conditions de retour à l'autonomie d'une commune associée

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, auteur de la question n° 1246, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Le retour à l'autonomie d'une commune associée peut se heurter à des difficultés sérieuses.

Les fusions-associations de communes se réalisent souvent sans consultation des habitants, parfois, d'ailleurs, pour des raisons purement électorales, et si certaines fonctionnent bien, d'autres, malheureusement, aboutissent à des conflits et à une demande de retour à l'autonomie.

Tel est le cas, notamment, de Béthune et de Verquigneul, dans le Pas-de-Calais : 63 % de Verquigneulois souhaitent ce que l'on appelle la « défusion », que la municipalité de Béthune, quant à elle, refuse.

Une fois accomplie la procédure dans le respect des articles L. 2112-2 et suivants du code général des collectivités territoriales - deux pétitions à un an d'intervalle, enquête publique, élection d'une commission syndicale, avis des conseils municipaux et du conseil général -, il appartient au représentant de l'État dans le département de prononcer la défusion des communes, en renvoyant le cas échéant le règlement de certaines conditions de détachement à une convention entre les deux communes qui sera entérinée par arrêté.

En réalité, cette procédure peut être entravée par des obstacles, et des situations conflictuelles se présentent parfois, les protagonistes ne pouvant se mettre d'accord sur les conditions de détachement, notamment financières ; le représentant de l'État hésite alors à agir en l'absence d'accord entre les communes.

Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous m'indiquiez comment sortir de cette crise, alors que les textes et la jurisprudence désignent tout naturellement le préfet pour trancher.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, le code général des collectivités territoriales ne comporte aucune disposition particulière concernant la scission de communes résultant d'une fusion antérieure, souvent désignée, ainsi que vous l'avez indiqué, par le terme « défusion ».

Le rétablissement en communes distinctes de communes fusionnées doit donc s'opérer selon les modalités prévues pour l'érection en commune indépendante d'une portion de commune. L'actualité très récente nous en a donné quelques exemples. Cette analyse a été confirmée en 1983 par la jurisprudence du Conseil d'État.

Dans cette hypothèse, le préfet prescrit l'enquête publique lorsqu'il a été saisi par le tiers des électeurs inscrits de la commune associée. À l'issue de celle-ci, une commission syndicale d'habitants, chargée de donner son avis sur le projet, est désignée par le préfet. Le ou les conseils municipaux intéressés donnent ensuite leur avis. S'il y a défaut d'accord entre la commission syndicale et le ou les conseils municipaux, l'avis du conseil général est également sollicité.

C'est le cas dans votre département du Pas-de-Calais, s'agissant de la demande de défusion présentée, à partir de 2003, par la commune de Verquigneul, fusionnée avec Béthune. La procédure a été engagée selon les règles en vigueur. La commission spéciale élue parmi les électeurs de Verquigneul s'est clairement prononcée pour la défusion, alors que le conseil municipal de Béthune s'est prononcé contre. Par délibération du 20 novembre 2006, le conseil général, consulté en raison de ces avis divergents, a rendu un avis défavorable au projet de défusion.

Au terme de cette procédure, il appartient effectivement au préfet du Pas-de-Calais, ainsi que vous l'avez dit, de prendre sa décision en toute responsabilité, le contrôle que le juge est susceptible d'exercer étant limité à l'erreur manifeste d'appréciation.

C'est l'intérêt général, au regard des inconvénients et avantages qui résulteraient de la défusion, qui doit guider cette décision.

Trois éléments me paraissent devoir être pris en compte pour éclairer cette réflexion.

Tout d'abord, la charge que représenterait la défusion pour la commune de Verquigneul doit être déterminée avec précision, en raison du poids des emprunts contractés par la commune de Béthune pour la réalisation d'équipements sur le territoire de Verquigneul. C'est là un élément qui doit être porté à la connaissance de tous.

