Article 47
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
Article 49

Article 48

Le dernier alinéa de l'article L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Lorsque la décision fixant le pays de renvoi vise à exécuter une mesure de reconduite à la frontière, le recours contentieux contre cette décision n'est suspensif d'exécution, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article L. 512-3, que s'il est présenté au président du tribunal administratif en même temps que le recours contre la mesure de reconduite à la frontière qu'elle vise à exécuter. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 215 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 417 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 215.

M. Bernard Frimat. Cohérence !

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 417.

Mme Éliane Assassi. Cohérence !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Même avis !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 215 et 417.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 48.

(L'article 48 est adopté.)

Article 48
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Article 50

Article 49

Dans l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots : « L'étranger », sont insérés les mots : « qui est obligé de quitter le territoire français ou ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 216 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 418 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 216.

M. Bernard Frimat. C'est un amendement de coordination.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 418.

Mme Éliane Assassi. Amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Même avis !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 216 et 418.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 49.

(L'article 49 est adopté.)

Article 49
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Article 51

Article 50

Dans le 2° de l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots : « qui a fait l'objet », sont insérés les mots : « d'une obligation de quitter le territoire français ou ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 217 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 419 est présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 217.

M. Bernard Frimat. Il s'agit, là encore, d'un amendement de coordination.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 419.

Mme Éliane Assassi. Amendement de coordination !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Défavorable !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 217 et 419.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 50.

(L'article 50 est adopté.)

Article 50
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Article 52

Article 51

L'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° Dans le 2°, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois », et après les mots : « n'ait pas cessé », sont insérés les mots : « depuis le mariage » ;

2° Le 3° est abrogé ;

3° Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Le ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse qui séjourne régulièrement en France depuis dix ans. »

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, sur l'article.

M. Bernard Frimat. Sur cet article, nous avons déposé deux amendements, qui seront présentés par Catherine Tasca, dont l'un tend à revenir sur un débat que nous avons déjà eu - et que nous aurons encore, sauf à lui trouver une issue favorable - sur le problème des jeunes enfants scolarisés de parents sans-papiers.

Comme vous avez pu le constater, madame la présidente, nous n'hésitons pas à faire avancer le débat lorsque nous le pouvons, notamment quand nous présentons des amendements de coordination, préférant le centrer sur les points « durs » et ne pas l'allonger à plaisir.

En l'occurrence, je m'efforcerai de ne pas dépasser mon temps de parole, tout en me réservant la possibilité d'intervenir à nouveau ultérieurement.

Nous souhaitons que les positions soient très claires et je vous ferai parvenir en temps opportun, madame la présidente, une demande de scrutin public.

À l'occasion de la discussion générale, j'ai attiré l'attention du ministre sur notre préoccupation profonde et l'émotion que suscite ce dossier, transcendant très largement les clivages politiques.

Tant qu'il en restait aux questions de flux ou de filières, le discours passait ;  mais, dès lors qu'il s'est incarné en un enfant, que ses camarades de classe, les parents d'élèves, les professeurs ont vu subitement menacé d'expulsion, la réaction est devenue plus « charnelle », si vous me permettez l'expression, s'accompagnant d'un sentiment général de déchirement, et il n'était plus question alors d'appartenance à telle ou telle formation politique ou à telle ou telle fédération de parents d'élèves.

M. le ministre d'État nous a apporté une première réponse, à la tribune de cette assemblée, en annonçant une circulaire. Je vis toujours dans l'espoir qu'il reviendra nous dire qu'il fera mieux, car cette circulaire paraissait un peu restrictive au premier abord.

Aujourd'hui, nous en sommes non plus aux intentions, mais aux actes, puisque la circulaire a été publiée, le 13 juin dernier, et qu'elle contient déjà en elle-même sa propre disparition sachant que sa validité expirera le 13 août prochain.

Si je devais caricaturer ma pensée, je dirais que je préfère être irresponsable plutôt qu'inhumain, monsieur le ministre délégué. Quoi qu'il en soit, notre amendement n'est en rien irresponsable.

Je veux dire à quel point j'ai été frappé, comme ont dû l'être Jean-Noël Buffet, ainsi que Georges Othily, lors de notre visite au centre d'accueil de demandeurs d'asile de Miramas, où une mère de famille nous a dit avec bonheur que ses deux enfants scolarisés, arrivés depuis six mois, parlaient désormais parfaitement le français, se situaient en tête de leur classe et, surtout, avaient retrouvé la paix. Les éducateurs nous ont montré les dessins réalisés par ces enfants au moment de leur arrivée dans le centre, et toute l'horreur qu'ils exprimaient : combien elle tranchait avec le bonheur de la paix retrouvée ! Nous avons eu le sentiment d'un profond décalage.

