M. le président. Très bien !

M. Charles Guené, rapporteur spécial. Je rappellerai principalement que nos préconisations invitent à rationaliser et à parfaire la gestion de nos interventions dans ce domaine, notamment afin de préserver l'image de notre pays à l'étranger. Nous avons évoqué pour ce faire plusieurs pistes, parmi lesquelles je citerai la création, à l'instar d'autres pays, d'une fondation ou d'un établissement public chargé des lieux de mémoire liés aux combats de la nation.

Je tiens à vous témoigner, monsieur le secrétaire d'État, la satisfaction que m'inspirent, parmi les éléments nous montrant la voie à suivre, vos initiatives pour réhabiliter la mémoire et la reconstruire. Je pense ainsi aux réflexions sur les commémorations que vous avez confiées au professeur Jean-Jacques Becker et à André Kaspi, sur le sens à leur donner, pour le premier, et sur leur devenir, pour le second. Je suis tout aussi sensible à l'affectation de correspondants de mémoire dans chaque département, en souhaitant qu'une solution soit trouvée aux problèmes de rééquilibrage des catégories de personnels de votre administration afin que leur installation puisse s'achever.

Les initiatives du Président de la République, au regard de l'histoire, de la Résistance et, tout dernièrement, du 11 Novembre, sont pour le monde combattant des signes plus qu'encourageants.

Il faut cependant continuer à se projeter vers l'avenir. La conclusion de mon propos portera donc sur la prospective et la refondation.

La prospective est nécessaire pour reformater ce budget dans le temps, pour mieux doser les efforts et définir les objectifs d'indemnisation. À cet égard, il est impératif que la mission soit reconsidérée au regard de la LOLF.

À l'heure où les membres du contingent de 39-45 s'amenuisent et où la génération des anciens combattants d'Afrique du Nord s'impose, il importe de redonner à la mémoire un sens plus contemporain.

Enfin, il convient de porter déjà un regard vers les OPEX pour faire le lien intergénérationnel, qui s'imposera demain.

Il me reste à présenter l'article 41 quater rattaché à la mission, adopté à l'Assemblée nationale sur votre initiative, monsieur le secrétaire d'État, qui vise à fixer à 39 points au lieu de 37 l'indice de référence de la retraite du combattant, et ce à compter du 1er juillet 2008. Cette décision, dont le coût pour 2008 est estimé à 12 millions d'euros, n'implique aucune augmentation de crédits dans le présent projet de loi de finances dans la mesure où son financement sera assuré par redistribution de crédits. Je ne peux qu'approuver cette initiative, qui vient renforcer l'orientation prise en 2006 et 2007.

En conclusion de ces observations, je vous propose donc, mes chers collègues, conformément à l'avis de la commission des finances, d'adopter sans modification les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », et l'article rattaché 41 quater. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, rapporteur pour avis de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », j'ai l'honneur de vous présenter la synthèse des réflexions et des remarques de la commission des affaires sociales.

Parmi les trente-deux missions de la LOLF, celle qui concerne les anciens combattants arrive en treizième position, avec un budget de 3,370 milliards d'euros. Du fait de la disparition progressive mais inéluctable de nos combattants, ce budget, qui pourrait paraître en régression de 1,69 %, est en réalité en augmentation de 3,27 %.

L'ensemble du monde combattant, représenté par quelque 7 000 associations - dont 400 d'envergure nationale -, a d'ailleurs très bien compris l'écoute, l'intérêt et le respect que, tous, nous avons pour eux, pour les privations, les souffrances et les blessures qu'ils ont subies, mais aussi pour les libertés qu'ils ont gagnées pour nous.

Malgré les contraintes qui pèsent sur le budget de la France - nous les connaissons tous -, les actions menées en faveur du monde combattant, qui s'étaient endormies pendant près de trente ans, ont été ravivées dès 2002.

Vous avez souhaité, monsieur le secrétaire d'État, amplifier ce rattrapage amorcé en 2002 et conforter des avancées telles que la décristallisation, l'augmentation de 2 points supplémentaires de la retraite du combattant, le dédommagement des orphelins des victimes des actes de barbarie, l'augmentation uniforme des pensions de veuves, la hausse du plafond majorable de la rente viagère, l'attribution plus large de la carte du combattant, les soins aux grands mutilés, etc.

