M. le président. Monsieur Beaumont, l'amendement n° 18 est-il maintenu ?

M. René Beaumont. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 18 est retiré.

Monsieur Béteille, l'amendement n° 19 rectifié est-il maintenu ?

M. Laurent Béteille. Je ne suis pas vraiment convaincu, monsieur le ministre : je ne vois pas le conseil intervenir avant l’entretien, rester derrière la porte pendant l’entretien, après avoir rédigé une petite note à celui qu’il conseille, puis faire le point ensuite.

Vous me demandez de bien vouloir retirer mon amendement en arguant du fait que les partenaires sociaux n’ont pas retenu la solution que je propose. Je vais accéder à votre demande, monsieur le ministre, mais bien à contrecœur !

M. le président. L'amendement n° 19 rectifié est retiré.

Monsieur About, l'amendement n° 16 est-il maintenu ?

M. Nicolas About. Convaincu par les arguments et de M. le ministre et de M. le rapporteur, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 16 est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 76, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-12 du code du travail :

Lors du ou des entretiens, l'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise à condition que le salarié ait lui-même fait valoir ce droit.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Je ne m’attarderai pas sur cet amendement, dont la rédaction et l’objet me semblent suffisamment clairs.

Il vise à encadrer législativement l’assistance de l’employeur au cours de la ou des réunions visant à mettre fin à la relation contractuelle par une personne membre de l’entreprise, comme c’est le cas aujourd’hui.

Il nous semble en effet que le parallélisme des formes doit impérativement être respecté : l’employeur doit pouvoir être assisté, comme c’est le cas pour l’employé. En revanche, l’assistance d’une personne étrangère à l’entreprise, je pense par exemple à un avocat, doit être interdite, comme pour le salarié. Nous venons d’en parler à l’instant.

Il est en effet inutile d’aggraver le déséquilibre qui caractérise la relation de travail en raison du lien de subordination entre l’employeur et le salarié et de la précarité qui règne sur ce que vous appelez le marché du travail.

L’amendement n° 76 tend donc à préciser que, si l’employeur se fait assister, cela doit être par une personne appartenant au personnel de l’entreprise, à condition – toujours pour respecter le parallélisme des formes – que le salarié soit lui-même assisté par une personne de son choix.

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par Mmes Demontès, Le Texier et Schillinger, M. Godefroy et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-12 du code du travail, après les mots :

de se faire assister

insérer les mots :

par une personne de son choix membre de l'entreprise ou d'une organisation représentative d'employeurs

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement est proche de celui qu’a déposé M. le rapporteur.

Il est important que l’équilibre dont vous vous félicitez ne soit pas rompu dans le cadre du ou des entretiens entre l’employeur et le salarié pour fixer les conditions de la convention de rupture.

À l’égal du salarié qui peut se faire assister par un représentant du personnel ou un conseiller du salarié, il semble équitable que l’employeur puisse être assisté par une personne de son choix, membre de l’entreprise ou d’une organisation représentative des employeurs.

Il importe tout particulièrement que cette assistance demeure non rétribuée. En effet, les moyens du salarié ne lui permettent pas, le plus souvent, de faire face aux dépenses d’assistance. Quant aux dépenses engagées par l’employeur, elles pourraient être prises en charge par l’entreprise. C’est d’ailleurs pour cette raison que les groupes socialistes de l’Assemblée nationale et du Sénat avaient voté la proposition de loi relative au conseiller du salarié, contre l’avis de la majorité, qui étend aujourd’hui cette procédure aux employeurs, et c’est très bien !

Monsieur le président, je vous ai rendu une minute. Je vous en dois encore une !

M. le président. Je vous félicite de votre concision, ma chère collègue. (Sourires.)

L'amendement n° 10, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-12 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :

« L'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d'employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements nos 76 et 33.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur. Cet amendement tend à permettre à l'employeur de se faire assister, lors du ou des entretiens préalables à la rupture conventionnelle, par une personne appartenant à son organisation patronale ou par un autre employeur relevant du même secteur professionnel que lui. Cette faculté serait ouverte uniquement aux entreprises comptant moins de cinquante salariés.

En l'état actuel du texte, l'employeur ne peut être assisté que par un salarié de son entreprise. Or on ne trouve pas nécessairement, dans les petites entreprises, un salarié ayant la volonté d’assister le chef d’entreprise ou les compétences nécessaires pour le faire.

