droits de mutation sur les acquisitions de bois et forêts

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, auteur de la question n° 792, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Philippe Richert. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur un vide juridique dans l'application de la circulaire du 12 avril 2005.

En effet, l'article 7 de la loi de finances rectificative du 13 juillet 2000 exonérait de droits de mutation les acquisitions en nature de bois et forêts et de terrains nus non frappés d'interdiction de boisement. Ce dispositif avait été prolongé pour les actes authentiques signés avant le 31 décembre 2004.

La loi du 23 février 2005 a prévu la possibilité pour les conseils généraux d'exonérer ces acquisitions à compter du 1er janvier 2005, ce qu'a fait le département du Bas-Rhin lors de la commission permanente du 25 avril dernier. Le but, à l'évidence, était d'assurer, après les tempêtes de 1999, la continuité des exonérations des droits de mutation.

Or, si la circulaire du 12 avril 2005 du bulletin officiel des impôts a formellement adopté le principe de l'exonération, ce qui paraît tout de même normal puisque ce principe a été fixé par la loi, elle a rappelé qu'il ne commencerait à produire ses effets qu'à compter du 1er juin 2005. La circulaire a donc introduit une rupture de six mois, entre le 1er janvier 2005 et le 1er juin 2005, dans l'application du principe de l'exonération.

Le conseil général du Bas-Rhin, je l'ai dit, a, comme la loi l'y autorisait, décidé de mettre en oeuvre l'exonération à partir du 1er janvier 2005, alors que, selon la circulaire, l'exonération n'est possible qu'à partir du 1er juin. Pour ceux qui ont acheté des terrains entre le 1er janvier et le 1er juin, est-ce donc la loi ou la circulaire qui s'applique ?

J'ai déjà interrogé M. le ministre afin de connaître la position du Gouvernement sur ce point, mais j'avoue avoir quelque mal à comprendre la réponse qu'il m'a apportée dans le courant du mois d'août. Il me semble en effet que l'intention du législateur en adoptant la loi du 23 février 2005 était d'assurer la continuité de l'exonération depuis 2000 et non pas, bien sûr, d'introduire une rupture d'un semestre, raison pour laquelle je souhaiterais que le Gouvernement me précise aujourd'hui sa position.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, comme vous le précisez, les dispositions de l'article 1137 du code général des impôts prévoyaient, sous certaines conditions, une exonération des droits de mutation pour les acquisitions de parcelles forestières ou de terrains nus destinés au reboisement. Ce régime a pris fin, comme vous le rappeliez, le 31 décembre 2004.

Depuis lors, l'article 118 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a donné la faculté aux collectivités locales d'exonérer de droits de mutation les acquisitions de bois et forêts et de terrains nus destinés au reboisement, ce régime devant s'appliquer jusqu'en 2010.

Conformément à l'article 118 que je viens d'évoquer, les décisions d'exonération prises par les collectivités locales ne peuvent s'appliquer qu'après notification aux services fiscaux des délibérations qui les instaurent. Or le texte est formel : cette notification doit intervenir avant le 31 mars pour prendre effet le 1er juin suivant.

Dans ces conditions, il n'y a pas de dispositif de faveur applicable aux acquisitions de bois et forêts et de terrains nus destinés à être reboisés constatées par acte signé entre le 1er janvier et le 31 mai 2005. Ces acquisitions sont par conséquent imposables dans les conditions de droit commun, soit un tarif de 4,80 %.

Je précise qu'au cas particulier, compte tenu de la date tardive d'adoption de la loi précitée, le délai de notification des délibérations aux services fiscaux a été prorogé pour l'année 2005 jusqu'au 13 mai afin de laisser aux collectivités locales concernées le temps de délibérer.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.

M. Philippe Richert. La réponse de Mme la ministre ne me satisfait évidemment pas.

Le Parlement a voté une loi et, dans cette loi, il a prévu une entrée en application à partir du 1er janvier. Je sais bien que cette entrée en application pouvait être repoussée par circulaire au 1er juin, mais il me semble que la loi devrait primer sur la circulaire !

En outre, alors que les collectivités devaient délibérer avant mars, la circulaire n'a été publiée qu'en avril, ce qui a entraîné quelques difficultés d'application, même si, pour remédier à cette situation, on leur a exceptionnellement donné la possibilité de délibérer jusqu'en mai.

