compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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Désignation de sénateurs en mission

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 3 octobre 2005 par laquelle il a fait part au Sénat de sa décision de placer en mission temporaire auprès de lui-même M. Henri de Raincourt, sénateur de l'Yonne, et M. Michel Mercier, sénateur du Rhône.

Acte est donné de cette communication.

3

Dépôt de rapports du Gouvernement

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport établissant le bilan de l'évolution comparée des bases, des taux et des produits de fiscalité directe locale, en application de l'article 31 de la loi de finances pour 2003, et le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, établi en application de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

4

Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat du Cambodge

M. le président. Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer la présence dans nos tribunes d'une délégation du Sénat du Cambodge, conduite par Mme Ty Borasy, présidente de la commission des affaires étrangères.

Je forme des voeux pour que la coopération entre nos assemblées renforce les liens amicaux entre nos deux pays. (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le ministre se lèvent et applaudissent.)

5

Souhaits de bienvenue à une délégation de fonctionnaires de l'Assemblée nationale d'Afghanistan

M. le président. Mes chers collègues, je tiens à vous signaler la présence dans les tribunes d'une délégation de fonctionnaires de l'Assemblée nationale d'Afghanistan, conduite par M. Hamid Akram, directeur du service des relations internationales.

Ces fonctionnaires sont actuellement accueillis à l'Assemblée nationale et au Sénat français dans le cadre du programme de « Soutien à l'établissement du pouvoir législatif en Afghanistan » du PNUD, dont la France a été déclarée pilote.

Dans ce cadre, nous avons aidé à la rédaction du règlement du Parlement afghan et certains de nos administrateurs ont conduit l'été dernier des formations à Kaboul.

Je forme des voeux pour que cette collaboration entre nos assemblées participe à la restauration de la démocratie dans ce pays tourmenté par des années de guerre.

Je vous rappelle que M. le président du Sénat reçoit aujourd'hui M. Hamid Karzaï, président de la République d'Afghanistan.

6

Démission de membres de commissions et candidatures

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de M. Hubert Falco, comme membre de la commission des affaires culturelles, de M. Jackie Pierre, comme membre de la commission des affaires sociales, et de MM. Francis Giraud et Simon Loueckhote, comme membres de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.

Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l'article  8 du règlement.

J'informe le Sénat que le groupe Union pour un mouvement populaire a fait connaître à la présidence le nom des candidats qu'il propose pour siéger à la commission des affaires culturelles, à la place laissée vacante par M. Jean-Pierre Chauveau, démissionnaire de son mandat de sénateur, à la commission des affaires économiques et du Plan, à la place laissée vacante par M. Georges Ginoux, démissionnaire de son mandat de sénateur, à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à la place laissée vacante par M. Simon Loueckhote, démissionnaire.

Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

7

Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

situation des unions départementales des associations familiales

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, auteur de la question n° 774, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Alain Vasselle. A travers cette question, je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur la situation difficile dans laquelle se trouvent les unions départementales des associations familiales, les UDAF, du fait de l'application de la convention collective de 1966.

Sur l'initiative de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, et avec l'agrément des pouvoirs publics, les UDAF sont entrées, au 1er janvier 2003, dans la convention collective de 1966, dont le syndicat employeur, le SNASEA, est le gestionnaire.

Lors de ce changement de convention, des engagements très clairs avaient été pris à la fois par l'UNAF et le SNASEA afin de ne pas appliquer aux agents des UDAF les congés trimestriels. D'ailleurs, en cours d'élaboration, l'annexe spécifique aux métiers de la tutelle, principale activité des UDAF, devait confirmer cette exclusion.

Par un accord en date du 10 novembre 2004, le SNASEA est revenu sur les engagements pris, en préconisant le rattachement des services des UDAF à des annexes de la convention de 1966 qui, toutes, concèdent des congés trimestriels aux salariés.

