît donc difficile d'en entamer la discussion.
L'amendement n° II-39 est appelé maintenant parce qu'il porte sur une réduction des crédits du titre III des services financiers. Si nous avons pris cette initiative avec le rapporteur général, c'est parce que nous avons conscience que les Monnaies et médailles représentent un trésor de professionnalisme et que le contexte difficile auquel est confronté ce grand établissement nécessite un surcroît de compétitivité. L'économie que nous proposons est donc, en quelque sorte, une mesure d'encouragement à la compétitivité.
Cet établissement, comme tous les autres, doit se remettre en cause et rechercher des gains de productivité avant de faire appel à la générosité du budget.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lambert, ministre délégué. Pour éviter toute frustration, je veux indiquer par avance qu'il n'y a aucun risque. Si l'amendement était adopté et que l'examen du budget annexe des Monnaies et médailles aboutissait à une décision inverse, il y aurait coordination. Ne vous inquiétez donc pas, l'amendement ne peut, en toute logique, venir en discussion que maintenant, mais le débat aura lieu et je m'engage à y répondre tout à l'heure.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-39.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
Titre IV : 315 347 872 euros. »