Nous avons remarqué que la dotation moyenne par ressortissant du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est passée de 7 830 euros en 2002 à 9 154 euros en 2008.

Toutefois, la commission des affaires sociales a surtout été sensible au rôle social grandissant de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l'ONAC, qui s'est vu lui aussi conforté dans ses missions ces dernières années. Nous avons mesuré le travail important qui lui est dévolu, notamment pour les dotations de l'allocation différentielle et les secours ponctuels à apporter aux conjoints en difficulté.

À ce sujet, nous avions souhaité que le plafond de l'allocation différentielle fût relevé de 550 à 681 euros : nos collègues députés ont obtenu l'assurance que cette mesure sera appliquée de façon rétroactive à compter du 1er août 2007.

Nous souhaiterions également que les fonds afférents aux crédits sociaux et ceux qui sont prévus pour l'allocation différentielle ne fussent pas confondus. Il y aurait une plus grande transparence s'ils apparaissaient sur deux lignes différentes dans la dotation de 18,6 millions d'euros qui est allouée.

L'ONAC a dans ses missions la charge et la gestion de neuf maisons de retraite et de neuf écoles de reconversion professionnelle. Ces dernières accueillent des jeunes en difficulté d'insertion et leur proposent un tutorat d'accompagnement, qui est un véritable parrainage, accompli par des anciens combattants bénévoles qui font profiter les jeunes de leur savoir et de leur expérience professionnelle.

L'ONAC est l'un des rares établissements publics qui associe les usagers à sa gestion et qui ait une réelle demande de modernisation, avec un contrat d'objectif et de moyens, pour optimiser ses missions et assurer la plénitude du rôle social qui lui est dévolu.

J'ai surtout parlé de « social », et c'est mon rôle, mais les anciens combattants ont bien sûr d'autres demandes et d'autres dossiers en attente ou en cours d'instruction, notamment le problème de la campagne double, le relèvement des rentes mutualistes, les soucis des RAD et des KHD, etc.

Pour lire un grand nombre de leurs publications, pour les rencontrer souvent, je sais qu'ils ont surtout soif de reconnaissance et qu'ils veulent continuer à compter dans la vie des Français.

Comme vient de le faire mon collègue Charles Guené, je me permets d'insister sur la politique de mémoire que nous avons à ériger comme un devoir vis-à-vis d'eux et de ce que nous leur devons.

Si, pour la plupart d'entre nous, les guerres du xxe siècle sont encore très présentes à l'esprit, nous avons l'impérieux devoir de faire connaître à la jeunesse de notre pays les sacrifices de ceux qui se sont battus pour préserver nos libertés.

Nous apprécions que le Gouvernement veuille donner un lustre particulier à la célébration, le 11 novembre prochain, du 90e anniversaire de l'armistice de 1918. Là encore, nous aimerions qu'un crédit bien ciblé apparaisse dans la dotation de 8,9 millions d'euros prévue pour la politique de mémoire. Ce serait un symbole fort. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous donner des assurances à ce sujet ?

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la commission des affaires sociales s'est prononcée en faveur de l'adoption des crédits pour 2008 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

Je conclurai mon propos avec une phrase relevée dans une publication d'anciens combattants : « Entre le passé où sont nos souvenirs et l'avenir limité où sont nos espérances, nous devons accorder une place au présent où sont nos devoirs. » (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Gisèle Printz.

Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi, avant d'ouvrir le débat, de saluer les nombreux représentants des associations d'anciens combattants présents dans la tribune.

Le budget des anciens combattants appelle de ma part et de celle du groupe socialiste des observations générales et des remarques sur des points particuliers qui sont à mes yeux au coeur de ce que la nation doit au monde combattant.

Les observations générales concernent d'abord le volume des crédits consacrés à ce budget. Je condamne le choix du Gouvernement qui, cette année encore, baisse ce budget de 60 millions d'euros.

Les arguments avancés par le secrétaire d'État et les rapporteurs de la majorité nous sont connus. Ils ne sont pas pertinents. La baisse du budget est simplement la conséquence de choix idéologiques : 15 milliards d'euros de baisse d'impôts ont été accordés aux contribuables les plus favorisés. Pour quel résultat, sinon celui de creuser un peu plus les inégalités ? Une toute petite part de ces 15 milliards d'euros aurait permis de donner une réponse positive aux principales revendications du monde combattant.