Ensuite, l'une des considérations qui avaient présidé à la fusion en 1990 concernait l'impossibilité pour la commune de Béthune de disposer d'espaces fonciers suffisants pour pérenniser son développement industriel, commercial et universitaire et en assurer l'avenir.

Enfin, la réflexion sur l'éventuelle défusion de Verquigneul et de Béthune ne saurait être séparée de la réflexion sur l'avenir de l'intercommunalité dans ce secteur, qui comporte la particularité de voir coexister une communauté d'agglomération comptant cinquante-huit communes et environ 210 000 habitants et une communauté de communes regroupant six communes et quelque 18 000 habitants.

Vous savez le prix que j'attache, monsieur le sénateur, à la consolidation de l'intercommunalité et à la cohérence des périmètres.

Si, à l'issue de la réflexion, le préfet accepte finalement la demande de scission de Verquigneul et de Béthune, il serait néanmoins nécessaire de rechercher un accord sur la répartition de l'actif et du passif entre les deux collectivités. En effet, l'arrêté préfectoral qui prononce une défusion doit en déterminer précisément les conditions, notamment en termes financiers et patrimoniaux. Le préfet ne doit pas pour autant les fixer d'autorité : dans toute la mesure du possible, les collectivités doivent en débattre librement avant que l'arrêté préfectoral les entérine.

Monsieur le sénateur, je suis persuadé que le préfet du Pas-de-Calais saura, à l'issue de sa réflexion, prendre la décision la plus conforme à l'intérêt général et surtout la plus à même de préserver durablement les conditions d'une coopération harmonieuse entre Verquigneul et Béthune, qui est seule de nature à permettre, quelle que soit l'évolution des rapports institutionnels de ces deux collectivités territoriales, leur développement commun.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le ministre, vous avouerez que nous n'avançons pas d'un pas ! Le problème, c'est qu'il y a blocage. Le préfet m'a fait part de ses inquiétudes ; il dit qu'il faudrait que les deux parties débattent des conditions de cette défusion ; mais comment faire, sachant que l'une refuse de rencontrer l'autre ?

J'estime qu'il appartient au préfet de saisir les deux parties, de les réunir et de les obliger à se parler. Or, il n'en va pas ainsi. Monsieur le ministre, je vous demande donc d'user de votre influence, forcément assez grande, auprès du préfet.

augmentation croissante pour les communes du nombre et du coût des analyses de l'eau potable

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, auteur de la question n° 1249, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Claude Domeizel. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les conséquences financières d'obligations s'imposant aux communes en matière d'analyses dans les réseaux d'eau potable.

Dans les communes rurales, le coût de ces analyses est devenu exorbitant pour chaque abonné.

La fréquence des analyses a très sensiblement augmenté pour les captages de moins de 100 mètres cubes par jour, c'est-à-dire pour les communes rurales.

Je me permets de citer l'exemple - mais il y en a d'autres ! - d'un syndicat intercommunal desservant quarante-quatre abonnés, dont les dépenses d'analyses sont passées de 102,86 euros en 2004 à 279,64  euros en 2005 et à 1 788,77 euros en 2006, soit environ 40 euros par abonné.

Je souligne que, pour la distribution de l'eau potable, le regroupement des communes, souhaitable pour la gestion de ce genre de service, n'engendre pas systématiquement des économies en matière de contrôle de la qualité de l'eau.

Sur les deux cents communes que compte mon département, on dénombre environ six cents réseaux séparés : il faut, pour chacun d'entre eux, faire des analyses. Particulièrement en milieu rural, les communes ou syndicats de communes doivent en effet procéder à autant de séries d'analyses qu'il y a de réseaux de captage et de distribution lorsque ceux-ci sont séparés les uns des autres.

Je vous demande, monsieur le ministre, de me faire connaître la réglementation définissant le nombre, la fréquence et la qualité des analyses à effectuer.

Enfin, je souhaiterais savoir s'il existe des mesures financières - ou si des mesures de ce type peuvent être envisagées - permettant d'aider les communes rurales peu peuplées, afin que ces charges démesurées pour les usagers soient pondérées. Autrement dit, peut-on « ouvrir le parapluie » à tous les niveaux sans trop se soucier des répercussions dans le porte-monnaie des usagers ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, je ne suis pas surpris par la conclusion assez optimiste de votre intervention.

