M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Nicolas About, rapporteur. Je trouve que cet amendement est assez original !

M. Nicolas About, rapporteur. Il vise des questions très importantes, mais c'est bien la première fois que le Sénat décide, en séance publique, de fixer l'ordre du jour d'une commission !

M. Nicolas About, rapporteur. Il faudrait même prévoir des sanctions pour le cas où la commission des affaires économiques ne remettrait pas le rapport demandé avant le 31 janvier 2008 !

Il ne me paraît pas judicieux de faire figurer dans la loi une telle disposition.

Compte tenu de l'intérêt de la question, je propose plutôt à nos collègues de transmettre au président Jean-Paul Emorine leur souhait de voir un rapport établi sur ce sujet.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Je viens d'entendre l'avis de M.  About, mais, bien sûr, il ne m'appartient pas de m'ingérer dans les affaires du Sénat !

Je vous répondrai seulement, madame le sénateur, que la proposition de réaliser avant le 31 janvier 2008 un rapport examinant le respect par les sociétés délégataires du service public de l'eau de leurs obligations, notamment en matière de rémunération du service, me paraît redondante au regard des dispositifs existants.

En effet, des mesures nouvelles ont d'ores et déjà été prises.

En outre, l'article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales précise que le maire est tenu de présenter annuellement un rapport sur le prix et la qualité du service d'eau potable, destiné notamment à l'information des usagers. Ce rapport annuel du maire, qui intègre désormais les indicateurs de performance et les éléments à fournir en fonction de la taille des services, est un élément clé dans la mise en oeuvre locale de la transparence et des principes de gouvernance des services.

Enfin, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, l'ONEMA, qui a été créé par un décret en date du 25 mars 2007 et qui compte, parmi les trente-deux membres de son conseil d'administration, six membres du collège des collectivités territoriales du Comité national de l'eau représentant au moins quatre comités de bassin, a notamment pour mission de définir et de mettre en oeuvre un système d'information sur le prix de l'eau qui est facturé aux usagers et sur la qualité des services publics de distribution d'eau et d'assainissement, en application des articles L. 213-1 et L. 213-2 du code de l'environnement.

Ce système doit contribuer à améliorer la gouvernance de ces services publics et à fournir des moyens d'évaluation aux collectivités, aux gestionnaires des services ainsi qu'au public.

Aussi, si votre préoccupation est légitime, madame le sénateur, elle est redondante. C'est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Nicolas About, rapporteur. J'ai oublié de donner une indication à Mme Terrade, monsieur le président.

L'amendement précise que la commission des affaires économiques doit réaliser un rapport avant le 31 janvier 2008. Or le texte dont nous discutons ne sera adopté définitivement que le 31 janvier ! Cela posera donc un problème au président de cette commission, puisqu'il n'aura l'information que le lendemain !

Pour éviter de tourner en ridicule les auteurs de l'amendement, je souhaite que celui-ci soit retiré.

M. le président. La parole est à Mme  Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Je regrette, monsieur le rapporteur, que vous traitiez par l'ironie notre rapport...

M. Nicolas About, rapporteur. Non, au contraire ! Mais il faut être cohérent !

Mme Odette Terrade. Admettez qu'il s'agit d'un vrai problème !

M. Nicolas About, rapporteur. Je l'ai dit !

Mme Odette Terrade. Ces questions relatives à la maîtrise de l'eau par nos collectivités territoriales sont une source de préoccupations,...

M. Nicolas About, rapporteur. Je l'ai dit !

Mme Odette Terrade. ... et le fait que, sur le site même de la Cour des comptes, plus de 1 500 rapports traitent de cette question le prouve !

M. Nicolas About, rapporteur. Alors mettez 2009 !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Nous n'allons pas nous laisser tourner en ridicule ! Je sais bien que la forme est discutable, mais il faut s'intéresser au fond !

M. Nicolas About, rapporteur. J'ai dit que le fond était important !

M. Guy Fischer. Pour les Françaises et les Français, les montants des loyers sont une source de très vives préoccupations, ce qui justifie nos amendements.

Les prix de l'énergie ont explosé. On l'a vu tout à l'heure avec les produits pétroliers. Cela est vrai aussi bien pour le gaz que pour le fioul.