Ces combattants qui ont servi la France, répondant à l'appel de la nation, ne sont pas des quémandeurs. Nous connaissons leur courage, leur esprit de sacrifice et leur abnégation. C'est pourquoi le Gouvernement et le Parlement ont pour devoir de prendre en charge le droit à réparation que le pays tout entier leur reconnaît depuis 1918.

Je salue ici, au nom du groupe socialiste, le formidable travail accompli au quotidien par celles et ceux qui, au travers des associations, défendent les intérêts moraux et matériels de leurs adhérents et mènent auprès des jeunes un travail pédagogique autour du devoir de mémoire. Nous leur devons respect et reconnaissance.

Dans la deuxième partie de mon intervention, j'évoquerai un certain nombre de dossiers qui me tiennent particulièrement à coeur.

S'agissant tout d'abord de la retraite du combattant, le Gouvernement a finalement accepté un amendement déposé à l'Assemblée nationale augmentant cette pension de deux points, la faisant passer de 37 points à 39 points d'indice. Nous constatons que cette mesure prendra effet au 1er juillet 2008, ce que nous contestons vivement. C'est pourquoi nous avons déposé un amendement prévoyant le 1er janvier 2008 comme date d'application.

Dans le même esprit, nous revendiquons une juste indexation des pensions militaires d'invalidité, qui ne devrait pas être inférieure à l'indice du coût de la vie. Or, depuis 2002, la perte de pouvoir d'achat de la pension est de 6 %.

Nous souhaitons que la question de la campagne double trouve enfin une solution positive.

La reconnaissance de la guerre d'Algérie, à l'unanimité de la représentation nationale, conduit logiquement à reconnaître à ces anciens combattants les mêmes droits qu'aux autres générations du feu.

En ce qui concerne la rente mutualiste, nous considérons que c'est un dossier qui appelle un suivi régulier et que le plafond de la rente doit être relevé à l'indice 130. Le Gouvernement ne l'a pas décidé, mais nous pensons que cette mesure permettrait d'achever le rattrapage auquel le Président de la République s'est engagé pendant la campagne présidentielle. Un amendement a été déposé en ce sens.

S'agissant des orphelins de guerre, victimes de la barbarie et de l'agression nazie, les dispositifs existants doivent être complétés. Le pays doit aller au bout de la logique qui a été engagée par le décret du 1er juillet 2000. Certes, il y a encore du chemin à parcourir, mais il faut s'y engager, c'est une question d'équité. Les sentiments d'injustice et de frustration qui hantent l'esprit des orphelins sont trop forts pour être ignorés plus longtemps.

Je souhaite évoquer maintenant un dossier qu'il est impossible de laisser en l'état, celui des veuves d'anciens combattants les plus démunies, notamment des veuves d'agriculteurs, d'artisans, de commerçants, et les veuves de salariés longtemps payés au SMIC. Certaines vont même devoir payer maintenant la redevance audiovisuelle dont elles étaient exonérées jusqu'à présent.

Ces veuves vont grossir le flot des personnes en très grande difficulté et beaucoup vivent dans une très grande précarité.

L'an dernier, le Parlement a voté la création d'une allocation différentielle de solidarité pour les veuves disposant de ressources inférieures à 550 euros par mois. Votre prédécesseur ne l'ayant pas fait, vous avez publié tardivement les textes d'application, mais avec des critères trop stricts. Dès lors, peu de dossiers ont été retenus. Dans mon département, la Moselle, sur une dizaine de dossiers déposés, aucun n'a été retenu.

Cette année, devant l'Assemblée nationale, vous avez annoncé que le plafond de 550 euros serait porté à 681 euros. Mais, monsieur le secrétaire d'État, 681 euros, c'est le seuil de pauvreté ! Ainsi, vous maintenez ces veuves dans une situation inadmissible. Nous vous demandons donc de relever le plafond de ressources au niveau du minimum vieillesse, soit 800 euros. Un amendement a été déposé en ce sens.

Par ailleurs, il est indispensable que les critères d'attribution de l'allocation soient revus pour permettre au plus grand nombre de veuves d'en bénéficier.

Bien que nous fassions totalement confiance aux représentants des anciens combattants au sein des structures de l'ONAC pour gérer au mieux cette allocation différentielle, il serait plus conforme à la LOLF que les crédits fassent l'objet d'un article distinct de la loi de finances.