Vous avez appelé mon attention - à juste titre, car le problème est en effet réel - sur l'importante charge financière qui résulte, pour les communes rurales, de la mise en oeuvre des dispositions relatives au contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine.

Les règles relatives aux contrôles sanitaires de l'eau potable sont codifiées dans le code de la santé publique. Ces dispositions intègrent les obligations issues de la directive européenne du 3 novembre 1998 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, transposées en droit français depuis 2001.

Ce changement de réglementation a conduit à renforcer les contrôles pour les très petites unités de distribution, pour lesquelles des paramètres tels que l'arsenic ou les pesticides n'avaient jamais été mesurés auparavant. Ces contrôles, dont l'objet est de parvenir à une amélioration de la sécurité sanitaire des eaux distribuées à la population, peuvent ainsi constituer une charge plus lourde pour les petites unités, et ce d'autant qu'ils étaient antérieurement assurés de façon très inégale - j'utilise là volontairement un vocabulaire prudent.

Si des augmentations du prix de l'eau ont été observées, il doit cependant être souligné que, dans la plupart des situations signalées, l'eau était jusqu'alors distribuée à un coût très faible par rapport à sa valeur (MM. Philippe Madrelle et Bernard Dussaut protestent.), parfois même gratuitement. Ce réajustement par rapport à un niveau historiquement bas est cependant un préalable indispensable à la tenue des contrôles et à la réalisation des travaux qui permettront l'amélioration de leurs résultats.

Dans ce contexte normatif imposé par les instances communautaires, les aménagements de la réglementation paraissent difficiles.

Une mission d'inspection interministérielle, diligentée par le ministre de la santé et des solidarités et le ministre de l'écologie et du développement durable, devrait cependant être lancée très prochainement, afin que soit connue plus précisément la situation des petites unités de distribution au regard tant du coût que des bénéfices sanitaires réellement engendrés par les contrôles sanitaires.

Sur le plan financier, si les aides sont principalement tournées vers l'investissement, la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, récemment votée, vise à renforcer le dispositif d'aide destiné aux communes rurales. Son article 83 précise en effet les orientations prioritaires des programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau pour les années 2007 à 2012, parmi lesquelles figure la contribution à la solidarité envers les communes rurales par le biais de subventions en capital - j'insiste sur ce point - pour l'exécution des travaux en eau potable et d'assainissement. Un montant minimal est prévu à ce titre, fixé dans la loi à un milliard d'euros pour la période 2007-2012.

Par ailleurs, les solutions possibles pour réduire les coûts résident dans le regroupement intercommunal, la mise en place de périmètres de protection des points de captage afin d'améliorer la qualité de l'eau, ainsi que le regroupement des points de captage. Cela n'est bien sûr possible que si la topographie des lieux le permet. Mais c'est une piste qu'il me semble utile de souligner.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, je vous remercie des éléments d'informations que vous venez d'apporter, notamment sur les objectifs de la réglementation en vigueur.

Cependant, lorsque vous affirmez que, jusqu'alors, l'eau était distribuée à un coût très faible, permettez-moi d'en douter ! Dans certains villages, en effet, l'entretien des nombreux kilomètres de conduites et, parfois même, des infrastructures de pompage entraîne un coût relativement élevé.

En outre, vous avez rappelé les aides qui peuvent être attribuées au titre de la récente loi sur l'eau. Mais celles-ci - il faut le souligner - concernent uniquement l'investissement, et pas du tout le fonctionnement. Or ma question porte précisément sur les dépenses de fonctionnement : autrement dit, en matière financière, votre réponse me laisse toujours aussi perplexe. Je ne reviendrai d'ailleurs pas sur l'intercommunalité, qui est bien souvent inefficace dans ce domaine.

