compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures vingt.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Article 4 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat
Articles additionnels après l'article 4

Travail, emploi et pouvoir d'achat

Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (n°s 390, 404, 406).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 37, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat
Article 4 bis

Articles additionnels après l'article 4

M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- L'article 777 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les limites des tranches des tarifs prévus aux tableaux ci-dessus sont actualisées chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi à l'euro le plus proche. »

II. - L'article 779 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant des abattements du présent article est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi à l'euro le plus proche. »

III.- La perte de recettes résultant pour l'Etat des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement a pour objet de prévoir l'actualisation automatique, en fonction de l'inflation, des tranches de barème et des abattements des droits de mutation à titre gratuit.

Je rappelle qu'une telle actualisation existe pour l'impôt sur le revenu et, depuis notre vote l'année dernière, pour l'impôt de solidarité sur la fortune.

Si nous n'adoptions pas cet amendement, seuls ces impôts ne feraient pas l'objet d'un barème indexé chaque année sur l'inflation.

Mme Nicole Bricq. Oh les pauvres !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n'est pas spécialement favorable à cette mesure, ...

Mme Christine Lagarde, ministre. ... considérant qu'un examen attentif des droits de succession a été réalisé et qu'un abattement raisonnable - étendu à l'ensemble des bénéficiaires en ligne directe - a été consenti.

Par ailleurs, nous aurons l'occasion d'évoquer le principe de l'indexation de manière générale lors de l'examen du texte que nous envisageons sur l'ensemble des prélèvements.

Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis de sagesse défavorable.

Mme Nicole Bricq. C'est raisonnable !

M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 37 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Si vous vous en remettez à la sagesse du Sénat, madame le ministre, elle ne manquera pas de s'exprimer !

Je rappellerai simplement que, entre 1959 et aujourd'hui, le seuil applicable à l'imposition des droits en ligne directe entre époux, qui était de l'équivalent de 7 600 euros, est passé à 73 102 euros. Je ne donnerai que cet exemple. Ces chiffres n'ont jamais été ajustés en fonction de la dérive des prix. Le Parlement ne s'est jamais prononcé de nouveau sur cet abattement.

Il s'agit donc là de ce que j'appelle un prélèvement rampant. Or, pour des raisons de principe, la commission des finances est hostile aux prélèvements rampants.

Je maintiens donc mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.

L'amendement n° 36, présenté par M. Marini au nom de la commission des finances est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Après l'article 778 bis du code général des impôts, il est inséré un article 778 ter ainsi rédigé :

« Art. 778 ter.- Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit par décès, en l'absence d'ascendants ou de descendants en ligne directe, et de conjoint survivant, la part nette taxable revenant aux héritiers parents ou non parents est soumise aux tarifs et abattements applicables aux frères et soeurs, sauf disposition plus favorable. »

II.- La perte de recettes résultant pour l'Etat du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à procéder à un ajustement que je qualifierai de mineur.

Nous voudrions qu'un geste soit fait pour les héritiers en ligne collatérale des défunts sans famille proche, sans ascendants, sans descendants, sans conjoint survivant.

Mme Nicole Bricq. Et pour les chiens et les chats, vous ne faites rien ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Soyez plus charitable, madame !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. M. le rapporteur général a très bien exposé les cas auxquels s'appliquerait cet amendement qu'il a qualifié de mineur.

Je me permettrai de faire appel à son sens de la rigueur, à laquelle il ne manquera pas à son tour de m'inviter lorsque nous examinerons le projet de loi de finances, car mes services - et je ne doute pas qu'ils aient fait un travail consciencieux -, ont évalué le coût de cette mesure à 736 millions d'euros.

Estimant important le coût de cette disposition, qui n'est pas fondamentale, je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le rapporteur général.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 36 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. J'avoue que cet argument me touche profondément ! (Sourires.)

Cet amendement vise à porter l'abattement en question de 1 500 euros à 15 000 euros. C'est beaucoup, c'est vrai, mais peu à la fois.

Que diriez-vous, madame le ministre, si nous faisions un geste et si nous portions le montant de cet abattement à 3 000 euros ? Ce serait peu de chose !