Je pense que la volonté du législateur était de permettre la continuité du régime des exonérations conformément à la loi du 13 juillet 2000 jusqu'au 31 décembre 2004 puis, conformément à la loi du 23 février 2005, à partir du 1er janvier 2005. La rupture d'un semestre introduite par la circulaire est vraiment regrettable pour ceux de nos concitoyens qui ont acquis des parcelles en croyant que la loi leur permettait de bénéficier de l'exonération à partir du 1er janvier et auxquels on a annoncé a posteriori que cette dernière ne s'appliquerait qu'à partir du 1er juin !

Il me semblait utile de signaler au ministère des finances cette incohérence, à laquelle j'aurais souhaité, même si je ne méconnais pas la difficulté, qu'il soit porté remède, car elle suscite des problèmes d'application en même temps que l'incompréhension de nos concitoyens.

problèmes soulevés par les importations de textile chinois

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel, auteur de la question n° 788, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jean-Pierre Bel. J'ai voulu attirer l'attention de M. le ministre sur la situation des bassins industriels textiles, en particulier au regard de l'utilisation de colorants azoïques dans la fabrication des produits textiles.

Depuis le 1er janvier dernier, les quotas qui contingentaient les importations textiles en provenance de Chine ont été levés. La levée de ces quotas avait suscité de grandes inquiétudes, mais ses effets ont été au-delà de ce que nous pouvions prévoir puisque la hausse fulgurante des importations chinoises s'est accompagnée du jour au lendemain d'une baisse des prix des produits de plus de 40 %. Par exemple, la baisse entraînée par l'offre des exportateurs chinois au cours du premier trimestre 2005 par rapport au premier trimestre 2004 a atteint 47 % pour les pull-overs et 26 % pour les tee-shirts. Je cite quelques chiffres frappants supplémentaires : les exportations chinoises vers la France ont augmenté de 534 % pour les pull-overs, 183 % pour les chaussettes, bas et collants, 413 % pour les pantalons !

Cette situation - je peux en témoigner étant l'élu d'un territoire et d'une ville qui, hélas ! vont être le cadre d'un nouveau plan social dans l'industrie textile - suscite beaucoup d'angoisse au sein de nos entreprises et parmi nos salariés, et elle n'est pas sans conséquence en termes d'emploi.

Pour y faire face, le Gouvernement a demandé à la Commission européenne d'utiliser la procédure d'urgence pour l'application de la clause de sauvegarde dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. Cependant, cette procédure ne peut être que limitée dans le temps ; elle ne constitue pas, à plus long terme, une solution satisfaisante, d'autant que des outils supplémentaires existent.

Ainsi, madame la ministre, comment comptez-vous faire appliquer la directive européenne interdisant la mise sur le marché et l'emploi des colorants azoïques, notamment du colorant bleu, utilisés pour la teinture des articles en tissu ou en cuir et présents également dans la composition de jouets pour enfants ?

Parce qu'ils provoquent de graves et longues maladies, qu'ils présentent une forte toxicité aquatique, qu'ils sont difficilement dégradables et que leur dispersion s'effectue par l'intermédiaire des eaux usées, il a été demandé à nos entreprises de ne plus utiliser ces colorants. En revanche, les produits provenant de pays hors Union européenne en regorgent, comme en témoigne une étude de l'Institut français du textile et de l'habillement, qui estime à 30 % le taux de produits non conformes.

Madame la ministre, en stoppant l'utilisation de ces colorants et en les remplaçant par d'autres produits moins nocifs, les entreprises textiles ont fait passer le coût au mètre en teinturerie de 12 centimes d'euros à 2 euros, la recherche et la mise au point de nouveaux colorants ayant engendré des investissements supplémentaires. Vous admettrez aisément que, dans ces circonstances, l'on puisse parler de distorsion dans la concurrence, notamment sur le prix final du produit.

