dispositions de l'arrêté du 10 mai 2006 relatif au dépistage de l'ibr

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 12, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Anne-Marie Payet. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur les dispositions de l'arrêté du 10 mai 2006 fixant des mesures de dépistage obligatoire de la rhinotrachéite infectieuse bovine, communément appelée IBR.

J'avais déjà, au début de l'année, interpellé votre collègue M. Barnier sur ce dossier pour lui demander d'élargir le champ d'application de cet arrêté aux départements d'outre-mer. Dans sa réponse, il précisait qu'il fallait d'abord que 60 % des éleveurs établissent un programme ambitieux de lutte contre cette maladie. Il relevait aussi que le caractère endémique de la fièvre catarrhale ovine dans les départements d'outre-mer interdisait actuellement tout échange intracommunautaire de ruminants depuis ces départements. Or les échanges ne se font pas depuis les DOM, mais bien dans l'autre sens, et c'est cela qui m'inquiète.

La situation s'aggrave de jour en jour : ayant tout perdu, un nombre considérable d'éleveurs se trouvent en situation de grande détresse ; l'un d'eux s'est suicidé en mars dernier. Alors qu'ils comptaient hier parmi les meilleurs de la filière, leurs compétences sont aujourd'hui remises en cause. Comment, dans ces conditions, mettre en place un plan de lutte ? Ils sont ruinés, ils n'ont plus rien !

À ce jour, six affaires ont été portées devant les tribunaux pour que toute la lumière soit faite sur ce dossier et que les responsabilités des uns et des autres soient clairement établies. Le rapport d'expertise réalisé par les spécialistes de Maisons-Alfort pour l'une de ces affaires sera publié prochainement ; il est d'ores et déjà établi dans le prérapport que le cheptel examiné est malade et que la coopérative locale a manifestement livré à l'exploitant des animaux contaminés.

Madame la secrétaire d'État, cette situation ne peut plus durer. Les organismes professionnels se renvoient la balle ; je pense qu'ils n'ont pas joué leur rôle de contrôle lors de l'importation des animaux. Nous devons également nous interroger sur l'utilisation qui a été faite des fonds européens pour l'importation sur le sol réunionnais de bêtes que l'on savait contaminées.

Dans ce contexte, madame la secrétaire d'État, j'aimerais qu'une mission sénatoriale soit constituée afin de faire toute la lumière sur cet épineux dossier et de dresser l'état des lieux des maladies existantes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Madame la sénatrice, vous avez interrogé M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur l'exclusion des départements d'outre-mer du champ d'application de l'arrêté ministériel du 10 mai 2006 fixant des mesures de dépistage obligatoire de la rhinotrachéite infectieuse bovine. Le ministre est actuellement au conseil « agriculture » au Luxembourg et me demande de bien vouloir l'excuser.

Je voudrais tout d'abord rappeler que c'est l'application de l'article L. 224-1 du code rural qui permet de rendre obligatoires dans une aire géographique des mesures de prophylaxie dès lors que 60 % des cheptels ou des effectifs y sont déjà soumis, et que la prophylaxie de l'IBR a été généralisée en métropole, à l'exception de la Corse, par un arrêté du 27 novembre 2006.

La conduite depuis plusieurs années, par les groupements de défense sanitaire, d'un programme volontaire de maîtrise de cette maladie virale des bovins a abouti, au début de l'année 2006, à l'engagement de plus de 65 % des éleveurs de métropole dans le dispositif de lutte contre l'IBR, ce qui en a permis la généralisation au titre de l'article L. 224-1 du code rural.

Je crois utile de souligner que le programme obligatoire est totalement pris en charge par les professionnels et qu'aucune participation financière de l'État aux mesures de lutte contre l'IBR n'est prévue.