Personnellement, je ne pourrai jamais comprendre pourquoi ces enfants constitueraient une menace pour la France.

Les deux médecins en poste dans la zone d'attente pour personnes en instance de Roissy sont tous deux d'origine étrangère, arrivés en France à l'âge de sept ou huit ans. Comme tous ces enfants, ils sont une chance pour la France.

Or la circulaire ne s'ouvre nullement sur un message d'accueil. Elle rappelle que la logique, c'est l'éloignement, et que le premier travail du préfet est de persuader les arrivants de repartir chez eux. Et on double la mise ! Quant aux possibilités de maintien sur le territoire, elles sont assorties de toute une série de conditions.

Monsieur le ministre délégué, pour éclairer la Haute Assemblée, pourriez-vous nous préciser si les critères sur lesquels se fonderont les préfets pour exercer leur pouvoir d'appréciation sont cumulatifs ou alternatifs, autrement dit si l'un d'entre eux suffit pour bénéficier d'un avantage qui, de toute manière, restera discrétionnaire et exceptionnel ?

Certes, on peut se réjouir de l'accélération du traitement des dossiers. Mais, si vous exigez, par exemple, la présence sur le territoire français depuis deux ans, ce critère venant s'ajouter aux autres, il jouera comme un couperet et aura des conséquences immédiates.

Après avoir entendu l'avis du ministre, nous aurons l'occasion de lui répondre en expliquant notre vote. Mais, comment vous dire, monsieur le ministre délégué ? Tous ici, nous avons notre histoire, nos références... Je ne puis en dire davantage.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 420, présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Dans le 2° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « un ».

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. L'émotion de notre collègue Bernard Frimat nous touche, ainsi que les mots empreints de délicatesse qu'il a eus à l'endroit des enfants dont il a décrit la sérénité retrouvée.

Nous sommes tous très émus, et nous n'en avons que plus de force pour dénoncer l'article 51 qui prévoit, en coordination avec l'article 39, de remettre en cause les dispositions en vigueur tendant à protéger les étrangers contre une mesure d'expulsion.

Par cohérence avec nos amendements précédents, nous souhaitons en effet renforcer les dispositions du texte concernant la protection des conjoints étrangers de ressortissants français contre les mesures d'expulsion.

Le 1° de cet article porte de deux à trois ans la durée de mariage et de communauté de vie nécessaire pour qu'un étranger marié avec un ressortissant français soit protégé contre les mesures d'expulsion.

Faut-il le répéter, nous sommes opposés à cet allongement qui s'inscrit toujours dans la même logique, selon laquelle les étrangers se marient avec des Français par complaisance !

Cette disposition nous semble tout à fait disproportionnée eu égard au nombre de mariages blancs effectivement constatés. Permettez-moi d'illustrer à nouveau, par quelques chiffres, l'ampleur de l'amalgame que vous effectuez entre mariages mixtes et mariages blancs, nous le répéterons autant de fois qu'il le faudra.

Chaque année, environ 270 000 mariages sont célébrés en France, dont 45 000 mariages mixtes et 45 000 mariages célébrés à l'étranger. La quasi-totalité des mariages célébrés entre un ressortissant français et un ressortissant étranger sont transcrits sur les registres de l'état civil français.

L'ampleur de la fraude serait corroborée, selon vous, non seulement par l'augmentation du nombre de mariages mixtes célébrés à l'étranger, mais aussi par l'augmentation du nombre de signalements transmis au parquet par les services consulaires.

Or, sur environ 45 000 mariages célébrés à l'étranger en 2005, seulement 1 533 signalements de possibles mariages blancs ont été transmis. Je tiens à rappeler que ces signalements ne valent en aucun cas jugement d'annulation de mariage pour ce motif.

L'amalgame est donc total ! J'en veux pour preuve supplémentaire l'extrait suivant du rapport écrit de notre rapporteur : « S'il importe de ne pas jeter un doute systématique sur ces unions mixtes, celles-ci étant même une preuve forte d'intégration, la hausse très rapide du nombre de mariages mixtes célébrés à l'étranger doit nous alerter sur de possibles mariages de complaisance ou forcés. »

Il est vraiment temps de cesser de considérer que les étrangers se marient avec des ressortissants français uniquement pour obtenir des papiers, pour acquérir la nationalité française, et jouir ainsi d'une protection contre des mesures d'éloignement du territoire. À nos yeux, l'exigence d'une année de mariage suffit à la fois pour évacuer les soupçons de mariage blanc et pour protéger le conjoint contre une mesure d'expulsion.