M. le président. J'ai l'impression d'assister au marchandage d'une vache dans la Sarthe ! (Rires.)

M. Guy Fischer. Nous, nous appelons cela du maquignonnage ! (Sourires.)

M. le président. Madame la ministre, êtes-vous dans ces conditions favorable à cet amendement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Non, monsieur le président, car je n'ai pas le chiffrage de cette mesure.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, maintenez-vous votre amendement ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Le coût de cette mesure pourrait être évalué en appliquant la règle de trois.

Je dois dire - peut-être reviendrons-nous sur ce sujet tout à l'heure - que nous sommes en général frustrés par les chiffrages de l'administration. En effet, le chiffrage est toujours très élevé quand il s'agit d'une initiative du Parlement et, en revanche, toujours très modéré quand il s'agit d'une mesure émanant du Gouvernement !

La bonne solution - j'ai déjà eu l'occasion de le dire - serait peut-être que le chiffrage soit effectué sous le contrôle du Parlement. Cela pourrait être une façon de revaloriser son rôle.

Ayant marqué sa sollicitude pour ces familles, la commission espère qu'elle sera entendue - nous reviendrons à la charge ! -, mais, pour le moment, elle retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 36 est retiré.

Monsieur le rapporteur général, mes vingt ans d'expérience au sein de la commission des finances me font partager votre analyse sur les estimations de la direction de la législation fiscale. Il est vrai que, suivant l'origine de l'amendement, les chiffrages varient souvent !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci d'en témoigner !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. L'indexation du barème que nous avons votée est un début de réponse à cette question.

J'ajoute qu'il est de la responsabilité du Sénat de se donner ses propres moyens d'expertise et d'évaluation. Il nous appartiendra donc d'en tirer les conséquences.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà ! Il appartiendra aux questeurs de nous donner des crédits à cette fin !

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Je tiens à apporter une précision sur ce sujet.

En matière d'évaluation, les choses sont souvent très variables. Je me souviens que, lorsque j'étais à Bercy, il nous est souvent arrivé, comme à mes prédécesseurs, dont Jean Arthuis, et comme à mes successeurs, de faire des évaluations « à la louche », parce qu'il y a des domaines qui ne peuvent pratiquement pas être évalués.

Il faudrait donc que l'on arrive à se mettre d'accord sur des normes d'évaluation communes, même si ce n'est pas facile, parce que la matière humaine est souvent insaisissable.

M. le président. Vaste chantier !

L'amendement n° 56 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Bizet, Bourdin, Huré, Cornu et Pointereau et Mme Gousseau est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Dans le deuxième alinéa de l'article 793 bis du code général des impôts, la somme : « 76 000 euros » est remplacée par la somme : « 150 000 euros ».

II. Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Joël Bourdin.

M. Joël Bourdin. L'abattement sur la valeur des biens ruraux transmis à titre gratuit et loués par bail à long terme est plafonné à 76 000 euros.

Dans un souci de cohérence avec le texte en discussion, nous proposons que cet abattement soit porté à 150 000 euros.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission estime que cette initiative est un peu éloignée du texte. Elle souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement et ne doute pas qu'il le donnera avec toute la considération que méritent ses auteurs et l'idée qu'ils ont exprimée.

Toutefois, à mon sens, cet amendement a vocation à être retiré.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Les mesures dont nous discutons actuellement s'appliquent évidemment à l'ensemble du patrimoine et donc aux parts de groupements fonciers agricoles, les GFA, au même titre que tous les éléments du patrimoine en succession.

Les parts de GFA bénéficient elles-mêmes déjà d'un régime dérogatoire particulièrement favorable, avec une exonération jusqu'à un certain plafond, puis une réduction de 50 %. Il nous semble que, en l'état, les dispositions particulières au bénéfice des groupements fonciers agricoles sont déjà suffisantes.

C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?

M. Joël Bourdin. Après avoir consulté mes collègues, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 56 rectifié est retiré.