Les formes asymptomatiques de l'IBR sont prédominantes en métropole. Ce ne sont donc pas les manifestations cliniques de la maladie qui ont justifié le dispositif réglementaire récent. En effet, la généralisation de la prophylaxie de l'IBR visait avant tout à la reconnaissance du dispositif au niveau communautaire. Cette reconnaissance, qui impliquait de rendre obligatoires certaines mesures de prophylaxie, devrait, à terme, permettre aux éleveurs de métropole de bénéficier de garanties complémentaires lors d'échanges intracommunautaires de bovins vers des États membres voisins, comme l'Italie ou l'Allemagne, qui ont récemment obtenu de telles garanties.

En revanche, l'absence de programme volontaire collectif organisé de lutte contre l'IBR dans les départements d'outre-mer n'a pas permis de généraliser la prophylaxie de l'IBR dans ces départements. Par ailleurs, la recherche de garanties complémentaires aux échanges n'a pas d'intérêt évident pour ces départements compte tenu de l'absence actuelle de commerce de bovins vers les États membres.

Si l'IBR induit actuellement des pertes économiques dans certains élevages réunionnais, il appartient aux exploitants de s'engager dans un programme volontaire de maîtrise de cette affection avec l'appui de leur vétérinaire traitant. Des outils vaccinaux efficaces sont disponibles et permettent d'éviter les manifestations cliniques de la maladie.

Je tiens également à vous signaler qu'un soutien technique à l'assainissement des troupeaux infectés est offert par le groupement de défense sanitaire local aux éleveurs intéressés. À ce titre, il convient de souligner la mise en oeuvre prochaine d'un .programme de qualification des troupeaux indemnes d'IBR par l'Association pour la certification de la santé animale en élevage, l'ACERSA. Ce programme déjà en place en métropole permettra d'offrir des garanties sanitaires aux acheteurs de bovins.

Enfin, ce programme volontaire qui s'instaure progressivement ouvre la voie à une généralisation de mesures de prophylaxies adaptées au contexte local de l'Île de la Réunion. Cette généralisation pourra ainsi être instaurée par arrêté préfectoral dès lors que plus de 60 % des éleveurs réunionnais se seront engagés dans un plan de maîtrise de la maladie.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Madame la secrétaire d'État, j'ai bien compris votre réponse, mais ce que vous me dites aujourd'hui n'est pas très différent de ce que me disait M. Barnier à l'époque.

La plupart de ces éleveurs n'ont plus rien : ils sont ruinés ! Dès lors, comment établir un programme volontaire de lutte ?

Je souhaiterais que l'on établisse clairement les responsabilités des uns et des autres et qu'une mission sénatoriale soit constituée pour cela.

Ouverture du capital des sociétés d'exercice libéral

M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, auteur de la question n° 16, adressée à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

M. Dominique Leclerc. Madame la ministre, la Commission européenne a adressé à la France, le 12 décembre 2006, un avis motivé concernant les sociétés d'exercice libéral, les SEL, des professions de santé.

Cet avis motivé faisait suite à une plainte déposée auprès de la Commission le 11 janvier 2005, puis à une mise en demeure adressée à la France le 4 avril 2006 et restée sans réponse.

La Commission considère que la réglementation française des SEL constitue une entrave à la liberté d'établissement, prévue à l'article 43 du traité communautaire. Elle demande une ouverture totale du capital social de ces SEL et s'oppose aussi à la limitation des prises de participation dans ces mêmes SEL.

Cette position de la Commission remet en cause des dispositions fondamentales de la loi du 31 décembre 1990 applicable à toutes les professions libérales exerçant sous forme de société.

Actuellement, en France, les SEL exigent que le capital soit majoritairement détenu par des professionnels diplômés et qu'ils exercent effectivement leur profession au sein de ces structures.

Cette position de la Commission est très grave, car elle a pour conséquence de faire passer toutes les professions libérales, et particulièrement les professions de santé, sous le contrôle de groupes financiers, dont les objectifs sont essentiellement capitalistiques et, bien sûr, antinomiques avec l'exercice d'une profession libérale.

