PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à considérer comme les effets d'une catastrophe naturelle les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols quelle que soit leur intensité
 

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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, au nom de toutes et de tous, je vous remercie de votre présence à cette première séance de questions d'actualité au Sénat depuis la constitution de votre gouvernement.

Nous sommes très sensibles à votre participation à ce temps fort du dialogue entre le Gouvernement et les sénateurs, de la majorité comme de l'opposition.

Je remercie par ailleurs tout particulièrement France Télévisions d'avoir accepté, à ma demande, cette programmation de dernière minute qui s'inscrit en temps supplémentaire pour la retransmission des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Je rappelle que l'auteur de la question dispose, de même que le ministre pour sa réponse, de deux minutes trente.

Fermeture de la Samaritaine

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Quelle mauvaise surprise ! Au moment même où le Gouvernement s'efforçait de convaincre l'opinion que l'emploi était sa priorité, les 1 500 salariés de la Samaritaine apprenaient par la presse que leur patron, le groupe LVMH, leader mondial de l'industrie du luxe, une des premières entreprises du CAC 40 - 2,5 milliards d'euros de bénéfices en 2004 ! -, fermait le magasin de la Samaritaine.

Le motif : la mise en sécurité des bâtiments.

Effectivement, depuis 2000, la commission préfectorale de sécurité exige une mise en conformité du site prestigieux du Pont-Neuf, classé à l'inventaire des monuments historiques.

Cette situation était connue du groupe LVMH, qui a acheté le magasin en 2001. Aussi, la précipitation actuelle ne peut qu'inquiéter les personnels et les Parisiens sur les intentions réelles du groupe. N'est-ce pas la mort annoncée du grand magasin au profit de quelque opération spéculative hautement rentable ?

La crainte est d'autant plus persistante qu'aucune réponse crédible n'a été fournie aux salariés, y compris lors du comité d'entreprise qui se tenait hier. La façon dont sont traitées 1 500 personnes, qui, pour certains et surtout pour certaines, sont depuis vingt ou trente ans employées dans le mythique magasin parisien, est une honte.

Pour la mise en conformité du site, des experts indépendants proposent deux solutions : des travaux par tranches étalés sur dix ans avec ouverture partielle du magasin ou la fermeture totale pendant plusieurs années.

Les salariés se sont prononcés en faveur de la première solution, avec maintien des emplois et congés formation.

Monsieur le ministre, l'Etat doit prendre ses responsabilités. Fera-t-il respecter les procédures d'information et de consultation des organismes représentatifs des salariés ? Prendra-t-il les dispositions nécessaires pour que la garantie d'emploi soit assurée, tant aux 800 salariés relevant directement de la Samaritaine qu'aux 800 démonstratrices et démonstrateurs, dont certains sont, comme par hasard, des salariés de prestigieuses marques, par exemple Dior ou Givenchy, qui appartiennent au groupe LVMH ?

Les salariés demandent l'organisation d'une table ronde réunissant, outre leurs représentants et leurs organisations syndicales, les élus parisiens, les dirigeants de l'entreprise, ainsi que la direction départementale du travail et de l'emploi et les représentants de la préfecture.

Pour ma part, avec les élus de mon groupe au Conseil de Paris, je soutiens cette proposition. De votre côté, monsieur le ministre, qu'entendez-vous faire pour favoriser la tenue de cette table ronde ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Mahéas. M. Borloo va faire du logement social à la Samaritaine !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame Borvo Cohen-Seat, c'est en février dernier que la préfecture de police de Paris a émis un avis défavorable sur la poursuite de l'exploitation du magasin en l'état. Vous le savez, d'importants problèmes de sécurité se posent : organisation des secours en cas d'incendie, résistance au feu des structures métalliques, des planchers de verre et des ascenseurs, absence de système de désenfumage.

A la suite de cet avis, la direction de la Samaritaine a mené un audit de sécurité qui a confirmé ces risques - l'avis de la préfecture de police était suffisamment alarmant, mais la Samaritaine a tenu à avoir un avis technique indépendant -, et qui a conclu à l'impossibilité du maintien de l'activité en l'état.

Face aux risques encourus, le principe de précaution doit être mis en oeuvre : les conséquences douloureuses des graves incendies qui se sont produits voilà quelques semaines sont là pour nous le rappeler.

Néanmoins, les questions que vous posez sont tout à fait fondées, madame Borvo Cohen-Seat.

La direction a décidé de suspendre l'activité du 15 au 28 juin, pour des raisons de sécurité ; dont acte ! Nous avons évidemment pris contact avec elle. Trois sujets de préoccupations ont été abordés.

Le premier est, clairement, l'information normale du personnel : la direction s'est engagée à l'assurer.

Deuxième point, quelle que soit l'option retenue, et donc la durée de la fermeture, il ne doit évidemment pas y avoir de licenciement et un programme d'accompagnement, de formation et de qualification digne d'une entreprise telle que LVMH doit être mis en oeuvre.

Troisième point plus préoccupant et que vous avez d'ailleurs évoqué, madame Borvo Cohen-Seat, nous avons demandé que le nécessaire soit fait pour que les salariés qui travaillent « autour » de la Samaritaine, notamment les démonstrateurs, soient inclus dans le soutien indispensable que LVMH doit aux personnels.

J'indique que la direction a annoncé un investissement de 100 millions d'euros et, pour nous assurer du parfait traitement de ce dossier difficile, Gérard Larcher et moi-même l'avons convoquée le 20 juin.

Je peux donc vous garantir, madame Borvo Cohen-Seat, que le Gouvernement prend cette affaire avec le plus grand sérieux, en termes de sécurité comme en termes de soutien aux personnels. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.)

Catastrophes naturelles

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

La terrible canicule de l'été 2003 a décimé les plus fragiles de nos anciens.

Elle a aussi été la cause de catastrophes considérables dans notre patrimoine immobilier. C'est pourquoi de très nombreux maires, se fondant sur le caractère tout à fait exceptionnel de cette canicule, ont déposé des dossiers de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle afin de permettre aux compagnies d'assurances de traiter les sinistres.