L'amendement n° 57 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Bizet, Bourdin, Huré, Cornu et Pointereau et Mme Gousseau, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article 796 du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art.... - Les contribuables domiciliés fiscalement en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction des droits de mutation à titre gratuit qu'ils doivent acquitter en cas de souscription ou d'acquisition en numéraire de parts d'un groupement foncier agricole louant leurs biens par bail dans les conditions prévues par les articles L. 418-1 et suivants du code rural. L'acquisition ne peut concerner les parts de groupements détenues par un parent ou allié jusqu'au troisième degré inclus.

« En cas de souscription, le groupement foncier agricole doit, dans un délai de douze mois suivant celle-ci, procéder à l'acquisition d'immeubles pour un montant au moins égal à 90 % de la valeur de la souscription. Les biens acquis doivent être loués par bail, dans les conditions visées à l'alinéa précédent, dans un délai maximum de deux mois suivants leur acquisition. Lorsque plusieurs souscriptions sont réalisées dans une période de trois mois, la période de douze mois s'apprécie à compter de la dernière souscription et le coût minimum d'acquisition doit représenter au moins 90 % du total des souscriptions de la période considérée.

« La réduction des droits de mutation à titre gratuit est égale au prix d'acquisition ou de souscription. Ce prix est retenu dans la limite annuelle de 50 % du prix d'acquisition dans la limite de 15 000 € par contribuable.

« Lorsque tout ou partie des parts ayant donné lieu à réduction de droits de mutation à titre gratuit est cédé avant le 31 décembre de la neuvième année suivant celle de la souscription, il est pratiqué au titre de l'année de cession une reprise des réductions de droits de mutation obtenues, dans la limite du prix de cession. Ces dispositions ne s'appliquent pas en cas de licenciement, d'invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ou du décès du contribuable.

« Un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant au contribuable et aux groupements fonciers agricoles. »

II. - La réduction prévue au I concerne les souscriptions ou acquisitions réalisées entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2009.

III. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Joël Bourdin.

M. Joël Bourdin. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement intéressant sera largement satisfait par l'amendement n° 44 de la commission, dont je préconiserai le vote à l'article 6. Il peut donc être retiré.

M. le président. Monsieur Bourdin, l'amendement n° 57 rectifié est-il maintenu ?

M. Joël Bourdin. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 57 rectifié est retiré.

L'amendement n° 122, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel rédigé comme suit :

L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « lorsque la valeur de l'actif successoral est inférieure à 50 000 euros. Cette somme varie chaque année comme l'inflation. »

La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Cette nuit, nous avons revu complètement le barème des droits de succession et les travaux du Sénat, conformément aux souhaits et aux propositions du Gouvernement, ont conduit, comme l'a souligné M. le rapporteur général hier, à dispenser désormais 95 % des successions de tout droit à payer, à l'exception...

M. Philippe Marini, rapporteur général. À l'exception de M. Dassault !

M. Michel Charasse. ... des frais de notaire. Il faudra bien expliquer aux intéressés que ce n'est pas parce qu'il n'y pas plus de droits de succession qu'il n'y a pas de frais de notaire. Or, souvent nos compatriotes mélangent tout, je dis cela en passant à Mme la ministre.

Donc, puisque nous avons refondu l'ensemble des barèmes, il m'a paru que le moment était venu de réexaminer une question qui a été très mal réglée dans le passé, qui n'a d'ailleurs même pas été réglée du tout, concernant la situation de l'allocation personnalisée d'autonomie à l'égard de l'obligation alimentaire.

En matière d'aide sociale, il y a dans pratiquement tous les cas obligation alimentaire et donc récupération sur succession, que ce soit l'aide sociale départementale « banale », comme l'aide médicale, ou d'autres formes d'aide sociale comme le revenu minimum d'insertion.

Mes chers collègues, lorsque le gouvernement de M. Rocard dont j'étais a fait voter le RMI, le législateur a inclus dans la texte la possibilité de récupération sur succession. Personne ne le sait ; pourtant cela existe et cela joue quelquefois. Or, en ce qui concerne l'APA - qui a succédé à la PSD, d'initiative sénatoriale, laquelle était récupérable - à la suite d'une mauvaise manoeuvre à l'Assemblée nationale qui n'a malheureusement pas pu être rattrapée ici, la récupération sur succession a sauté !