Or l'application de cette convention en matière de congés trimestriels, propres à certains secteurs de l'action sociale, ne sera pas sans conséquences graves pour les UDAF, tant sur le plan organisationnel que sur le plan financier.

En effet, la mise en oeuvre par les services de tutelle concernés entraînera la réduction du temps de travail annuel à 1 400 heures pour un salarié à temps plein, durée qui est très nettement inférieure à celle que prévoit la législation sur les 35 heures.

Cette situation aura, par ricochet, des conséquences pour les personnes handicapées qui sont confiées aux services de tutelle des UDAF et qui sont déjà particulièrement démunies. En effet, de par une moindre disponibilité des agents, les personnes handicapées subiront un préjudice, ce qui est tout de même surprenant alors que le Parlement vient de voter une nouvelle loi sur le handicap qui tend à établir une véritable équité entre les personnes handicapées et celles qui ne le sont pas.

En outre, cette situation portera atteinte non seulement à la qualité et à la pérennité des services des associations UDAF sur le plan financier, mais aussi à l'avenir des personnels employés.

Tout cela n'est pas sans conséquence sur l'Etat qui finance aujourd'hui 80 % des associations tutélaires. Dès lors, la question qui se pose est de savoir si l'Etat sera en mesure d'apporter les compensations financières correspondant à cette disposition.

A l'heure actuelle, il faut savoir que les inspecteurs du travail ont commencé à demander aux UDAF de concéder les congés trimestriels à leurs salariés.

De nombreux contentieux ont été engagés depuis le 1er janvier 2003, à la suite de l'adoption de cet avenant à la convention collective, ce qui ne manque pas de mettre en difficulté nombre d'UDAF.

Face à cette situation sans issue aux conséquences dramatiques pour les UDAF, je souhaiterais connaître, monsieur le ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement pour trouver une solution aux difficultés qu'elles rencontrent et, d'avance, je vous remercie de la réponse que vous aurez l'amabilité de m'apporter.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité m'interroger sur l'incidence des dispositions de l'accord collectif du 2 novembre 2002, signé par l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, qui prévoit les conditions d'application de la convention collective du 15 mars 1966 pour les associations tutélaires.

L'agrément de cet accord, intervenu en décembre 2002, était notamment conditionné par l'exclusion des métiers tutélaires du bénéfice des congés trimestriels. Une négociation au niveau de la convention collective devait ensuite déterminer le régime des congés applicable aux personnels de ces associations auxquels vous venez de faire allusion.

Les difficultés dont vous faites état ont été soulevées lors de la signature par le SNASEA et les syndicats d'employés d'un deuxième accord en date du 10 novembre 2004. Ce dernier visait à appliquer aux salariés des UDAF le régime des congés trimestriels.

Or votre question porte tant sur les conséquences financières de cet accord que sur ses conséquences en termes d'organisation du travail.

Sur le plan juridique, j'ai fait connaître, le 25 juin 2005, au président de l'UNAF et au président du SNASEA que cet accord, n'ayant pas été agréé, n'était dès lors pas applicable et, par conséquent, pas opposable aux financeurs.

Je constate par ailleurs que, dans certaines UDAF, des accords locaux ont été conclus, mettant en place une réorganisation du travail, comprenant notamment la suppression des jours de RTT. Ces UDAF ont fait savoir qu'elles étaient de ce fait en mesure de mettre en place les jours de congés trimestriels sans surcoût ni diminution de la qualité de prise en charge, point auquel nous sommes tous particulièrement attachés.

J'ai donc pris acte de la volonté du SNASEA et des UDAF adhérentes de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que ces accords soient sans incidence tant sur leurs budgets que sur la qualité de la prise en charge des personnes.

Il appartient donc aux associations, soit de ne pas décliner l'accord national qui, je le répète, n'ayant pas été agréé, ne s'impose pas, soit d'assortir un accord local d'une nouvelle organisation du travail qui n'implique pas de surcoût et n'entraîne pas de baisse de la qualité du service rendu.