Dans le domaine de la santé, elle ne garantit de façon prioritaire la protection de la santé publique, la qualité du système de soins, la déontologie, la proximité des structures de santé et donc l'accès aux soins.

Elle favorise la création de réseaux diffus, difficilement contrôlables, et instaure surtout de nouveaux monopoles qui remettent en cause l'exercice du libre choix du patient et la libre concurrence entre les professionnels de santé.

Cette position va à l'encontre du principe d'indépendance professionnelle et financière qui est la clef de voûte de l'exercice en SEL des professions libérales de santé.

La Commission persiste à considérer la santé comme une prestation de service ordinaire alors que les services de santé ont été exclus de la dernière rédaction de la directive sur les services dans le marché intérieur.

L'article 152 du traité communautaire garantit le principe de subsidiarité dans l'organisation des services de santé des États membres.

À l'avis motivé de la Commission, le gouvernement français doit répondre en prenant en considération l'ensemble des professions libérales, en particulier les professions de santé.

C'est pourquoi, devant une situation aussi grave qu'incertaine, nous ne pouvons nous contenter d'attendre simplement la décision de la Commission.

De plus, il n'est pas concevable qu'un bouleversement aussi considérable se produise une fois de plus en catimini, sans que la représentation nationale soit informée de l'importance de l'enjeu, de sa gravité et sans l'organisation d'un débat, surtout au moment où il est question de revaloriser le rôle du Parlement. Il est toujours intéressant de parler des sucreries dans les écoles et de bien d'autres hochets, mais là encore ne soyons pas hypocrites.

Madame la ministre, premièrement, quelle est votre position au regard des dispositions européennes concernant l'organisation et le fonctionnement des structures libérales de soins ?

Deuxièmement, voulez-vous défendre le principe de subsidiarité dans l'organisation et le fonctionnement des professions libérales et des professions de santé ?

Troisièmement, le Gouvernement souhaite-t-il laisser les financiers capitalistiques mettre en coupe réglée les professions libérales et les professions de santé pour créer de nouveaux monopoles qui permettront, nous le savons tous, de sélectionner les professionnels et les patients ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, le Gouvernement, en concertation avec la profession, a effectivement répondu en février dernier à un avis motivé de la Commission européenne concernant les sociétés d'exercice libéral de biologistes. La Commission fait grief à la France de limiter à 25 % le capital pouvant être détenu dans les sociétés d'exercice libéral par des personnes physiques ou morales autres que les biologistes.

Or, la France - tel est aussi mon sentiment - considère que la législation et la réglementation en vigueur sont proportionnées à l'objectif de protection de la santé publique. Ces dispositions permettent de préserver l'indépendance de l'exercice des professionnels de santé et de faire respecter les principes déontologiques régissant cet exercice.

Comme vous le soulignez, une éventuelle ouverture du capital des sociétés d'exercice libéral concernerait l'ensemble des professions libérales qui, tels les pharmaciens d'officine, sont autorisées à exercer sous cette forme conformément à la loi du 31 décembre 1990.

C'est pourquoi, dans l'hypothèse où la Commission ne serait pas satisfaite par notre réponse, je demanderais alors à mes services d'organiser une concertation avec le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, ainsi qu'avec le ministère de la justice, compétents en cette matière.

Par ailleurs, je vous précise que la France a également répondu fin juin à une mise en demeure de la Commission européenne concernant certaines dispositions de la législation française relatives aux officines de pharmacie.

La Commission reprochait à la législation française de réserver la propriété des officines aux seuls pharmaciens, d'interdire à un pharmacien d'exploiter plus d'une officine et de prévoir l'incompatibilité entre l'exploitation d'une officine et l'exercice d'une autre profession.

De même, pour le contentieux relatif aux laboratoires, les autorités françaises ont insisté sur le fait que les restrictions à la liberté d'établissement identifiées par la Commission se justifiaient par une raison impérieuse d'intérêt général - en l'occurrence, la protection de la santé publique - et par des mesures légitimes et proportionnelles à la défense de cet intérêt général.