Notre amendement vise donc à substituer à la durée actuelle de deux ans celle de un an, afin de supprimer celle de trois ans qui est prévue par le texte. Les conjoints étrangers de ressortissants français ont le droit de mener une vie familiale normale, au même titre que tous nos concitoyens.

Mme la présidente. L'amendement n° 218, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le 1° et le 2° de cet article.

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Les articles L. 521-2 et L.521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que certaines catégories d'étrangers bénéficient de protection contre l'expulsion.

Le premier de ces articles concerne les protections relatives et énumère cinq catégories d'étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'expulsion que pour des raisons liées à la sûreté de l'État et à la sécurité publique, ou s'ils ont été définitivement condamnés à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans.

L'article 51 du projet de loi introduit trois modifications.

Nous approuvons totalement la troisième d'entre elles, qui tend à créer une nouvelle catégorie de bénéficiaires d'une protection contre l'éloignement, en application de la directive 2004/38/CE, à savoir les ressortissants de l'Union européenne d'un autre État partie à l'Espace économique européen, la Norvège, l'Islande ou la Suisse.

En revanche, nous proposons, par cet amendement, de supprimer les deux premières modifications.

La première concerne les conjoints de Français qui devront désormais prouver trois ans, au lieu de deux ans, de vie commune en France depuis leur mariage.

Ma collègue Mme Assassi vient de réagir comme nous sur cette disposition. Tout au long de ce débat, nous avons tous insisté sur le critère « vie privée et familiale » et sur l'importance de la vie familiale pour créer les conditions d'un bon équilibre et d'une bonne intégration. Or, monsieur le ministre délégué, nous rendons toujours plus difficile l'accès à une vie familiale de qualité. Ne sommes-nous pas en pleine contradiction ?

En outre, en portant la durée de vie commune de trois à deux ans, vous ne tenez pas compte de l'évolution de la société, même si elle peut paraître regrettable. Aujourd'hui, en effet, bon nombre de couples, tant français qu'étrangers, se séparent malheureusement avant deux ans de vie commune ; nous en connaissons tous autour de nous. Ce n'est pas pour autant que nous condamnons le mariage et que nous considérons les époux concernés comme des « sous-citoyens ». Dès lors, que devient le conjoint étranger en cas de rupture de la vie commune avant que la condition des trois ans soit remplie ? C'est lui faire payer vraiment très cher un accident de la vie devenu courant.

Au surplus, cet allongement de la durée exigée sera inévitablement une source de chantage ou, en tout cas, de dépendance au sein des couples mixtes, ce que nous refusons.

Quant à la seconde modification dont nous proposons la suppression, elle vise les étrangers pouvant apporter la preuve qu'ils résident en France depuis plus de quinze ans : ils ne bénéficieront plus d'une protection contre la reconduite à la frontière.

Franchement, monsieur le ministre délégué, des personnes arrivées en France depuis plus de quinze ans sont, à l'évidence, intégrées et ont créé des liens dans le pays. Vous ne pouvez donc pas tout à la fois discourir sur le malheur des étrangers et supprimer leur protection relative contre l'expulsion.

Nous pouvons tous affirmer ici, sur l'ensemble des travées, notre attachement à l'intégration des étrangers dans notre pays. Et il n'y a pas trop d'étrangers dans notre pays : le problème n'est pas celui de leur nombre, mais bien plutôt celui des mauvaises conditions d'accueil et d'intégration que nous leur réservons.

Tout ce qui est de nature à favoriser l'intégration nous paraît positif pour ouvrir notre communauté nationale à l'apport des étrangers.

Si nous multiplions les obstacles, en particulier pour des personnes qui résident depuis longtemps déjà dans notre pays, nous sommes véritablement dans une contradiction fondamentale avec nous-mêmes.

Je le répète, il n'y a pas trop d'étrangers en France : il y a des étrangers qui y sont entrés irrégulièrement, et il y a des étrangers auxquels nous n'offrons pas les conditions d'une véritable intégration.

Dans les deux cas que vise l'article 51, celui des personnes résidant depuis plus de quinze ans dans notre pays et celui des conjoints de Français, nous ramons véritablement à contre-courant de notre propre objectif d'intégration, monsieur le ministre délégué. C'est un très mauvais signal qu'adresse la France à l'étranger.

Mme la présidente. L'amendement n° 219, présenté par M. Frimat, Mme Alquier, MM. Badinter, Bel et Bockel, Mme Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le 3° de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° Le mineur ou le jeune majeur inscrit dans un établissement scolaire, y compris pendant la période des vacances scolaires. »

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Nous abordons là, monsieur le ministre délégué, un sujet particulièrement actuel et douloureux auquel M. Frimat a consacré son propos.

Nous souhaitons que les mineurs ou les jeunes majeurs inscrits dans un établissement scolaire ne soient plus, y compris pendant la période des vacances scolaires, sous la menace d'une expulsion.