Dans une ville comme la mienne, nous avons essayé de peser sur ces coûts grâce à une chaudière à bois, et je remercie M. Michel Mercier de nous avoir généreusement aidés à l'installer.

M. Michel Mercier. Et aussi pour la coupe du bois !

M. Guy Fischer. Cette chaudière, de par ses dimensions, est presque unique en Europe. Nous récupérons du bois dans les forêts des Monts du Lyonnais, notamment pour permettre à cette chaudière de fonctionner.

Le prix de l'eau pose également un problème. Soyons clairs ! Nous avons constaté un scandale dans ce domaine ; Mme Gonthier-Maurin a cité notamment deux grandes compagnies : Veolia et Suez.

Sur la région lyonnaise, les deux sociétés concessionnaires avaient confisqué des sommes considérables. Cela avait eu pour conséquence une augmentation des tarifs qui étaient bien plus élevés qu'ils n'auraient dû l'être. À la suite des actions engagées, le prix du mètre cube du Grand Lyon au 1er janvier 2008 a diminué de 16 % !

M. Ivan Renar. Il n'y a pas de fatalité !

M. Guy Fischer. Cette diminution résulte, bien entendu, d'un compromis. Nous considérons, nous, que la baisse aurait dû être plus importante.

Cet exemple d'actualité justifie tout à fait, sur le fond, le dépôt de nos amendements relatifs au prix de l'eau. La situation mérite vraiment, tout le monde en a conscience, que l'on fasse le ménage dans ce domaine !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Effectivement, cela demande beaucoup plus de transparence !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 87, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article 4 de la loi n° 90-449 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Toute coupure de fourniture d'eau, d'énergie et de fourniture de services téléphoniques est interdite. Le fournisseur ou le distributeur est tenu de saisir, à compter de deux échéances impayées, le fonds de solidarité au logement, prévu par l'article 6, qui statue sur les demandes d'aide. Le fournisseur qui procède de sa propre initiative à une coupure engage sa responsabilité pénale. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. À l'occasion de la discussion du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, nous avions souhaité alerter le Gouvernement sur le problème des coupures d'énergie infligées aux familles les plus démunies, premières victimes de la hausse vertigineuse des tarifs de l'énergie. Mon collègue Guy Fischer vient de faire un très bon tour d'horizon de ce problème.

Très lapidairement, la commission nous avait alors répondu que l'amendement que nous avions déposé n'avait pas de rapport avec le texte discuté, ce que vient de dire M. le rapporteur sur l'amendement précédent. Toutefois, aujourd'hui, l'amendement n° 87 est au coeur de nos préoccupations, puisque ce projet de loi est consacré au pouvoir d'achat.

Les familles qui se trouvent dans l'impossibilité de payer leurs factures d'électricité, d'eau ou de téléphone sont dans une situation inadmissible dont il faut tenir compte dans un débat sur le pouvoir d'achat.

Le Président de la République, en poursuivant l'ouverture du capital d'EDF, conforte la stratégie de désengagement de l'État, en faveur des actionnaires et au détriment du service public de l'énergie.

Nous remarquons que les prix de l'énergie ne cessent de subir des augmentations, qui auront pour conséquence immédiate d'accroître le nombre de coupures dues aux difficultés que rencontrent les ménages pour honorer leurs factures. Nous ne pouvons le tolérer !

L'électricité est un facteur essentiel de la cohésion nationale, en ce qu'elle garantit l'accès à la santé, à l'hygiène et à un confort décent, que toutes les personnes résidant sur notre territoire sont en droit d'attendre. Il s'agit d'une mission d'intérêt général justifiant l'existence d'un service public national.

De plus, la fourniture d'électricité à un tarif acceptable participe du droit au logement inscrit à l'article 10 du préambule de la Constitution de 1946 et à l'article 25 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

En outre, les coupures d'électricité contraignant à l'utilisation de moyens de remplacement, tels que la bougie, conduisent à une augmentation des risques d'incendie. Les derniers accidents survenus sont là pour en témoigner.