Je partage donc votre point de vue, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc.

M. Dominique Leclerc. Madame la ministre, j'ai eu connaissance de la position que vous avez prise récemment concernant les biologistes, mais mon propos s'étend non seulement aux professions de santé, mais aussi à l'ensemble des professions libérales.

Aujourd'hui, en matière de santé, les directives européennes visent à favoriser la libre circulation des patients et des professionnels dans un souci de qualité.

J'avais cru comprendre que les professionnels de santé étaient exclus de la directive sur les services, le principe de subsidiarité devant s'appliquer.

L'ouverture totale, telle qu'elle est demandée par certains, signifierait la disparition d'un des piliers de notre société, c'est-à-dire l'expression libérale pour certaines professions,...

M. Jean-Marc Pastor. C'est terrible !

M. Dominique Leclerc. ...qui, au travers des SEL, ont optimisé l'exercice professionnel, mais aussi le service rendu aux patients. On en connaît les avantages : proximité avec les patients, accès aux soins, meilleure gestion et adaptation aux réglementations de plus en plus contraignantes.

C'est pourquoi il est essentiel, pour préserver la qualité de l'offre de soins, d'exiger que seuls les professionnels diplômés puissent détenir majoritairement le capital des SEL dans le domaine de la santé.

Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

problèmes liés au rayonnement médical

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 20, adressée à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

M. Louis Souvet. Madame la ministre, je tiens à vous remercier d'être venue en personne répondre à nos questions. Ce n'est pas toujours le cas et nous y sommes sensibles.

M. le président. La présidence partage votre remarque, monsieur Souvet.

M. Louis Souvet. Cette question orale relative à la dosimétrie et aux bonnes pratiques en matière de rayonnement médical nous offre l'opportunité de faire coïncider deux problématiques.

D'une part, les accidents survenus en raison des rayonnements ionisants excessifs, d'erreurs d'identification, de déviation des faisceaux de rayonnement ne doivent plus se reproduire. Cela ne manquerait pas de susciter un sentiment d'insécurité alors même que ces thérapeutiques permettent à 180 000 patients de recevoir des soins via les trois cent cinquante-neuf accélérateurs dédiés à cet usage. Les besoins face à l'augmentation du nombre des tumeurs cancéreuses sont très importants. Il en découle un déficit au niveau des moyens humains. À titre d'illustration et selon l'Autorité de sûreté nucléaire, seuls 60 % des services en question disposent d'une personne spécialisée en radiophysique médicale. Ce chiffre résume, à lui seul, l'ampleur du problème.

Rien que pour l'hôpital de Belfort-Montbéliard, la direction du centre hospitalier recherche dix postes de manipulateurs radio. Pour l'heure, et comme en attestent les difficultés d'une telle procédure de recrutement, seuls quelques professionnels de la santé étrangers sont susceptibles d'occuper les postes en question, s'ils ne répondent pas dans l'intervalle de la procédure de recrutement à d'autres opportunités.

Reste alors la mise en place de solutions s'apparentant plus à des pis-aller qu'à une conception rationalisée d'une médecine moderne et performante, soit le recours à des étudiants stagiaires, soit à des équipes d'appui, donc composées de personnels par essence moins qualifiés, ne pouvant prendre en charge que les cas les plus légers.

D'autre part, - seconde problématique annoncée au début de mon propos - la Communauté de l'agglomération du pays de Montbéliard, que je préside, soutient financièrement ces recherches spécifiques, dans le cadre d'un projet pilote datant de 2004, visant à favoriser la radioprotection des habitants dans le pays de Montbéliard. Nous souhaitons renforcer un pôle de compétence spécifique dans ce domaine, par l'attribution d'allocations de recherche et de crédits de fonctionnement pour stimuler et pérenniser les coopérations existantes entre les laboratoires CREST/FEMTO-ST et LIFC, d'une part, et le service d'oncologie-radiothérapie du Dr Monnier, d'autre part. Par ailleurs, et toujours dans ce cadre dédié, il a été mis en place une licence professionnelle spécifique intitulée « Dosimétrie et radioprotection médicales ». Dans un rapport d'évaluation qui date de mars 2007, consacré aux différentes entités de l'institut FEMTO-ST - Franche-Comté électronique mécanique thermique et optique-sciences et technologies -, le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, faisait état du dynamisme et de la qualité des travaux de l'équipe IRMA - Interaction rayonnement matière - créé en 1993 par le professeur Libor Makovicka.