Face au courage de nos entreprises et à leur volonté de respecter une directive qui s'inscrit dans la démarche de normes environnementales et de santé, quelles mesures comptez-vous prendre pour contrôler plus efficacement l'entrée de produits textiles et de produits destinés aux enfants qui, je le répète, nous font courir de graves dangers en termes de santé et d'environnement et pour rétablir dans le même temps les conditions d'une concurrence loyale dans le secteur textile ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, la directive citée dans la question, à savoir la directive 2002/61/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002, a été transposée en droit français par le décret n° 2003-866 du 9 septembre 2003 complété par un avis publié au Journal officiel du 13 octobre 2004, relatif aux méthodes d'essai.

Ce texte interdit notamment l'utilisation de certains colorants azoïques dans la fabrication des articles en tissu et en cuir susceptibles d'entrer en contact direct et prolongé avec la peau humaine ou la cavité buccale, ainsi que l'importation et la mise en vente des articles contenant ces substances.

Le respect de ce texte fait l'objet de vérifications régulières par les services de la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, une enquête étant programmée pour le troisième trimestre 2005.

L'enquête précédente, réalisée en 2004 aux stades de la fabrication, de l'importation et de la distribution auprès de 166 établissements commercialisant des articles textiles et en cuir, a donné lieu à 103 prélèvements.

Ces contrôles, menés en coopération avec les services de la direction générale des douanes et droits indirects, portent sur les moyens mis en oeuvre par les professionnels pour s'assurer de la conformité de leurs produits, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les rapports d'analyse effectués selon les méthodes d'essai visées dans l'avis précité ou les attestations des fournisseurs certifiant que les articles livrés ne sont pas teints à l'aide de colorants azoïques interdits.

Des suites contentieuses sont données aux constats d'infractions, d'ailleurs peu nombreux.

Lors de ces enquêtes sont ciblés les produits particulièrement à risque, en raison de leur destination à être en contact prolongé avec la peau, de leur couleur ou de leur origine. A cet égard sont exploitées toutes les informations utiles, dont celles qui sont signalées par les organisations professionnelles du type de celles que vous avez mentionnées.

J'ajouterai, à titre de complément d'information, que, si les chiffres que vous avez mentionnés concernant les importations de textile chinois sont exacts, il n'en demeure pas moins que, selon les chiffres des douanes, à la fin du premier semestre 2005, le total de nos importations de textile n'a quasiment pas augmenté par rapport au total de nos importations textiles effectuées sur la même période en 2004. En fait, nous avons constaté une sensible modification entre les lignes, c'est-à-dire que nous avons importé plus en provenance de la Chine et moins en provenance des pays du Maghreb.

Cela n'enlève rien à l'aspect tout à fait tragique de la situation que connaissent les entreprises françaises de produits textiles.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bel.

M. Jean-Pierre Bel. Madame la ministre, je vous remercie des informations précises que vous venez de nous donner.

Je me dois néanmoins de vous dire qu'il y a un décalage entre vos propos, entre ce que les statistiques révèlent et ce que nous rapportent les chefs d'entreprises, qu'elles soient implantées dans les Vosges, dont certains ici pourraient parler, ou dans ma région, celle de Midi-Pyrénées. Je pense, en particulier, à l'Ariège, où des chefs d'entreprises nous disent ne plus pouvoir boucler leur budget, tant la situation a totalement changé depuis un an, c'est-à-dire depuis la levée des quotas sur les importations chinoises. Cette réalité, personne ne peut l'ignorer. Il serait quand même bon de rassurer ces chefs d'entreprise sur un certain nombre de plans.

J'aurais pu élargir ma question aux marchés publics, tant la France est particulièrement zélée  dans l'application des règles auxquelles nos entreprises sont soumises, d'autres pays admettant un plus grand laxisme. La question a été posée en son temps, à propos des normes environnementales notamment : nos entreprises, qui ont fait d'énormes efforts, ne comprendraient pas que les mêmes obligations ne soient pas imposées partout.

Aussi j'aimerais, madame la ministre, que soit menée à ce propos une recherche plus approfondie. En effet, on sait bien que des produits importés en provenance des pays asiatiques notamment ne remplissent pas ces normes.

Quant aux colorants azoïques, tous les professionnels s'accordent pour dire qu'ils constituent un vrai problème.

Comme cela a été souligné à plusieurs reprises, il faut vraiment se pencher sur l'avenir du textile dans notre pays. Le sujet est plus que d'actualité dans des régions comme la mienne, où des centaines de salariés sont mis au chômage d'une année sur l'autre, situation qui sera difficilement supportable dans les temps à venir.