Avec la situation très favorable qui est faite désormais aux héritiers grâce aux dispositions votées hier soir, la nation peut tout de même demander aux familles de contribuer à l'entretien des personnes âgées en grande dépendance.

En tant que maire d'une commune de 2 700 habitants, je signe des demandes d'APA et je vois à qui cela profite. Il y a beaucoup d'enfants qui attendent la mort du futur défunt, si je puis dire, grand-père ou autre, pour passer à la caisse. En attendant, nous faisons payer des impôts locaux à des personnes qui n'auront jamais les moyens d'être propriétaires d'un logement et qui devront jusqu'à la fin de leur vie entretenir le voisin dont les futurs héritiers se désintéressent totalement, mais ne perdent plus une minute après le décès pour exiger leur dû !

Je pense que l'on peut mettre un terme à ce processus en profitant de cette occasion pour rétablir la récupération sur succession.

J'ai prévu, madame le ministre, un seuil de 50 000 euros.

M. Guy Fischer. Je ne suis pas d'accord !

M. Michel Charasse. On peut penser que la somme est trop basse, mais, cher Guy Fischer, c'est celle qui est appliquée aujourd'hui à peu de choses près en matière de récupération sur succession au titre des autres aides sociales départementales.

Mme Marie-France Beaufils. Ce n'est pas pour cela que c'est bien !

M. Michel Charasse. On peut très bien prévoir un seuil de 100 000 euros, qui correspond à la moyenne des transmissions de patrimoine ; cela ne me gêne pas.

Mais je pense que, vraiment, à un moment où nous avons, les uns et les autres, à faire des efforts pour la solidarité nationale et pour financer correctement et équitablement la protection sociale, alors que nous allons faire sauter l'ensemble du dispositif ou presque de taxation des successions, nous devons faire ce geste qui bénéficiera, je le précise, aux départements et donc à leurs contribuables.

Les départements supportent aujourd'hui le coût de l'APA et, compte tenu de leur situation actuelle encore aggravée par d'autres transferts comme la loi sur les handicapés et quelques autres, il est temps de sortir de cette anomalie et de cette injustice selon lesquelles les détenteurs de patrimoine font payer l'entretien de leurs aïeux par le voisin qui n'a pas d'argent ou qui en a moins qu'eux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon propos sera bref : démarche vertueuse, avis favorable !

M. Alain Lambert. Très bien !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très beau commentaire !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Charasse, j'ai beaucoup de sympathie pour votre amendement et vous posez un vrai problème, qui sera probablement d'une bien plus vaste ampleur au fur et à mesure que, l'âge aidant pour un plus grand nombre d'entre nous, ces questions de dépendance et de handicap se poseront avec beaucoup plus d'acuité.

De ce point de vue, nous allons avoir un débat sur la cinquième branche, liée à la dépendance, dans le cadre duquel il faudra que nous réexaminions la question de principe de la répartition de ce risque entre la solidarité nationale et la solidarité familiale.

En ayant bien mis en exergue, d'une part, le débat sur la cinquième branche et, d'autre part, celui que nous devrons mener sur l'équilibre de nos finances publiques, compte tenu des engagements de modération des uns et des autres, tant sur le plan national qu'au niveau des collectivités locales, qui seront également tenues à la rigueur, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. M. Charasse nous renvoie à un vieux débat lors de la création de l'APA sur la question de son financement, dont il était ressorti que cette allocation n'était pas récupérable sur succession.

M. Michel Charasse. Défense du patrimoine !

M. Guy Fischer. Nous avions évoqué la vieille PSD, qui avait été expérimentée dans douze départements, notamment dans celui de M. de Raincourt, et nous avions débattu longuement sur le fait que l'APA n'était pas financée en totalité. Nous en mesurons aujourd'hui les conséquences !

Mme la ministre vient de faire allusion à la création d'une cinquième branche. Le débat est loin d'être tranché.

M. Michel Charasse. Avec une cotisation !

M. Guy Fischer. Sera-t-elle traitée dans le cadre de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, comme la majorité semble le souhaiter ? Viendra-t-elle s'ajouter à la protection sociale, comme nous y porte notre sensibilité ? La question a été écartée des débats que nous avons eus récemment avec MM. Alain Vasselle et Paul Blanc au sein de la commission des affaires sociales.