Je cite le rapport pour ne pas verser dans le registre de l'autosatisfaction, et pour rendre hommage au professeur Makovicka, qui le mérite amplement. L'équipe IRMA « n'a bénéficié d'aucun fondement historique, ce qui ne l'a pas empêchée de grandir très rapidement avec, en son sein, de jeunes chercheurs talentueux et ambitieux. La qualité de sa production répond parfaitement aux critères adoptés par la communauté scientifique dans ce secteur. [...] Basée à Montbéliard, dans le Nord-Franche-Comté, l'équipe IRMA a su développer des relations régionales, nationales et même internationales ».

Madame la ministre, comme je l'ai indiqué, c'est en raison de l'évolution de notre réalisation que la problématique nationale croise notre volonté montbéliardaise.

Certes, l'équipe IRMA est reconnue par des instances prestigieuses, participant par là même à la rédaction d'un ouvrage collectif sur la dosimétrie française, mais elle est « aux limites de ses possibilités », comme le souligne le rapport du CNRS. « Cette équipe ne peut se développer avec des moyens constants, car elle travaille déjà à flux tendu ». Elle ne pourra donc accepter de nouvelles sollicitations et d'autres contrats. Une nouvelle dynamique s'avère nécessaire dans l'intérêt de tous.

Puisque nous sommes dans le domaine de la physique, j'emploierai une image qui s'en inspire. Nous avons déjà mis en place un noyau stable avec la licence DORA. Les pouvoirs publics devront faire en sorte que ce noyau d'excellence puisse susciter un processus d'agrégation, selon le terme employé par une personne plus qualifiée que moi sur le plan scientifique, à savoir M. Jacques Lochard, président du Centre d'études sur l'évaluation de la protection dans le domaine du nucléaire.

Le noyau d'excellence est là, madame la ministre. À vous maintenant de faire en sorte qu'il puisse accroître sa masse, son attractivité, via toutes les options de recherche, toutes les évolutions possibles et futures liées à cette radioprotection. La collectivité nationale, si elle y participe, retirera des bénéfices certains de cette dynamique.

Votre ambition, madame la ministre, celle du Gouvernement, est de porter à 600 le nombre des physiciens médicaux en cinq ans. À l'heure actuelle, selon les personnels eux-mêmes, on en compte de 350 à 400. Il convient de se donner les moyens de concrétiser cette ambition ; tant l'Autorité de sûreté nucléaire, l'ASN, que l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l'IRSN, peuvent témoigner de la nécessité de s'appuyer sur des structures ayant déjà fait leurs preuves, notamment l'équipe IRMA.

Ce faisant, on conjuguerait les moyens nationaux avec l'expertise et le savoir-faire d'une telle structure. Le problème n'est pas spécifiquement national, puisque la presse s'est fait l'écho d'autres accidents à l'étranger. Soulignons à dessein que l'équipe IRMA ne se contente pas d'une expertise franco-française, mais échange sur ces sujets avec la Tchéquie ou l'Amérique du Sud, par exemple, et ce au niveau tant de la recherche que de l'enseignement. C'est ainsi qu'elle a acquis une renommée internationale dans les « codes de calcul ».