Vous avez constaté comme nous, car nous y sommes tous sensibles, que l'opinion dans notre pays est traversée par des tentations diverses sur cette question des étrangers. Néanmoins, ce qui s'est manifesté clairement ces derniers mois, c'est le net refus de nos concitoyens de voir des enfants saisis à la porte de l'école, à la veille des vacances, pour être expulsés de notre pays, où ils sont scolarisés parfois depuis de nombreuses années.

Il est si vrai que ce mouvement d'opinion est parvenu aux oreilles du Gouvernement que M. le ministre de l'intérieur a annoncé une mesure visant à adoucir le sort réservé à certains élèves enfants de sans-papiers. Toutefois, les conditions imposées pour bénéficier de cet assouplissement en atténuent considérablement la portée : la mesure ne vise en effet que les enfants les plus intégrés, n'ayant plus aucune attache avec leur pays d'origine, ayant fait toute leur scolarité en France et ne parlant que le français !

Je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre délégué, sur le fait que cette dernière condition a quelque chose non seulement de scandaleux, mais d'absurde.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous avons répondu hier sur ce point !

Mme Catherine Tasca. Je le répète, monsieur le ministre délégué : c'est une condition absurde quand nous plaidons tous pour le plurilinguisme. Tout de même, conserver ses attaches avec sa famille d'origine, avec sa langue d'origine, cela ne devrait pas être un péché !

Nous devrions être fiers de constater l'effort que font des familles étrangères pour que leurs enfants accèdent à une instruction, à une éducation dans notre système éducatif. Au lieu de cela, nous les découragerions et, pis, nous les pousserions hors de nos frontières ?

Nous insistons beaucoup sur cet amendement n° 219, dont l'adoption donnerait à notre pays un visage plus ouvert que le texte qui nous est proposé.

Mme la présidente. L'amendement n° 421 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le 3° de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, dont les liens personnels ou familiaux en France sont tels qu'une mesure d'expulsion porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Il s'agit d'un amendement de coordination avec celui que nous avions présenté à l'article 39.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je rappelle que l'article 51 procède lui-même à une coordination et définit les catégories d'étrangers protégés contre les mesures d'expulsion. En effet, les articles 27, 28 et 24 du projet de loi modifiant les règles de séjour, il faut éviter de créer de nouveaux « ni-ni ».

En conséquence, nous sommes défavorables à l'amendement n° 420, puisque la question a déjà été traitée au cours de nos longs débats de cette semaine.

Nous avons également émis un avis défavorable sur l'amendement n° 218.

Pour ce qui est de l'amendement n° 219, je rappelle que la circulaire est une nouveauté puisque, aux termes de la législation ancienne, les expulsions étaient possibles.

J'ai été extrêmement sensible, comme tous ici, aux propos de notre collègue M. Frimat. Il nous arrive à tous, en tant que parlementaires ou en tant qu'élus locaux, de nous adresser au préfet, voire au ministre. Certes, l'administration obéit à des règles, mais elle peut aussi être humaine, et elle l'est souvent. Poser des règles strictes est quelquefois plus dangereux, en fin de compte, que de laisser la possibilité de faire preuve d'humanité.

Nous rencontrerons toujours des situations qui n'entrent dans aucun des cadres prévus, du fait de leur complexité. La circulaire, qui a été longuement évoquée, et que le ministre rappellera peut-être, permet de résoudre les cas particuliers qui peuvent nous être soumis. L'avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement n° 219.

Il l'est également sur l'amendement n° 421 rectifié, qui, ainsi que l'a expliqué Mme Assassi, est un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'ai l'impression, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous confondons deux débats : l'article 51, qui ne concerne que les expulsions pour des raisons d'ordre public, n'a rien à voir avec la question que vous soulevez et que nous avons déjà largement abordée lors de l'examen des articles 24 et 24 bis. Il ne concerne en aucun cas les enfants.

Je voudrais vous répondre de manière dépassionnée.

D'abord, madame Tasca, je dois avouer qu'hier j'ai peut-être été sévère avec M. Sueur ; j'en étais même un peu malheureux, après.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'était même avant-hier !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Déjà ! Voilà bientôt deux semaines que nous sommes ensemble et, pour autant, nous restons tous passionnés par le sujet !

Quand on appartient à un gouvernement ou que l'on représente le peuple ou les élus de la France, comme vous le faites, mesdames, messieurs les sénateurs, on a au fond de soi-même un sens profond des responsabilités et de l'humain. Et voilà qu'un élu de la République, qu'un élu de la nation, se contente pour commenter une circulaire de reprendre la « une » d'un quotidien - peu importe lequel, et je n'en citerai pas le nom - sans se référer à la circulaire elle-même, alors que j'en avais donné une lecture détaillée ici même, puisque le ministre d'État m'avait demandé d'en faire l'annonce !