Pourtant, EDF continue de couper l'électricité à 600 000 foyers par an et à refuser un contrat à ceux qui ne peuvent plus payer ou aux occupants sans droit ni titre. Alors que des millions de personnes vivent, dans notre pays, sous le seuil de pauvreté et que plus du quart des ménages en difficulté a une dette envers EDF et GDF, il est plus que jamais indispensable que l'État prenne ses responsabilités en inscrivant dans la loi le principe d'interdiction des coupures d'énergie, aux conditions mentionnées dans cet amendement, et le principe de la responsabilité des fournisseurs qui engagent sans consultation la procédure de coupure d'énergie.

Enfin, je mentionnerai l'évolution de la jurisprudence sur les arrêtés « anti-coupures ». Le 16 mai 2007, le tribunal administratif de Melun a jugé légal l'arrêté pris en 2005 par la commune de Champigny-sur-Marne Il serait donc opportun que le législateur s'inspire de cette décision courageuse et progressiste.

Il faut également évoquer la tentation grandissante de l'État de se désengager du fonds solidarité énergie. Les dispositifs actuellement prévus par l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles restent limitatifs. Concrètement, cet article, modifié par la loi portant engagement national pour le logement, ouvre à toute personne éprouvant des difficultés particulières le droit à une aide de la collectivité pour bénéficier de la fourniture d'eau, d'énergie et de services téléphoniques.

Ainsi, en cas de non-paiement des factures, et jusqu'à ce qu'il soit statué sur la demande d'aide, cette disposition assure un service minimal de fourniture de ces services. Mais elle n'est pas suffisante et cela justifie à nos yeux une nouvelle refonte de la législation.

L'amendement n° 87, qui vise à interdire les coupures d'électricité, d'eau, de téléphone, tient compte de l'évolution du périmètre d'intervention du fonds solidarité logement et tend à renforcer les obligations des fournisseurs et des distributeurs, afin de protéger les familles les plus modestes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Nicolas About, rapporteur. Chacun le sait, il existe des procédures qui sont destinées à protéger les personnes contre toute coupure abusive, à les aider et à les accompagner en cas de difficultés de paiement, et qui prévoient notamment des délais à respecter avant toute coupure.

Si la commission considère qu'il faut renforcer cet accompagnement, elle n'est pas favorable à l'adoption d'un amendement aussi radical. Elle a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Madame David, vous me donnez l'occasion d'apporter quelques précisions.

Vous le savez fort bien, des dispositifs ont d'ores et déjà été prévus dans deux textes : la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement et la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. En outre, un décret d'application, dont je vais vous présenter les grandes lignes, est en cours de signature.

La loi du 5 mars 2007 prévoit que « toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l'insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d'existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d'eau, d'énergie et de services téléphoniques dans son logement.

« En cas de non-paiement des factures, la fourniture d'énergie, d'eau ainsi que d'un service téléphonique restreint est maintenue jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande d'aide. [...]

« Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l'année suivante, les fournisseurs d'électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l'interruption, pour non-paiement des factures, de la fourniture d'électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles mentionnées au premier alinéa et bénéficiant ou ayant bénéficié, dans les douze derniers mois, d'une décision favorable d'attribution d'une aide du fonds de solidarité pour le logement. [...] Ces dispositions s'appliquent aux distributeurs d'eau pour la distribution d'eau tout au long de l'année ».

De plus, un décret d'application, qui est en cours d'examen au Conseil d'État, prévoit que, dès la première facture impayée, et non à compter de deux échéances, comme vous le proposez dans l'amendement, la mise en place de traitements différenciés selon les personnes en situation d'impayés, avec un système d'alerte à deux niveaux permettant de cibler les aides du fonds de solidarité pour le logement, ou FSL, sur les ménages en difficulté sociale.

Un décret en date du 10 août 2005 prévoyait déjà une saisine du FSL par EDF pour tout ménage menacé de réduction de puissance à la suite d'un impayé. Cette disposition, qui n'a pas permis de faire la distinction entre les ménages ayant des difficultés sociales et les autres ménages, est donc sur le point d'être abrogée.

