M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Cet amendement tend à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance…

M. Thierry Repentin. Ben voyons !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Parfaitement, monsieur Repentin ! Comme vous le savez, la République connaît des alternances politiques régulières. Or, que je sache, quand vos amis se trouvaient au pouvoir ils ne se sont pas privés de recourir aux ordonnances ! Au contraire, ils en étaient les champions !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Ne nous reprochez donc pas des procédures que vous avez pratiquées à grande échelle ! D'ailleurs, ces ordonnances sont prévues par la Constitution.

Le Gouvernement sera donc habilité à prendre par voie d’ordonnance les dispositions relevant du domaine de la loi qui sont nécessaires pour mettre la section 4 du chapitre I du titre IV du livre V du code de l'environnement, dans sa partie législative, en conformité avec le règlement n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006, qui concerne les transferts de déchets.

En effet, cette section du code n'est plus en adéquation avec le règlement 1013/2006 précité, qui impose aux États membres, notamment, d'intervenir quand les transferts transfrontaliers sont illicites ou ne peuvent pas être menés à leur terme pour diverses raisons. Il s'agit de mesures visant à la reprise des déchets – par exemple, leur réexpédition à leur point de départ – et, le cas échéant, à leur stockage temporaire ou à leur traitement.

Il convient en conséquence de modifier les dispositions législatives précitées, c'est-à-dire les articles L. 541-40 et suivants du code de l'environnement, pour traduire les obligations qui incombent à l'État en matière de mesures de police administrative, au sens du droit national.

Il est nécessaire aussi de modifier l'article L. 541-46 du code de l'environnement afin de sanctionner le non-respect des dispositions du règlement n° 1013/2006 susvisé – mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère que vous vous accorderez tous sur ce point.

Comme vous le voyez, monsieur Repentin, dans les situations d’urgence, il est utile de légiférer par ordonnance !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Bizet, rapporteur. Il s'agit ici d’une procédure d’adaptation de la réglementation communautaire.

Le Gouvernement souhaite apporter des modifications purement formelles à des dispositions extrêmement techniques, en remplaçant certaines terminologies par d’autres qui sont prévues par la directive. C’est notamment pour cette raison qu’il a souhaité procéder par voie ordonnance, et nullement pour priver le Parlement de ses prérogatives !

La commission émet donc un avis très favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Soulage, pour explication de vote.

M. Daniel Soulage. Si vous le permettez, monsieur le président, mon intervention portera en même temps sur les amendements nos 96 et 97.

M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue.

M. Daniel Soulage. Ces deux amendements gouvernementaux tendent à autoriser l’exécutif à adopter, par voie d’ordonnance, des dispositions qui relèvent du domaine de la loi. L’objectif visé est de mettre en conformité le code de l’environnement avec le règlement du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets et avec le règlement REACH, en tenant compte de divers autres textes communautaires intéressant les produits chimiques et biocides.

Par principe, les sénateurs du groupe Union centriste-UDF sont opposés au recours aux ordonnances. Certes, nous sommes tout à fait conscients de la nécessité d’agir vite pour éviter un trop grand retard dans la transposition de ces dispositions et prouver ainsi l’implication européenne de la France, au moment où celle-ci s’apprête à assurer la présidence de l’Union européenne.

Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, vous avez également prétexté de la complexité et de la technicité des domaines traités par ces différents règlements pour justifier le recours aux ordonnances, et cet argument n’est pas recevable, me semble-t-il : soit nous nous trouvons dans le domaine de la loi, soit tel n’est pas le cas !

Le texte que nous examinons aujourd'hui est lui-même très technique, mais il ne me semble pas que les parlementaires aient démérité. Études et débats sont toujours utiles. Surtout, il nous paraît incohérent qu’au moment où le Parlement examine un projet de réforme des institutions censé lui rendre du pouvoir on nous impose à la dernière minute deux ordonnances qui ne sont pas neutres, puisque le règlement REACH avait suscité de nombreux débats dans l’opinion publique lors de son adoption.

Je crois donc pour le moins nécessaire que le Parlement débatte de cette question, ne serait-ce que dans un souci de transparence vis-à-vis des citoyens.

Enfin, permettez-moi de rappeler le souhait, que j’ai émis lors de la discussion générale, de voir notre mode de transposition des directives évoluer. Cette remarque ne s’applique pas seulement au présent gouvernement, mais aussi à ceux qui l’ont précédé : la France devrait prendre l’habitude de se mettre au travail dès l’adoption d’une directive ou d’un règlement, pour réussir la transposition de ces textes dans les meilleures conditions, en cohérence, d'une part, avec notre culture et notre droit, et, d'autre part, avec la volonté réaffirmée de voir atteints leurs objectifs.