Je conclurai, monsieur le secrétaire d'État, en évoquant le destin tragique des anciens membres des unités RAD-KHD, des hommes et des femmes d'Alsace-Moselle incorporés de force dans des organisations paramilitaires allemandes et qui ne sont toujours pas indemnisés.

Une partie de ping-pong s'est engagée depuis trop longtemps entre l'État et la fondation « Entente franco-allemande », qui dispose des ressources nécessaires pour financer une juste indemnité. De deux choses l'une : ou bien l'État paie ou bien l'État fait payer la fondation. Une troisième voie est encore possible, celle d'un partage entre l'État et la fondation. Il ne faut pas laisser le temps faire son oeuvre à la place de la responsabilité politique.

Je vous serais très reconnaissante, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir me faire connaître votre position et si vous avez engagé des pourparlers avec la fondation.

Je terminerai par une question concernant les « malgré- nous », ces Alsaciens-Mosellans anciens prisonniers des camps soviétiques et pour qui existe une discrimination selon le lieu d'implantation des camps dans lesquels ils se trouvaient. En effet, seuls ceux qui étaient situés à l'est de la frontière germano-russe de 1941, matérialisée par le fleuve Bug et nommée « ligne Curzon », ont été pris en compte, contrairement à ceux qui étaient dans les camps situés à l'ouest de cette ligne. Que comptez-vous faire pour eux, monsieur le secrétaire d'État, afin de pallier cette différence de traitement ?

Par ailleurs, sur ce même sujet, dans le cadre de votre politique de mémoire, nous souhaitons que le vécu et les souffrances endurées par les Alsaciens-Mosellans durant la période de l'annexion fassent partie intégrante de l'histoire de notre pays et soient enseignés comme tels dans les écoles.

Il reste encore un point non réglé à ce jour et sur lequel M. Sarkozy s'est engagé lors de la campagne présidentielle, c'est l'attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires du Service du travail obligatoire, le STO : « il est temps que notre pays reconnaisse enfin aux réfractaires leur droit imprescriptible à réparation en leur attribuant le titre de reconnaissance de la nation », a-t-il dit. Que pensez-vous faire à ce sujet, monsieur le secrétaire d'État ?

En conclusion, le Gouvernement ayant fait le choix de favoriser par sa politique fiscale les plus privilégiés de nos concitoyens, au détriment de ce qui aurait pu et dû être fait pour les anciens combattants par justice, respect et reconnaissance, il est impossible au groupe socialiste de voter votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2008 s'inscrit, cette année encore, dans le contexte de maîtrise de la dépense publique, fixée par le Président de la République et mise en oeuvre par le Gouvernement. Cela explique la raison de la légère diminution des crédits réservés à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » de 1,9 %.

Ce budget reste néanmoins tout à fait satisfaisant puisqu'il marque la poursuite des efforts engagés, en 2006 et 2007, dans le domaine de la réparation, de la solidarité et de la mémoire.

Il s'agit, notamment, de l'achèvement du processus de décristallisation des pensions. Les crédits dégagés en 2007 sont reconduits et augmentés de 24 millions d'euros, afin de prendre en charge la réouverture du dispositif à près de 3800 veuves, la consolidation du relèvement du plafond des rentes mutualistes à 125 points d'indice de pension militaire d'invalidité - avec une augmentation de la dotation correspondante de 4,17 % -, l'accroissement des crédits de l'ONAC ou l'augmentation des points d'indice de la retraite du combattant.

Au total, et à périmètre constant, la dotation moyenne par pensionné augmente de 3,27 % par rapport à 2007, témoignant de l'attention que le Gouvernement porte au monde combattant et au devoir de réparation.

Après une première augmentation de deux points d'indice PMI - pension militaire d'invalidité - au 1er juillet 2006, la retraite du combattant a été de nouveau revalorisée au 1er janvier 2007 de deux points. Néanmoins, le Gouvernement a tenu à faire un effort supplémentaire, cette année encore, en proposant, par voie d'amendement lors de l'examen de ce budget à l'Assemblée nationale, le 8 novembre dernier, une troisième augmentation consécutive de deux points d'indice à compter du 1er juillet 2008 ; je sais combien nos deux rapporteurs y étaient particulièrement attachés.