Aujourd'hui, le problème du financement de l'APA a été tranché en le faisant porter, pour une large part, sur les familles. Il faut savoir que l'hébergement est assuré presque intégralement par les familles et que l'aide sociale accordée par les départements est absolument nécessaire...

M. Michel Charasse. Pour les riches !

M. Guy Fischer. ... pour nombre de familles.

Il existe peut-être quelques cas marginaux, mais je sais, pour fréquenter régulièrement les établissements pour personnes âgées dépendantes, les EPAD - anciennement MAPAD -, que ce problème de fond mérite toute notre attention.

Nous aurons, semble-t-il, un débat sur le financement de la dépendance. En l'état actuel, le problème reste entier, nous sommes donc en total désaccord avec l'amendement qui a été présenté par M. Michel Charasse.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous n'êtes pas en accord avec vos principes !

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

M. Alain Vasselle. Je suis assez surpris de la position du Gouvernement, qui s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

Il serait effectivement raisonnable, madame la ministre, mes chers collègues, de faire preuve de sagesse à l'égard d'une telle initiative. Notre collègue Michel Charasse a une position constante sur le sujet.

Nous avons eu un très long débat sur le sujet, comme l'a rappelé M. Fischer, qui a fait apparaître des positions très diversifiées selon les sensibilités politiques.

Je rappelle que l'initiative de la suppression du recours sur succession...

M. Michel Charasse. C'est l'obligation alimentaire.

M. Alain Vasselle. ...est venue de l'Assemblée nationale. J'étais rapporteur du texte à l'époque et la commission des affaires sociales avait proposé que nous suivions la position de l'Assemblée nationale. En créant l'APA, nous avions créé une sorte de droit universel puisque nos concitoyens pouvaient bénéficier de l'APA quel que soit leur niveau de revenus.

M. Michel Charasse. Et voilà !

M. Alain Vasselle. À partir du moment où l'allocation changeait de nature comparée à celle qui existait antérieurement, il était tout à fait judicieux que nous nous interrogions sur la pertinence du maintien ou non de cette récupération.

Il me semblerait opportun que notre collègue M. Charasse accepte de retirer son amendement pour que nous puissions en débattre à nouveau lorsque le Gouvernement saisira le Parlement, comme le Président de la République s'y est engagé, sur l'opportunité de créer un cinquième risque et éventuellement une cinquième branche. Le Gouvernement a confirmé qu'il prendrait des initiatives en ce sens, mais nous ne savons pas encore quelles modalités seront retenues le moment venu.

Si nous adoptons cet amendement, nous allons créer de nouvelles disparités que nous avions gommées ; car lorsque nous avions abrogé cette disposition, nous en avions profité pour supprimer le recours sur succession en ce qui concerne les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé, l'AAH.

Nous allons donc rouvrir un débat sur lequel la commission des affaires sociales doit donner son avis. Je trouverais particulièrement regrettable qu'au détour d'un texte, un vendredi, nous prenions une telle initiative.

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Alain Vasselle. C'est la raison pour laquelle je ne pourrai pas approuver la proposition de M. Charasse. Les problèmes qu'il pose méritent effectivement qu'une réflexion soit à nouveau conduite sur le sujet. Pour autant, je ne pense pas que les quelques cas dont il fait état se retrouvent à une grande échelle sur l'ensemble du territoire national. Le phénomène est relativement marginal par rapport au nombre de cas que nous connaissons aujourd'hui.

Je rappelle également que le recours n'était pas appliqué d'une manière équivalente d'un département à l'autre.

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Alain Vasselle. Certains conseils généraux appliquaient effectivement le recours...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est très bien !

M. Alain Vasselle. ...et d'autres pas, ce qui créait une situation d'iniquité sur le territoire national...

M. Michel Charasse. Il y en a d'autres !

M. Alain Vasselle. ...entre les personnes handicapées et les personnes âgées.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, il serait beaucoup plus sage que notre collègue Michel Charasse retire son amendement afin que nous en débattions d'une manière beaucoup plus sereine avec la commission des affaires sociales et la commission des finances.