Cependant, ces dossiers ont été examinés en fonction des critères mis en place en l'an 2000. Or chacun a pu constater que, même assouplis, ces critères ne pouvaient traduire la réalité des dommages subis et qu'en conséquence ils étaient inapplicables.

Le 7 avril, M. de Villepin, alors ministre de l'intérieur, en réponse à une question d'actualité, reconnaissait ces faits ; il admettait que lesdits critères étaient inopérants et que les dossiers devaient être traités au cas par cas.

Le 20 mai, M. Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, me confirmait par lettre cette décision.

Monsieur le ministre, nous devons et vous devez beaucoup de considération aux maires. Ils attendent depuis deux ans.

M. Aymeri de Montesquiou. C'est long, très long !

M. Jean-Marc Todeschini. C'est un scandale !

M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !

M. Aymeri de Montesquiou. Je rappelle que l'administration est tenue de répondre à toute demande dans un délai de deux mois.

Monsieur le ministre, quand signerez-vous les arrêtés officialisant le traitement au cas par cas de ces dossiers de catastrophe naturelle ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme Nicole Bricq. On connaît la réponse !

M. Jean-Pierre Sueur. M. le ministre a déjà répondu ce matin !

M. Jean-Marc Todeschini. C'est de la mise en scène permanente !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous le savez puisque vous étiez présent, j'ai en effet, ce matin, en séance, annoncé en primeur à la Haute Assemblée une nouvelle initiative d'indemnisation exceptionnelle,...

M. Jean-Pierre Sueur. Grâce à la proposition de loi socialiste !

M. Brice Hortefeux, ministre. ... dotée d'une enveloppe de 150 millions d'euros financée, pour l'essentiel, par le reliquat du fonds de compensation de l'assurance construction.

Vous l'avez observé, cette décision a été approuvée sur l'ensemble des travées de cette assemblée.

M. Paul Raoult. Eh oui ! Les socialistes sont intelligents !

M. Brice Hortefeux, ministre. Elle permet de répondre aux préoccupations de nos concitoyens dont vous vous faites régulièrement l'écho, de même d'ailleurs que votre collègue du Gers, le sénateur Yves Rispat.

Pour votre département, 261 dossiers ont été examinés à ce jour par la commission interministérielle chargée d'émettre un avis sur la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse de 2003.

Très précisément, deux arrêtés interministériels, l'un du 11 janvier 2004, l'autre, tout récent, du 27 mai, ont permis la reconnaissance de 124 communes.

M. Jean-Pierre Sueur. Il en reste près de 3 000 !

M. Brice Hortefeux, ministre. Comme je l'ai annoncé ce matin au nom du Gouvernement et du ministre d'Etat, les dossiers des 137 communes restantes seront examinés dans le cadre soit de l'ultime élargissement des critères de la loi de 1982, soit d'une nouvelle procédure complémentaire hors catastrophe naturelle.

Statistiquement, le département du Gers se situe au deuxième rang des départements métropolitains avec 1 153 reconnaissances.

Mme Nicole Bricq. Le Gers n'est pas toute la France !

M. Brice Hortefeux, ministre. Au-delà, je veux préciser à la Haute Assemblée que, mardi prochain, 300 communes supplémentaires se verront reconnaître l'état de catastrophe naturelle tandis que 600 autres communes vont bénéficier d'une étude géologique des sols.

Le nouveau dispositif permettra de régler la situation des victimes les plus gravement touchées.

Le Gouvernement envisage d'ailleurs de se saisir de l'occasion que lui donne la proposition de loi...

M. Jean-Pierre Sueur. Du groupe socialiste !

M. Brice Hortefeux, ministre. ...que le Sénat a examinée ce matin pour soumettre au législateur ce dispositif de règlement de la sécheresse de 2003. Il le fera avec une volonté simple, claire et nette : statuer sur l'ensemble des situations et les régler avant la fin de l'année.

Monsieur le sénateur, vous pouvez constater que les engagements antérieurs sont confirmés et qu'ils seront respectés, mais je sais que vous n'en doutiez pas. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

libération de florence aubenas

M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont.

M. Ambroise Dupont. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, après cent cinquante-sept jours de détention en Irak, Florence Aubenas et Hussein Hanoun ont été libérés dimanche dernier. C'est, pour nous, à la fois un immense soulagement et une très grande joie.

Au nom du groupe UMP du Sénat, je tiens aujourd'hui à saluer avec une particulière solennité l'action courageuse et déterminée de Jean-Pierre Raffarin, de Michel Barnier...

M. Paul Raoult. C'est pour cette raison qu'ils ont été virés !

M. Jean-Marc Todeschini. Ils ont été punis !

M. Ambroise Dupont. ...et de l'ensemble des services officiels de la République française qui, dans la continuité de l'Etat, ont permis de mettre un terme heureux à cet acte barbare et inhumain. Je pense notamment aux membres de la diplomatie française ainsi qu'à ceux du ministère de la défense qui ont oeuvré dans l'ombre, avec une efficacité remarquable.

II faut redire avec fermeté et constance que cet austère combat fut mené jour après jour, dans des conditions extrêmement difficiles, avec beaucoup de sang-froid et un grand sens des responsabilités, sans céder à la polémique ou à la division.

Toute prise d'otage est une question délicate qui exige la discrétion, le sérieux et, souvent, le secret. Cela est valable en toute circonstance, pendant et après la détention. Nous devons nous y tenir, au risque de tomber dans la controverse stérile et oiseuse et sous peine de porter irrémédiablement atteinte au crédit de la France.

Après ce dénouement heureux, monsieur le Premier ministre, une question reste posée à laquelle il faut essayer d'apporter sinon une réponse immédiate, du moins les fruits d'une réflexion sérieuse : comment est-il possible, aujourd'hui, en Irak ou ailleurs, de conjuguer la défense de la liberté d'informer et notre responsabilité à l'égard de l'ensemble de nos compatriotes ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d'abord de vous dire tout le plaisir que j'éprouve à me présenter devant vous à l'occasion de cette première séance de questions d'actualité au nouveau gouvernement.