Je souhaite également que le gouvernement actuel et ses successeurs soumettent immédiatement les textes européens à transposer au Parlement, afin que ce dernier dispose du temps nécessaire pour travailler correctement, ce qui, à mon sens, n’est pas vraiment le cas aujourd'hui.

Pour toutes ces raisons, les sénateurs centristes s’abstiendront sur ces deux amendements.

M. Thierry Repentin. Tout ça pour ça !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

L'amendement n° 97, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 5, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnances, dans un délai de douze mois à compter de la date de publication de la présente loi, toutes mesures afin d'adapter d'une part les dispositions législatives relatives aux produits chimiques et aux biocides du titre II du livre V du code de l'environnement, d'autre part les dispositions législatives relatives aux risques chimiques du titre I du livre IV de la quatrième partie du code du travail, et celles relatives aux dispositions pénales du titre IV du livre VII de la quatrième partie du code du travail et enfin de celles de l'article L. 5141-2 du code de la santé publique :

1° Au règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n° 793/93 du Conseil et le règlement (CE) n° 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission ;

2° Au règlement (CE) n° 842/2006 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 relatif à certains gaz à effet de serre fluorés ;

3° Au règlement (CE) n° 850/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant les polluants organiques persistants et modifiant la directive 79/117/CEE ;

4° Au règlement (CE) n° 304/2003 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant les exportations et importations de produits chimiques dangereux ;

5° Au règlement (CE) n° 2037/2000 du Parlement européen et de Conseil du 29 juin 2000 relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone ;

6° À la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides, au règlement (CE) n° 1451/2007 de la Commission du 4 décembre 2007 concernant la seconde phase du programme de travail de dix ans visé à l'article 16, paragraphe 2, de la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits biocides.

II. - Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du sixième mois à compter de la publication de ces ordonnances.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Comme dans le cas de l’amendement précédent, il s'agit ici simplement d’un réajustement technique. Néanmoins, je souhaite répondre à l’intervention de M. Soulage, qui regrette que l’on n’ait pas davantage discuté en amont de certaines dispositions.

Monsieur le sénateur, la compétence de la Haute Assemblée lui permet tout de même de juger en séance de l’importance des améliorations techniques apportées à un texte ! Reconnaissez que celles que propose le Gouvernement ne méritent pas de longs débats en commission, et que les discussions que nous menons librement dans cet hémicycle suffisent. (Marques d’hilarité sur les travées du groupe socialiste.)

M. Thierry Repentin. Vous avez mauvaise conscience !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Je ne doute pas que vous disposiez de la compétence et du bon sens nécessaires – car la technicité renvoie toujours au bon sens, comme le montrent les dispositions des amendements nos 96 et 97. D'ailleurs, les améliorations techniques qui sont ici proposées étaient souhaitées par tous.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je pense que vous êtes tous capables, quelle que soit votre orientation politique, de donner immédiatement votre avis sur les propositions du Gouvernement !

Cet amendement habilite donc le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures nécessaires pour modifier la partie législative du code de l'environnement.

Il s'agit de compléter ou de modifier les dispositions relatives au contrôle et à la constatation des infractions, aux sanctions administratives et aux sanctions pénales prévues par les articles L. 521-12 à L. 521-24 du code de l'environnement afin de sanctionner le non-respect du règlement REACH, en tenant compte, en tant que de besoin, de divers directives et règlements communautaires relatifs aux produits chimiques et biocides.

Que je sache, nous souhaitons tous sanctionner les dérives qui porteraient atteinte à notre environnement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Bizet, rapporteur. Comme l’a souligné tout à l'heure M. le secrétaire d'État, le recours à l’article 38 de la Constitution est motivé, d'une part, par la nécessité de légiférer avant le 1er décembre 2008 sur les sanctions pénales et administratives liées au non-respect des dispositions essentielles du règlement REACH, et, d'autre part, par le caractère technique des dispositions à prendre.

Il s'agit de mettre en cohérence avec le règlement REACH l’ensemble des règlementations, que celles-ci concernent le travail, la santé, ou l’environnement, mais aussi d’adopter des dispositions de « toilettage ». Ici encore, la plupart des modifications ne seront que formelles.