Conditions d'ouverture du droit au RMI

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 768, adressée à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Alain Fouché. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question concerne les conditions de l'ouverture du droit au RMI ainsi que celles de son exercice.

En effet, conformément à l'article 14 de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, des personnes ressortissantes des Etats membres de l'Union européenne et des Etats de l'Espace économique européen et de la Suisse n'ont plus l'obligation de détenir un titre de séjour.

La Caisse nationale d'allocations familiales a autorisé l'ouverture du droit au RMI aux ressortissants de l'Union européenne et des Etats de l'Espace économique européen sans condition de titre de séjour.

Alors que montent en charge les demandes de droit au RMI des ressortissants de l'Union Européenne, aucun moyen n'est donné aux administrations françaises pour vérifier les ressources perçues, pas plus que les capitaux placés par l'usager dans son pays d'origine.

Par conséquent, je souhaiterais connaître, madame la ministre, dans un premier temps, les dispositions que vous entendez mettre en oeuvre afin que soit maintenue l'égalité entre les personnes qui n'ont pas droit au RMI du fait de l'accès possible à un contrôle sur les ressources perçues et les capitaux détenus sur le territoire français, c'est-à-dire les Français, et les ressortissants de l'Union Européenne qui, eux, en bénéficient sans aucun contrôle.

Je souhaiterais également, madame la ministre, dans un deuxième temps, attirer particulièrement votre attention sur les conséquences financières pour les conseils généraux de la multiplication des demandes de formation effectuées par les bénéficiaires du RMI.

Jusqu'au 31 décembre 2003, les bénéficiaires du RMI qui souhaitaient suivre une formation pouvaient prétendre, après validation du projet par l'ANPE, à un financement SIFE - stage d'insertion et de formation à l'emploi - de l'ANPE ou de la direction du travail et de l'emploi.

Depuis le 1er janvier 2005, conformément à la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, la compétence « formation » est attribuée, sauf erreur de ma part, aux conseils régionaux.

L'Etat n'apporte plus de financement par le biais du SIFE. Il le fait d'ailleurs savoir aux usagers qui en font la demande en les renvoyant notamment vers les conseils régionaux, ce qui me paraît normal, mais aussi vers les conseils généraux quand il s'agit du RMI.

Je vous remercie donc à l'avance, madame la ministre, de nous préciser les mesures que vous envisagez de prendre pour remédier à cette situation, étant entendu que le département ne peut se substituer à la compétence de la région, qui assure le droit commun  en matière de formation.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur Fouché, je voudrais d'abord vous prier d'excuser Jean-Louis Borloo, qui, malheureusement, ne pouvait pas vous répondre lui-même ce matin.

Je vais m'attacher à répondre aux deux questions que vous avez abordées, en commençant par l'accès au RMI des étrangers d'origine communautaire.

En droit communautaire, le droit au séjour n'existe que pour autant que la personne dispose d'une assurance maladie couvrant l'ensemble des risques et de ressources suffisantes pour ne pas être à la charge de l'aide sociale.

Par conséquent, un ressortissant communautaire qui s'installe sur le territoire français alors qu'il n'est pas autonome financièrement ne dispose pas de droit au séjour et n'a donc pas droit à l'allocation RMI.

Lorsque le demandeur a disposé, lors de son installation en France, de ressources qui lui permettaient d'assurer son autonomie matérielle, il a, à ce moment-là, acquis son autorisation de séjour.

S'il demande, après, l'ouverture d'un droit au RMI, c'est forcément qu'il a connu ce que l'on pourrait appeler un revers de ressources, la perte de son emploi, des problèmes personnels, une rupture de vie, la séparation d'avec la personne qui lui procurait des ressources, et, à ce moment-là, ce droit au RMI peut effectivement lui être ouvert, au moins temporairement. Le contrôle s'exercera, comme pour l'ensemble des bénéficiaires du RMI, sur les ressources dont il disposait en France pendant la période précédente.

Je voudrais rappeler que le droit au RMI est suspendu dès lors que le bénéficiaire devient une charge déraisonnable pour les finances publiques.

Ces éléments sont précisés dans une note datée du 25 mars 2005 du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, qui fut adressée aux présidents de conseils généraux et aux préfets de régions.