Cela étant dit, monsieur le ministre, rassurez-vous : lorsque je partirai en randonnée sur les hauteurs de mon département, je continuerai, sans aucune appréhension, à remplir ma gourde à la source des rivières qui fournissent l'eau dans les communes de la vallée ; et je ne me soucierai pas de savoir si cette eau contient des hydrocarbures solubles, du tétrachloréthylène ou de l'arsenic ! (Sourires.)

conséquences de la sécheresse de 2003

M. le président. La parole est à M. Robert Hue, auteur de la question n° 1206, transmise à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Robert Hue. Monsieur le ministre, je souhaite aborder un sujet sensible et d'une importance certaine, à savoir le dossier de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle consécutive à la sécheresse de l'année 2003. En effet, si nombre de communes ont sollicité une telle reconnaissance, peu l'ont obtenue : sur 7 859 demandes, seules 4 225 communes ont été reconnues éligibles.

Certes, monsieur le ministre, je sais qu'une question semblable a été posée ici même, la semaine dernière, par une sénatrice des Yvelines. On m'a d'ailleurs gentiment suggéré de retirer la mienne, qui avait pourtant été déposée avant celle de ma collègue...

Monsieur le président, permettez-moi tout de même de m'étonner de cette façon de faire, si peu répandue dans notre assemblée !

M. le président. C'est pour faire progresser la parité ! (Sourires.)

MM. Claude Domeizel et Gérard Dériot. C'est de la galanterie !

M. Robert Hue. Ma question porte plus précisément sur la situation dans mon département du Val-d'Oise. Sur 51 communes souhaitant légitimement bénéficier du dispositif de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, seule la petite commune de Bray-et-Lû a pu profiter de la mesure prévue dans l'arrêté interministériel du 20 décembre 2005. Quant à l'aide exceptionnelle prévue, 53 % des dossiers ont été rejetés.

Je puis vous assurer, monsieur le ministre, que l'incompréhension est grande et que nos concitoyens s'interrogent sur le choix des critères d'éligibilité. La reconnaissance de cet état de catastrophe naturelle passe ainsi par plusieurs critères bien précis, que vous connaissez.

Il s'agit, tout d'abord, de la présence d'argile reconnue dans le sol, attestée par un rapport ou une étude géotechnique. À cet égard, je suis catégorique : comme le prouvent les conclusions de plusieurs rapports, qui sont à votre disposition, il y a bien présence de plaques d'argile dans le sol de plusieurs communes du Val-d'Oise sinistrées, parmi lesquelles Herblay, la Frette-sur-Seine et Montigny-lès-Cormeilles, dont je suis maire depuis trente ans.

Il s'agit, ensuite, de critères météorologiques permettant de qualifier l'intensité anormale de la sécheresse. À la suite du découpage procédant du zonage Aurore, ces communes appartiennent à la zone 110, dont la station météorologique de référence est située à Bonneuil-en-France, alors que celle-ci n'est pas représentative des conditions climatiques des villes concernées. Pourquoi donc maintenir ce choix, au lieu et place d'autres stations plus proches, à l'image de celles d'Herblay ou de Pontoise ?

Ainsi, il y a tout lieu de penser que le bilan hydrique de la station de Bonneuil-en-France n'est pas comparable, cette ville étant éloignée des communes du Val-d'Oise qui prétendent à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.

Le sentiment d'inégalité, découlant évidemment de ces situations, est fort chez les sinistrés, lesquels se sentent lésés et souhaitent obtenir un élargissement, justifié à mon sens, des critères scientifiques sur le plan météorologique.

Enfin, monsieur le ministre, je souhaite souligner un dernier point : quelles que soient les modalités d'attribution, les travaux représentent un coût exorbitant, de l'ordre de plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d'euros. À mes yeux, des aides pourraient être envisagées, sous des formes aussi diverses que les prêts à taux zéro, les réparations déductibles des impôts ou encore les exonérations de TVA.