Cet amendement doit donc absolument être pris en compte, mais il n’est pas fondamental. C’est pour cela que le Gouvernement a choisi de l’inclure dans le présent projet de loi.

La commission émet donc un avis tout à fait favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Mme Odette Herviaux. Le règlement REACH est entré en vigueur le 19 janvier 2007, me semble-t-il. Le 1er juin 2008 s’ouvrira une nouvelle phase, qui se prolongera jusqu’en décembre prochain, celle de l’enregistrement préalable des substances chimiques par les entreprises. Ce texte se trouve donc déjà largement mis en œuvre.

En revanche, la directive 2006/121/CE doit entrer en vigueur le 1er juin prochain. Elle a été adoptée à la même date que la précédente et elle permet le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière de classification, d’emballage et d’étiquetage des substances dangereuses, afin de faciliter la mise en œuvre du règlement REACH.

Or, de façon surprenante, cette directive ne figure pas dans votre liste, même par anticipation – une technique qui avait pourtant été mise en œuvre, par exemple, lors de nos débats sur la question de la pollution maritime.

Par ailleurs, l’argument selon lequel nous devrions nous mettre à jour en matière de transposition des directives avant le début de la présidence française de l’Union européenne trouve ses limites, surtout lorsque cette attitude risque de devenir source de positionnements anti-européens.

Mes chers collègues, je m’explique : faudrait-il faire « passer en douce » – passez-moi l’expression ! – la législation européenne et ne pas assumer les négociations qui ont eu lieu entre les gouvernements à l'échelle communautaire ? C’est discutable, surtout quand l’Union, comme cela a été le cas pour ce règlement, cède à certains lobbys, notamment les industries chimiques. En effet, les concessions qui ont été consenties pour parvenir à ce texte l’ont été surtout au détriment des travailleurs de ces industries...

Je suis donc persuadée que ce texte méritait un véritable débat, et non une transcription par ordonnance aussi rapide, avec une évaluation des conséquences de ses dispositions et de ses abandons, donc, tout simplement, un travail parlementaire sérieux en amont.

Monsieur le secrétaire d'État, chat échaudé craint l’eau froide ! Peut-être s’agit-il d’éviter que le règlement REACH ne suscite des débats aussi intenses, passionnés et riches que ceux qui ont accompagné le texte sur les OGM ?

Même si le compromis obtenu n’est pas totalement satisfaisant, cette réforme de la réglementation devrait avoir un impact considérable sur la santé des citoyens et des travailleurs. Je crois donc qu’un véritable travail parlementaire était nécessaire pour montrer aux citoyens français que nous pouvons nous montrer tenaces quand nous souhaitons faire avancer les choses, y compris à l'échelle européenne.

Par ailleurs, le règlement REACH n’est pas le seul concerné. Vous nous proposez aussi, dans le 3° du I de cet amendement, d’adapter dans notre droit le règlement n° 850/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant les polluants organiques persistants et modifiant la directive 79/117/CEE. De nouveau, nous découvrons une transposition un peu tard !

En fait, vous nous demandez, une fois encore, de signer un chèque en blanc. Vous savez ce que je pense de cette méthode !

Si l’on peut parfois admettre que le Gouvernement soit habilité à prendre par ordonnance des mesures pour transposer certaines dispositions, nous nous y opposons très fermement dans ce domaine.

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Mon intervention vaudra pour les amendements nos 96 et 97.

Je ne vais pas revenir sur tout ce qui vient d’être dit de manière excellente. Nous aussi, nous nous opposons totalement au fait d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur ces questions, d’autant que, une fois de plus, nous n’avons pas eu le temps d’effectuer un travail sérieux.

Disons-le clairement, beaucoup trop de lobbies sont intervenus au niveau européen au moment des négociations concernant les mesures relatives aux biocides et aux produits chimiques. La France ayant fait partie des pays qui se sont montrés faibles face à ces lobbies, je ne peux absolument pas faire confiance s’agissant de dispositions qui seraient prises par ordonnance.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Nous ne faisons rien en douce !

M. Jean Desessard. Et violemment ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Les deux amendements du Gouvernement ont été présentés en toute transparence. En outre, il ne s’agit pas d’une transposition.

Que je sache, le règlement REACH s’applique aujourd’hui. En l’occurrence, le Gouvernement ne demande rien d’autre que d’adapter la législation française au droit européen et de pouvoir tout simplement continuer à appliquer ledit règlement. Il pense que le Sénat, dans sa grande sagesse, le suivra, car ces dispositions sont indispensables.