Après une longue phase de stagnation de 1978 à 2005, la retraite du combattant vient donc de connaître une revalorisation importante de six points en trois ans, pour atteindre 39 points, avec un objectif de 48 points dans les perspectives budgétaires, objectif sur lequel le Président de la République s'est engagé en réponse aux attentes des associations.

Ce budget pour 2008 permet également de renforcer les droits liés aux pensions militaires d'invalidité, avec notamment la consolidation des crédits destinés à la prise en charge d'appareillages de qualité pour les anciens combattants mutilés et invalides ou blessés. Il prévoit également l'inscription d'une dotation spéciale pour les rentes mutualistes.

Par ailleurs, la place de l'ONAC est renforcée. Ses crédits sociaux poursuivent leur hausse, afin de répondre aux besoins des anciens combattants en difficulté et de leurs veuves âgées ; une hausse des crédits d'action sociale de 32 % est prévue, liée notamment au financement de l'allocation différentielle en faveur des conjoints survivants.

Le seuil des ressources de référence est porté pour 2008 de 550 euros à 680 euros, ce qui permet de couvrir un nombre plus important de situations. Une dotation de 5 millions d'euros est prévue à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2008.

Autre gage de pérennité, l'année 2008 sera celle de l'adoption d'un nouveau contrat d'objectifs et de moyens pour l'Office qui fixera, jusqu'en 2013, le cap des principales orientations. Dans cet objectif, les crédits destinés à I'ONAC augmentent en 2008 de manière significative, puisqu'il s'agit de 7,7 %.

L'Institution nationale des invalides voit, elle aussi, sa subvention en augmentation de 0,8 million d'euros. Elle pourra ainsi poursuivre non seulement la politique d'amélioration des soins entreprise depuis plusieurs années, mais aussi le programme de modernisation de son organisation administrative et développer davantage encore son expertise dans l'évaluation et la prise en charge du grand handicap.

Par ailleurs, l'année 2008 verra également - et nous nous en réjouissons - la création de la fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc, pour laquelle est inscrite une dotation en capital de 3 millions d'euros.

Enfin, je voudrais appeler l'attention du Gouvernement sur la situation des orphelins de guerre.

S'il faut se féliciter de la bonne application des dispositifs prévus pour l'indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, il est regrettable que ces droits ne soient pas étendus aux autres orphelins de victimes de la barbarie nazie. En 2004, nous avons obtenu, avec nos collègues, que l'indemnisation soit ouverte aux orphelins dont les parents sont morts en déportation, fusillés ou massacrés pour des actes de résistance ou des faits politiques.

Cela étant, au motif que leurs parents sont morts les armes à la main pour rétablir la liberté et la République, sans avoir été pour autant arrêtés ou fusillés, certaines personnes restent encore exclues du dispositif d'indemnisation. Il est temps aujourd'hui de réparer cette injustice.

C'est pourquoi nous vous demandons, monsieur le secrétaire d'État, d'étendre l'indemnisation à tous ceux dont les parents ont été victimes de la barbarie nazie, quelles que soient les conditions de leur mort. Nous sommes bien conscients qu'il faut attendre les conclusions de la mission confiée au préfet Audouin sur l'évaluation des décrets de 2000 et 2004.

Vous avez précisé à l'Assemblée nationale qu'à la suite des conclusions de cette mission la commission de suivi se réunira au début de l'été 2008 et que la traduction budgétaire des mesures envisagées ne posera aucun problème. (M. le secrétaire d'État acquiesce.) C'est très rare d'entendre un membre du Gouvernement faire de telles affirmations, et nous vous en remercions. Cette réponse nous permet d'espérer la traduction budgétaire de ces mesures d'indemnisation pour 2009.

En attendant, puisque vous attachez, comme nous tous et peut-être même plus que certains d'entre nous, une très grande importance au devoir de mémoire, nous vous demandons de bien vouloir accepter de retenir la mention « mort pour la France » sur les actes de décès des résistants et victimes de la barbarie nazie.

Les enfants de résistants massacrés entre 1940 et 1945 ont pris conscience qu'on avait oublié le sacrifice de leurs parents, morts sous la torture dans les prisons ou dans les camps de concentration, morts lors des combats ou lors des opérations de déminage pour libérer les routes empruntées par les armées alliées. Il ne doit pas y avoir d'iniquités dans le devoir de mémoire, surtout s'agissant des résistants auxquels nous devons une reconnaissance éternelle. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, d'accueillir cette requête avec, je l'espère, la plus grande bienveillance.