Par ailleurs, le 20 septembre 2005, j'ai donné des instructions en ce sens aux services déconcentrés du ministère et je leur ai tout particulièrement demandé de veiller à la nécessité de maintenir dans les structures concernées la qualité de la prise en charge.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, de votre réponse très claire qui ne souffre aucune ambiguïté, aucun quiproquo.

Pour ma part, je souhaite que les UDAF parviennent à un accord et que, à défaut, les instructions que vous avez données s'appliquent. En effet, il ne faudrait pas qu'elles empêchent les UDAF d'engager le dialogue sur le plan local pour trouver une solution donnant satisfaction aux personnels tout en maintenant le même niveau de qualité de service.

Soins dentaires et CMU

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier, auteur de la question n° 775, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Mme Gisèle Gautier. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur la dégradation des conditions d'exercice des chirurgiens-dentistes qui délivrent des soins aux personnes bénéficiant de la CMU, la couverture maladie universelle, et de la CMU complémentaire.

En effet, les chirurgiens-dentistes qui exercent dans des quartiers à forte densité de population relevant de la CMU ou de la CMU complémentaire souffrent d'un important manque de moyens en inadéquation avec les objectifs ambitieux prônés par cette réforme.

De plus, les tarifs prothétiques, d'ailleurs parfois inférieurs aux coûts et aux charges, se superposent à de faibles tarifs de soins conventionnels, ce qui peut inciter certains praticiens à adopter une organisation et des procédures techniques simplifiées.

Il en résulte, à mes yeux, une pratique de la chirurgie dentaire à deux vitesses, la possibilité pour les chirurgiens-dentistes de limiter leur participation au dispositif CMU, voire de désertifier des zones dans lesquelles les bénéficiaires de la CMU sont plus nombreux.

En conséquence, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si le Gouvernement envisage une revalorisation et une actualisation du panier de soins CMU complémentaire, un accompagnement social et une responsabilisation des patients bénéficiaires ainsi qu'une reconnaissance pour les bénéficiaires de la CMU complémentaire du libre choix de leur traitement, conformément, d'une part, à la loi relative aux droits des malades du 4  mars 2002, et, d'autre part, aux demandes de la convention nationale des syndicats dentaires.

Je rappellerai que le syndicat des chirurgiens-dentistes, qui m'a interpellée et qui représente plus de 15 000 adhérents, souhaite, d'une part, un égal accès aux soins dentaires pour tous les assurés sociaux en évitant la mise en place de plusieurs types d'exercice, synonymes de chirurgie dentaire à deux vitesses, comme je viens de le dire, d'autre part, le maintien des cabinets dentaires dans les zones défavorisées, dans les quartiers où habitent de nombreux bénéficiaires de la CMU complémentaire et, enfin, des conditions d'exercice acceptables pour tous les cabinets dentaires.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Madame la sénatrice, je veux en préambule vous redire l'attachement du Gouvernement à l'égalité d'accès aux soins de l'ensemble de la population et, notamment, des plus démunis.

Je pense bien évidemment aux assurés bénéficiaires de la CMU complémentaire qui, à ce titre, doivent recevoir les mêmes soins et disposer des mêmes droits quant à l'accès aux soins, au choix du professionnel de santé et au choix du traitement.

A cet égard, dans une instruction du mois de mai dernier, la Caisse nationale de l'assurance maladie a de nouveau appelé l'attention des caisses primaires sur la nécessité de prendre dûment en compte, par une démarche envers les professionnels, les refus de soins qui pourraient être signalés.

Cela étant, madame la sénatrice, le Gouvernement ne méconnaît pas les difficultés réelles, que vous avez évoquées. Vous avez d'ailleurs rappelé les raisons pour lesquelles elles sont plus importantes dans certains cabinets.