C'est aussi une grande joie que cette libération de Florence Aubenas et de Hussein Hanoun. Je veux une nouvelle fois remercier, comme vous l'avez fait, l'ensemble des services de l'Etat qui ont permis cette libération, ceux du ministère de la défense comme ceux du ministère des affaires étrangères. Nous savons tout ce que nous devons à leur sang-froid et à leur détermination tout au long de ces cent cinquante-sept jours.

Nous devons également examiner lucidement la situation en Irak : elle est très dangereuse pour l'ensemble de la presse et, tout particulièrement, pour les envoyés de la presse française. Nous disposons aujourd'hui d'informations très précises sur les risques qu'ils encourent.

Cette situation est d'autant plus sérieuse que se développe actuellement un véritable marché des otages en Irak.

Il nous faut donc - vous l'avez dit, monsieur le sénateur - conjuguer la liberté d'informer avec la responsabilité de chacun. C'est pourquoi, d'ici à la fin de la semaine, j'aurai l'occasion de réunir l'ensemble des directeurs de l'information des grands groupes de presse français, pour rechercher avec eux des solutions adaptées permettant de répondre à cette double exigence. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

MANIFESTATIONS DE LYCEENS

M. le président. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Monsieur le Premier ministre, en janvier dernier, le chef de l'Etat s'engageait à ce que le projet de loi, qui allait devenir la loi « Fillon », mobilisât « l'ensemble de la communauté éducative, mais aussi les parents et l'Etat tout entier, parce que c'est l'avenir de notre pays qui est en jeu ».

Cette loi a, en effet, mobilisé un grand nombre de nos concitoyens, mais contre elle ! Le projet de loi a été délibéré dans l'urgence, y compris parlementaire, ce dont votre gouvernement est apparemment conscient, puisque, à peine installé rue de Grenelle, M. de Robien annonçait le report de l'examen des textes d'application pour permettre « un deuxième tour de concertation ».

Mais, monsieur le Premier ministre, si second tour il doit y avoir, quand a eu lieu le premier ?

Certainement pas dans les prétoires des tribunaux correctionnels de ce pays, qui ont vu et voient encore défiler des jeunes gens comme Samuel Morville...

M. Josselin de Rohan. C'est un voyou ! Il crache à la figure des commissaires !

M. Jean-Marc Todeschini. Ecoutez l'orateur !

M. David Assouline. ...qui ont manifesté publiquement leur désapprobation à l'égard d'un texte que le Gouvernement se refusait d'amender dans le dialogue !

Vous pouvez me répondre que certains ont été trop loin, oubliant que d'autres peuvent saccager le bureau d'une ministre sans être vraiment inquiétés !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a d'autres voyous !

M. David Assouline. Mais, souvenez-vous ! Vous étiez ministre de l'intérieur lorsque ces lycéens ont choisi la manifestation de masse, pacifique et bon enfant, le 8 mars à Paris, et qu'ils ont été agressés avec une extrême violence par des bandes de plusieurs centaines de « cogneurs », sans que les forces de l'ordre, présentes en nombre, aient su les protéger et garantir leur droit républicain de manifester. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Marc Todeschini. On va faire du bruit, nous aussi, tout à l'heure !

M. David Assouline. Qu'avez-vous fait pour arrêter et punir ces « cogneurs » ? Votre majorité n'est-elle pas prête à étouffer la vérité et à empêcher la transparence en bloquant notre demande de commission d'enquête parlementaire, invoquant, quatre mois après, des informations judiciaires inexistantes ? (M. Josselin de Rohan proteste.)

Ces jeunes lycéens ont été poussés à choisir d'autres moyens d'action, pour rester visibles...

M. David Assouline. ...et pour amener le Gouvernement à la négociation que vous reconnaissez utile aujourd'hui. Ils ne doivent donc pas faire les frais d'une situation dans laquelle vous admettez avoir une part de responsabilité.

Etes-vous prêt, et ce serait à votre honneur, à vous déclarer solennellement, sans interférer sur le cours indépendant de la justice, contre la « criminalisation » de ces jeunes ?

M. Josselin de Rohan. Ce sont des voyous, des casseurs !

M. David Assouline. C'est un message fort que je vous demande d'adresser à un jeune lycéen de ce pays...

M. le président. Concluez, monsieur Assouline !

M. David Assouline. ...qui, pour la première fois s'est occupé des affaires de la cité en participant à un mouvement collectif, ... (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Josselin de Rohan. C'est un voyou !

M. David Assouline. ...animé de générosité mais aussi d'angoisse pour son avenir, quand d'autres ne s'occupent trop souvent que de leurs petits « business ».

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Retirez les plaintes !

M. David Assouline. Il a été cogné par des voyous alors qu'il manifestait pacifiquement, ... (Brouhaha sur les travées de l'UMP.)

M. le président. C'est terminé, monsieur Assouline !

M. David Assouline. ...devant des forces de l'ordre inertes !

M. le président. C'est terminé, monsieur Assouline ! M. Gilles de Robien va vous répondre.

M. David Assouline. J'ai été interrompu ; il me reste dix secondes !

M. le président. Vous vous êtes exprimé pendant trois minutes, monsieur Assouline, alors que vous ne disposiez que de deux minutes trente !

M. Jean-Marc Todeschini. Laissez-le formuler sa question !

M. David Assouline. Il me reste une phrase !

M. le président. Une phrase !

M. David Assouline. Dites-lui que l'Etat et la société ne lui claquent pas la porte au nez ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, depuis que l'on m'a confié la charge du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de l'enseignement supérieur, je me suis efforcé d'organiser la concertation la meilleure, le dialogue et l'échange avec les représentants de la communauté éducative, ainsi que l'a demandé le Premier ministre lors de son discours de politique générale.

Je me suis déjà entretenu avec les fédérations de parents d'élèves et je recevrai les représentants et les syndicats de lycéens dès la semaine prochaine.

Cette concertation est, à mes yeux, la seule méthode pour permettre à l'école d'évoluer au profit de la société tout entière et, en premier lieu, des jeunes, qui sont les meilleurs investissements de la nation.