Cela explique que j'aie répliqué avec une certaine sévérité à M. Sueur, car j'avais le sentiment que son propos relevait quelque peu de la manipulation.

Certes, la manipulation était le fait plutôt du quotidien que de M. Sueur, et, s'il était là, je lui présenterais mes excuses. Mais votre collègue a préféré, manquant de rigueur, faire référence au journal, sans prendre la peine de vérifier le contenu de la circulaire dans le compte rendu des débats du Sénat, supposant que le journal disait vrai ; or il disait faux.

Vous-même, madame Tasca, reprenez la même référence. Je n'ai évidemment pas envie, quarante-huit heures après, de vous répondre de nouveau sur le même ton. Mais, je vous en conjure, ne vous faites pas le porteur d'un message qui est totalement faux ! À aucun moment la circulaire du ministre de l'intérieur ne prévoit que l'enfant étranger scolarisé en France ne devrait avoir aucun lien avec sa langue d'origine ou sa langue maternelle !

Mme Éliane Assassi. De quelle circulaire parlez-vous ? Il y en a eu trois versions !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'ai sous les yeux la circulaire transmise aux préfets...

Mme Josiane Mathon-Poinat. Elle a été modifiée !

Mme Éliane Assassi. Elle a été transmise hier !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... le 14 juin au matin, signée le 13 juin par le ministre de l'intérieur. Je vous redonne lecture du passage concerné, ce qui me permettra par la même occasion de répondre à la question de M. Frimat :

« Dans le cadre de votre pouvoir d'appréciation, vous pourrez utilement prendre en compte les critères suivants :

« résidence habituelle en France depuis au moins deux ans à la date de la publication de la présente circulaire d'au moins l'un des parents ;

« scolarisation effective d'un de leurs enfants au moins, en France, y compris en classe maternelle, au moins depuis septembre 2005 ». Cela signifie que, même si tous les enfants ne sont pas scolarisés, il suffit qu'un seul le soit pour que tous soient pris en compte.

Je poursuis :

« naissance en France d'un enfant ou résidence habituelle en France d'un enfant depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans ;

« absence de lien de cet enfant avec le pays dont il a la nationalité ». Cela ne veut pas dire, madame Tasca, monsieur Frimat, qu'il ne doit avoir aucun lien avec sa langue, cela ne figure nulle part !

Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, que signifie exactement cette phrase : « absence de lien de cet enfant avec le pays dont il a la nationalité » ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Cela signifie que sa famille n'est pas là-bas, que son contexte social et familial ne crée pas un lien qui justifierait qu'il soit éduqué chez lui plutôt que dans notre pays, voilà ce que cela signifie ! En aucun cas il n'est fait référence à la langue, bien évidemment !

Mme Bariza Khiari. Dont acte !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous savez, je suis un fils d'Italien...

Mme Catherine Tasca. Moi aussi !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...et je m'honore de parler italien, ...

Mme Catherine Tasca. Moi aussi !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. J'espère que grâce à cela - ou à cause de cela ! - je ne suis pas expulsable !

Mais j'achève la lecture des critères prévus par la circulaire :

« contribution effective du ou des parents à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis sa naissance ;

« réelle volonté d'intégration de ces familles, caractérisée notamment par, outre la scolarisation des enfants, leur maîtrise du français, le suivi éducatif des enfants, le sérieux de leurs études et l'absence de trouble à l'ordre public. »

J'insiste, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les mots : « dans le cadre de votre pouvoir d'appréciation ». Aussi, lorsque vous me demandez si ces critères sont cumulatifs ou si chacun peut être une condition suffisante, je vous répondrai que ce n'est ni l'un ni l'autre !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous êtes suffisamment avisés et expérimentés pour me comprendre : la scolarisation effective depuis septembre 2005 doit de toute évidence s'accompagner de l'absence de trouble à l'ordre public, les deux vont bien sûr de pair. Il est cependant tout aussi évident que les conditions que je viens d'énumérer ne doivent pas être nécessairement toutes respectées pour que le préfet puisse prendre une décision positive : en ce sens, non, ces conditions ne sont pas cumulatives, et c'est bien pour cela qu'il est question de pouvoir d'appréciation.

Monsieur Frimat, j'essaie de vous parler avec mon coeur. Chacun de nous, dans l'exercice de ses responsabilités, que ce soit en tant que parlementaire, en tant qu'élu local ou comme membre d'un gouvernement, oui, chacun de nous a été confronté à des situations difficiles. Nous avons chacun notre histoire, comme vous l'avez rappelé avec beaucoup d'émotion tout à l'heure. Moi-même, j'ai quelques frissons en vous disant cela, parce que j'ai tant d'images en tête...