En effet, parmi les sinistrés, nombre de personnes sont retraitées, handicapées ou sans emploi, et ne peuvent débourser ainsi 100 000 euros. De même, certains actifs auront de grandes difficultés pour obtenir des prêts bancaires, sachant qu'aucune garantie de taux préférentiels n'a été activée à ce jour.

Comme vous pouvez le constater, il ressort de ces interrogations nombre de situations d'inégalité, voire d'angoisse, face à des mesures prises à la hâte et sans garantie. Malheureusement, l'aide exceptionnelle de 180 millions d'euros ne suffira pas à couvrir l'ensemble des sinistrés.

En conséquence, c'est la solidarité nationale qui doit prévaloir, et elle ne peut passer par une sélectivité des dossiers, qui pourrait paraître arbitraire. Quelles mesures comptez-vous prendre en ce sens ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur les conséquences de la sécheresse de l'année 2003. Ce faisant, vous êtes naturellement tout à fait dans votre droit, même si j'ai effectivement répondu la semaine dernière à la question d'une sénatrice des Yvelines portant sur le même sujet.

Vous m'interrogez plus précisément sur la situation des communes du Val-d'Oise qui n'ont pas été reconnues en état de catastrophe naturelle. Vous souhaitez en fait obtenir des précisions sur l'aide exceptionnelle mise en place par le biais de l'article 110 de la loi de finances pour 2006.

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler à plusieurs reprises lors de séances de questions orales ou de questions d'actualité au Gouvernement, cette sécheresse a été atypique et exceptionnelle, tant d'un point de vue technique, dans la mesure où elle a pris la forme d'un phénomène extrêmement rapide et concentré sur la période estivale, que d'un point de vue quantitatif, puisque près de 8 000 communes ont sollicité la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Tous les membres de la Haute Assemblée ont d'ailleurs sûrement ce chiffre en mémoire, notamment M. Doligé, qui est au moins aussi attentif que vous sur ces sujets.

Le Gouvernement s'est donc employé à déterminer des critères d'éligibilité plus adaptés et plus souples, en raison précisément des particularités du phénomène observé. Il a été amené à assouplir ces règles, et ce à plusieurs reprises.

Monsieur Hue, chacun doit bien avoir conscience de la réalité et agir en toute responsabilité : si les critères habituellement utilisés avant 2003 avaient été retenus, seules 200 communes auraient en réalité bénéficié de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, alors que, avec le système actuel, grâce à ces assouplissements, plus de 4 000 communes ont ainsi pu être reconnues éligibles.

Votre interrogation porte naturellement sur les communes ayant fait l'objet d'une décision défavorable, pour lesquelles les élus sont encore dans l'attente. Ceux qui sont contents ne vont évidemment pas se manifester !

Pour ces mêmes communes, une procédure d'examen individualisé des dossiers présentés par les propriétaires sinistrés, en dehors de la procédure de catastrophe naturelle, a été proposée au Parlement par le Gouvernement. Celui-ci l'a approuvée, et l'article 110 de la loi de finances pour 2006 a permis aux préfectures d'instruire les dossiers au mieux, au plus près des réalités locales.

Dans le cadre de ce dispositif, qui a tout de même été doté de 180 millions d'euros, le représentant de l'État vérifie l'éligibilité des demandes, notamment au regard des travaux de confortement nécessaires au rétablissement de l'intégrité de la structure, du clos et du couvert des habitations principales.

Pour ce qui concerne le département du Val-d'Oise, sur 53 communes demanderesses, une commune, répondant aux critères météorologiques, a été reconnue en état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse de 2003. Les 52 autres communes non reconnues relèvent donc du dispositif d'aide exceptionnelle mis en oeuvre par l'article 110 de la loi de finances pour 2006. À cet égard, 376 dossiers, portant sur 44 communes et déposés en préfecture du 6 février au 6 juin 2006, ont été déclarés éligibles au regard des critères définis dans l'article 110, et un montant global de 7 577 718 euros a été proposé.