Des manifestations ont eu lieu, au cours desquelles des messages très importants ont été envoyés, des revendications ont été exprimées, des propositions même ont été faites.

Mme Hélène Luc. Absolument !

M. Gilles de Robien, ministre. Certaines d'entre elles sont à l'étude et d'autres pourront être mises en oeuvre dès la rentrée prochaine.

Mais il s'est également produit, hélas ! des voies de fait sur des personnes et des dégradations de biens publics.

M. Gilles de Robien, ministre. Des plaintes ont été déposées.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Et les paysans ?

Mme Hélène Luc. En d'autres occasions, les agriculteurs ont fait beaucoup plus !

M. Josselin de Rohan. Taisez-vous !

M. le président. On écoute le ministre !

M. Gilles de Robien, ministre. Des poursuites ont été engagées et des décisions judiciaires sont intervenues, qu'il n'appartient pas au ministre de l'éducation nationale de commenter.

En revanche, je peux vous dire que je me suis montré très attentif au fait que les lycéens poursuivis...

M. Guy Fischer. Il faut retirer les plaintes !

M. Gilles de Robien, ministre. ... qui avaient à passer les épreuves du baccalauréat puissent le faire dans des conditions normales, comme les autres candidats.

Maintenant, le temps du dialogue se poursuit. Croyez-le bien, monsieur le sénateur, je suis déterminé à le faire fructifier. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. Guy Fischer. Il faut apaiser les choses !

Mme Hélène Luc. Pour apaiser le climat, il faut retirer les plaintes !

MODIFICATION DU FINANCEMENT DES SOINS A DOMICILE

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

La polémique sur le lundi de Pentecôte a relancé à juste titre la question de la nécessaire contribution de la solidarité nationale...

Mme Valérie Létard. ...pour prendre en charge une population vieillissante.

Dans cet enjeu majeur, chacun des acteurs impliqués a un rôle à jouer : en effet, l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, ne prend en charge que la dépendance la plus sévère. En deçà, la caisse nationale d'assurance vieillesse assure, en association avec les services d'aide à domicile, le financement du maintien à domicile des personnes âgées valides dont le seul désir est de pouvoir continuer à vivre chez elles.

Or, monsieur le ministre, la décision récente de la caisse nationale d'assurance vieillesse de diminuer sensiblement la dotation accordée, pour 2005, aux différentes caisses régionales pour financer les quotas d'heures d'aide ménagère apparaît en complète contradiction avec les orientations de sa convention d'objectifs et de gestion.

Pour la période 2005-2008, la convention prévoit, notamment, de prévenir la perte d'autonomie. Or, le meilleur moyen d'arriver à cette fin n'est-il pas de laisser aussi longtemps que possible les personnes âgées chez elles ? Dès lors, comment comprendre la décision de diminuer de 25 % les dotations du fonds d'action sociale pour 2005 ?

Mme Valérie Létard. Sur le terrain, l'annonce de ces mesures met tous les acteurs de l'aide à domicile dans une situation impossible et les oblige à diminuer drastiquement le nombre d'heures d'aide ménagère qu'ils assuraient jusqu'à présent.

Mme Valérie Létard. Pour les seules régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie, la dotation pour 2005 accuse un différentiel négatif de 611 802 heures par rapport à 2004, avec en perspective des craintes pour les emplois correspondants.

Dans la pratique, s'ils en ont la capacité financière, les services d'aide à domicile se verront dans l'obligation de combler en partie ce désengagement, alors même que l'été arrive et que les leçons de la canicule ne doivent pas être oubliées.

Ma question est simple, monsieur le ministre : comptez-vous rétablir, en 2005, un volant d'heures d'aides ménagères à la hauteur des besoins ?

M. Jacques Mahéas. Très bien !

Mme Valérie Létard. Peut-on envisager un avenant à la convention d'objectifs pour revenir sur la décision de diminution de la dotation ? Sinon, quelle est la cohérence de l'action gouvernementale, à l'heure où Jean-Louis Borloo défend, à juste titre, un projet de loi pour développer les services à la personne et atteindre le fameux objectif de 500 000 emplois, si, dans le même temps, les moyens correspondants de votre ministère sont réduits ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.)

M. Jean-Pierre Sueur. C'est intéressant !

M. Guy Fischer. Que de contradictions !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Madame la sénatrice, s'agissant de la caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, je vous indique, en premier lieu, que la convention d'orientation et de gestion qui a été signée prévoit bien que les moyens alloués à l'aide au maintien à domicile seront maintenus.

Mme Michelle Demessine. Il n'y en avait déjà pas assez !

M. Xavier Bertrand, ministre. Or, sur le terrain, chez vous probablement comme dans la ville dont je suis l'élu, un certain nombre de personnes ont vu diminuer leur nombre d'heures d'aide ménagère depuis le 1er juin dernier.

Il importe donc de savoir exactement ce qui s'est passé, afin de prendre les mesures nécessaires.

Je vais essayer, dans le temps qui m'est imparti, de vous donner les précisions qui ressortent des entretiens que j'ai eus personnellement avec le directeur de la caisse régionale d'assurance maladie du Nord-Pas-de-Calais et de Picardie, ainsi qu'avec le directeur général de la caisse nationale d'assurance vieillesse. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

Les moyens qui ont été attribués, en 2005, correspondent exactement, à l'euro près, aux moyens qui ont été nécessaires en 2004.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a pas assez d'heures !

M. Xavier Bertrand, ministre. Or les directeurs des caisses régionales ont diffusé des notifications indiquant que le nombre d'heures serait diminué. Ce n'est ni normal ni acceptable.

Dans la mesure où les crédits sont disponibles, il ne doit pas y avoir de diminution des services sur le terrain pour les personnes âgées et j'ai demandé à ces deux directeurs d'apporter des solutions avant la fin du mois de juin. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Si besoin est, des transferts de crédits au sein des budgets de la CNAV pourront se faire sans aucune difficulté et le Gouvernement veillera à délivrer les autorisations correspondantes.

Le problème devra être résolu, je le répète, avant la fin du mois de juin.