En conclusion, l'adoption de l'amendement n° 87 n'apporterait pas d'amélioration au regard des dispositions existantes, lesquelles doivent permettre d'assurer la continuité du service pour les ménages défavorisés.

Madame le sénateur, nous partageons, me semble-t-il, le même objectif. Les mesures que vous proposez sont d'ores et déjà inscrites dans la loi et le projet de décret que je viens d'évoquer. C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 87 n'a pas, selon moi, de raison d'être. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Cet amendement me paraît vraiment pertinent.

Bien sûr, madame la ministre, je ne conteste pas les éléments que vous venez de nous donner. Néanmoins, pour être conseiller général des Minguettes, je suis, avec mon collègue André Gérin, député-maire de Vénissieux, confronté continuellement à ces problèmes de coupures d'eau et d'énergie.

La situation est encore plus compliquée pour les grands ensembles immobiliers, quand le poids des charges est réparti entre des locataires et des copropriétaires. En l'occurrence, il y a onze offices d'HLM ! Dans ce cas, les conditions de transparence sont difficiles à établir.

La question du financement du FSL se pose compte tenu du désengagement de l'État et de la volonté de faire supporter par les départements des dépenses de plus en plus importantes. Face à l'aggravation de la crise, les services sociaux des départements et les centres communaux d'action sociale doivent faire face à une véritable explosion des demandes

À Vénissieux, après avoir délibéré à plusieurs reprises sur ces questions, nous avons pris des arrêtés anti-expulsions et anti-coupures, qui font l'objet de recours devant le tribunal administratif

La charge du logement devient une dépense de plus en plus importante et pèse sur les dépenses incompressibles. Cette question nous préoccupant particulièrement, nous maintenons cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 98, présenté par Mmes Terrade et David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Dans la deuxième phrase du second alinéa de l'article L. 331-2 du code de la consommation, après le mot : « scolarité », sont insérés les mots : «, le montant des prestations familiales et le nombre de personnes à charge ».

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Hier, M. Xavier Bertrand nous a présenté le projet de loi voulu par le Président de la République comme un texte avant tout pragmatique et non dogmatique.

L'amendement n° 98 vise précisément à répondre dans les faits aux difficultés des Français. Vous n'y trouverez ni grandes théories ni batailles de clan. Il s'agit juste d'une proposition réelle pouvant avoir des effets immédiats, à savoir la garantie, pour les familles, d'un reste à vivre suffisant.

Vous le savez, pour déterminer la capacité de remboursement du débiteur, la commission de surendettement déduit des ressources de celui-ci une somme laissée à sa disposition, nécessaire pour lui permettre de faire face aux charges de la vie courante. C'est ce que l'on appelle le « reste à vivre ». Il existe des prestations insaisissables du calcul du reste à vivre, afin d'éviter que des évaluations irréalistes n'obèrent la réalisation du plan de redressement.

Or, à l'heure actuelle, cette part de ressources, que l'on pourrait qualifier d'indispensable, intègre les dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, de nourriture et de scolarité. Nous proposons ici d'y ajouter la notion de personne à charge, ce qui aurait pour conséquence de prendre en compte les évolutions sociétales, comme l'aide apportée par les familles - quand bien même elles seraient en difficulté - à un autre membre de leur famille, qu'il s'agisse d'un ascendant ou d'un descendant.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Nicolas About, rapporteur. En cas de surendettement, le plancher de la part insaisissable des salaires est au moins égal au RMI.

L'amendement n° 98 ne semble apporter rien de plus à un principe qui, selon nous, n'a jamais été remis en cause par la Cour de cassation.

Ma question est assez simple, madame Terrade : pourriez-vous nous en dire plus sur l'arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation, auquel l'objet de l'amendement fait référence et que nous n'avons pas retrouvé ?

Il s'agit d'une disposition de la loi portant engagement national pour le logement suffisamment explicite, qui ne saurait par conséquent être remise en cause, même par la Cour de cassation.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Nous allons rechercher cet arrêt, monsieur le rapporteur !

Je connais une famille qui doit se conformer à un plan de redressement après avoir assumé, pendant quelque temps, la charge de neveux, dont la mère est décédée. Or ces personnes ne sont pas prises en compte dans le calcul.

