situation de la viticulture en Loir-et-Cher

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, auteur de la question n° 863, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la viticulture française et en particulier, pour ce qui me concerne, sur celle du Loir-et-Cher.

Alors que le millésime s'annonce des plus exceptionnels cette année - et tel est le paradoxe - les viticulteurs sont particulièrement inquiets de la crise que traverse cette filière pourtant déterminante pour l'avenir de nombreux territoires. Et ce n'est pas mon collègue Simon Sutour, sénateur du Gard, qui me démentira, puisque le 8 décembre dernier, avec d'autres parlementaires du Gard, il a été retenu par des viticulteurs très inquiets qui ont eu recours à des méthodes un peu exceptionnelles, mais qui montrent la gravité de la situation. Je sais, monsieur le ministre, que vous vous êtes rendu le lendemain dans le Gard.

À la tendance à la diminution de la consommation globale de vin s'ajoutent la concurrence exacerbée de nombreux opérateurs mondiaux et les incohérences des politiques menées au niveau européen.

Monsieur le ministre, je sais que vous devez aujourd'hui à Bruxelles parler d'un accord avec les Etats-Unis sur le vin. La délégation du Sénat à l'aménagement et au développement durable du territoire est très inquiète des dispositions qui pourraient y être prises et une lettre a été rédigée à cette attention.

Par ailleurs, vous allez recevoir aujourd'hui avec M. le Premier ministre une délégation de viticulteurs. Je savais en posant ma question que la situation était très grave, mais j'ignorais qu'elle serait à ce point d'actualité.

De nombreuses exploitations viticoles se trouvent dans une véritable situation de « faillite », le mot n'est pas trop fort, et ce quel que soit leur mode de commercialisation, à laquelle s'ajoutent, bien évidemment, les drames personnels de nombreux viticulteurs.

Face à cette situation, je souhaiterais connaître les dispositifs qui peuvent être mis en place.

D'une part, à court terme, comment permettre aux agriculteurs de maintenir leur activité, car c'est bien de cela qu'il s'agit, notamment par des aménagements de charges sociales et fiscales et des aides à la trésorerie ?

D'autre part, et à plus long terme, quelles peuvent être les mesures envisagées, notamment pour maîtriser le volume de production et éviter les comportements spéculatifs à la baisse qui conduisent certains producteurs à commercialiser au-dessous du coût de production ?

Comment accompagner les efforts à l'exportation de nos producteurs et simplifier les démarches administratives qui entravent cette exportation ? Cette question a été soulevée dans mon département.

Comment le Gouvernement entend-il mieux favoriser une meilleure adéquation entre les nouvelles demandes des consommateurs et l'offre des producteurs ?

Enfin, et peut-être surtout, comment faire en sorte que la France ne soit pas la seule nation vertueuse pour la maîtrise de la production quand, dans le même temps, on plante, y compris au sein de l'Union européenne, et ce de manière in- considérée, des milliers d'hectares de vigne ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame Gourault, vous avez raison, le sujet est d'actualité.

Comme vous l'avez rappelé, des événements sont survenus le 8 décembre dans le Gard. Le 9 décembre, je me suis rendu sur place ; M. Sutour était là. Nous avons eu tout au long de l'après-midi de très longues réunions avec la profession viticole, que ce soit les syndicats officiels ou les collectifs de base. Dès que j'aurai répondu à la question de Mme Voynet, je rejoindrai à l'Hôtel Matignon M. le Premier ministre, qui va recevoir une délégation de viticulteurs de plusieurs régions, notamment du Val de Loire, madame Gourault. Nous aurons une discussion générale au cours de laquelle les viticulteurs pourront expliquer au Premier ministre l'étendue de leurs difficultés

Cela étant, nous n'avons pas attendu toutes ces rencontres pour agir. En 2005, nous avons proposé une série de mesures tenant compte de cette crise, d'ordre structurel. Voilà quelques années, les Français buvaient cent litres de vin par an, ils en boivent aujourd'hui cinquante-cinq. Nous en exportons toujours. Mais, alors que nous étions les seuls voilà quelques années, tous ces pays qui étaient représentés lors de la réunion de l'OMC à Hong Kong, et qui étaient parmi les plus virulents, pour ne citer que l'Australie, la Nouvelle Zélande, le Chili, arrivent sur les marchés avec des vins d'une qualité différente, mais qui se vendent très bien, en particulier en Asie.