Respectueux des attentes du monde combattant comme des engagements du Président de la République, ce budget nous paraît tout à fait satisfaisant. C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues du groupe UMP, nous voterons les crédits réservés à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

Nous tenons particulièrement à remercier le Président de la République et le Premier ministre, qui ont souhaité pérenniser le secrétariat d'État aux anciens combattants. Une nation ne saurait mieux exprimer l'importance qu'elle attache à ceux qui ont combattu pour elle. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d'État, vous nous présentez un budget qui ne comportait à l'origine aucune mesure nouvelle. Ce n'est que sous la pression des associations d'anciens combattants, nombreuses, et que je salue ici, que deux mesures ont été adoptées.

Ce budget enregistre une diminution systématique et récurrente, de 1,69 % cette année, le fameux argument de la baisse démographique nous étant servi comme à l'accoutumée.

Le dépôt d'amendements devient la règle, ainsi que - j'ose employer le terme, mais n'y voyez aucun mal, monsieur le secrétaire d'État ! - la « supercherie » consistant à faire « glisser » en partie les crédits d'une année sur l'autre.

Dans le projet de loi de finances pour 2006, M. Mekachera « lâchait » deux points pour la retraite du combattant, tout en proposant que cette mesure ne soit applicable qu'à partir du mois de juillet. Or, lorsque nous votons un budget, la plupart de nos concitoyens pensent que les mesures prévues sont applicables dès le 1er janvier suivant.

L'année 2007, année électorale, fut l'exception : la hausse prévue s'appliqua au 1er janvier.

L'an dernier, c'est par amendement que le Gouvernement nous avait proposé la création, au 1er juillet, de l'allocation différentielle de solidarité servie aux conjoints survivants, mais le plafond de ressources est si bas que quelques dizaines de bénéficiaires seulement la perçoivent.

Cette année, la bonne surprise ne sera malheureusement pas au rendez-vous ! On change de président, mais pas de politique. Alors, quoi de neuf, me direz-vous ? Quid des promesses du candidat, puis du président Nicolas Sarkozy en faveur du monde combattant ?

Les anciens combattants attendent la réalisation de ces promesses. Or force est de constater qu'aucune mesure concrète ne figure dans ce budget, hormis quelques velléités. Mais ce ne sont là que quelques pincées de sel ! En revanche, 15 milliards de cadeaux fiscaux ont été distribués dès le mois de juillet aux plus riches !

Au demeurant, vous reprenez d'une main ce que vous donnez parcimonieusement de l'autre. N'oublions pas, en effet, que les anciens combattants et leurs veuves subiront, comme tous les Français, même si ce n'est que partiellement, les franchises médicales ! Mme Bachelot-Narquin me l'a dit ici même récemment : ils n'en seront exonérés que pour les affections portées sur leur carnet de soins. Avouez que c'est indigne !

De plus, comme toutes les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans, ils subiront, en 2008, la suppression de l'exonération de la redevance audiovisuelle, alors que, compte tenu des réactions qu'elle suscite, cette mesure pourrait être mise en oeuvre progressivement sur trois ans.

Je me permets également de rappeler que l'octroi d'un point supplémentaire pour la retraite du combattant, soit 13,38 euros par bénéficiaire et par an, équivaut, en année pleine, à un coût total de 20 millions d'euros. Si l'on met ce chiffre en parallèle avec les 15 milliards de cadeaux fiscaux votés dans la loi TEPA de juillet dernier, accordés aux ménages les plus aisés, nous sommes en pleine indécence !

Entre un budget initial sans proposition nouvelle et les maigres avancées issues du débat à l'Assemblée nationale, suivant le processus que je viens de décrire, vous ne nous présentez finalement, comme mesure nouvelle, monsieur le secrétaire d'État, qu'une hausse de deux points de la retraite du combattant au 1er juillet 2008, et ce sous la pression du monde combattant et de ses associations ! Mais comme vous avez consenti un effort à l'Assemblée nationale, peut-être allez-vous aujourd'hui créer la surprise en nous faisant une proposition que tout le monde pourrait accueillir favorablement ! (Sourires.)