Chacun d'entre nous a pu être touché, à un moment ou à un autre de son parcours de responsable public, chacun a pu être confronté à une situation telle qu'il s'est dit que ce n'était pas possible, qu'il ne pouvait pas laisser faire, qu'il lui fallait trouver une solution. Et, sincèrement, ce n'est pas à cause de nos lois depuis 2002 ni de vos lois d'avant 2002 : c'était ainsi, la loi était ainsi !

Pour la première fois, sans doute grâce au débat, aux pressions, aux associations, à l'initiative d'un certain nombre d'élus ou de familles qui, dans des écoles, ont sensibilisé les responsables du gouvernement en place, pour la première fois, un ministre de l'intérieur adresse une circulaire aux préfets à ce sujet.

Il y a une quinzaine de jours, comme il le fait de manière régulière, le ministre de l'intérieur a réuni tous les préfets de France pour dresser un état des lieux de l'ensemble des problèmes et donner ses instructions. Le ministre d'État a annoncé à cette occasion qu'il adresserait aux préfets dans les prochains jours une circulaire, insistant sur la nécessité pour ces autorités, avant même la réception de ladite circulaire, d'étudier au cas par cas, de manière individualisée et dans un esprit de justice, les situations de ces familles de ressortissants étrangers en situation irrégulière dont les enfants sont scolarisés, ce qui pose des problèmes d'une nature particulière.

Le ministre d'État a également recommandé aux préfets de lui faire part de toutes les difficultés éventuelles qu'ils pourraient rencontrer avec les rectorats, les inspections académiques, les instances judiciaires administratives ou pénales. Il concluait en ces termes : « Nous ne laisserons personne sur le bord du chemin, chaque situation doit être étudiée ».

J'ai sous les yeux cette circulaire, longue de trois pages, qui précise les critères d'appréciation sur lesquels les autorités administratives doivent se fonder, mais les instructions du ministre d'État vont au-delà, puisqu'il demande aux préfets d'étudier la situation de chaque enfant, au cas par cas, avec mesure.

Il a été fait référence à deux élèves de la Sarthe.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. En effet, c'est arrivé chez moi !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Dès le lendemain, on ne parlait plus de cette affaire, car cette famille avait fait sa demande en Norvège et tout le monde est convenu que la convention de Dublin s'appliquait.

À partir du moment où l'autorité française avait pu s'assurer qu'il n'y avait aucun problème sur le plan humanitaire, puisque cette famille était censée être accueillie en Norvège et que nous étions tenus de respecter la convention de Dublin, il n'y avait plus de problème.

Mais quand les choses ne se passent pas ainsi, on apprécie la situation et on prend les mesures nécessaires, dont un certain nombre sont en oeuvre depuis plusieurs semaines.

Monsieur Frimat, c'est la première fois depuis des années qu'une telle initiative est prise par un ministre de l'intérieur. Des instructions très claires ont été données aux préfets pour régler tous ces problèmes, pour que chaque situation soit étudiée au cas par cas, afin que nous évitions tous les drames qui pourraient résulter de ces situations de détresse.

Nous nous sommes éloignés de l'article 51, certes, mais ce débat sur l'immigration et l'intégration était une opportunité qu'il fallait saisir, et je ne verrais aucun inconvénient à ce que cela se produise de nouveau, car nous nous sentons tous concernés par ce problème.

Vous l'avez abordé un peu plus au fond, madame Tasca, car vous aviez sans doute besoin de précisions ; j'ai essayé de vous les apporter.

Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez convaincus que personne au sein du Gouvernement, et surtout pas le ministre de l'intérieur, ne souhaite que la situation d'un enfant étranger scolarisé dans notre pays puisse donner lieu à un drame familial, et nous y serons particulièrement vigilants.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, me permettez-vous de vous interrompre ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je vous en prie, madame le sénateur.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Tasca, avec l'autorisation de M. le ministre délégué.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre délégué, vous avez fait un effort de clarification des termes de la circulaire. Mais il demeure une condition qui me paraît périlleuse parce que difficile à apprécier, c'est l'absence de lien avec le pays d'origine.

Nous connaissons le parcours des familles d'étrangers. Fort heureusement, elles laissent souvent derrière elles de la famille : des grands-parents, des fratries, des oncles, des tantes.

Puisque vous dites vouloir faire toute la lumière sur les conditions qui sont posées, j'affirme de nouveau que les termes « absence de liens avec le pays d'origine » me paraissent lourds de possibilités d'interprétation qui joueraient contre l'intérêt des étrangers.