J'en viens à votre deuxième question, monsieur le sénateur, relative à la prise en charge de la formation des allocataires du RMI.

Les allocataires du RMI ont accès à plusieurs types de formations qui relèvent de l'Etat. C'est le cas, par exemple, des formations AFPA, pour lesquelles ils relèvent du statut de stagiaires de la formation professionnelle et perçoivent à ce titre une rémunération.

Ils peuvent, s'ils sont inscrits à l'ANPE, bénéficier des dispositifs proposés par l'Agence.

Soixante-douze conseils généraux ont, à ce jour, passé une convention avec l'ANPE pour l'accompagnement des allocataires du RMI non inscrits et peuvent demander à l'Agence d'organiser, pour les bénéficiaires dont ils ont la charge, des formations ou des dispositifs d'accès à l'emploi de même nature.

La loi relative aux libertés locales du 13 août 2004, à laquelle vous faisiez allusion, a effectivement confié aux conseils régionaux la responsabilité de la formation professionnelle des adultes.

Ce transfert de compétences, je le rappelle, a été accompagné du transfert de ressources permettant de les exercer.

Les allocataires du RMI ont accès aux plans de formation mis en oeuvre par les conseils régionaux. L'effort de l'Etat porte en priorité sur l'accès à l'emploi des allocataires des minima sociaux. Le plan de cohésion sociale a accordé des moyens sans précédents à l'insertion par l'activité économique ainsi qu'aux nouveaux contrats aidés, notamment le contrat d'accès à l'emploi et le contrat d'avenir.

Enfin, le Gouvernement a entrepris une réforme de l'intéressement à la reprise d'emploi pour rendre ce dispositif plus simple, plus juste et plus attractif, comme le rappelait le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 1er septembre dernier.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. S'agissant des ressortissants étrangers, je ne suis pas sûr, madame la ministre, que les choses se déroulent exactement comme vous l'avez indiqué. Peut-être faudrait-il faire le point, par exemple en effectuant un sondage dans les différents départements pour savoir exactement ce qui se passe. Je pense, en effet, que certains RMIstes étrangers bénéficient d'une certaine souplesse.

Lutte contre les délocalisations

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n°773, adressée à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Claude Biwer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans l'inconscient collectif des Français, le risque de délocalisation des activités d'un très grand nombre d'entreprises, y compris de celle au sein de laquelle ils exercent leurs propres activités professionnelles, constitue incontestablement une très grande source d'inquiétude, inquiétude qui s'est, au demeurant, exprimée lors du référendum sur le traité constitutionnel européen.

Nous ne disposons pas, malheureusement, de statistiques fiables décrivant de manière précise le nombre d'emplois qui a pu être supprimé ou non créé du fait des délocalisations. Mais, voilà quelques mois, la direction de la prévision du ministère des finances estimait à 800 000 les postes de travail potentiellement menacés, soit 3,4 % de l'emploi total en France.

D'autres estimations paraissent plus optimistes, mais, comme le notait l'IGAS dans un rapport non rendu public qu'elle a remis au Gouvernement, « la délocalisation des activités de services revêtira, à l'avenir, une importance croissante ».

Au demeurant, l'on constate de plus en plus que les suppressions d'emplois envisagées par de grands groupes internationaux en France ne concernent plus seulement des emplois peu ou non qualifiés, mais également, et de plus en plus, des emplois d'ingénieurs ou de techniciens hautement qualifiés.

S'agissant des causes majeures des délocalisations, le Cabinet Altédia a remis au Gouvernement un rapport quelque peu décoiffant. Il estime qu'elles sont dues, pour l'essentiel, au besoin ressenti par l'entreprise de se rapprocher des marchés en croissance en Europe de l'Est et en Asie, mais aussi au coût du travail, la France ne pouvant rivaliser sur ce point avec ces derniers pays.

Sont également en cause le coût de la disponibilité des matières premières et, plus surprenant, l'image négative de la France qui pousserait de nombreux dirigeants étrangers à choisir d'autres pays pour leurs investissements, tant ils sont persuadés que l'environnement des affaires en France est devenu trop mauvais. En revanche, les trente-cinq heures, pourtant dévastatrices, et la fiscalité semblent peu citées, sinon à titre de simple rappel.

