SEANCE DU 9 DECEMBRE 2002


M. le président. L'amendement n° II-128, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent, Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 58 undecies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après de I de l'article 1414 A du code général des impôts, il est inséré un paragraphe I bis ainsi rédigé :
« I bis. - A compter du 1er janvier 2003 les contribuables assujettis à la taxe d'habitation au titre de leur habitation principale sont également assujettis à une cotisation de solidarité dans les mêmes conditions.
« Son montant est égal, sans pouvoir être inférieur à 0, à la différence entre d'une part 1,2 % de leur revenu, au sens du IV de l'article 1417, diminué d'un abattement fixé dans les conditions prévues aux a, b, et c du I du présent article, et d'autre part le montant de leur taxe d'habitation. Il est plafonné à 50 % en 2003, à 100 % en 2004, à 150 % en 2005 et à 200 % en 2006 et les années suivantes du montant de la taxe d'habitation ayant servi de référence à son calcul.
« Les contribuables visés à l'article 1414 et ceux dont le revenu n'excède pas la limite prévue au II de l'article 1417 en sont exonérés.
« Elle est recouvrée au profit de l'Etat selon les dispositions légales et réglementaires applicables au recouvrement de la taxe d'habitation. L'avis d'imposition de la taxe d'habitation fait apparaître distinctement son montant et en présente succinctement l'objet.
« Avant le 31 décembre 2003, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'information relatif à l'application du présent dispositif. »
« II. - Le premier alinéa du 1 du II de l'article 1414 A du code général des impôts est ainsi rédigé : "Pour l'application du I et du I bis : »
« III. - Dans la première phrase du II de l'article 1417 du code général des impôts, après les mots : "les dispositions de l'article 1414 A" sont insérés les mots : "sauf celles du I bis" .
« IV. - Le montant des ressources de la première part du fonds national de péréquation est majoré en 2004 et les années suivantes des sommes mises en recouvrement l'année précédente au titre de la cotisation de solidarité prévue au présent article.
« V. - Cette majoration n'est pas prise en compte pour l'application du I de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998). »
La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Cet amendement important vise à atténuer les injustices résultant de l'absence de révision depuis près de trente ans des valeurs locatives servant de base au calcul de la taxe d'habitation. En conséquence, elles n'ont évidemment plus de lien avec la valeur réelle des locaux auxquels elles s'appliquent. A cet égard, il serait très intéressant, mais aussi un peu affligeant, de comparer la valeur vénale de certains logements avec leur valeur locative.
Ces dernières années, les prix de l'immobilier ont augmenté d'environ 40 % en moyenne, mais la hausse n'a été que de 30 % pour certains logements, tandis qu'elle a été de 50 % pour d'autres. Ces disparités ne sont évidemment pas traduites dans les valeurs locatives, et il en est ainsi pour tous les mouvements ayant affecté l'immobilier au cours des dernières décennies.
Notre droit actuel a pris partiellement en compte les injustices qui pouvaient résulter de cette situation de fait. Ainsi, le montant de la taxe d'habitation due par les personnes disposant de revenus modestes ou moyens est plafonné à 4,3 % de leurs revenus. Cette disposition est parfaitement logique, car il existe, à l'évidence, un lien étroit entre la valeur du logement occupé et le revenu de celui qui l'habite.
Toutefois, si le législateur a bien prévu un plafond pour la taxe d'habitation, il n'a pas prévu de plancher.
Or il est indéniable que certains contribuables aisés ne paient qu'un montant infime de taxe d'habitation, parce qu'ils résident dans une commune appliquant des bases sous-évaluées et bénéficiant d'un potentiel fiscal élevé.
Le présent amendement vise donc à instituer un plancher par la création d'une cotisation de solidarité dont le montant, cumulé à celui de la taxe d'habitation, s'établirait à 1,2 % du revenu du contribuable. Il serait plafonné à 50 % du montant de la taxe d'habitation en 2003, puis progressivement déplafonné pour atteindre 200 % de celui-ci en 2006. Les contribuables éligibles au plafonnement de la taxe d'habitation, c'est-à-dire les contribuables aux revenus modestes, seraient exonérés de cette cotisation. Le produit de ladite cotisation serait affecté au fonds national de péréquation, afin de permettre aux communes défavorisées de réduire leurs taux d'imposition. Ainsi, la pression fiscale ne serait pas globalement accrue ; elle serait seulement mieux répartie sur le territoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est tout à fait défavorable à cet amendement, qui tend à alourdir l'impôt sur le revenu, ce qui est contraire à la politique que nous préconisons.
En outre, son adoption aurait vraisemblablement pour effet d'accroître la pression fiscale, dans la mesure où, contrairement aux affirmations de M. Gérard Miquel, rien ne garantit que le versement de cette cotisation de solidarité inciterait les collectivités dites défavorisées à réduire leur pression fiscale à due concurrence.
Une telle modification, aussi substantielle dans son principe, du dispositif de la taxe d'habitation ne peut manifestement être votée par voie d'amendement. L'instauration d'un plancher constituerait une orientation nouvelle ; même les gouvernants que nous avons connus ces cinq dernières années n'y avaient pas pensé, monsieur Miquel !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les raisons que vient d'exposer M. le rapporteur général.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-128.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 58 duodecies