Cette phase d'instruction s'est achevée le 23 juin 2006. Les mesures d'encadrement ont été fixées par le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et par le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Les enveloppes départementales ont donc été arrêtées et communiquées aux représentants de l'État. À cet égard, le Gouvernement, constatant que le taux d'indemnisation était insuffisant, a proposé une ouverture complémentaire de 38,5 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2006.

Depuis le mois de septembre dernier, toutes les instructions ont été données aux préfets pour que la notification des subventions aux particuliers soit effectuée sans délai, étant entendu que le paiement effectif des aides est actuellement en cours.

M. le président. La parole est à M. Robert Hue.

M. Robert Hue. Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous avez bien voulu m'apporter. Je ne méconnais d'ailleurs pas l'intérêt qu'ont suscité les mesures d'assouplissement, sans lesquelles, effectivement, peu de communes auraient été éligibles. Il reste que nous sommes confrontés à une situation nouvelle et que les critères anciens sont aujourd'hui largement dépassés. C'est précisément sur ces derniers qu'il faut encore réfléchir.

Les personnes concernées par ces situations ont beaucoup travaillé et ont étudié les dossiers en profondeur. À titre personnel, le critère de la pluviométrie m'avait ainsi complètement échappé. Or, après examen, il s'agit bien d'un élément essentiel. Le choix de la station météorologique de référence, située à une trentaine de kilomètres des communes concernées, ne peut donc que susciter des interrogations quant à la régularité des données collectées et au traitement des dossiers.

Il convient, à mon avis, d'examiner à nouveau ces critères et de prendre naturellement les mesures qui en découlent sur le plan financier.

Certes, monsieur le ministre, il ne s'agit pas directement de votre domaine de responsabilité. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'avais posé la question à M. le Premier ministre, sachant qu'elle impliquait que des mesures financières de solidarité soient prises. Je souhaite que ma proposition soit étudiée.

financement des contrats enfance dans le maine-et-loire

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, en remplacement de M. Christian Gaudin, auteur de la question n° 1233, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le ministre, mon collègue Christian Gaudin, qui est souffrant et qui ne peut donc être présent ce matin avec nous, m'a demandé de poser en son nom une question concernant le financement des contrats enfance dans le département de Maine-et-Loire.

Dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion entre la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, et l'État pour la période 2005-2008, signée le 2 août 2005, le Gouvernement a récemment demandé à la CNAF de moduler son financement. Dès lors, cette dernière envisage de conditionner son soutien au respect de plusieurs nouveaux critères, ce qui revient notamment à pénaliser les communes ayant beaucoup construit dans le cadre du contrat enfance précédent.

À titre d'exemple, la caisse d'allocations familiales d'Angers, en ne tenant compte que des projets finalisés, a demandé 2,876 millions d'euros pour la période 2005-2008 ; or elle ne recevra que 1,255 million d'euros, soit 43 % des montants espérés.

L'application de ces nouveaux critères de sélectivité - potentiel fiscal, précarité familiale avec les taux d'allocataires CAF « parent isolé », prise en compte du niveau d'équipement - se traduit par une baisse significative des engagements des caisses d'allocations familiales auprès, notamment, des communes rurales ou des communautés de communes.

C'est ainsi que, privées de l'aide financière apportée par les caisses d'allocations familiales, les collectivités locales doivent désormais supporter seules le coût des équipements destinés à l'accueil des jeunes enfants.

Monsieur le ministre, je vous demande donc de bien vouloir m'apporter des éléments de clarification quant aux mesures qui doivent être prises pour soutenir l'effort des collectivités en matière d'équipements destinés à l'accueil des plus jeunes enfants. Je pense plus particulièrement aux collectivités locales en zone rurale, dans lesquelles la mobilité géographique pour les familles est non seulement la plus forte mais également la plus difficile, ce qui n'est pas sans conséquences sur leur budget.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, je voudrais tout d'abord rappeler l'importance de l'action accomplie en faveur des familles de France au cours des dernières années. Grâce à la création de la prestation d'accueil du jeune enfant, on dénombre ainsi 250 000 nouvelles familles bénéficiaires par rapport à celles qui percevaient les anciennes aides à la garde d'enfant. Nous avons nous-mêmes été dépassés par le succès de cette prestation, puisque nous n'attendions que 200 000 familles supplémentaires.