S'agissant des remèdes, l'IGAS recommande un ciblage des aides publiques sur les projets les plus innovants. Elle affirme que les soutiens doivent plutôt se concentrer sur le financement d'investissements que compenser l'écart des coûts de production entre la France et l'étranger.

Elle estime que la création d'un crédit de taxe professionnelle dans les zones d'emploi en difficulté devrait concerner, au-delà du secteur de l'industrie, celui des services, où les menaces de délocalisation apparaîtront de plus en plus importantes. Nous rejoignons là des questions qui ont été évoquées tout à l'heure.

Il estime aussi qu'il conviendrait de renforcer les aides destinées au redéploiement des activités à très forte valeur ajoutée en France.

Quant à Altédia, il préconise également des actions en faveur de l'innovation, une politique monétaire et commerciale européenne plus favorable à l'emploi et des mesures d'aménagement du territoire tournées vers les coopérations décentralisées et le maintien des activités en zone rurale.

L'aménagement du territoire et le développement d'activités dans les zones transfrontalières et rurales sont pour moi des préoccupations constantes : je suis heureux qu'un grand cabinet d'audit parisien ait eu la présence d'esprit de le souligner également, mais je serai plus heureux encore lorsque les pouvoirs publics comprendront, eux aussi, que cette logique est primordiale pour le devenir de nos régions.

La proximité géographique de mon département comme de ma propre commune avec la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne m'apporte journellement le témoignage que la compétition est très difficile. Aussi, je crois que l'adoption de mesures particulières, par exemple la mise en place de zones franches, est indispensable si nous voulons rivaliser avec le dynamisme de nos voisins. Nos zones rurales ont, elles aussi, besoin de telles mesures pour pouvoir espérer encore en leur avenir.

Puisse le Gouvernement entendre toutes ces propositions et leur réserver une suite favorable, car elles me semblent frappées au coin du bon sens.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Jean-Louis Borloo.

Comme vous le décriviez à l'instant, les délocalisations ont fait depuis plusieurs années l'objet de nombreux débats et ont suscité l'inquiétude de l'opinion publique. C'est la raison pour laquelle, en 2004, le Gouvernement a souhaité disposer d'éléments supplémentaires. Tel est le sens du rapport qui a été commandé au cabinet Altédia.

Ce document a notamment montré que certaines décisions de délocalisation étaient intervenues dans un contexte de relatif isolement de l'entreprise, parfois insuffisamment informée des risques associés à la délocalisation, et qu'une meilleure insertion dans un réseau local, constitué en s'appuyant par exemple sur des systèmes productifs locaux, aurait pu contribuer à mieux l'« arrimer », en quelque sorte, à son territoire d'origine.

Cette préconisation a d'une certaine façon rejoint la volonté du Gouvernement de poser les bases d'une nouvelle stratégie industrielle et territoriale, fondée sur l'encouragement de toutes les formes de coopération interentreprises, et d'un renforcement sans précédent des dispositifs permettant d'anticiper et d'accompagner les reconversions des personnes et des territoires.

Cette volonté gouvernementale s'est traduite par la relance, dès l'automne 2004, de la politique industrielle et territoriale de notre pays, politique qui s'est depuis concrétisée par l'identification de soixante-sept pôles de compétitivité et par la création de l'Agence pour l'innovation industrielle et de l'Agence nationale pour la recherche, ouvertes très récemment à Reims, tout près de votre département, monsieur le sénateur. La mise en place des pôles s'est réalisée à travers un appel à projets qui a témoigné tant de la vitalité que de la créativité de nos concitoyens, puisque cent cinq projets ont été candidats à la labellisation.

Parmi ces soixante-sept pôles, quinze ont déjà ou auront très prochainement un rayonnement international et disposent d'un potentiel de plusieurs milliers de chercheurs.

Quant à la cinquantaine de pôles à vocation nationale, ils reflètent la diversité de nos activités, notamment de celles qui sont implantées en milieu rural autour de projets développés dans les secteurs de l'agroalimentaire, et doivent permettre de renforcer notre base industrielle dans une économie ouverte.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Je remercie Mme la ministre : des voies existent effectivement, et nous souhaitons les emprunter ensemble.