Madame la ministre, la présente question orale se situe dans le registre du « gagnant-gagnant ». Pour se développer et rester à son niveau d'excellence, l'IRMA doit disposer de moyens supplémentaires significatifs, moyens que la communauté d'agglomération du pays de Montbéliard, même avec la meilleure volonté du monde, ne peut réunir, car elle n'est qu'une collectivité locale, qui plus est une petite collectivité locale. Les pouvoirs publics pourraient, à bon escient, s'appuyer pour partie sur l'expertise accumulée localement par les chercheurs, en liaison avec les praticiens, tel le docteur Monnier, chef du service radiothérapie-oncologie du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, pour accorder les moyens supplémentaires ad hoc et faire évoluer qualitativement et quantitativement ce projet d'excellence, qui s'inscrit tout naturellement dans les objectifs gouvernementaux en matière de bonnes pratiques dans le domaine du rayonnement médical.

Je souhaite que les pouvoirs publics se tournent automatiquement vers l'expertise présente au sein des équipes coopérant dans le pays de Montbéliard lorsque se pose un problème dans le domaine de la dosimétrie.

Considérant l'appréciation du CNRS, que je tiens à votre disposition, madame la ministre, je vous demande de répondre favorablement à cette offre de coopération. Eu égard à l'importance du problème, rien ne doit être négligé pour le résoudre, car les personnes victimes des accidents et incidents en question, ainsi que leurs familles, attendent un signal fort des pouvoirs publics. Cette coopération future que j'appelle de mes voeux y est en tout cas totalement dédiée.

Je voudrais ajouter trois remarques pour votre réflexion personnelle. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Premièrement, dans le quart nord-est de la France, l'IRSN n'est pas présent, sauf à Dijon où un poste de l'autorité de sûreté nucléaire est installé.

En décembre 2006, nous avons eu un problème avec une entreprise de Morteau : un flacon de sels de radium, produit utilisé anciennement pour rendre les cadrans de montre phosphorescents, a été découvert par des lycéens. Une équipe a dû venir d'assez loin, mais c'eût été pire encore si l'accident s'était produit en Moselle ou en Alsace.

Or, dans le pays de Montbéliard, nous disposons de locaux parfaitement adaptés, d'une superficie de 50 à 7 000 mètres carrés, qui nous permettraient d'accueillir soit une petite équipe de l'IRSN, soit des pans entiers de ce prestigieux organisme.

M. Jean-Marc Pastor. On viendra ! (Sourires.)

M. Louis Souvet. Deuxièmement, je souhaite insister sur le manque de diplômes sanctionnant la formation aux métiers de la radioprotection médicale. En effet, avant d'exercer, le pharmacien, qui délivre des prescriptions dans le cadre d'une ordonnance médicale, tout comme l'infirmière, a suivi des études. Or, en matière de radioprotection, combien d'établissements de formation existe-t-il ? Combien de diplômes préparent et sanctionnent les études de radiophysicien ? Quelles études portent sur l'optimisation des doses ? Pourtant, ces radiophysiciens ne sont-ils pas les pharmaciens de la dose ou de la dosimétrie ? Et cependant, nous en manquons vraiment.

La communauté d'agglomération que je préside est prête, si vous voulez bien l'y aider, madame la ministre, à prendre en charge cette avancée. On nous objecte qu'il s'agirait d'en faire un métier, une corporation, et que cela entraînerait encore des actes médicaux supplémentaires. Est-ce bien sérieux ?

Troisièmement enfin, songez, madame la ministre, aux souffrances humaines et au coût d'un accident semblable à ceux que nous avons connus, par rapport à celui d'une formation. Si un accident est bien évidemment toujours possible, les risques sont réduits si le personnel est bien formé. Ce sujet tragique est d'actualité, et les Français attendent un geste fort de votre part.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Il ne faudrait pas, monsieur le président, que la longueur de l'intervention de M. Souvet entraîne une réduction de mon temps de parole, car les questions soulevées sont nombreuses ! (Sourires.)