Depuis maintenant deux ans, nous avons mis en place plusieurs dispositifs pour essayer d'aider nos exploitations viticoles. Nous avons donné 25 millions d'euros d'aides directes et 71 millions d'euros de prêts de consolidation aux caves coopératives et aux exploitations en difficulté.

M. Sutour en est témoin, j'ai annoncé l'autre jour, à Nîmes, 11,5 millions d'euros de crédits supplémentaires pour permettre un certain nombre d'opérations utiles aux agriculteurs.

Nous avons essayé d'aider certains bassins de production par des mesures de structure - M. Beaumont le sait bien - comme l'ouverture de l'arrachage définitif pour les bassins présentant une demande consensuelle. C'était le cas dans certains vignobles du Beaujolais, dans le Rhône et dans le Bordelais. Un emprunt a été décidé par la profession et l'État a proposé au Parlement de le garantir dans le cadre du projet de loi de finances.

Nous avons prévu également des mesures visant à encourager l'utilisation de moûts concentrés pour enrichir les vins AOC et tendant à procéder à des réductions de rendement très importantes pour les vins d'appellation d'origine.

Enfin, le Gouvernement a décidé de prendre une mesure classique d'aide aux personnes en difficulté quelle que soit la profession, c'est-à-dire l'obtention de délais de paiement pour les dettes fiscales et sociales. Par exemple, pour les viticulteurs du Languedoc-Roussillon en grande difficulté, une remise des paiements de la taxe sur le foncier non bâti pour l'année 2005 a été accordée. Cette mesure concernera d'autres régions également, puisque les trésoriers-payeurs généraux ont reçu du ministre du budget l'instruction de l'appliquer dans tous les cas où les viticulteurs sont en difficulté, quelle que soit la région.

Il est vrai que la situation va être difficile. Même si nous avons une récolte un peu plus faible, elle est d'excellente qualité, mais nous avons encore les stocks de la précédente récolte. Je suis moi-même un élu de la Charente, je peux vous dire que nous avons six ou sept ans de stocks de Cognac. C'est normal, car c'est un produit qui vieillit. Dans le cas du vin, c'est une situation à laquelle on n'est pas habitué, sauf quand on spécule sur son prix, comme le font certaines grandes maisons bien connues.

Tout à l'heure, lors de la réunion à l'Hôtel Matignon, nous rappellerons aux viticulteurs que nous avons achevé le paiement des aides du plan de soutien pour la quasi-totalité des dossiers.

Par ailleurs, les producteurs doivent tirer parti de la distillation. Je regrette que la distillation que nous avions demandée dans le Bordelais n'ait pas été mise en oeuvre parce qu'elle pèse beaucoup sur les autres vins d'AOC y compris, M. Sutour le sait bien, en Languedoc-Roussillon.

Nous avons, à la demande de la profession, ouvert une nouvelle distillation appelée « alcool de bouche ». Il faut atteindre l'objectif fixé : plus de deux millions d'hectolitres doivent être distillés pour assainir le marché.

Pour 2006, - M. le Premier ministre le confirmera tout à l'heure - le Gouvernement demandera à l'Union européenne une nouvelle distillation de crise l'an prochain, si nécessaire.

En outre, il faut poursuivre l'adaptation structurelle de la filière afin de renforcer sa compétitivité et de mieux orienter les productions. Nous avons dégagé 7 millions d'euros supplémentaires en 2005 pour soutenir les entreprises exportatrices de vin.

Il faut également que les viticulteurs s'organisent par bassin de production. Je pense à la région Pays de la Loire que je connais bien. Il faut qu'ils constituent des comités et qu'ils présentent des offres coordonnées. Nous allons faire en sorte que ces comités de bassin se mettent en place dans chaque région et ce très rapidement.

La réunion avec le Premier ministre a pour objet non pas de prendre des mesures, mais d'écouter les viticulteurs. En tout cas, sachez que je connais les difficultés de la filière viticole. J'étais la semaine dernière à Tours, pas très loin de chez vous, madame Gourault. J'ai rencontré les représentants des chambres d'agriculture, les viticulteurs d'Indre-et-Loire qui ont les mêmes soucis que ceux de Loir-et-Cher car ce sont les mêmes produits.