M. Guy Fischer. Paroles !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je suis prêt à revenir devant vous et à m'en expliquer, monsieur Fischer, vous le savez pertinemment !

En second lieu, je souligne que non seulement les moyens sont maintenus, mais que le Gouvernement compte même aller au-delà.

En effet, outre les heures d'aide ménagère, nous avons voulu offrir davantage de services aux personnes âgées qui demandent parfois aussi du « sur-mesure », par exemple le portage de repas à domicile ou des aides importantes pour leur sécurité, notamment la mise à leur disposition de téléalarmes.

Des moyens nouveaux seront consacrés à ce volet qui bénéficiera, en 2005, de 42,8 millions d'euros de crédits supplémentaires.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. N'en jetez plus !

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la sénatrice, votre question montre bien que si nous avons l'ambition et la volonté de faire encore mieux pour les personnes âgées, nous devons nous montrer particulièrement vigilants afin que les décisions que nous prenons s'appliquent bel et bien aux bénéficiaires sur le terrain.

Le soutien aux personnes âgées est, pour le Gouvernement, une priorité. Soyez assurée de ma vigilance et de ma détermination. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur quelques travées de l'UC-UDF.)

M. Jacques Mahéas. Les Français d'en haut disent une chose, mais les Français d'en bas en disent une autre !

politique de l'emploi

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre, M. Dominique de Villepin, s'est engagé à gagner « la bataille de l'emploi ». Pour relever ce défi, il a annoncé les grandes lignes d'un plan d'urgence, pragmatique : « affecter nos moyens à tous ceux qui en ont un besoin réel et immédiat, agir sur les vrais blocages, dans un esprit d'efficacité et de justice. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ceux qui sont licenciés ont des besoins immédiats !

Mme Catherine Procaccia. Il a précisé que l'Etat y consacrera 4,5 milliards d'euros supplémentaires en 2006.

Il faut effectivement consacrer toute notre énergie à combattre le chômage qui, touchant plus de 10 % de la population active, a atteint un niveau « inacceptable ». Il est indispensable d'agir en faveur des plus fragilisés, c'est-à-dire les jeunes et les seniors.

Nous savons, sur toutes les travées de cette assemblée, que les marges de manoeuvre sont étroites. C'est pourquoi toutes les solutions doivent être envisagées : aller chercher les emplois là où ils se trouvent, mobiliser les services publics de l'emploi et leurs partenaires pour assurer l'accompagnement et le reclassement des chômeurs.

A cet égard, plusieurs dispositions ont été évoquées pour les très petites entreprises, afin de favoriser l'emploi des jeunes et celui des seniors, et une consultation approfondie avec les partenaires sociaux sera engagée.

Pouvez-vous nous indiquer aujourd'hui, monsieur le ministre, les principales mesures que vous entendez mettre en oeuvre, et selon quel calendrier ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame la sénatrice, ce matin même, comme tous les jeudis matin d'ailleurs, avec de nombreux autres ministres, j'étais au rapport dans le bureau du Premier ministre pour faire le point sur ce combat que nous menons sur tous les fronts.

S'agissant de la simplification de l'acte d'embauche dans les très petites entreprises, l'idée évoquée par M. le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale est simple : favoriser l'acte d'embauche, ...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et pour combien de temps ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... et, si une difficulté se présente, améliorer les conditions des salariés, afin de parvenir à un équilibre. Dès cet après-midi et jusqu'à mardi prochain, nous consulterons l'ensemble des partenaires sociaux sur ce sujet.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Combien de temps votre essai va-t-il durer ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Par ailleurs, vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est actuellement examiné par l'Assemblée nationale. Ce grand programme dont Valérie Létard a parlé tout à l'heure, un des plus grands gisements d'emplois pour notre pays, sera discuté par la Haute Assemblée dans une dizaine de jours.

En outre, une prime de 1 000 euros sera accordée aux jeunes acceptant un emploi dans les secteurs sous tension que nous allons définir, tels les maçons ou les serveurs, par exemple. Il faut vraiment que cette mesure soit appliquée pour de tels métiers. Par ailleurs, une prime de 1 000 euros également sera versée aux demandeurs d'emploi de longue durée bénéficiant des minima sociaux.

De plus, les 57 000 jeunes au chômage depuis plus d'un an commencent à être reçus par l'ANPE, l'Agence nationale pour l'emploi. La machine est lancée ; les rendez-vous seront terminés avant la fin du mois de septembre. Des solutions leur seront proposés : la prime de 1 000 euros, bien entendu la signature de contrats d'accompagnement vers l'emploi annoncée par M. le Premier ministre, et des CIVIS, les contrats d'insertion dans la vie sociale. Actuellement, nous comptons 52 000 CIVIS ; notre objectif est d'atteindre, d'ici à la fin de l'année, les 100 000 CIVIS.

Pour résumer rapidement ce combat mené sur tous les fronts, je vous indique que les services publics de l'emploi seront mobilisés. Je ne cèderai pas sur le rapprochement des moyens de traitement dont dispose l'ensemble des partenaires UNEDIC-ANPE : dossier unique, système informatique unique, prévision des besoins, déclenchement de la formation. Les premières maisons de l'emploi ont été labellisées cette semaine. Ce n'est pas suffisant et nous allons accélérer les procédures.

Enfin, pour ce qui concerne l'industrie, les fameux pôles de compétitivité seront mis en place au cours du mois de juillet.

Vous pouvez le constater, madame la sénatrice, nous sommes en ordre de marche sur tous les fronts et, je le répète, nous faisons le point tous les jeudis. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur quelques travées de l'UC-UDF.)

plan d'urgence pour l'emploi du gouvernement

M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion.

Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, je tiens à dire en préambule que nous regrettons vivement que M. le Premier ministre n'ait pas répondu à notre collègue. Espérons que cette attitude -  son prédécesseur avait la même - ne devienne pas une coutume ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Ladislas Poniatowski. C'est gratuit !

M. Alain Fouché. Et comment c'était avec Jospin ?

Mme Claire-Lise Campion. Ma question s'adresse donc à M. le Premier ministre.