M. le président. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Cet amendement vise à exclure des prestations familiales de la détermination de la capacité de remboursement dans le cadre des procédures de surendettement.

Madame le sénateur, nous comprenons bien sûr votre objectif, qui est de protéger les emprunteurs à faibles ressources, lesquels se trouvent souvent, à la suite d'accidents de la vie, entraînés dans des procédures de surendettement.

Toutefois, votre proposition soulève deux problèmes.

Tout d'abord, on peut noter que ces prestations sont essentiellement destinées à couvrir les dépenses courantes des ménages, en relation précisément avec la taille de la famille. Ces dépenses sont déjà prises en compte pour déterminer la capacité de remboursement. Si nous excluons les prestations familiales, cela reviendrait de facto à soustraire deux fois ces sommes des revenus affectés au remboursement des dettes, ce qui serait catastrophique pour ces personnes.

Ensuite, ces mesures de protection des emprunteurs à l'égard des créanciers peuvent avoir des effets pervers et rendre l'accès au crédit encore plus difficile, pour les personnes dont les revenus sociaux sont importants.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Nous ne pouvons vous fournir en cet instant le document que nous avons cité, faute peut-être d'un nombre suffisant de collaborateurs, mais nous ne manquerons pas de procéder aux recherches nécessaires afin de vous le communiquer, monsieur le président de la commission.

Chacun sait qu'il est très difficile pour des familles surendettées d'accéder à un plan de surendettement et, à ce titre, de prétendre au « reste à vivre ». Leur dossier est renvoyé au département, au centre communal d'action sociale, les réponses sont souvent tardives, les montants limités. Ces familles sont confrontées à une véritable course d'obstacles, ce qui les plonge dans une détresse susceptible de durer de nombreux mois, voire des années.

C'est une des situations qui nous préoccupent beaucoup à l'heure actuelle et il faut prendre cet amendement comme un amendement d'appel et de sensibilisation à ce problème.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 98.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 124, présenté par Mme Terrade, M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le a) de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1230 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« a) Le loyer :

« - des logements neufs ;

« - des logements vacants ayant fait l'objet de travaux de mise ou de remise en conformité avec les caractéristiques définies en application des premier et deuxième alinéas de l'article 6 ;

« - des logements conformes aux normes définies par ledit décret, faisant l'objet d'une première location ou, s'ils sont vacants, ayant fait l'objet depuis moins de six mois, de travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes, d'un montant au moins égal à une année du loyer antérieur, est fixé librement entre les parties, dans les limites de quatre fois l'indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Bien qu'il soit intéressant, le dispositif de l'article 4 est d'une portée limitée, puisqu'il ne vise que les logements dans lesquels le niveau des loyers fait l'objet d'une modification répondant aux critères du seul paragraphe d de l'article 17 de la loi de 1989, c'est-à-dire les logements occupés concernés par une réévaluation « ordinaire » de leur montant.

Il exclut, en particulier, les logements neufs mis en première location et ne concerne donc qu'une petite partie du patrimoine locatif privé mis en location.

Il s'agit d'une petite partie, car, à moins que vous ne l'ignoriez, mes chers collègues, le taux de rotation des logements locatifs privés est sensiblement plus important que celui des logements sociaux.

En effet, 22 % des logements régis par un bail privé sont reloués chaque année à de nouveaux locataires, ce qui limite immédiatement la portée de l'article 4, puisque ces logements ne sont pas concernés par l'article 17 de la loi de 1989.

Il convient de souligner que la rotation atteint à peine 10 %, en moyenne, dans le patrimoine locatif social, et parfois moins dans certains ensembles immobiliers, singulièrement ceux qui sont situés en zone tendue.

Si l'on veut donner sa pleine portée à l'article 4, il importe donc de le rendre plus pertinent en couvrant l'ensemble des logements définis par l'article 17 et pas seulement, comme c'est le cas pour le moment, de ceux qui sont actuellement occupés.

Je citerai M. About, président et rapporteur de la commission des affaires sociales, qui fait observer ce qui suit, relativement à cet article :

« Votre commission approuve la nouvelle définition de l'indice de révision des loyers qui devrait permettre de modérer le renchérissement des loyers du parc privé et donc de freiner la progression des dépenses de logement dans le budget des locataires.