Nous devons aider la filière viticole à passer la crise en prenant des mesures conjoncturelles qui l'aideront à se restructurer. Nos vins sont parmi les meilleurs au monde. Il faut aider cette filière à reprendre sa place, ce qui suppose peut-être une plus grande organisation, mais nous devons être à ses côtés.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse très complète et technique.

Je sais que vous connaissez la gravité de la situation du monde viticole.

J'espère qu'avec M. le Premier ministre tout à l'heure vous apporterez des réponses à nos viticulteurs. La situation est difficile, mais la viticulture fait partie de notre patrimoine. Ce sont des hommes, des femmes, des familles qui souffrent beaucoup, qui aiment leur métier et il faut absolument les aider.

Accès aux informations sur les études de toxicologie concernant les OGM

M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, auteur de la question n° 836, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Dominique Voynet. Monsieur le ministre, ma question concerne les conditions d'accès aux informations concernant les études de toxicologie menées par les entreprises fabriquant des semences OGM.

Dans un avis rendu le 8 avril 2005, la commission d'accès aux documents administratifs, afin d'arbitrer le caractère confidentiel des informations détenues par ces entreprises, a estimé que « seules peuvent être regardées comme protégées par l'obligation de confidentialité prévue à l'article 25 de la directive 2001/18/CE, les informations relatives au procédé d'obtention de l'OGM ou à sa commercialisation et dont la divulgation serait susceptible de nuire à la position concurrentielle de l'entreprise qui a sollicité l'autorisation » pour expérimentation de cultures OGM.

La transparence est essentielle.

De deux choses l'une : soit le résultat de ces études est rassurant et nul ne devrait s'alarmer de devoir apporter la bonne nouvelle aux citoyens, soit il ne l'est pas et les pouvoirs publics comme les citoyens doivent en être informés : les premiers pour modifier en conséquence les politiques publiques, les seconds pour choisir en connaissance de cause.

Loin de respecter les décisions de la commission d'accès aux documents administratifs, le Gouvernement a pourtant adressé une note à la Commission européenne au mois de septembre pour réclamer la modification du dispositif communautaire qui autorise la publication des informations relatives aux effets des OGM sur la santé, estimant que « de telles communications, fondées sur des données brutes et études isolées utilisées dans le cadre de l'évaluation des risques sont susceptibles d'entacher la confiance de l'opinion publique dans le processus de gestion du risque, mais également de nuire à la position concurrentielle de l'entreprise ». La France a sollicité une nouvelle discussion du cadre de l'application de l'article 25.

S'agit-il de l'intervention maladroite d'un collaborateur trop zélé et inexpérimenté ou de la position officielle du Gouvernement ? Je ne peux pas le croire, monsieur le ministre.

Je vous demande donc de confirmer que le Gouvernement, qui est le garant du principe constitutionnel de précaution défini dans la charte de l'environnement, a bien l'intention de permettre à la Commission du génie biomoléculaire d'accéder à toutes les études de toxicologie concernant les OGM et de les diffuser auprès du public.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame le sénateur, rentré tôt ce matin de Hong Kong, je n'ai pas eu le temps de revoir la réponse que l'on m'a chargé de vous transmettre et qui me paraît très technocratique. J'espère toutefois qu'elle sera de nature à apaiser vos craintes sur des sujets que vous connaissez au demeurant fort bien.

Conformément à la réglementation nationale relative aux organismes génétiquement modifiés, la Commission du génie biomoléculaire est saisie pour examen de chaque dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché ou d'expérimentation d'OGM, afin d'évaluer les risques pour la santé et l'environnement. Les dossiers complets, y compris les données confidentielles, sont transmis systématiquement à cette commission pour permettre aux experts de conduire leur évaluation.

Les données qui sont contenues dans les dossiers sont communiquées au public dans les conditions prévues par la loi du 13 juillet 1978, relative à la liberté d'accès aux documents administratifs, qui a créé la Commission d'accès aux documents administratifs, et de la directive 2001/18/CE relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, notamment son article 25 traitant de la confidentialité des données. Cet article précise que la propriété intellectuelle est garantie et que les données dont la communication serait de nature à nuire à la position concurrentielle de l'entreprise sont protégées. Cette protection n'est accordée par l'autorité publique qu'avec une justification valable.