Face à la situation économique de la France, nous ne pouvons que nous accorder sur le fait qu'il est urgent d'engager une véritable politique de l'emploi capable de relancer la croissance, de lutter contre l'exclusion, la pauvreté et la précarité.

Il aura fallu attendre trois ans, 230 000 chômeurs supplémentaires et un vote négatif sur le traité constitutionnel européen pour que le Gouvernement prenne enfin conscience du désespoir dans lequel se trouve un grand nombre de nos concitoyens.

A situation d'urgence, mesures d'urgence. Vous avez donc choisi, comme la Constitution vous en donne la possibilité, monsieur le Premier ministre, de recourir aux ordonnances.

C'est toujours avec beaucoup de réserve que le Parlement se voit dessaisi de son pouvoir d'amender et de contrôler l'action gouvernementale. Le recours aux ordonnances porte également atteinte aux prérogatives des partenaires sociaux et à la démocratie sociale. Elles ne peuvent se justifier que s'il s'agit de répondre à des attentes fortes exprimées par nos concitoyens.

M. Jean-Jacques Hyest. C'est le cas !

Mme Claire-Lise Campion. Cependant, en aucune manière, cette parenthèse dans la séparation des pouvoirs ne peut avoir pour objet de faire passer en force une politique qui porterait atteinte aux droits des citoyens et, en l'espèce, aux droits des salariés.

Or nul ne connaît l'objet des ordonnances que vous entendez prendre pendant la période estivale, monsieur le Premier ministre !

S'agit-il de la mise en place d'un « contrat nouvelle embauche », dont la période d'essai dure deux ans et qui permet à l'employeur de se séparer d'un salarié, pendant ces deux ans, sans avoir à payer les indemnités compensatrices de précarité ?

S'agit-il de l'instauration d'un chèque-emploi entreprises, qui fait disparaître l'obligation de signer un contrat de travail ?

S'agit-il de la modification des seuils retenus dans les très petites entreprises, qui est une manière détournée de remettre en cause le droit syndical ?

Toutes ces mesures sont autant de brèches dans notre code du droit du travail et introduisent la flexibilité que les Français rejettent. Nous ne pouvons cautionner le recours aux ordonnances pour ces fins détournées.

Vous avez prôné dans votre discours de politique générale, monsieur le Premier ministre, l'écoute, la concertation et la réflexion. Mais vous vous passez de l'avis des parlementaires et restez sourd aux commentaires des organisations syndicales que vous avez reçues.

C'est pourquoi je vous demande de bien vouloir nous indiquer la façon dont vous envisagez d'associer et d'informer les forces vives de la nation, notamment le Parlement, sur les ordonnances que vous comptez prendre cet été. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Pierre Sueur. C'est un one man show !

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame la sénatrice, imaginer une seconde que, dans notre grand pays, des contacts permanents avec les forces vives de la nation ne soient pas nécessaires est une illusion grave.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et le Parlement ?

M. Jacques Mahéas. Pourtant les syndicats se plaignent !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. En 1982, sur des questions de fond, combien d'ordonnances avez-vous prises ? Dois-je vous le rappeler ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) Plus de cinquante !

En ce qui nous concerne, nous prenons des dispositions d'application immédiate : 1 000 euros de plus par-ci, 1 000 euros de plus par-là, ...

M. Jean-Marc Todeschini. Où les prenez-vous ces 1 000 euros ? Et à qui ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... des mesures de simplification.

Chère madame Campion, à partir de cet après-midi, nous allons de nouveau recevoir, et ce pendant quatre jours, l'ensemble des forces vives de la nation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Pour être certains de n'en oublier aucune, nous rencontrerons également l'ensemble du bureau du Conseil économique et social, afin d'aller au fond de cette discussion.

M. Jacques Mahéas. Ah oui ! Et le patronat aussi ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Quant au Parlement, dans le cadre du vote du projet de loi d'habilitation, il sera naturellement associé aux discussions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ils applaudissent poliment !

problèmes budgétaires de la caisse nationale d'allocations familiales (cnaf)

M. le président. La parole est à Mme Adeline Gousseau. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Adeline Gousseau. Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre a annoncé la création de 15 000 places de crèches supplémentaires, en plus des « plans crèches » qui sont déjà mis en oeuvre. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Marc Todeschini. Payées par qui ? Par les communes ?

Mme Adeline Gousseau. Il veut ainsi aider les femmes à garder la liberté de choix entre vie familiale et vie professionnelle. II a souligné que « l'un des atouts de notre pays, c'est le nombre important de femmes qui travaillent, malgré les contraintes de la vie quotidienne et familiale ».

Cette annonce démontre bien l'intérêt que le Gouvernement porte à notre politique familiale et à l'une des principales préoccupations des Français : l'accompagnement du désir d'enfant. Nous nous en félicitons.

Or, monsieur le ministre, nous nous inscrivons dans un contexte particulier, celui de la négociation de la COG, la nouvelle convention d'objectifs et de gestion 2005-2008 entre la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, et l'Etat.

Comme dans toute négociation, un dialogue s'instaure entre les deux parties, afin de trouver un consensus. Il semble que deux points d'achoppement demeurent.

Concernant les emplois, la CNAF s'inquiète du non-remplacement possible de la totalité des personnels partant à la retraite.

Concernant les ressources financières, les deux parties ne semblent pas en accord sur leur progression, ce qui a pour conséquence d'inquiéter les élus locaux qui se sont d'ores et déjà impliqués dans des projets visant à créer de nouvelles places de crèches.

M. Jean-Marc Todeschini. C'est ce que nous avons dit !

Mme Adeline Gousseau. Pour ces raisons, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez rassurer ces élus locaux quant à la participation des pouvoirs publics au financement des projets engagés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Madame la sénatrice, au coeur de notre pacte social se trouve la politique familiale. C'est une priorité que nous partageons et, avec Philippe Bas, nous y travaillons depuis notre prise de fonction.

M. Xavier Bertrand, ministre. La préoccupation que vous avez exprimée, madame la sénatrice, porte, d'abord, sur le niveau de remplacement des départs à la retraite dans la branche famille au cours des années à venir.