Il faut le rappeler, les tarifs actuels ont été fixés en 1999, au moment de l'institution de la CMU complémentaire. Il est donc légitime aujourd'hui qu'ils soient revus, dans la mesure où, depuis plus de six ans, rien n'a été fait. Par un courrier du 18 mai 2005, j'ai indiqué au directeur général de l'UNCAM, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, au président de la Confédération nationale des syndicats dentaires et à celui de l'Union des jeunes chirurgiens-dentistes que j'étais favorable à un réexamen de l'adéquation des plafonds tarifaires applicables aux bénéficiaires de la CMU complémentaire.

Je peux vous indiquer, madame la sénatrice, que des échanges techniques qui ont déjà eu lieu entre les syndicats de chirurgiens-dentistes et les services de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, notamment son service médical, ont eu pour objet de préciser les actes à revaloriser et le niveau de la revalorisation. Il était en effet important de savoir précisément ce qu'il convenait de faire.

En outre, vous le savez, des négociations conventionnelles sont engagées entre l'assurance maladie et la profession dentaire. Par définition, la question des actes dentaires réalisés dans le cadre de la CMU relève du Fonds CMU et non pas directement du champ de la convention dentaire. Malgré tout, en raison des enjeux financiers qui y sont notamment attachés, je souhaite que la réponse qui sera donnée à cette question soit cohérente avec les résultats de la négociation conventionnelle. Les syndicats dentaires ont d'ailleurs bien à l'esprit que ces deux aspects ne peuvent pas être complètement déconnectés.

A cet égard, madame la sénatrice, j'ai donné des instructions pour qu'une solution au problème bien réel que vous avez évoqué soit trouvée le plus rapidement possible. Au demeurant, ce problème de la CMU ne sera pas déconnecté des revendications portant, notamment, sur la revalorisation conventionnelle. En effet, nous ne pouvons pas envisager un égal accès aux soins sans prendre en compte la question de la juste réévaluation d'un plafond qui n'a pas été revu depuis six ans.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Monsieur le ministre, les éléments de réponse que vous venez de nous apporter devraient permettre de donner satisfaction aux demandes des différents syndicats, notamment en matière d'actualisation des tarifs, lesquels n'ont effectivement pas été revalorisés depuis 1999.

Je comprends donc très bien qu'il faille consulter l'ensemble des partenaires et élaborer une convention générale pour régler ce problème. Si le coût financier final ne sera pas négligeable, pour autant, l'ensemble des assurés et des intervenants en matière de chirurgie dentaire ne doivent pas être pénalisés.

dégradation de la situation des retraités

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la question n° 770, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez, la population manifestera aujourd'hui, vraisemblablement en grand nombre, pour défendre, notamment, le pouvoir d'achat.

Les retraités, au regard de leur situation qui ne cesse de se dégrader, seront nombreux à se joindre à ce mouvement. Il n'est d'ailleurs pas étonnant que l'ensemble des unions syndicales les représentant en soit partie prenante, car, en dix ans, le pouvoir d'achat des pensionnés a baissé de 20 %.

Or, loin de s'attaquer à ce problème, monsieur le ministre, le Gouvernement a pris des décisions qui ne font qu'accentuer les difficultés.

C'est le cas de la loi portant réforme des retraites, dont la mise en oeuvre a entraîné une perte de 0,5 % de pouvoir d'achat par an pour les retraités non cadres du privé et de 0,7 % par an pour les retraités cadres du privé. C'est également le cas en matière d'assurance maladie.

Ces mesures ont certes fait des heureux, notamment les assurances privées, qui prospèrent et dont les profits continuent de grossir, mais qui ne sont pour autant mises à contribution pour soutenir l'effort que vous demandez à la population.

Par conséquent, elles ont des conséquences très lourdes pour le plus grand nombre : elles pénalisent les ménages modestes et moyens et pèsent très lourdement sur le niveau de vie des personnes âgées. C'est en effet cette catégorie de la population qui est l'une des principales consommatrices de médicaments.