Madame Voynet, comme j'ai eu l'occasion de m'en entretenir avec des membres de votre formation politique, cette disposition de la directive 2001/18/CE sera transposée dans le droit français par un projet de loi qui a été préparé par le ministre en charge de la recherche, qui est en cours d'examen au Conseil d'État et qui sera soumis prochainement au Parlement.

Lorsqu'il s'agit d'un dossier de demande d'autorisation d'OGM déposé dans un autre État membre de l'Union européenne que la France, dans le cadre de la procédure communautaire, la Commission d'accès aux documents administratifs a estimé, dans son avis du 8 avril 2005, que les autorités françaises ne peuvent pas communiquer au public les données qui ont été considérées comme confidentielles par cet État membre, et ce en vertu du principe de non-réciprocité qui est classique en droit européen.

Afin de s'assurer que tout acteur de la société civile ou que tout citoyen pourra accéder aux données relatives aux OGM de façon homogène dans tous les États membres, une harmonisation de l'interprétation de l'article 25 de la directive 2001/18/CE a été demandée par le Gouvernement à la Commission européenne le 22 juillet 2005. Cette demande a été examinée lors des comités réglementaires européens du 19 septembre et du 8 novembre 2005. Aucune décision n'a encore été arrêtée, les discussions doivent se poursuivre lors du comité prévu au mois d'avril 2006.

J'ajoute que la première partie du conseil des ministres concerne les problèmes sanitaires. Je verrais donc le commissaire Kyprianou qui est chargé de ces dossiers, et je lui rappellerai notre souhait d'être très rapidement éclairés en la matière.

En tout état de cause, je confirme à la Haute Assemblée le dépôt prochain, sans doute dans le courant du mois de janvier, d'un projet de loi sur les OGM consécutif à l'excellent travail réalisé par les députés à l'occasion d'une mission d'information.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Monsieur le ministre, je vous excuse bien volontiers puisque vous étiez voilà peu de temps encore dans l'avion qui vous ramenait de Hong Kong, mais ma question ne concernait pas les dossiers de demandes d'autorisation d'OGM. La législation communautaire est claire en la matière et les entreprises ont le droit de protéger des données qui pourraient nuire à leur position concurrentielle.

Ma question concernait le résultat des études toxicologiques qui ont été conduites en secret par certaines firmes. Ainsi le journal The Independant, daté du dimanche 22 mai, a révélé des détails sur des recherches qui ont été menées par le groupe Monsanto dans le domaine de l'alimentation transgénique du rat. Il semble que ces recherches aient montré que les rats nourris avec du maïs transgénique avaient des reins plus petits et présentaient des variations dans la composition de leur sang.

Est-ce vrai ou pas ? On ne peut pas le savoir en l'absence de la communication des données à des experts capables de les interpréter.

D'une façon plus générale, et alors que vous nous annoncez la transposition en droit national de l'ensemble des dispositions communautaires concernant les OGM, je souhaite vous interpeller sur les lenteurs et sur les hésitations qui président à cette transposition.

Comme vous le savez, le moratoire européen, de fait depuis 1999, était justifié par l'inadaptation de la législation communautaire dans au moins deux domaines, la traçabilité et l'étiquetage des données sur les OGM. On a beaucoup progressé dans cette voie. Mais le régime de responsabilité manque. Je ne verrais que des avantages à ce que mon pays prenne l'initiative d'interpeller la Commission pour savoir quand elle entendra mettre en place un régime de responsabilité des firmes permettant de protéger les États et les consommateurs de conséquences éventuellement délétères de pratiques qu'elles auraient réussi à imposer aux pouvoirs publics.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre. J'ai pris acte de la sollicitation de Mme Voynet concernant la partie de sa question restée sans réponse précise.

Je l'invite à m'adresser une question écrite à laquelle je m'engage à répondre non pas dans le délai habituel de deux mois, mais dans un délai d'un mois afin qu'elle dispose au Journal officiel d'une réponse très précise à cette partie de sa question.

M. le président. Il s'agit d'un favoritisme évident !

Mme Dominique Voynet. Je m'en réjouis, monsieur le président.

financement des contrats temps libre

M. le président. La parole est à M. René Beaumont, auteur de la question n° 855, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. René Beaumont. Monsieur le ministre, le 2 août dernier, vous avez signé une nouvelle convention avec la Caisse nationale d'allocations familiales concernant notamment l'évolution du Fonds national d'action sociale.