Monsieur le sénateur, vous me demandez si j'ai pris conscience du problème que vous évoquez. Permettez-moi de vous dire que, dès ma prise de fonctions, j'ai été confrontée aux accidents de radiothérapie qui se sont produits aux centres hospitaliers d'Epinal et de Toulouse-Rangueil, ainsi qu'à un dysfonctionnement d'un type d'appareil de radiothérapie stéréotaxique Brainlab installé à Paris, à Nancy, à Montpellier et à Tours. J'ai immédiatement considéré que la radiothérapie était confrontée à une crise systémique.

Je profite d'ailleurs de cette question orale pour dire que la radiothérapie est une filière thérapeutique absolument indispensable au traitement de nombreux cancers. Il convient donc de restaurer la confiance des malades dans ce domaine.

J'avais alors demandé au président de l'INCa, l'Institut national du cancer, le professeur Dominique Maraninchi, de me remettre de façon anticipée, dès le vendredi 29 juin, un point d'étape sur les travaux menés par les cinq missions mises en place en mars dernier.

J'ai relégitimé ces cinq missions, en insistant sur l'importance que j'attache à la situation démographique des professionnels de la radiothérapie, au haut niveau de compétences requis, ainsi qu'aux modalités pratiques de tous les nouveaux matériels de radiothérapie. Par ailleurs, je serai également ferme sur les niveaux de formation, de compétence et de responsabilité des professionnels qui réalisent la radiothérapie.

L'objectif est de sécuriser les pratiques, d'assurer la qualité des soins et d'être particulièrement vigilant sur les incidents indésirables.

Les professionnels qui réalisent les calculs dosimétriques assurant aux patients efficacité et sécurité des irradiations prescrites sont principalement, comme vous l'avez indiqué, monsieur Souvet, des radiophysiciens, aidés en tant que de besoin par des manipulateurs en électroradiologie.

Dès juin 2007, j'ai annoncé que le nombre de radiophysiciens passerait de 300 à 600 en cinq ans, en augmentant les capacités de formation théorique et pratique et en mettant en place des contrats emploi formation.

Quant aux manipulateurs en radiothérapie, soignants qui contribuent à la prise en charge globale des patients, une réflexion est en cours sur la valorisation et l'attractivité de leur métier.

L'IRMA du pays de Montbéliard a mis au point un diplôme de dosimétriste, mais, aujourd'hui, la dosimétrie n'est pas reconnue comme une qualification, et l'emploi de dosimétriste n'existe pas en tant que tel à l'hôpital. Cette question a été examinée par un groupe de travail sur les mesures nationales pour la radiothérapie, dont les propositions m'ont été remises à la fin du mois d'août par le président de l'INCa. Ces mesures sont en cours de parachèvement, et je les annoncerai dès que la représentation nationale aura adopté le projet de budget.

Monsieur le sénateur, votre question ouvre une réflexion plus large sur les métiers de l'hôpital, qui sont en pleine évolution, avec de nouveaux métiers à créer.

À cet égard, la reconnaissance d'un grade LMD - licence, master, doctorat - que j'ai souhaité lancer pour les formations des quatorze professions paramédicales, notamment le métier d'infirmière, et une profession médicale, celle de sage-femme, ne doit pas simplement faire l'objet d'un décret ; elle doit nous conduire à réfléchir tous ensemble sur l'évolution des métiers de l'hôpital, car celui-ci est en pleine mutation. La mission sur l'hôpital public confiée à votre collègue Gérard Larcher devra aborder toutes ces questions.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, de mon extrême vigilance sur ces questions de radiothérapie, sur la qualité des soins et sur l'aide qu'il convient d'apporter aux victimes. À cet égard, j'ai reçu les représentants de l'Association vosgienne des surirradiés de l'hôpital d'Epinal, que je soutiens activement. Bien entendu, l'IRMA du pays de Montbéliard aura toute sa place dans la réflexion sur l'évolution de ces métiers.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Mon exposé liminaire ayant été relativement long (Sourires sur les travées du groupe socialiste.), je me limiterai à remercier Mme la ministre. Je serais extrêmement heureux qu'une rencontre puisse être organisée entre les services de son ministère et les miens en vue de la mise au point d'un programme plus élaboré.