Mme la présidente. Veuillez poursuivre, monsieur le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Madame Tasca, vous qui êtes conseiller d'État honoraire, vous n'ignorez pas que la notion de lien avec le pays d'origine n'est pas étrangère à la jurisprudence du Conseil d'État. L'expression n'a pas été choisie au hasard, et vous savez ce qu'elle signifie. Si nous avons choisi de faire figurer ces termes dans la circulaire, c'est parce que nous étions tenus de le faire en vertu de la jurisprudence du Conseil d'État.

Pour ma part, je m'engage, au nom du ministre d'État, à ce que les préfets appliquent cette circulaire avec le discernement et l'humanité nécessaires, et je vous invite à interpeller le Gouvernement s'il ne respectait pas ses engagements.

Pour en revenir précisément aux amendements nos 420, 218, 219 et 421 rectifié, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre délégué, c'est moi qui vous ai parlé des enfants kurdes.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. C'est vrai !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je connais parfaitement les engagements qui nous lient sur le plan européen, mais que sont-ils face à la situation de ces deux enfants de trois et six ans que l'on est venu chercher à l'école pour les expulser ? Ce sont des pratiques qui hélas ! nous rappellent d'autres temps. Que les choses soient claires, nous ne les admettons pas.

Monsieur le ministre délégué, nombre des enfants qui sont scolarisés et qui n'ont pas de papiers parlent le français comme vous et moi. Nous en parrainons quelques-uns symboliquement et certains d'entre eux passent le baccalauréat en ce moment même.

Par conséquent, ne serait-ce que dans l'intérêt de notre pays, je me demande comment on peut admettre qu'ils soient expulsés au motif qu'ils auraient un lien avec leur famille dans leur pays d'origine, sans même parler du devoir de protection que nous avons envers ces enfants et ces jeunes...

M. Bernard Frimat. Ils sont une chance pour la France !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...qui ont été accueillis dans l'école de la République pour y suivre leur parcours scolaire, et jusqu'au baccalauréat pour certains !

Chacun peut avoir des liens avec sa famille où que ce soit, et peut-être y a-t-il parmi nous des sénateurs qui ont des liens avec une famille qui n'est pas française.

Il faut que les choses soient claires : ce parti pris de rejet, de méfiance en particulier à l'égard de jeunes qui sont scolarisés dans notre beau pays, est inadmissible !

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Pour achever sur ce thème des enfants et aller un peu au-delà, je précise que c'est en effet Mme Borvo qui a signalé le cas qui s'est produit au Mans, ma région natale, et j'ai eu ensuite reçu des appels téléphoniques à ce sujet.

Ce qui a beaucoup choqué, c'est qu'au lieu d'envoyer la mère accompagnée éventuellement d'un policier en civil, si l'on avait peur qu'elle ne disparaisse, on a dépêché deux agents de police en uniforme pour aller chercher à l'école maternelle deux enfants de trois et six ans !

Cela rappelle de très mauvais souvenirs...

Quant à la fragilité des enfants, on n'en a pas tenu compte, pas plus que des traumatismes que cette situation pouvait engendrer. Il y aurait donc beaucoup à dire sur cette affaire.

S'agissant de l'amendement n° 218, présenté par Mme Tasca, la mobilisation des Français pour des cas particuliers d'étrangers menacés d'être éloignés du territoire prouve à quel point notre pays est, fort heureusement, très ambigu dans ses relations avec les étrangers.

Oui, en général, on dit qu'il y a trop d'étrangers en France. Oui, on trouve qu'il y a, ici, un peu trop de Noirs, là, un peu trop d'Arabes. Mais, quand il s'agit de cas particuliers, ce n'est plus du tout la même chose. Dans le village, dans le quartier, autour de l'école, sur le lieu de travail, on apprécie les étrangers, on noue avec eux des liens de solidarité. C'est ce qui fait la richesse de notre pays et c'est pourquoi l'on ne peut pas mener n'importe quelle politique hostile aux étrangers en croyant que l'on va plaire à tous les Français, monsieur le ministre délégué !

De surcroît, tout le monde en France s'inquiète beaucoup, à commencer par les Églises. Ces dernières ont un poids considérable dans l'opinion publique ; même si la majorité des Français ne pratiquent plus, ils sont sensibles à l'opinion des Églises.

Je tiens à vous lire le communiqué que viennent de publier les Églises protestantes d'Alsace et de Lorraine. Elles ont manifesté vendredi leur profonde préoccupation au sujet des menaces d'expulsion d'enfants sans papiers.