C'est pour moi l'occasion de rappeler que les crédits affectés à ce fonds vont augmenter de 7,5 % par an pendant la période de 2005 à 2008, c'est-à-dire de près de 30 %, soit 2,4 milliards d'euros supplémentaires. Au total, ce fonds aura presque doublé sur la période 2002 à 2008.

C'est la confirmation, heureuse pour nous, parlementaires, de la priorité annoncée par le Gouvernement d'une véritable politique de la famille, comme vous avez l'habitude d'en mener.

Parallèlement, le Gouvernement a décidé qu'il entendait recentrer cette politique vers certains objectifs prioritaires. Il s'agit essentiellement de la jeunesse, de l'enfance et de la prime enfance, en particulier de la satisfaction des besoins de places de crèches, estimés à 15 000 sur l'ensemble du territoire. Ces besoins seront notamment satisfaits par les augmentations des crédits du Fonds national d'action sociale.

La nouvelle convention prévoit également la redéfinition de critères les plus précis possible, dans une matière qui est forcément subjective, d'attribution des aides à la petite enfance, mais aussi à l'enfance.

Les contrats temps libre, les CTL, connaissent un vif succès depuis quelques années, notamment en milieu urbain, bien que leur nombre reste encore insuffisant.

Toutefois, il s'agit de donner la priorité aux zones des périphéries des villes, où il est devenu urgent d'intervenir massivement en faveur de la jeunesse et des familles en difficulté, urgence renforcée par les événements que nous avons connus ces dernières semaines.

Monsieur le ministre, élu de Saône-et-Loire, terre d'équilibre entre le monde rural et le monde urbain, je tiens à attirer votre attention sur l'aménagement du territoire.

On constate que les jeunes ménages, sans doute en raison des difficultés liées à l'urbanité, ont plutôt tendance aujourd'hui à vouloir vivre à la campagne. Ils aspirent non pas à vivre dans la périphérie urbaine, à devenir ce que l'on appelait naguère des rurbains, mais à s'installer à la campagne, malgré des temps de trajets en voiture relativement importants, mais finalement acceptables par rapport à ce que connaissent les habitants des grandes conurbations. Je constate, dans mon département, un retour très marqué vers le monde rural.

Il importe donc d'apporter des aides à ces jeunes ménages, que nous nous efforçons d'attirer chez nous en construisant des établissements scolaires, des équipements sportifs. Mais nous avons besoin de davantage de crédits au titre des contrats temps libre.

À un moment, il a semblé qu'il n'y aurait pas de nouveaux contrats. Depuis, j'ai appris avec satisfaction qu'il y en aurait quelques-uns. Et peut-être parce que certains savaient que j'allais poser une question, j'en ai obtenu un pour mon secteur. Je m'en réjouis, mais cela ne résout en rien le problème.

Toute politique est faite d'équilibre et je suis d'ailleurs persuadé que vous recherchez l'équilibre entre le monde urbain et le monde rural, en prenant bien en compte la nouvelle tendance des jeunes ménages français. Il faut que nous soyons capables de les accueillir dans le milieu rural dans de bonnes conditions et de leur proposer des conditions d'accueil dignes de notre République et égales à celles qu'ils pourraient trouver en ville.

Monsieur le ministre, quels seront les critères d'attribution des nouveaux contrats temps libre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, le Gouvernement a conclu, après de longs mois de discussion, une nouvelle convention d'objectifs et de gestion avec la Caisse nationale d'allocations familiales.

Comme vous l'avez rappelé, cette nouvelle convention d'objectifs et de gestion prévoit un effort très important sur les quatre années à venir pour renforcer l'action sociale des caisses d'allocations familiales. L'augmentation annuelle garantie par l'Etat des crédits, qui est sans précédent, sera de 7,5 % par an, soit une hausse cumulée de 2,4 milliards d'euros sur quatre ans.

Nous avons noué cet accord en donnant la priorité à la création de places de crèche. Il s'agit pour nous de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale dans un pays qui compte 80 % de femmes actives et qui est pourtant le pays dont la natalité est la plus forte d'Europe continentale. C'est la preuve que le travail des femmes n'est pas l'ennemi de la natalité, bien au contraire !