Dans la mesure où le salarié a la possibilité, dans certains cas, de se faire assister par une personne extérieure à l'entreprise, il ne paraît pas inéquitable d’accorder la même possibilité au patron d'une très petite entreprise.

J’indique que, si cet amendement était adopté, les amendements nos 76 et 33 n’auraient plus d’objet.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous demanderons le vote par priorité de l’amendement n° 10 !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Je suis vraiment désolé, mais je pense que l’amendement n° 10 est plus complet que les amendements nos 76 et 33.

Mme Raymonde Le Texier. Vous êtes tellement plus intelligent, c’est normal ! (Sourires.)

M. Xavier Bertrand, ministre. J’aurais tellement aimé vous dire que les amendements nos 76 et 33 étaient meilleurs que l’amendement n° 10 ! (Nouveaux sourires.)

Je prie les auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer au profit de l’amendement n° 10, qui devrait les satisfaire.

M. le président. Madame Le Texier, l'amendement n° 33 est-il maintenu ?

Mme Raymonde Le Texier. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.

Madame David, l'amendement n° 76 est-il maintenu ?

Mme Annie David. Je veux bien admettre que la rédaction proposée par M. le rapporteur est meilleure.

M. le rapporteur ayant bien précisé que son amendement concernait les toutes petites entreprises – il est vrai que les chefs de ces entreprises n’ont pas toujours les compétences suffisantes pour mener à bien ces entretiens –, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 76 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 34 rectifié, présenté par Mmes Demontès, Le Texier et Schillinger, M. Godefroy et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-14 du code du travail, remplacer le mot :

calendaires

par le mot :

ouvrables

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Un délai de quinze jours calendaires, soit au plus dix jours ouvrés, à compter de la réception de la demande nous paraît trop court pour permettre un examen au fond de la rupture conventionnelle.

Dans ces conditions, l’homologation va se trouver réduite à un simple contrôle de légalité, ce qui présume implicitement que les parties à la rupture conventionnelle sont en situation d’égalité, comme s’il s’agissait d’un contrat de droit civil.

Nous ne partageons évidemment pas cette opinion, qui traduit une méconnaissance de la raison d’être fondamentale d’un droit du travail autonome : la sujétion du salarié à l’employeur, qui justifie un réel examen des conditions de la rupture.

Dans sa version initiale, notre amendement tendait à prévoir un délai de deux mois, cette durée correspondant au délai de recours contentieux de droit commun dans les cas de décision implicite résultant du silence gardé par l’administration.

Il faut que l’administration du travail soit en mesure de vérifier la réalité du consentement des salariés et, en cas de doute, le contexte propre à l’entreprise, ce qui nécessite un délai d’examen suffisant.

Monsieur le ministre, après une discussion en commission des affaires sociales, nous avons accepté de modifier notre amendement.

Estimant qu’une durée de quinze jours calendaires était tout de même trop courte – si une homologation devait avoir lieu entre le 1er mai 2008 et 15 mai 2008, le délai de quinze jours ne correspondrait qu’à sept jours ouvrables ! –, nous proposons de porter le délai d’instruction à trois semaines. Une telle disposition ne nous paraît pas remettre fondamentalement en cause l’accord qui a été signé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. En effet, comme l’a très justement expliqué M. Godefroy, si une demande d’homologation était faite au mois de mai, cela poserait quelques difficultés, y compris dans les directions du travail !

J’accepte donc tout à fait la proposition de M. Godefroy. Je suis d’ailleurs heureux que nous soyons enfin d’accord sur un amendement ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Combien aurais-je aimé ne pas rompre cette unanimité naissante ! (Sourires.) D’ailleurs, il est vrai que, dans un premier temps, j’ai été tenté d’adopter la même position que vous, monsieur le rapporteur.

Toutefois, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite attirer votre attention sur un point. Dès lors que nous avons fixé à quinze jours calendaires le délai légal pour exercer le droit de rétractation, il est cohérent que nous options pour la même durée s’agissant du délai d’homologation.

Par ailleurs, dans le présent dispositif, le silence vaut acceptation. Nous avons donc intérêt à avoir le délai le plus court et le plus sécurisé possible, car cela profitera aux parties.

Dans ces conditions, s’il était adopté, un tel amendement viendrait tout simplement fragiliser l’homologation.