« Cependant, votre commission constate la limite de cette mesure, qui ne porte que sur un seul des deux facteurs responsables de la hausse des loyers. Celle-ci s'explique en effet pour moitié par la revalorisation des loyers des locataires déjà installés et pour l'autre moitié par l'augmentation des loyers au moment d'une nouvelle location. Il est donc très probable que les loyers du parc locatif privé continueront d'augmenter plus rapidement que les prix à la consommation.

« Par ailleurs, la mesure ne favorise pas à proprement parler la création de pouvoir d'achat, mais organise un transfert de pouvoir d'achat des propriétaires vers les locataires. »

Ces observations appellent de ma part quelques brefs commentaires.

Indépendamment du fait qu'il s'agit d'un indice de référence et non d'un indice de révision, vos remarques, monsieur le rapporteur, attestent le caractère partiel et donc forcément incomplet de la mesure.

L'élément le plus dynamique de la hausse des loyers, c'est bel et bien la mise en location de logements neufs ou la passation d'un nouveau bail, plus que la simple réévaluation du loyer d'un logement d'ores et déjà occupé.

On est loin du compte et, soit dit en passant, du transfert massif de pouvoir d'achat des propriétaires - que certains plaignent amèrement - vers les locataires, qui ont tout de même, ne l'oublions pas, la particularité d'être les plus nombreux.

Et, très franchement, puisque cet indice de référence va se rapprocher de l'indice des prix à la consommation, soit 2,6 % en 2007, et qu'il va se substituer à un indice de référence des loyers déjà mis en question qui, pour sa part, s'est élevé à 2,76 % au deuxième trimestre de 2007 et à 2,49 % au troisième trimestre de la même année, on en vient à s'interroger sur la portée réelle de la mesure prévue à l'article 4...

Pour le locataire, ce sera au mieux, 1 euro ou 2 euros en moins à payer chaque mois sur un loyer de 1 000 euros. On est loin du transfert massif de revenus des propriétaires vers les locataires...

C'est donc tout naturellement qu'il nous semble que, si l'on veut décélérer sérieusement l'évolution des loyers du secteur locatif privé, ce qui permettra aussi à moyen terme une détente du marché, il faut agir sur la relocation ou la première location de logements neufs.

Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Nicolas About, rapporteur. Cet amendement, tel qu'il est rédigé, ne paraît pas facilement applicable. Il vise à plafonner les plus hauts loyers au niveau de quatre fois l'indice de référence des loyers, l'IRL. Il nous semble difficile, dans la mesure où il s'agit d'un indice et non d'une valeur absolue, de plafonner ces loyers à quatre fois la valeur d'un indice.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

En effet, tout en comprenant bien votre objectif, madame le sénateur, je ne vois pas comment on peut fixer une norme, puisqu'il n'existe pas de référence pour les logements neufs. Votre proposition me paraît donc inapplicable.

Mme Odette Terrade. C'est le marché !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Madame la ministre, votre réponse montre que le marché régule absolument tout, notamment lors de la première mise en location. Il y a tout de même lieu de s'interroger !

Permettez-moi de revenir à notre débat sur les hausses de loyer des logements sociaux. Lorsque je vous ai dit que deux hausses étaient appliquées par certains offices, je ne généralisais absolument pas.

Quelles dispositions comptez-vous prendre, dans le prolongement de votre texte, lorsque deux hausses de loyer  -pour tromper le locataire - sont votées par le conseil d'administration de l'office d'HLM ? Le préfet refuse, bien sûr, et souhaite une deuxième délibération du conseil d'administration de l'office.

En l'occurrence, Michel Mercier, président de l'OPAC du Rhône, ne bronche pas ! (Sourires.) Il maintient sa décision de procéder à deux hausses de loyers, soit un total de 5 %, deux fois supérieur au taux d'inflation. Et il n'est pas condamné ! Est-ce normal ?

Mme Odette Terrade. Ce n'est pas moral !

M. Guy Fischer. Si l'on pouvait condamner M. le président de l'OPAC du Rhône parce qu'il va à l'encontre du projet gouvernemental, ce serait tout de même juste ! (Nouveaux sourires.)