C'est pour renforcer cette politique que nous souhaitons, sur la période de 2002 à 2008, augmenter de près du tiers le nombre de places de crèches. Si nous avons des infrastructures enviables en ce qui concerne les maternelles, si notre réseau d'assistantes maternelles est lui aussi très important, nous manquons de places de crèches.

Cela signifie-t-il pour autant qu'il faille renoncer à la politique des contrats de temps libre pour les enfants qui sont trop âgés pour être accueillis dans les crèches ? Bien sûr que non !

Pour autant, nous ne pouvons pas poursuivre toutes les priorités en même temps. Dès lors, et vous l'avez vous-même souligné, il a fallu trouver des compromis.

Tout d'abord, tous les contrats qui étaient sur le point d'être conclus en 2005 pour l'accueil des enfants âgés de six ans à seize ans l'ont été ou ils pourront l'être avant la fin de cette année.

Ensuite, pour les années suivantes, tous les contrats temps libre qui avaient été conclus et qui arrivent à échéance pourront être renouvelés.

Enfin, de nouveaux contrats temps libre pourront être signés, mais en appliquant, vous l'avez rappelé, un principe de sélectivité. Nous serons donc amenés à en conclure moins que dans les années précédentes puisque nous voulons consacrer l'essentiel de notre effort aux créations de places de crèches.

Vous considérez que cette sélectivité doit être conçue en tenant compte aussi bien des besoins des familles des villes que de ceux des familles des campagnes. Nous ne devons en effet pas opposer les familles en fonction de leur choix de lieu de vie. Un nombre croissant de jeunes ménages aspirent à s'installer hors des grands ou moyens centres urbains afin de disposer d'une meilleure qualité de vie.

C'est la raison pour laquelle les critères de sélectivité en cours d'élaboration tiendront compte, bien sûr, de la nécessité de respecter l'équilibre entre ville et campagne.

J'ai moi-même eu l'occasion de me déplacer à plusieurs reprises pour inaugurer des crèches construites par de petites communes dans le cadre d'une politique harmonieuse d'aménagement du territoire. Ces communes attirent effectivement une population nouvelle, notamment des jeunes ménages travaillant « à la ville », comme on dit, qui acceptent ainsi l'inconvénient d'un temps de trajet un peu plus long que s'ils habitaient dans la ville elle-même.

Tout en poursuivant cette action prioritaire, nous devrions réussir à trouver un équilibre aussi satisfaisant que possible sur les quatre années de la convention d'objectif et de gestion, sans pour autant renoncer complètement aux contrats temps libre. Au contraire, nous entendons continuer à les renouveler et les augmenter en appliquant le principe de sélectivité.

M. le président. La parole est à M. René Beaumont.

M. René Beaumont. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et exprime le souhait de vous voir poursuivre cette politique de la famille.

Valorisation de la dénomination commune internationale

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann, auteur de la question n° 864, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, devant la multiplication des noms commerciaux, l'Organisation mondiale de la santé a créé, dans les années cinquante, la dénomination commune internationale, ou DCI, afin d'établir un langage médical compris dans tous les pays du monde et éviter ainsi, autant que possible, les confusions et accidents.

Force est en effet de constater qu'il existe, pour une même molécule, une multitude de noms commerciaux, de « dénominations de fantaisie ». À titre d'exemple, l'antalgique dont la DCI est « tramadol », existe sous une dizaine de noms différents en France, et sous une centaine dans le reste du monde.

Comme l'ont compris un grand nombre de nos partenaires européens, la généralisation de la DCI comporte de très nombreux avantages tant pour les patients que pour les prescripteurs et les pharmaciens.

Pour les patients, elle permet d'éviter les surdosages en prenant plusieurs fois le même médicament sous des noms commerciaux différents. En outre, pour ceux qui voyagent à l'étranger, c'est le moyen le plus sûr d'éviter des interruptions de traitement, voire des risques d'erreurs.

Pour les médecins et les pharmaciens, la DCI aide à prévenir les effets indésirables des médicaments et des interactions médicamenteuses.

La généralisation de la DCI permet par ailleurs une meilleure substitution des médicaments de marques par des génériques et, par là même, constitue un facteur de redressement de la situation financière de l'assurance maladie.