Certes, dans les cas où le système exige qu’une réponse soit apportée, je comprends que l’on ait besoin de plus de temps. Mais, dès lors que le silence vaut acceptation, mieux vaut que le délai soit le plus court possible.

Or remplacer « calendaires » par « ouvrables » aurait pour effet d’allonger la procédure et n’irait nullement dans le sens d’une sécurisation.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, j’entends bien vos arguments, mais je pense tout de même que votre position s’explique avant tout par votre refus de modifier votre texte.

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce n’est pas « mon » texte, c’est celui des partenaires sociaux !

M. Jean-Pierre Godefroy. Soit ! Alors, parlons plutôt de votre « accord », puisque vous l’avez signé.

M. Xavier Bertrand, ministre. Non ! Je ne l’ai pas signé !

M. Jean-Pierre Godefroy. Mais vous l’avez avalisé.

Pour en revenir au fond de notre débat, vous soulignez que le silence vaut approbation. Or, pour reprendre mon exemple du mois de mai 2008, le temps que la demande parvienne à l’administration, puis qu’elle soit transmise à la personne susceptible d’examiner le dossier, on peut compter effectivement sur un silence total !

En tant qu’élus, mes chers collègues, nous savons bien que les délais d’acceptation silencieuse de l’administration posent parfois des problèmes.

Aussi, porter le délai à trois semaines ne constituerait pas, me semble-t-il, une remise en cause fondamentale du texte. En revanche, cela permettrait de sécuriser la procédure, et ce pour les deux parties, en constatant qu’il n’y a pas d’objection formulée. À mon sens, cela ne peut pas fragiliser la procédure.

Quoi qu’il en soit, avec le dispositif actuel, c'est-à-dire un délai de quinze jours calendaires pour obtenir un accord par silence, il n’y aura jamais de refus d’homologation !

Mme Raymonde Le Texier. C’est bien l’objectif !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Une fois n’est pas coutume, je ne partage pas l’avis de M. le ministre.

À mon sens, le délai de rétractation et le délai d’homologation sont bien distincts.

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous sommes d'accord !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Dans le cas du délai de rétractation, les deux parties connaissent le contenu du contrat – elles l’ont signé – et n’ont pas à étudier les pièces qui leur sont communiquées, puisque c’est leur volonté qui s’exprime. Dès lors qu’elles connaissent le texte pour l’avoir approuvé et signé, il est tout à fait concevable que le délai soit fixé en jours « calendaires ».

Pour sa part, l’autorité administrative doit avoir le temps de prendre connaissance des conditions dans lesquelles l’accord a été conclu. Encore faut-il qu’il y ait des jours travaillés et que les dossiers ne s’empilent pas trop…

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais l’État est toujours présent ! (Sourires.)

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Certes, monsieur le ministre, nous savons bien que l’État est présent jour et nuit, notamment lors des fêtes de fin d’années ou pendant la période excessivement « ouvrée » des ponts du mois de mai. (Nouveaux sourires.)

Par conséquent, de notre point de vue, fixer le délai d’homologation en jours « ouvrables » ne nous paraît pas abusif. Peut-être faisons-nous une erreur. Dans ce cas, nous aurions toujours le temps d’y remédier d’ici à la commission mixte paritaire.

En attendant, monsieur le ministre, donnez-nous quelques jours ouvrables !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. M. le président de la commission des affaires sociales vient de rappeler dans quels cadres respectifs se situent le délai de rétractation et le délai d’homologation. Il est vrai que je les avais moi-même mis en parallèle.

À la limite, si une suite favorable devait être donnée à un tel amendement, c’est plutôt le délai de rétractation qu’il faudrait définir en jours « ouvrables », et non en jours « calendaires ».

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pourquoi ?

M. Xavier Bertrand, ministre. En effet, dans ce cas, cela offrirait une possibilité supplémentaire aux parties !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non !

M. Xavier Bertrand, ministre. Pour ma part, je reste sur ma position. Il y a bien un problème de symétrie. Si le délai de rétractation est fixé en jours « calendaires », il doit en être de même pour le délai d’homologation.

En outre, j’ai bien conscience – vous l’avez souligné vous-même en mentionnant la commission mixte paritaire, monsieur le président de la commission des affaires sociales – que si de tels sujets ne sont pas portés par de grands espoirs, il vaut mieux arrêter tout de suite !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non ! Nous avons une véritable volonté d’avancer !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-14 du code du travail, après les mots :

du conseil des prud'hommes,

insérer les mots :

qui statue en premier et dernier ressort,

La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que le conseil de prud'hommes statue en premier et dernier ressort quand il est saisi d'un recours contre une convention de rupture du contrat de travail.