« Face au sort qui pourrait être réservé à ces jeunes personnes ou à leurs familles, le Conseil de l'Union des églises protestantes d'Alsace et de Lorraine a rappelé vendredi dans un communiqué son attachement au respect des personnes, surtout lorsqu'elles sont vulnérables. Convaincues de la force d'intégration réalisée par la culture et l'éducation et attachées aux valeurs familiales, les Églises protestantes d'Alsace et de Lorraine ont fait appel à la sagesse et au coeur des pouvoirs publics face à ces situations dramatiques. »

Nous sommes satisfaits qu'une circulaire ait été envoyée aux préfets. Nous souhaitons qu'elle soit appliquée avec le plus d'humanité, le plus de largeur de vue et de coeur possible, mais sachez, monsieur le ministre délégué, que les Français dans leur village, dans leur ville, dans leur quartier, resteront très mobilisés. Et surtout ne croyez pas que votre politique soit aussi populaire que vous le pensez !

Mme la présidente. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.

Mme Bariza Khiari. Mme Borvo Cohen-Seat vient de le dire, effectivement nous parrainons des enfants. Pour ma part, je parraine une jeune fille qui vient d'avoir dix-huit ans et qui est élève dans ma circonscription. C'est une enfant brillante qui a eu un prix d'excellence.

Bien sûr, comme beaucoup d'autres, je suis sensible à son sort, elle vient de Tananarive et elle est visiblement, elle aussi, une pépite pour la France.

Toutes proportions gardées, monsieur le ministre délégué, avec cette affaire d'enfants, vous allez faire de beaucoup de nos concitoyens des « justes » de cette cause !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Gardez le sens des proportions, madame !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.

M. Bernard Frimat. À défaut de pouvoir me réjouir de la conclusion que notre débat ne manquera pas d'avoir, je me réjouis de sa tonalité.

Nous sommes devant un problème difficile. Je reconnais que notre amendement n'a pas été déposé au bon endroit, mais, si nous l'avions déposé plus tôt dans le texte, votre circulaire n'aurait pas encore été publiée. C'est mus par une sorte de prescience que nous avons donc permis au débat sur ce délicat problème de se tenir après le 13 juin ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous pouviez rédiger un article additionnel !

M. Bernard Frimat. Après ces considérations de pure technique parlementaire, j'en viens au fond de mon propos.

Nous n'allons pas multiplier les exemples à l'infini, tout le monde en connaît et je ne veux mettre personne en cause dans ses convictions.

Je m'interroge cependant sur la démarche que vous avez adoptée. Tout d'abord, la loi est modifiée - ce sera le cas dans quelques heures - et elle favorise d'abord l'aide au retour, quelle que soit l'histoire du jeune scolarisé. Pourtant, quand un jeune obtient le baccalauréat en France, c'est une chance pour notre pays et on ne doit pas lui demander de partir, même si, pour rendre ce départ encore plus attractif, la circulaire double le montant des aides au retour.

Par ailleurs, la carte « vie privée et familiale », accordant l'autorisation de travailler, permettra de régler un certain nombre de situations, ce dont nous nous réjouirons à chaque fois.

Reste que les préfets devront rendre des comptes sur le nombre de personnes ayant regagné volontairement leur pays et ayant bénéficié de l'aide au retour, sur le nombre de celles qui auront fait l'objet d'une régulation, le 15 juillet, le 15 août et le 1er septembre prochains. Les préfets doivent traiter les dossiers sous un mois et, en tout état de cause, avant la prochaine rentrée scolaire.

J'ai le sentiment que nous allons devoir faire preuve d'une très grande vigilance à partir du 13 août et que nous allons devoir essayer de protéger particulièrement les familles qui auront tenté, mais sans succès, d'obtenir une carte « vie privée et familiale ». En effet, à partir de cette date, elles seront en très grand danger. Je pense que nous nous comprenons !

Nous ne nous sommes pas convaincus au cours de ce débat qui, cependant, a été utile. Les déclarations du ministre délégué formulées en séance ont la valeur que nous savons tous. Le critère, flou, de l'absence de lien de l'enfant avec le pays dont il a la nationalité a été un peu précisé.

Bien évidemment, nous maintenons l'amendement n° 219 et nous demandons qu'il soit mis aux voix par scrutin public.

Permettez-moi de constater, en guise de conclusion, que, lorsqu'il travaille dans des conditions qui font une large part au dialogue et à l'écoute, et une écoute de qualité, si j'en juge aux moments que nous venons de vivre ensemble, le Parlement est pleinement dans sa fonction. (Mme Cerisier-ben Guiga applaudit.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 420.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 218.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 219.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 212 :

Nombre de votants 296
Nombre de suffrages exprimés 296
Majorité absolue des suffrages exprimés 149
Pour l'adoption 127
Contre 169

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 421 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 51.

(L'article 51 est adopté.)