Le forfait hospitalier a augmenté de 8 % en 2004, et devrait continuer de progresser au même rythme jusqu'en 2007, si vous refusez de revenir sur vos décisions.

Par ailleurs, la CSG qui s'applique aux retraites a subi une augmentation de 6,45 %.

Les seniors, dont le suivi médical est nécessairement plus poussé, sont soumis au forfait sur les consultations médicales. A ce sujet, vous souhaitez aller plus loin, avec l'instauration d'un forfait de 18 euros pour tout acte supérieur à 91 euros.

A mon avis, de telles mesures pénaliseront l'épargne populaire, au lieu de donner une assise vraiment nouvelle, juste et moderne pour le financement de la protection sociale, qui pourrait être obtenue avec la prise en compte des revenus financiers.

L'ensemble de ces mesures entraîne, bien sûr, des augmentations des cotisations dues aux mutuelles.

Par ailleurs, et malgré le drame vécu en 2003, les maisons de retraite manquent toujours cruellement des moyens indispensables à leur fonctionnement. Même si je n'ignore pas que des efforts ont été faits, nous constatons tout de même que la pénurie de personnel perdure et que le prix de l'hébergement reste très élevé.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, il nous semble urgent d'entendre les revendications des retraités, ainsi que de leurs organisations représentatives, et de prendre des mesures pour enrayer le processus de paupérisation des personnes âgées.

Notre pays doit garantir à chacune et à chacun de vivre dans la dignité, jusqu'à la fin de ses jours.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le sénateur, alors même que la sécurité sociale célèbre aujourd'hui même son soixantième anniversaire, je tiens à rappeler que la France peut s'enorgueillir, grâce à son système de protection sociale, d'allouer un niveau de vie élevé aux personnes âgées. Ce niveau a d'ailleurs fortement progressé depuis plusieurs décennies et tout dernièrement encore.

Compte tenu de la tonalité de votre question, le bref rappel que je souhaite faire est d'autant plus significatif.

En effet, l'INSEE révèle dans le cadre de ses études l'amélioration constante du niveau de vie moyen des ménages de retraités, qui est aujourd'hui égal à 90 % de celui des ménages d'actifs, alors qu'il n'en représentait, en 1970, que les deux tiers.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre. De fait, aujourd'hui, les ménages de retraités disposent en moyenne d'un niveau de vie supérieur à celui des actifs, car ils sont plus souvent propriétaires de leur logement.

Cette amélioration de la situation financière des retraités concerne également les plus modestes : le taux de pauvreté des ménages de retraités est ainsi passé de 28 % en 1970 à 4 % aujourd'hui. C'est encore, bien entendu, 4 % de trop !

Si une telle amélioration concerne tous les retraités, elle est aussi clairement perceptible à travers l'évolution du nombre de bénéficiaires du minimum vieillesse, qui a été divisé par trois depuis 1970, alors même que la population âgée de plus de soixante-cinq ans a progressé de 50 %.

M. Alain Gournac. Absolument !

M. Xavier Bertrand, ministre. Cette évolution est un des grands succès de la sécurité sociale, qu'il nous faut préserver. La réforme des retraites en 2003 et la réforme de l'assurance maladie en 2004 ont toutes les deux pour finalité de pérenniser notre sécurité sociale, sur la base de ses principes constitutifs de solidarité, de répartition, mais aussi d'égal accès.

Concernant la réforme des retraites, monsieur le sénateur, je voudrais rappeler un point que vous n'avez pas cité : le maintien du pouvoir d'achat des retraités est aujourd'hui garanti, pour la première fois, grâce à une indexation sur l'inflation.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre. S'agissant des petites pensions, l'objectif est d'assurer en 2008 un montant de pension égal à 85 % du SMIC minimum pour une carrière complète, comme cela figure à l'article 4 de la loi du 21 août 2003.