Certes, vous mettez en oeuvre la disposition prévue dans la loi de finances de 2007 créant l'allocation différentielle pour les conjoints survivants, dont le coût, en année pleine, s'élève à 4,5 millions d'euros, qui s'ajoutent aux 500 000 euros non consommés de l'année dernière. Mais vous savez pertinemment que cette mesure s'est révélée quasiment inopérante avec un plafond de ressources de 550 euros, que vous avez dû porter, y compris sous la pression de vos amis politiques, à 681 euros, le seuil de pauvreté INSEE le plus bas des deux qui coexistent, avec un effet rétroactif au 1er août 2007 qui ne vous coûtera pas cher.

Par ailleurs, cette disposition reste agglomérée aux crédits sociaux de l'ONAC, contre l'avis de la quasi-totalité de vos interlocuteurs. Je vous demande donc de « sortir » les conjoints survivants d'un système que l'on pourrait qualifier d'« assistanat » : une véritable ligne budgétaire doit être créée pour différencier la mesure et garantir sa pérennité. Il convient également d'extraire au moins l'allocation personnalisée d'autonomie, qui est une prestation en nature, des revenus retenus pour fixer le plafond, ainsi que les loyers et aides au logement, qui ne sont pas pris en compte par l'ONAC pour l'aide sociale.

Monsieur le secrétaire d'État, si vous fixiez ce plafond à 817 euros, le seuil de pauvreté calculé au niveau européen, cela serait plus juste !

Par ailleurs, vous ne prévoyez pas de relever le plafond majorable de la retraite mutualiste des anciens combattants. Vus ne prévoyez rien pour la campagne double. Vous refusez d'abaisser de soixante-quinze ans à soixante-dix ans le bénéfice de la demi-part supplémentaire d'impôt sur le revenu, qui est pourtant réclamée depuis des années par les titulaires de la carte du combattant volontaire de la Résistance et leurs veuves. Vous ne réglez pas non plus le douloureux problème de l'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires nazies. Je reviendrai tout à l'heure sur certains de ces points.

Je voudrais également me faire l'interprète des grands invalides de guerre, qui désespèrent d'obtenir la prise en charge intégrale de l'appareillage et des aides techniques, notamment pour les prothèses auditives. Il s'agit des plus âgés et des plus fragiles des anciens combattants !

Je vous rappelle enfin que les victimes des essais nucléaires se heurtent toujours au refus du ministère de la défense de lever le secret défense sur les rapports de relevés de radioactivité des essais nucléaires au Sahara et en Polynésie française, et que les anciens des missions extérieures attendent toujours l'attribution de la carte du combattant sur la base de 120 jours de présence sur les lieux d'opération.

Vous n'évoquez pas le rapport constant : il est pourtant urgent qu'une instance de concertation tripartite se réunisse pour chiffrer le retard accumulé et clarifier le fonctionnement du dispositif.

Permettez-moi également de donner mon sentiment sur la pérennisation des services de l'ONAC. Nous devrions les intégrer dans la loi, monsieur le secrétaire d'État. Vous nous avez apporté des assurances en la matière, mais les anciens combattants attendent que ces services soient véritablement consacrés.

En outre, on le sait - écoutez-moi bien, monsieur le secrétaire d'État, et j'espère que vous ne me démentirez pas ! - il n'y a plus que vingt-sept assistants sociaux pour la France entière, dont un seul à Paris pour toute l'Île-de-France (M. le secrétaire d'État fait un signe de dénégation.) et un seul à Lyon pour la région Rhône-Alpes. Et vous nous annoncez avec satisfaction le redéploiement du personnel pour une meilleure efficience, tandis que le rapporteur spécial évoque l'évolution de la performance et le non-remplacement d'un départ en retraite sur deux. Il me semble que le nouveau contrat de plan pour la période 2008-2012 s'annonce sous d'inquiétants auspices ! Pourriez-vous me rassurer sur ce point ?

Je constate cependant que vous n'êtes pas avare de commissions et d'instances de réflexion. Sans vouloir vous prêter des intentions coupables, je connais les craintes de chacun : ces instances ont parfois pour objet de faire durer les choses ou de préparer des coups bas.