M. Michel Charasse. J'en ai marre d'arroser les milliardaires !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je respecte beaucoup la commission des affaires sociales, je pense l'avoir montré au début de nos débats,...

M. François Marc. Tout à fait !

M. Philippe Marini, rapporteur général. ...mais nous sommes dans le sujet.

De quoi s'agit-il ? Il s'agit de la solidarité intergénérationnelle. On ne peut pas prendre le positif et refuser le négatif, ce n'est ni raisonnable ni responsable.

Nous faisons une réforme pour abaisser les droits de succession, c'est bien ! Je l'ai appelée de mes voeux, j'en suis partisan. Mais, à l'inverse, lorsque des dépenses sont engagées par la collectivité et peuvent faire l'objet d'une démarche de solidarité de la part des descendants, il me paraît raisonnable de le leur demander.

Au demeurant, Alain Vasselle le sait mieux que tout autre, c'est ce qui existait dans l'ancien droit de l'aide sociale.

M. Philippe Marini, rapporteur général. En l'occurrence, il s'agit simplement de replacer l'allocation personnalisée d'autonomie au même rang que les prestations classiques d'aides sociales. C'est ce qui aurait dû être fait lorsque l'APA a été créée.

M. Michel Charasse. Exactement !

M. Philippe Marini, rapporteur général. La démarche de Michel Charasse est particulièrement opportune. Je dirais même qu'elle est vertueuse.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Une démarche vertueuse qui émane de temps en temps de ce côté-ci de l'hémicycle est un bon signe d'ouverture, et je m'en réjouis.

MM. Robert del Picchia et Alain Lambert. Très bien !

M. Guy Fischer. C'est scandaleux !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Jégou. Je voterai cet amendement, car il est effectivement vertueux.

Je suis désolé que M. Vasselle pense que ce vote a lieu à la sauvette, au détour d'un vendredi. En outre, nous ne sommes pas du tout hors sujet. Nous venons tout de même d'accorder aux droits de succession tout ce qu'il est possible de donner, y compris d'ailleurs ce que le budget de la nation ne peut pas donner.

Madame la ministre, vous avez distingué la solidarité qui vient de l'État et celle qui vient des familles. Il y a un temps pour tout ! Il est souhaitable que les familles puissent également ...

M. Jean-Jacques Jégou. ... se montrer solidaires envers leurs aïeux.

Par ailleurs, je n'ai pas compris votre intervention, monsieur Fischer. Pour ma part, j'estime que c'est le minimum que nous puissions demander aux familles.

Les maires se rendent bien compte des difficultés que peut quelquefois engendrer l'obligation alimentaire, mais on constate aussi les effets d'aubaine du dispositif actuel et, dans ce cas, il est à la charge de l'État !

M. Guy Fischer. Là, c'est le département !

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. Je voudrais à mon tour soutenir l'amendement de Michel Charasse.

Comme l'a très bien dit M. Vasselle, le problème vient du fait que l'allocation personnalisée d'autonomie est versée quel que soit le niveau de revenu. Je ne comprends donc pas votre attitude, monsieur Fischer. En l'occurrence, il s'agit de demander à ceux qui ont beaucoup d'argent de participer à la solidarité, alors que ceux qui n'ont pas beaucoup de moyens y contribuent déjà notamment par les impôts locaux.

Aujourd'hui, lorsqu'un conseil général veut accroître ses ressources fiscales, il ne peut le faire qu'en augmentant les impôts supportés par les ménages, puisque la taxe professionnelle est plafonnée à la moitié des bases.

Cela étant, je pense que, si Michel Charasse pouvait porter le seuil un peu faible de 50 000 euros à 100 000 euros, ce serait mieux. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Thierry Repentin. Il faudrait dix fois plus !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Pour ma part, je ne voterai pas cet amendement, car il manque de nuance.