Cependant, malgré ces nombreux mérites, l'utilisation de la DCI n'est pas valorisée dans notre droit. Dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, l'Assemblée nationale et le Sénat avaient adopté en termes identiques un article prévoyant que, pour bénéficier de l'agrément par la Haute autorité de santé, « les logiciels permettent directement la prescription en DCI ». Le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition non conforme, dès lors que son objet était étranger au domaine des lois de financement de la sécurité sociale. On peut en conséquence espérer que le vide juridique actuel sera prochainement comblé par une loi ordinaire, et j'agirai en ce sens.

S'agissant de la valorisation de la DCI auprès du grand public, beaucoup reste à faire. L'article R. 5121-138 du code de la santé publique qui régit l'étiquetage des emballages de médicaments ne la met pas suffisamment en avant. Cette indication est noyée parmi une dizaine d'autres informations, et le consommateur est donc dans l'impossibilité de l'identifier et d'en faire un point de repère.

La directive n° 2004/27/CE du 31 mars 2004 rend indispensable une adaptation des règles applicables à l'étiquetage des médicaments, notamment s'agissant de la DCI. Une campagne de sensibilisation et de promotion, lancée en octobre dernier par le collectif « Europe et médicament » et de nombreuses associations de consommateurs, propose de saisir cette occasion pour modifier le code de la santé publique.

Il semble en effet opportun de faire figurer parmi les mentions obligatoires sur l'emballage la dénomination commune internationale au même titre que la dénomination de fantaisie. L'apposition sur l'emballage d'un code graphique aussi visible que le nom ainsi que de la mention « DCI » suivie du nom de la molécule composant le médicament, constitueraient de précieux atouts en vue d'une identification immédiate.

Monsieur le ministre, alors que la France est en retard dans l'utilisation de la DCI et que l'Europe nous invite à réagir, quelles mesures comptez-vous prendre afin d'offrir à tous les Français, notamment à ceux qui sont appelés à résider à l'étranger, cette indispensable sécurisation dans l'usage des médicaments ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage totalement votre souhait de voir se développer la prescription en dénomination commune internationale ainsi que son inscription sur les boîtes de médicaments, pour toutes les raisons que vous avez fort justement exposées.

Cette politique, si elle n'est pas menée avec précision, peut évidemment être source de confusion. Elle passe notamment par une bonne formation des médecins eux-mêmes à l'utilisation de la DCI. Cette démarche est engagée depuis plusieurs années. Ainsi, la possibilité de prescrire des médicaments en utilisant cette dénomination commune du principe actif existe dans notre droit depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Vous proposez, madame la sénatrice, de modifier un article du code de la santé publique qui énumère les mentions obligatoires sur l'étiquetage des médicaments en y ajoutant la mention de la dénomination commune internationale. Cet étiquetage, comme vous le savez, impose déjà que la mention de cette dénomination suive le nom des médicaments lorsque ces derniers ne contiennent qu'une seule substance active.

Lorsque les médicaments contiennent plusieurs principes actifs, cette mention figure également en précisant la liste exhaustive des principes actifs par unité de prise ou, en fonction de la forme d'administration, pour un volume ou un poids déterminé.

Les autres mentions n'en sont pas moins importantes pour la sécurité des patients et le bon usage des médicaments ; tel est le cas, par exemple, de la mention relative aux voies d'administration, aux dates de péremption ou encore aux numéros de lot.

Le Gouvernement transposera, dans le courant de l'année 2006, l'article 54, point a) du code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Désormais, la mention obligatoire de la DCI à la suite de la dénomination du médicament sera étendue à tous les médicaments comportant jusqu'à trois substances actives. Il convient de souligner que cette mesure avait été soutenue par les autorités françaises lors de la négociation de la directive européenne dont il sera fait application en modifiant l'article réglementaire dont vous avez parlé voilà un instant.

Enfin, les procédures de certifications de logiciels d'aide à la prescription, sur lesquels la Haute autorité de santé travaille actuellement, veilleront à s'assurer d'une prescription en DCI de façon prioritaire.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann.

Mme Christiane Kammermann. Je tiens à remercier M. le ministre des précisions apportées, tout en espérant que les médecins recevront rapidement une formation adaptée.