Il faut savoir que, durant la période 2005 à 2008, près de 3 000 personnes vont être amenées à partir à la retraite. La même situation s'est déjà produite par le passé dans d'autres branches de la sécurité sociale.

Des discussions vont prochainement s'engager entre l'Etat et les partenaires sociaux, sans oublier les associations familiales. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que si tous les départs à la retraite ne seront pas remplacés, une grande partie d'entre eux le seront. Autrement dit, il n'est pas question de geler les embauches dans la branche famille.

En effet, nous devons tenir compte de la qualité du service apporté aux usagers : le maintien, le développement de la qualité de ce service sont, à nos yeux, prioritaires. Il nous faut également tenir compte des conditions et de la charge de travail des agents, sachant notamment que la gestion des allocations familiales versées aux fonctionnaires a été transférée à la CNAF depuis le 1er janvier 2005.

Par ailleurs, dans le cadre de la négociation de la convention d'objectifs et de gestion qui est à l'heure actuelle en cours entre l'Etat et la CNAF, vous voulez savoir ce que seront, au titre de la branche famille, les crédits d'action sociale dans les années à venir.

Je sais que certains élus locaux s'interrogent aujourd'hui sur le fait de savoir si, oui ou non, les moyens dont ils disposeront leur permettront de mener à bien leurs projets.

Je puis d'ores et déjà vous dire que Philippe Bas contactera dans les jours qui viennent les interlocuteurs que je viens de nommer, pour prendre les premiers rendez-vous dès la semaine prochaine, afin de déterminer les besoins et de savoir quels moyens nous devrons leur accorder.

Je m'engage devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs : la COG qui sera signée prochainement répondra pleinement aux objectifs que nous nous sommes fixés en matière de développement de l'offre de garde. Je veux rappeler que, outre les 26 000 places qui ont déjà été créées depuis 2002, 31 000 places supplémentaires seront réalisées sur la période 2005-2008. M. le Premier ministre a voulu aller plus loin encore dans son discours de politique générale et faire mieux, puisque 15 000 places complémentaires, qui correspondent à un réel besoin de la population, viendront encore s'ajouter à celles que je viens de citer.

Tous ces projets, qu'ils soient engagés ou à venir, seront bel et bien financés, madame la sénatrice, je m'en porte garant.

M. Jacques Mahéas. Essentiellement par les communes et les départements !

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous voulons permettre à la femme de pouvoir concilier vie familiale et vie professionnelle. Les moyens seront au rendez-vous de cette ambition ...

M. Jean-Marc Todeschini. Où les prenez-vous ?

M. Xavier Bertrand, ministre. ... et, surtout, les résultats seront là ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'UC-UDF.)

fermeture de classes et carte scolaire, notamment à paris

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Monsieur le ministre, depuis les manifestations des personnels enseignants, des lycéens et la mobilisation des parents d'élève au cours de l'hiver dernier et au printemps, nous savions que l'ensemble de la communauté éducative était inquiète, voire indignée des conséquences de votre politique en matière de service public de l'enseignement.

La loi de finances de 2005 prévoit en effet de supprimer 3 500 postes dans le second degré, au motif que le nombre d'élèves diminuerait de 45 000.

Pour notre part, nous considérons, monsieur le ministre, que l'avenir de nos adolescents ne se résume pas à des moyennes par classe. Les effectifs des établissements devraient, selon nous, être examinés au cas par cas, en tenant compte du contexte local.

Dans le même temps, l'augmentation de 51 000 élèves dans le premier degré n'est accompagnée, hors Mayotte, que par la création de 700 postes d'enseignants supplémentaires. Pour une même variation d'effectifs, cela revient à supprimer les postes cinq fois plus vite qu'ils ne sont créés. Dans de nombreuses villes, les effectifs des classes n'en seront que plus surchargés et les conditions de remplacement des personnels absents se dégraderont encore.

Alors que le Président de la République vient de nommer un ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances, vous portez gravement atteinte, monsieur le ministre, à l'école de la République, qui est le véritable creuset de l'égalité des chances.

En effet, vous organisez l'injustice avec la carte scolaire pour la rentrée de 2005. Si nous ne contestons pas le principe de fermeture des classes lorsque les effectifs sont en baisse significative, nous contestons en revanche le fait que, en septembre prochain, les suppressions de classes frapperont, de manière brutale et sans distinction, des établissements parfois en grande difficulté.

Ainsi, les académies de Nancy-Metz et de Lille connaîtront respectivement 600 et 1 000 suppressions de postes, alors qu'elles subissent de plein fouet les effets de la désindustrialisation et de leurs conséquences pour les familles.

A Paris, les quartiers populaires que sont les XIIIe et XIXe arrondissements concentrent plus de la moitié des fermetures de classe. Je m'attarderai un instant sur le cas de cette ville, que je connais bien. Comment expliquez-vous, monsieur le ministre, que soient fermées des classes dans des secteurs très populaires, où l'on dénombre parfois jusqu'à trente nationalités dans les écoles et où la crise sociale fait des ravages, et que, dans le même temps, vous mainteniez des classes dans les Ier et Ve arrondissements où les effectifs parfois n'atteignent péniblement que vingt élèves par classe ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Raymonde Le Texier. Pas de mauvais esprit !

M. Roger Madec. Enfin, des académies dont les effectifs scolaires sont en augmentation connaîtront des suppressions de postes : c'est le cas de celle d'Aix-Marseille, où 200 postes seront supprimés.

L'ancien ministre de l'éducation nationale, M. François Fillon, nous avait expliqué que le nombre de postes d'enseignants n'était pas une réponse aux difficultés de l'école : la solution résidait, selon lui, dans les innovations pédagogiques.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Roger Madec. Nous le contestons, à l'instar de l'ensemble de la communauté scolaire.