Madame la ministre, quelles directives allez-vous donner à MM. les préfets pour que la hausse devant intervenir au 1er juillet soit atténuée et que votre projet de loi ait un effet concret pour les locataires ? Qu'allez-vous faire ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Fischer, je suis prête à vous rencontrer à nouveau pour vous expliquer en détail notre point de vue.

Mais, comme vous le savez très bien puisque vous êtes vous-même responsable d'un OPAC, selon le mode de gouvernance actuel, tous les acteurs décident de l'augmentation des loyers, puisque le conseil d'administration comprend également des représentants des locataires, des élus.

En outre, vous le savez également, la deuxième délibération est soumise à un plafond maximum qui est lié à l'IRL.

Au demeurant, je dois vous en faire la confidence, monsieur Fischer, cette deuxième délibération me pose aussi quelques problèmes. Mais la question est de savoir si l'on doit faire confiance ou pas aux responsables qui assurent la gouvernance. C'est peut-être là que se situe la différence entre vous et moi.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 124.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 131, présenté par Mme Terrade, M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le c) de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« c) Lors du renouvellement du contrat, le loyer ne donne lieu à réévaluation que s'il est manifestement sous-évalué.

« Dans ce cas, le bailleur peut proposer au locataire, au moins six mois avant le terme du contrat et dans les conditions de forme prévues à l'article 15, un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables dans les conditions définies à l'article 19.

« Lorsque le bailleur fait application des dispositions du présent c, il ne peut donner congé au locataire pour la même échéance du contrat.

« La notification reproduit intégralement, à peine de nullité, les dispositions des alinéas du présent c et mentionne le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant servi à le déterminer.

« En cas de désaccord ou à défaut de réponse du locataire quatre mois avant le terme du contrat, l'une ou l'autre des parties saisit la commission de conciliation.

« À défaut d'accord constaté par la commission, le juge est saisi avant le terme du contrat. À défaut de saisine, le contrat est reconduit de plein droit aux conditions antérieures du loyer éventuellement révisé. Le contrat dont le loyer est fixé judiciairement est réputé renouvelé pour la durée définie à l'article 10, à compter de la date d'expiration du contrat. La décision du juge est exécutoire par provision.

« La hausse convenue entre les parties ou fixée judiciairement s'applique par tiers ou par sixième selon la durée du contrat.

« Toutefois, cette hausse s'applique par sixième annuel au contrat renouvelé, puis lors du renouvellement ultérieur, dès lors qu'elle est supérieure à 6 p. 100 si le premier renouvellement avait une durée inférieure à six ans.

« La révision éventuelle résultant du d ci-dessous s'applique à chaque valeur ainsi définie. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet amendement vise à compléter l'article 4 en couvrant l'ensemble des situations locatives.

Dans le périmètre de l'article 17 de la loi de 1989, dite « loi Mermaz-Malandain », qui rééquilibrait les rapports locatifs sérieusement détériorés par la loi Méhaignerie, on avait ainsi défini plusieurs catégories de logements et de modalités de révision des loyers.

Dans le cadre de l'article 17, paragraphe c, il s'agit des conditions de révision des loyers des logements dont le niveau de loyer est notoirement sous-évalué ou ayant fait l'objet de travaux.

Pour être précis, mes chers collègues, nous souhaitons modérer la progression des loyers de ces logements, ne serait-ce que parce qu'il faut, et c'est même indispensable, qu'existe dans notre pays un parc locatif privé abordable pour l'ensemble des demandeurs de logement.

Quel sens pourrait prendrait la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale si nous continuions à laisser dériver, comme on le constate ces derniers temps, les loyers du secteur privé ?

La hausse continue des loyers privés ressemble à une vaste machine à exclure de l'accès au logement de couches de plus en plus larges de la population, accentuant la pression sur le patrimoine locatif social, qui n'est pas en situation de faire face à la demande.

Monsieur About, je vous fais part du sentiment de mon groupe : vous ne nous ferez jamais pleurer sur la perte du pouvoir d'achat des propriétaires fonciers !