Vous annoncez la création de la commission Kaspi sur les commémorations, le renouveau et la lutte contre le désintérêt. La commission Becker va réfléchir, nous dites-vous, sur le « sens à donner aux commémorations du 11 novembre  2008 », et ce dans un périmètre européen. Vous nous parlez d'une réflexion ministérielle sur la campagne double, alors que celle-ci a largement eu le temps de se faire, de se défaire et de se refaire depuis le tortueux cheminement du rapport Gal. S'agissant de l'indemnisation des orphelins, enfin, vous nommez le préfet Jean-Yves Audoin pour « étudier le statut des orphelins de guerre », avant de désigner par la suite une commission.

Je préférerais vous entendre cadrer plus précisément les promesses que vous avez faites devant nos collègues députés.

S'agissant des engagements du Président de la République, pourquoi ne pas vous engager solennellement sur un plan quinquennal, assorti de dates et de moyens, pour l'ensemble des revendications dont il a promis la satisfaction ? Cela aurait le mérite de la clarté !

Je souhaiterais également des engagements plus précis sur l'achèvement de l'indemnisation des orphelins de victimes du nazisme. Vous savez, comme nous tous, qu'un certain nombre de personnes s'estiment lésées. Selon les termes de votre prédécesseur, l'élément fondateur de l'éligibilité au bénéfice du décret de 2004 est l'acte de barbarie. Mais il n'est plus tenable d'ergoter sur ce qui fut barbare ou le fut moins. Décidons donc, pour en finir dignement, d'étendre le bénéfice de ce décret à tous les orphelins de guerre, particulièrement des résistants morts les armes à la main.

Quant aux conflits contemporains et aux psychotraumatismes de guerre, il faudra bien que le droit à réparation s'applique enfin à tous, y compris aux victimes de la guerre du Golfe et à celles des irradiations nucléaires consécutives aux essais effectués dans le Sahara et en Polynésie française.

Pour conclure rapidement un propos difficile à résumer en si peu de temps, je vous le dis, avec le monde combattant je serai très vigilant - nous travaillerons avec vous, monsieur le secrétaire d'État - sur le droit à réparation, sur la mémoire et sur les dates de commémoration.

Vous déclariez dernièrement, dans le journal Le Figaro, votre attachement à l'enjeu « de savoir transmettre ». Oui, transmettre, mais comment ? Aujourd'hui, en effet, des voix s'élèvent pour prôner l'instauration d'une date unique, une sorte de « Memorial Day » à l'américaine. Notre rapporteur, Mme Janine Rozier, dont je ne crois pas déformer les propos, y semble favorable, monsieur le secrétaire d'État.

Ne l'êtes-vous pas également à mots couverts ? Votre création d'une commission chargée de réfléchir aux commémorations est-elle innocente ? Lors de votre audition devant la commission des affaires sociales, vous avez dit que les parlementaires, auteurs de la proposition de loi tendant à instituer le 27 mai une journée nationale de la Résistance, seront invités à exposer leur point de vue à la commission présidée par l'historien André Kaspi. Soyez assuré que j'ai retenu l'invitation et que j'y serai !

Pour honorer la mémoire des militaires tombés pendant la guerre d'Algérie et les combats de Tunisie et du Maroc, ainsi que celle des victimes civiles d'avant et d'après le 19 mars 1962, je veux souligner le stratagème peu glorieux du Gouvernement pour donner force de loi à la date du 5 décembre au lieu et place de la date légitime du 19 mars. Il l'a fait par le biais d'un décret qui a acquis valeur législative par l'article 2 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés ! Je l'ai appris en lisant, dans le Journal officiel, votre réponse à la question de l'une de nos collègues, Mme  Sylvie Desmarescaux !

Non, la mémoire n'est pas une abstraction que l'on pourrait, une fois l'an, servir à des écoliers ennuyés, sous prétexte qu'ils ne s'ennuieraient qu'une fois ! Elle est faite de dates-phares qui ont du sens, qui rappellent des sacrifices, des combats, des engagements concrets à toutes les époques de notre histoire où il fallut que les hommes et les femmes de notre pays se lèvent contre ce qui menaçait notre indépendance, notre liberté, la paix du monde. Et les collégiens de mon département, que j'accompagne une fois l'an à Auschwitz-Birkenau, le savent désormais.

Malgré la reconnaissance de certaines avancées, mais en toute connaissance de leur très large insuffisance, c'est en vertu du respect qu'il porte au monde combattant que notre groupe votera contre votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)