Pour atteindre cet objectif, comme cela était prévu, le minimum contributif sera majoré de 9 %, en plus des revalorisations générales, dans le cadre de trois hausses de trois points en 2004, en 2006 et en 2008.

Concernant la branche maladie, monsieur le sénateur, vous savez que les personnes âgées sont les premières intéressées à la réforme et au maintien de notre système d'assurance maladie. Dans le cadre de cette réforme, nous avons pu augmenter le niveau de ressources, en insistant notamment sur les efforts demandés au titre de la CSG et, surtout, en faisant évoluer les comportements.

Nous avons aussi fait en sorte, concernant les personnes âgées dépendantes, que le plan « vieillissement et solidarités », mis en oeuvre depuis 2003, vise à favoriser soit l'hébergement à domicile, soit la médicalisation accrue des établissements ou des services médico-sociaux accueillant ces personnes.

Les perspectives pour 2006 ont été annoncées clairement. Les objectifs de création de places seront totalement finalisés dès le début de l'année 2006, soit deux ans avant l'échéance retenue. Alors que ce plan prévoyait la création de 10 000 places en quatre ans, ce seront, à cette date, plus de 11 500 places qui auront été créées en établissements.

Cet effort se poursuit d'ailleurs en parallèle de la création de places en services de soins infirmiers à domicile, pour laisser le choix aux personnes âgées. Plus de 85 % des 17 000 places prévues par le plan auront été créées deux ans avant son échéance. Je tiens à vous remercier, monsieur le sénateur, de me permettre de le rappeler au sein de cet hémicycle.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous le voyez, parce que nous sauvegardons notre système de retraite et notre système d'assurance maladie, parce que nous accroissons l'effort en direction des personnes âgées dépendantes, le Gouvernement prend pleinement en compte la question de l'allongement de la durée de vie et continue de garantir non seulement la solidarité au sein de chaque génération, mais surtout la solidarité entre les générations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Georges Mouly applaudit également.)

M. Alain Gournac. Très bonne réponse !

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de rappeler que nous célébrons le soixantième anniversaire de la sécurité sociale. Nous rendons hommage à Ambroise Croizat.

MM. Alain Gournac et Louis Souvet. Et au général de Gaulle !

M. Thierry Foucaud. Certes, mais c'était une autre époque. Au demeurant, nous sommes toujours fidèles aux valeurs du Conseil national de la Résistance, et nous entendons notamment défendre celles qui ont été les fondements de notre sécurité sociale.

Monsieur le ministre, il ne faut pas nier la réalité : un certain nombre d'unions nationales et d'organisations syndicales de retraités expriment leur profond mécontentement et ont des revendications précises. Puisqu'il existe aujourd'hui une base de discussion, il convient de recevoir ces organisations et d'engager des négociations.

Il ne s'agissait pas pour moi d'engager un débat de chiffres avec vous. Je souhaitais simplement vous faire part de la réalité et relayer le mécontentement des retraités eu égard à la dégradation de 20 % de leur pouvoir d'achat en dix ans.

En ce qui concerne les places dans les maisons de retraites, monsieur le ministre, je suis de ceux qui reconnaissent que des efforts ont été faits. Pour autant, il faut continuer dans cette voie, pour combler les nombreuses lacunes qui existent encore dans les maisons de retraite et que la presse écrite souligne quasi quotidiennement.

Il serait bon que vous puissiez discuter de la satisfaction des besoins des personnes hébergées dans les maisons de retraite, qui doivent employer un personnel suffisamment nombreux, mais également de qualité, grâce à des formations appropriées.

stationnement des gens du voyage

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 764, adressée à M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, ma question est bien évidemment en décalage avec les soucis actuels du Gouvernement, et je vous prie de bien vouloir m'en excuser !

Il faut dire qu'elle a été déposée depuis un temps certain et qu'il y a eu évidemment, entre-temps, la coupure des vacances. Mais, si décalage il y a, le thème que je vais développer revêt une très grande importance pour les maires qui, sur le terrain, sont chargés de faire respecter les lois.