Une telle mesure vise à réduire la durée des procédures juridictionnelles et à sécuriser ainsi plus rapidement, sur le plan juridique, la rupture conventionnelle.

En outre, cet amendement est cohérent avec la logique de la rupture conventionnelle, qui vise à favoriser des solutions négociées, et non des procédures conflictuelles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est partagé.

D'une part, le sujet n’a pas à proprement parler été visé par l’accord national interprofessionnel et ne me semble pas faire l’unanimité parmi les signataires.

D'autre part, monsieur le rapporteur, le dispositif que vous proposez permettrait tout de même de gagner deux années de procédure.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Eh oui !

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce n’est pas neutre !

Ne l’oublions pas, il s’agit d’une procédure de rupture conventionnelle – je dis bien « conventionnelle », et non « amiable » –, ce qui suppose également la possibilité d’attendre l’homologation et d’intervenir ensuite. Dès lors, il ne me semble pas logique de se placer de prime abord dans une perspective de conflit.

Cependant, si la justice est amenée à trancher à un moment donné, il est vrai qu’il n’est pas neutre de gagner deux ans, surtout lorsque l’on évoque la sécurisation des procédures.

Par ailleurs, le seul vrai juge de la liberté du consentement est le juge prud’homal, c'est-à-dire une juridiction à caractère paritaire. Aussi, le double degré de juridiction ne trouve pas tout à fait sa place de la même manière que pour d’autres juridictions.

D’ailleurs, et vous le savez, en fonction du montant des affaires, le conseil de prud’hommes juge parfois en premier et dernier ressort ; il reste alors seulement la possibilité de se pourvoir en cassation. Il me semble important que le juge prud’homal soit soumis au contrôle du juge de cassation en cas d’erreur de droit.

En revanche, d’aucuns objectent que, si le pourvoi en cassation, donc devant des magistrats professionnels, devient la seule voie de recours possible, cela posera des problèmes de coûts. La suppression de l’appel ne risque-t-elle pas de dissuader certains justiciables d’aller devant la Cour de cassation ?

Tels sont les termes du problème posé. Voyons maintenant les réponses.

D’abord, l’accès à aide juridictionnelle, qui bénéficie au salarié dont les ressources mensuelles sont égales ou inférieures à 1 328 euros, est également ouvert devant la Cour de cassation.

Ensuite, si son recours devant la Cour de cassation est fondé, le salarié pourra bénéficier des frais irrépétibles, qui correspondent aux frais d’avocat. Dans ce cas, c’est l’employeur qui pourra être condamné aux dépens.

Enfin, un syndicat peut également intervenir aux côtés du salarié, par exemple en prenant en charge ses frais d’avocat.

Tels sont les tenants et les aboutissants de ce débat, et le sujet n’est pas neutre. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Pour ma part, je voterai contre cet amendement.

Cela vous surprendra sans doute, mes chers collègues, mais je rejoins l’argumentation qui vient d’être défendue par M. le ministre, encore que je ne le dirai pas trop fort, ni trop souvent. (Sourires.)

De mon point de vue, le fait que les prud’hommes statuent en premier et en dernier ressort prive effectivement les salariés de certaines possibilités. M. le ministre a très bien expliqué les difficultés qui surgiraient si le pourvoi en cassation devenait la seule voie de recours possible.

Certes, la procédure sera plus longue si le conseil de prud’hommes ne statue pas en premier et en dernier ressort. Mais, en même temps, il est, me semble-t-il, normal de maintenir une procédure respectueuse du droit des parties.

C’est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.

M. Guy Fischer. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. Tout comme ma collègue Annie David, je partage l’avis de M. le ministre, notamment lorsqu’il rappelle que le sujet n’a pas été visé par l’accord national interprofessionnel.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est un bon argument !

Mme Christiane Demontès. De notre point de vue, il n’y a pas lieu d’empêcher l’appel, sauf à vouloir limiter les contentieux sur la rupture conventionnelle et à chercher à éviter pour l’employeur tout risque de sanction, comme la réintégration du salarié ou le versement de dommages et intérêts.