M. Jégou a parlé de l'obligation alimentaire et cet amendement ne tient pas compte des familles qui l'auront versée pendant cinq ans, dix ans, quinze ans, voire vingt ans.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sans doute y a-t-il encore quelques nuances à apporter à la formulation de ce dispositif pour tenir compte de la suite pratique qui lui sera donnée s'il était adopté.

En attendant, je partage la suggestion de porter le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros.

M. Guy Fischer. Et même plus !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce montant plus raisonnable lèverait les craintes de M. Fischer, qui ne veut pas taxer les pauvres.

Il faudra que, dans les textes d'application, on fasse la distinction, au sein de l'APA, entre les mesures qui relèvent de l'hébergement et celles qui relèvent du domaine sanitaire, à savoir la prise en charge du handicap ou de la maladie. Si l'on peut dire que l'hébergement est l'équivalent de l'aide sociale, le domaine sanitaire ressortit à une autre logique, celle qui est liée à la création d'une cinquième branche.

Si Michel Charasse acceptait de relever le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros, je voterai son amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Je veux faire plusieurs observations.

Tout d'abord, je souhaite compléter le rapide historique tracé par M. Vasselle.

Souvenez-vous, mes chers collègues, le Sénat avait décidé que la PSD donnerait lieu à récupération sur succession dans le cadre de l'obligation alimentaire.

Le projet de loi relatif à l'APA, déposé à l'Assemblée nationale par M. Jospin, prévoyait initialement, lui aussi, la récupération sur succession.

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !

M. Michel Charasse. C'est au cours du débat à l'Assemblée nationale que, à la demande pressante du groupe communiste, dans le cadre de la bonne entente de l'Union de la gauche de l'époque (M. Vasselle s'esclaffe), M. Jospin a accepté de supprimer la récupération sur succession. Nous avons été un certain nombre ici à trouver immoral.

Je remercie Philippe Adnot de l'intervention qu'il vient de faire. Je me rappelle que, lorsque le projet de loi du gouvernement de M. Jospin a été examiné ici, la commission des affaires sociales avait proposé de se rallier au texte de l'Assemblée nationale. Nous avons été trois sénateurs - Philippe Adnot, Henri de Raincourt et moi-même - à déposer des amendements visant à revenir à la rédaction initiale. Nos trois amendements ont été mis au vote à main levée, et ils ont été rejetés trois fois à deux voix près.

M. Jean-Jacques Jégou. À l'époque, j'étais député et je n'ai pas non plus eu gain de cause !

M. Michel Charasse. Ensuite, puisqu'on supprime les droits de succession pour le plus grand nombre, c'est l'occasion d'éviter de faire payer le voisin pour les soins donnés au grand-père de ceux qui ont les moyens de payer et qui recevront les biens du défunt le jour où le malheur arrivera. Il ne faut tout de même pas exagérer !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !

M. Guy Fischer. Ce sont des biens modestes !

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est tout de même une belle somme !

M. Guy Fischer. Quand on voit le prix des maisons, qu'est-ce que 100 000 euros aujourd'hui ?

M. Michel Charasse. Mes chers collègues, je suis maire et président d'une association de maires. Nous sommes d'ailleurs un certain nombre ici dans la même situation.

Lorsque l'APA a remplacé la PSD, nous avons tous vu arriver des demandeurs avec un patrimoine plus que convenable qui avaient hésité à réclamer la prestation en raison de la récupération sur succession. Dans mon propre département, alors qu'il n'y a pas eu de Tchernobyl ou d'autres catastrophes, nous sommes passés d'un seul coup en un ou deux ans de 2 000 PSD à 8 000 APA : cherchez l'erreur !

À partir du moment où, à la suite de la réforme des droits de succession, la plupart des héritiers n'auront pratiquement plus rien à payer, il serait normal et juste de dispenser la collectivité de payer pour ceux qui ont un patrimoine d'une certaine valeur.

J'ai entendu ce qu'a dit M. Fischer. Mais, je le répète, et M. Vasselle peut le confirmer, il n'y a pas de plafond pour bénéficier de l'APA. Même les milliardaires y ont droit !

Si j'ai proposé le chiffre de 50 000 euros, c'est parce que c'est le seuil actuellement applicable aux récupérations sur succession en matière d'aide sociale départementale. Or, jamais personne, ni les communistes, ni mes amis socialistes, ni qui que ce soit d'autre, n'a proposé de relever cette somme qui s'applique tous les jours dans tous les départements.