La France est citée en exemple en matière de stationnement des gens du voyage, En effet, aucun des pays frontaliers de l'hexagone n'oblige les collectivités locales à organiser ce stationnement. Cela est acté, et mon propos n'est pas de revenir sur l'opportunité ou non des dispositions de la loi 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

Permettez-moi, monsieur le ministre, - et mes collègues, je l'imagine, seront d'accord avec moi -  de trouver paradoxal que les collectivités locales qui ont respecté les prescriptions éthiques via le canal des préfectures, à savoir la construction d'accueil permanent selon les normes officielles, soient ensuite contraintes, pour faire respecter les arrêts et les interdictions, de recourir au même parcours du combattant que les collectivités qui seraient restées dans l'expectative.

C'est à décourager les meilleures volontés et à faire presque regretter le coût élevé des équipements qui, je le précise, élèvent ces aires de stationnement au niveau de campings quatre étoiles ! C'est ainsi dans la ville dont je suis le maire.

Alors qu'ils supportent le poids de l'investissement et de l'entretien de l'aire de stationnement, les contribuables voient régulièrement s'ajouter à ce coût les réparations des casses volontaires et l'ensemble des frais liés à un déménagement forcé, à savoir les sempiternels constats d'huissiers, les procédures de référé, bref, au bas mot, entre 900 et 1 200 euros pour chaque stationnement sauvage sur le terrain d'une commune qui a satisfait très largement à toutes les obligations légales.

Le décompte dans ce domaine mérite que l'on s'y attarde. Un constat d'occupation illégale s'élève à 250 euros. Notons l'intervention au niveau du parquet et l'obtention du jugement d'expulsion qui représente plus de 40 euros supplémentaires. Relevons aussi la signification de ce même jugement aux intéressés, à laquelle il convient d'ajouter le coût du procès-verbal d'expulsion, soit plus de 220 euros, les émoluments des avocats, etc. En dernier lieu, il faut que le préfet accorde l'aide de la force publique, ce qui n'est pas acquis.

Comme M. le ministre de l'intérieur l'a rappelé lui-même à propos de l'immigration clandestine, la loi est la même pour tous et, plus particulièrement en ce qui nous concerne ce matin, à la population sédentaire comme à la population nomade. Les élus, les contribuables ne doivent pas faire les frais, et ce sans jeu de mots, d'inimitiés ancestrales entre les différents groupes en cause. D'ailleurs, ces alibis ont bon dos pour transgresser la loi. Les Rom, les Manouches et autres Tsiganes ne se supportent pas. Même si les communes disposent de place, ces populations refusent de cohabiter. Nos contribuables doivent-ils faire les frais de ces particularismes ? Je ne le pense pas.

Monsieur le ministre, à l'avenir sera-t-il prévu des procédures simplifiées pour mettre fin aux stationnements sauvages ? En effet, pour les élus, pour les administrés, la non-reconnaissance de leurs efforts financiers est de moins en moins compréhensible. Un allégement des procédures, en ce qui concerne tant les délais que les coûts, répondrait à une simple équité et tout simplement au bon sens.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, empêché, m'a demandé de vous apporter la réponse suivante, tout en ayant bien conscience qu'elle est un peu tardive.

En application de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, les maires des communes figurant au schéma départemental d'accueil des gens du voyage, qui se sont conformés à leurs obligations, peuvent prendre des arrêtés d'interdiction de stationnement des résidences mobiles en dehors des aires d'accueil aménagées et faire ordonner leur évacuation forcée. Ils disposent, à cet effet, d'une procédure d'expulsion spécifique et simplifiée.

Ainsi, lorsque ces conditions sont remplies, le président du tribunal de grande instance peut prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée. Le juge peut étendre les effets de l'ordonnance à l'ensemble des occupants du terrain non visés par l'ordonnance initiale.