En conclusion, monsieur le ministre, nous vous demandons de revoir la carte scolaire pour la rentrée de 2005 et de rétablir les moyens supprimés par la loi de finances rectificative. Nous considérons, en effet, que l'école de la République doit bénéficier des moyens dont elle a besoin, car il s'agit là d'un investissement pour l'avenir. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, je suis d'accord avec vous : le meilleur des investissements, c'est l'investissement humain. Cela se vérifie notamment dans l'éducation nationale.

Tout d'abord, dès ma prise de fonction, je me suis assuré que la rentrée de 2005 pourrait se dérouler dans des conditions satisfaisantes. C'est le cas du point de vue technique comme du point de vue du nombre des enseignants et des personnels encadrant. (Mme Nicole Bricq et M. Jean-Marc Todeschini s'exclament.)

M. Jacques Mahéas. C'est catastrophique !

M. Gilles de Robien, ministre. En ce qui concerne Paris, monsieur le sénateur, depuis 1996, les effectifs d'élèves ne cessent de décroître.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est faux ! Les postes sont supprimés dans les quartiers où les effectifs augmentent, non dans les quartiers où ils baissent !

M. Gilles de Robien, ministre. Parallèlement, le taux d'encadrement ne cesse de s'améliorer.

Je puis vous assurer que, pour la rentrée de 2005, aucun poste ne sera supprimé.

Par ailleurs, on nous annonce, comme vous venez de le faire, des augmentations d'effectifs d'élèves. Je n'en crois rien, mais c'est toujours possible et il faut être prudent. C'est pourquoi l'éducation nationale est en état de veille. Elle a les moyens de répondre à de telles augmentations qui sont aujourd'hui imprévues, mais qui pourraient se révéler au moment de la rentrée. Elle se prépare à cette éventualité.

Mme Hélène Luc. Il faut un collectif budgétaire !

M. Gilles de Robien, ministre. Enfin, s'agissant de votre remarque concernant les quartiers favorisés et les quartiers défavorisés, monsieur le sénateur, ...

M. Gilles de Robien, ministre. ...sachez qu'elle n'est pas exacte. Depuis longtemps, notamment à travers la politique des zones d'éducation prioritaire, un effort considérable est accompli.

M. Gilles de Robien, ministre. Entre les établissements de centre-ville et les établissements périphériques, on note un taux d'encadrement supplémentaire, de l'ordre de 18 % à 20 %. C'est encore plus vrai à Paris qu'ailleurs.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est archifaux !

M. Gilles de Robien, ministre. Je terminerai par un exemple. Alors que, mathématiquement, quinze classes pourraient être fermées dans les quartiers périphériques, notamment en zone d'éducation prioritaire, elles sont maintenues ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les effectifs baissent dans le Ve et les postes sont supprimés dans le XIIIe !

Mme Hélène Luc. Il faut un collectif budgétaire !

Importations de textile chinois

M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.

La très forte progression des importations textiles en provenance de Chine depuis le début de l'année constitue une menace pour notre industrie et est particulièrement mal vécue dans les bassins d'emploi en difficulté.

Le commissaire européen au commerce extérieur a signé, voilà quelques jours, un accord temporaire à Shanghai. Pouvez-vous m'assurer, madame la ministre, que celui-ci constitue une protection suffisante pour l'emploi en France ?

Par ailleurs, nous constatons une aggravation constante du déficit commercial français à l'égard de la Chine. Que comptez-vous faire, madame la ministre, pour inverser cette tendance ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, comme vous l'indiquez, la Commission européenne a trouvé un accord sur les importations chinoises de vêtements et de textiles dans la nuit de vendredi à samedi dernier, à Shanghai.

Permettez-moi de faire deux rappels.

Premier rappel : la France a été à l'origine de la mobilisation de la Commission européenne, tant pour fixer la liste des produits concernés, après enquête auprès des professionnels, que pour déclarer une procédure d'urgence permettant la mise en oeuvre de sauvegardes, comme nous y autorisent les accords internationaux.

La fin des accords multifibres intervenue le 1er janvier dernier a, en effet, entraîné une progression spectaculaire des importations chinoises, ce qui a contribué à déstabiliser l'industrie textile dans notre pays comme dans des pays du sud de la Méditerranée. Cette augmentation brutale a également provoqué une diminution considérable des prix, dommageable pour notre industrie.

Les autorités européennes ont engagé des négociations avec les autorités chinoises en vue de trouver un accord d'autolimitation sur dix catégories de produits et un engagement d'autolimitation jusqu'à la fin de l'année 2007, ainsi qu'un accord pour une période transitoire en 2008. Cet accord donnera plus de visibilité et plus de temps à nos industries pour se restructurer et pour se spécialiser dans des produits à haute valeur ajoutée.

La France et l'Union européenne resteront vigilantes et utiliseront tous les instruments de politique commerciale nous permettant de nous assurer que ces accords seront effectivement appliqués.

Second rappel : l'entrée de la Chine dans l'Organisation mondiale du commerce commence à se traduire par une progression de nos exportations. Au cours de l'année 2004, nos exportations à destination de la Chine ont augmenté de 15 % et se portent bien pour le premier trimestre de l'année 2005. L'augmentation du niveau de vie des consommateurs chinois ainsi que les considérables besoins de ce pays dans les domaines des infrastructures, du nucléaire et de l'environnement offriront des opportunités nouvelles à ceux qui sauront les saisir.

Au début du mois de juillet prochain, j'inaugurerai à Pékin l'exposition française sur l'habitat « France, des maisons à vivre ». Au mois de novembre, j'accompagnerai 600 PME françaises qui iront à la rencontre de leurs homologues chinois pour explorer les perspectives d'exportation de l'industrie et des services français.

Le Gouvernement a l'ambition d'engager chaque année 1 000 nouvelles PME à venir prospecter le marché chinois. A cet effet, des instruments sont à notre disposition et UBIFRANCE, l'Agence française pour le développement international des entreprises, encouragera ces entreprises et participera au financement des différents salons qui se tiendront dans les pays cibles, notamment en Chine.

Notre réussite sur le marché chinois passe non seulement par les grands projets que le Gouvernement soutient, mais également par l'activité intense de l'ensemble des PME qui sont désireuses d'exporter. Je les y encouragerai. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de Mme Michèle André.)