Je tiens aussi à rappeler que le nombre de places de crèches a augmenté.

En l'an 2000, 264 places de crèches, en tout et pour tout, avaient été créées en France. En 2005, nous en avons créé 8 500 et, en 2006, 10 000. En 2007, nous en ouvrirons 12 000. Et dans le cadre du Plan petite enfance, nous serons en mesure, d'ici à la fin de la montée en régime de ce plan, de donner une réponse à tous les parents en attente d'un mode de garde pour leur enfant.

Il reste, aujourd'hui, 240 000 enfants de moins de trois ans pour lesquels les parents n'ont pas trouvé de solution de garde. Nous faisons donc un effort sans précédent. Mais cet effort est nécessaire pour rattraper le retard accumulé.

Entre 2001 et 2004, les sommes consacrées aux contrats enfance et aux contrats temps libre ont augmenté de 200 %. Loin d'une approche restrictive de la question de la garde des jeunes enfants, nous assistons à une véritable flambée des dépenses.

Nous avons hérité d'un fonds d'action sociale doté, fin 2001, de 2,1 milliards d'euros pour toutes les caisses d'allocations familiales de France, crédits qui permettent de financer les crèches et les centres de loisirs. Ce fonds sera doté, fin 2008, de 3,9 milliards d'euros, ce qui représente un quasi-doublement des crédits initiaux. Aucun autre budget public n'a connu une telle expansion !

Nous devons bien évidemment veiller à ce que cet effort soit soutenable sur le moyen terme. J'ai donc dû poser un certain nombre de règles afin que le financement des ouvertures de places de crèches se fasse sans gaspillage. Il a fallu, pour cela, moderniser les outils de la Caisse nationale des allocations familiales, qui n'étaient plus adaptés.

Jugez-en par vous-mêmes : entre 2003 et 2005, dans le Maine-et-Loire, le nombre de places de crèche a augmenté de 7 % seulement ; mais, dans le même temps, les dépenses prises en charge par la caisse d'allocations familiales pour le fonctionnement des places de crèche, dans ce même département, ont augmenté de 195 %, passant de 4,07 millions d'euros à 7,9 millions d'euros ! Il fallait donc remettre de l'ordre, dans l'intérêt même des familles, afin que l'ouverture des places de crèches puisse se poursuivre, comme le souhaitent à la fois le Gouvernement et les partenaires sociaux gestionnaires de ces crédits d'action sociale et familiale.

Les nouveaux contrats enfance mis en oeuvre par les caisses d'allocations familiales financeront les crèches de façon importante - à hauteur de 77 % des dépenses de fonctionnement en moyenne -, ce qui permettra de donner la priorité à la création de nouvelles places. Trois garanties seront apportées : les contrats en cours ne sont pas concernés ; pour les contrats qui vont être renouvelés, l'aide de la CAF ne peut baisser de plus de 3 % par an ; pour une meilleure lisibilité, l'aide de la CAF est fixée contractuellement pour quatre années, au lieu de trois auparavant.

Grâce à cette réorganisation des aides, nous pourrons continuer à ouvrir des places de crèche et à financer le Plan petite enfance, que j'ai présenté l'an dernier et dont l'objectif est de développer l'aide aux familles.

Une politique familiale moderne consiste en effet à répondre aux besoins des familles, c'est-à-dire, notamment, à proposer des solutions de garde pour les jeunes enfants. Je rappelle que, au sein des familles françaises, 82 % des femmes ont une activité professionnelle. Il est donc nécessaire de leur venir en aide, et ce non pas en augmentant systématiquement le montant des prestations, mais en ouvrant rapidement le plus grand nombre possible de places de crèche et en développant l'aide aux familles.