Mais, comme nous sommes dans un processus de réflexion sur le financement de la dépendance, je suis prêt à accepter de relever le seuil à 100 000 euros. Bien entendu, le jour où nous arriverons à financer la dépendance par une cotisation, il n'y aura plus de récupération, puisqu'il ne s'agira plus d'aide sociale. L'essentiel est d'entrer dans un processus de normalisation de cette prestation.

Je vous le rappelle, mes chers collègues du groupe communiste, même le RMI est récupérable sur succession, et dans les mêmes conditions avec un seuil de 50 000 euros. Quand on a créé cette prestation, vous l'avez votée, et vous n'avez rien dit à ce sujet !

Monsieur le président, j'accepte donc de rectifier mon amendement en portant le seuil de 50 000 euros à 100 000 euros. Je souhaite que cette mesure soit la plus provisoire possible, qu'on arrive très vite à des règles de financement de l'APA sous forme d'un cinquième risque avec cotisation et qu'on dispense enfin les départements d'intervenir en cette matière.

M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° 122 rectifié, présenté par M. Charasse et ainsi libellé :

Après l'article 4, insérer un article additionnel rédigé comme suit :

L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « lorsque la valeur de l'actif successoral est inférieure à 100 000 euros. Cette somme varie chaque année comme l'inflation. »

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste comprend le souci de notre collègue Michel Charasse, qui est toujours très vigilant sur l'utilisation des deniers publics, que ce soit ceux de l'État ou ceux des collectivités territoriales.

Mais, cette nuit, nous avons voulu, par un amendement, supprimer l'article 4, qui a reçu le soutien de la majorité et tendait à légiférer en matière de droits de succession pour 4 % des assujettis. Là, cette disposition vise tout le monde !

M. Guy Fischer. Ce sont les 96 % restants qui les intéressent !

Mme Nicole Bricq. Nous ne pouvons donc pas nous déjuger en quelques heures.

M. Guy Fischer. Très bien !

Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur général, si vous avez été attentif à nos interventions, auxquelles vous n'avez pas répondu sur le fond, ...

M. Philippe Marini, rapporteur général. Au contraire !

Mme Nicole Bricq. ...vous vous êtes aperçu qu'il y là un vrai débat politique entre la gauche et la droite. Vous le savez, cette question est un marqueur politique et identitaire.

Hier soir, Charles Josselin a essayé de vous faire comprendre avec le coeur qui est le sien que, pour nous, ce point est fondamental. Nous ne pouvons donc nous renier.

Je fais appel à votre raisonnement, monsieur le rapporteur général, et pas uniquement sur le plan politique. Vous le savez, de votre côté, comme du nôtre, ce type de mesure a un fort effet psychologique.

Nous avons eu ce type de débat il y a quelques années quand nous avons mis en place l'APA. Quand je dis nous, je veux parler des socialistes et de nos collègues du groupe communiste, puisque nous étions dans la même majorité. Nous avons essayé de le régler du mieux possible en sachant que tout ce qui tourne autour des droits de succession a des effets psychologiques pour les catégories qui sont visées.

Pour rester cohérent avec la position que nous avons défendue cette nuit, le groupe socialiste votera contre l'amendement de M. Charasse.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Bricq, je ne peux pas vous laisser dire que cette mesure s'appliquerait soudainement à l'ensemble des successions. La moyenne des successions, c'est 100 00 euros, et la médiane est à 80 000 euros. Par conséquent, je ne peux pas vous laisser dire que tout le monde est visé.

Par ailleurs, M. le rapporteur général l'a souligné, on ne peut pas libérer de droits de succession la transmission du patrimoine ...

M. François Marc. Pour les 4 % les plus riches !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ... et, dans le même temps, exonérer les familles de leurs obligations alimentaires.

Il y a donc deux logiques. Pour notre part, nous devons aller au bout de celle que nous avons choisie cette nuit en votant l'allégement des droits de succession.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Michel Charasse. Courage fuyons !