En outre, aux termes de l'article 322-4-1 du code pénal, l'installation illicite en réunion sur un terrain appartenant à autrui en vue d'y établir une habitation temporaire peut être punie de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende, sous réserve, lorsque l'installation a lieu sur un terrain appartenant à une commune - ou un groupement de communes - inscrite au schéma départemental, que les prescriptions de ce schéma la concernant aient été réalisées. Dès l'occupation illicite, les forces de l'ordre, qui relèvent alors de l'autorité du procureur de la République, peuvent intervenir.

Concrètement, les élus des communes qui ont respecté leurs obligations disposent donc de moyens plus efficaces que ceux des communes qui n'ont pas encore réalisé les aires d'accueil inscrites au schéma départemental pour lutter contre les occupations illicites. Tel est d'ailleurs l'esprit du texte.

Par conséquent, il convient d'insister, ainsi que le rappelle une circulaire adressée aux préfets voilà un an, sur la nécessité, pour les communes, de régulariser leur situation dans les meilleurs délais afin d'être en mesure de bénéficier de l'ensemble des dispositions précitées.

Au-delà de ces dispositions juridiques, il convient de préciser que M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, a souhaité que des avancées significatives puissent être réalisées.

D'une part, il a demandé aux préfets, à l'occasion d'une réunion à laquelle assistait d'ailleurs M. Estrosi, de tout mettre en oeuvre pour créer des synergies dans chacune des zones concernées et de relancer ainsi la réalisation des aires d'accueil afin de réduire autant que possible et dans les meilleurs délais les contentieux et les tensions locales obligatoirement générés par les stationnements illicites.

D'autre part, il a souhaité que soit rendue plus facile et plus efficace la réponse des pouvoirs publics à l'égard de l'occupation illicite des terrains publics ou privés.

Ainsi, sont en cours des travaux visant à réduire le délai dans lequel le juge saisi en référé doit statuer sur les demandes d'expulsion. De leur côté, les préfets veilleront à accorder chaque fois que possible le concours de la force publique pour permettre la mise en oeuvre rapide des expulsions décidées par le juge. De plus, ils se rapprocheront des procureurs de la République afin que les dispositions que je viens de rappeler soient exploitées au mieux par les forces de l'ordre, ce qui, reconnaissons-le, n'a pas toujours été le cas par le passé. Enfin, ils s'efforceront de gérer de façon globale et ferme la question des campements semi-sédentaires, implantés, le plus souvent, en périphérie urbaine.

Tels sont, monsieur le sénateur, les quelques éléments que M. le ministre d'Etat souhaitait vous apporter en réponse à votre question.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, je vous remercie des éléments de réponse clairs et détaillés que vous m'avez apportés et qui seront très utiles aux maires confrontés à la difficulté de faire respecter la loi.

En l'espèce, il s'agit de maires qui ont prévu des aires d'accueil en respectant le nombre de places et les équipements requis. Mais je doute que les procédures simplifiées, dont vous venez de parler, soient connues de la justice. Pour ce qui me concerne, je n'ai constaté aucune différence. Quand des gens occupent illicitement des espaces, cassent les barrières, comblent les fossés, déplacent les rochers que nous avons mis en place pour empêcher leur passage, le coût auquel je dois faire face est très élevé. Personne ne semble respecter ces procédures simplifiées.

De surcroît, compte tenu des troubles à l'ordre public que pourrait engendrer l'intervention des forces de l'ordre, on demande bien souvent aux élus de temporiser et d'attendre huit ou dix jours. Nos concitoyens, qui sont voisins des lieux occupés illicitement, ne comprennent pas pourquoi les arrêtés pris par les maires ne sont pas appliqués. Tout cela crée des difficultés considérables.

J'espère, monsieur le ministre, qu'à l'avenir nous pourrons nous référer à votre réponse.