Par conséquent, nous voterons contre cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 53 rectifié, présenté par M. Souvet, Mme Procaccia, M. Esneu, Mme Henneron et MM. Hérisson et Bordier, est ainsi libellé :

Compléter le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1237-14 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date d'homologation de la convention.

La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Je le rappelle, au mois de janvier 2005, j’ai été le rapporteur du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale. Nous avions alors adopté une disposition tendant à limiter à douze mois les délais de recours contentieux ou de recours juridictionnel.

Afin de mieux « borner » le système de la rupture conventionnelle et de sécuriser davantage les conditions dans lesquelles les parties peuvent s’accorder, j’ai pensé qu’il était nécessaire et positif d’intégrer une telle disposition dans le présent projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur. Une telle précision nous paraît effectivement en cohérence avec la limitation à douze mois du délai de recours en cas de licenciement. Elle va effectivement dans le sens d’une meilleure sécurité juridique et d’une diminution de la durée du recours contentieux.

Néanmoins, cette disposition n’ayant pas été visée par l’accord national interprofessionnel, la commission a préféré émettre un avis de sagesse sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

En effet, comme vous le savez, en matière sociale, des discussions et des réflexions sont actuellement menées pour unifier le régime des prescriptions, qui serait fixé à cinq ans. À ce titre, je vous renvoie à la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière civile, qui vient d’être adoptée par l’Assemblée nationale.

Par ailleurs, un progrès a déjà été réalisé avec l’adoption de l’amendement n° 11 visant à préciser que le conseil des prud’hommes statue en premier et dernier ressort. Je ne souhaite pas que nous allions plus loin.

De plus, nous savons pertinemment que le nombre de recours dont nous serons saisis a peu vocation à varier au-delà des douze premiers mois. Je ne vois donc pas pourquoi, surtout au moment où nous menons une réflexion d’ensemble, nous modifierions le délai pour le ramener de cinq ans à douze mois.

Voilà pourquoi, pour une question à la fois de fond et de méthode, eu égard aux discussions qui sont en cours, le Gouvernement demande le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement.

M. le président. Monsieur Souvet, l'amendement n° 53 rectifié est-il maintenu ?

M. Louis Souvet. Non, monsieur le président. Je comprends les raisons invoquées par M. le ministre, et je retire donc cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 53 rectifié est retiré.

L'amendement n° 77, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 1237-15 du code du travail.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L’objet de cet amendement est clair. Le texte proposé pour l’article L. 1237-15 du code du travail prévoit que les salariés protégés, c’est-à-dire détenteurs d’un mandat syndical, pourraient bénéficier de ce nouveau dispositif.

Notre amendement est tout aussi simple : nous proposons de supprimer cet alinéa, au motif que la disposition n’est pas dans l’accord national interprofessionnel, l’ANI.

On s’étonne de voir cette mesure figurer dans le projet de loi, d’autant que le Gouvernement n’a cessé de répéter que tout ce qui excédait la stricte transposition de l’ANI n’avait rien à faire dans ce texte ! Nombre de nos amendements ont d’ailleurs été repoussés sous ce prétexte ; j’espère donc que M. le ministre saura prêter une oreille attentive à notre proposition.

Cette mesure nouvelle par rapport à l’ANI vient contredire tous les discours gouvernementaux officiels. Nous en avons pris l’habitude ! Lors de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, sur lequel la commission mixte paritaire se réunira mardi prochain, vous nous disiez déjà vouloir réaliser une simple transposition. Vous avez pourtant malicieusement inséré un alinéa autorisant l’enseignement non mixte… Cela a d'ailleurs fait l’objet d’un débat passionnant ici même !

De plus, la disposition que vous ajoutez pourrait faire courir un risque d’achat de mandat. Cette mesure pourrait faire peser un doute trop important sur les représentants des salariés à qui l’on donne mandat pour défendre ces derniers dans l’entreprise.

La démocratie sociale d’entreprise, comme la démocratie dans son ensemble, exige à la fois de la transparence et de la confiance ; votre mesure pourrait entamer cette dernière, les représentants du personnel pouvant être suspectés de monnayer leur départ.

Or, ne l’oublions pas, les salariés élus le sont pour l’ensemble des salariés et, s’ils sont protégés, c’est justement pour les mettre à l’abri de l’arbitraire et du seul pouvoir de l’employeur.

Adopter cette disposition aboutirait indéniablement à revenir sur cet équilibre, ce qui est inacceptable. Cette disposition est en outre contraire à l’ANI.