M. Thierry Repentin. La majorité du Sénat le fera !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.

M. Daniel Soulage. Je m’abstiens.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

L'amendement n° 98, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 5, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 414-4 du code de l'environnement est ainsi rédigé :

« Art. L. 414-4. - I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après « Évaluation des incidences Natura 2000 » :

« 1° Les documents de planification qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, sont applicables à leur réalisation ;

« 2° Les programmes ou projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations ;

« 3° Les interventions et activités humaines.

« II. - Les travaux, aménagements, ouvrages ou installations ainsi que les interventions ou activités humaines prévus par les contrats Natura 2000 ou pratiqués dans les conditions définies par une charte Natura 2000 sont dispensés de l'évaluation des incidences Natura 2000.

« III. - Les plans, programmes ou projets ainsi que les interventions ou activités humaines, soumis à un régime administratif d'autorisation, d'approbation ou de déclaration au titre d'une législation ou d'une réglementation distincte de Natura 2000 doivent faire l'objet d'une évaluation des incidences Natura 2000 lorsqu'ils figurent :

« 1° Soit sur une liste nationale établie par décret en Conseil d'État,

« 2° Soit sur une liste locale, complémentaire à la liste nationale, arrêtée par l'autorité administrative compétente.

« IV. - Tout plan, programme ou projet ainsi que toute intervention ou activité humaine qui ne relève pas d'un régime administratif d'autorisation, d'approbation ou de déclaration au titre d'une législation ou d'une réglementation distincte de Natura 2000 peut être soumis à autorisation en application de la présente section et doit alors faire l'objet d'une évaluation des incidences Natura 2000. Une liste locale des plans, programmes ou projets ainsi que des interventions ou activités humaines concernés est arrêtée par l'autorité administrative compétente parmi celles et ceux figurant sur une liste nationale de référence établie par décret en Conseil d'État.

« V. - Les listes arrêtées au titre des III et IV par l'autorité administrative compétente sont établies au regard des objectifs de conservation des sites Natura 2000, en concertation notamment avec des représentants de collectivités territoriales et de leurs groupements, de propriétaires, d'exploitants et d'utilisateurs concernés. Elles indiquent si l'obligation de réaliser une évaluation des incidences Natura 2000 s'applique dans le périmètre d'un ou plusieurs sites Natura 2000 ou sur tout ou partie d'un territoire départemental ou d'un espace marin.

« VI. - L'autorité chargée de l'autorisation, de l'approbation ou de recevoir la déclaration s'oppose à tout plan, programme ou projet ainsi qu'à toute intervention ou activité humaine si l'évaluation des incidences requise en application des III et IV n'a pas été réalisée, si elle se révèle insuffisante ou s'il en résulte que la réalisation portera atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000.

« À défaut pour la législation ou la réglementation applicable au régime d'autorisation, d'approbation ou de déclaration concerné de définir les conditions dans lesquelles l'autorité compétente s'oppose, celles-ci sont définies au titre de la présente section et impliquent qu'en l'absence d'opposition expresse dans un délai déterminé, le plan, le programme, le projet, l'intervention ou l'activité humaine peut entrer en vigueur ou être réalisé à compter de l'expiration dudit délai.

« VII. - Lorsqu'une évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 et en l'absence de solutions alternatives, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000. Ces mesures compensatoires sont à la charge de l'autorité qui a approuvé le plan ou du bénéficiaire des travaux, de l'installation, de l'ouvrage, de l'aménagement, de l'intervention ou de l'activité humaine. La Commission européenne en est tenue informée.

« VIII. - Lorsque le site abrite un type d'habitat naturel ou une espèce prioritaires qui figurent, au titre de la protection renforcée dont ils bénéficient, sur des listes arrêtées dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, l'accord mentionné au VII ne peut être donné que pour des motifs liés à la santé ou à la sécurité publique ou tirés des avantages importants procurés à l'environnement ou, après avis de la Commission européenne, pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur. »

II. - Au premier alinéa du I de l'article L. 414-5 du code de l'environnement, les mots : « programme ou projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement » sont remplacés par les mots : « programme ou projet d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations ou lorsqu'une intervention ou une activité humaine ».

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Nous abordons le sujet des zones Natura 2000.

M. Jean-Louis Carrère. Attention …

Mme Évelyne Didier. Sujet sensible !

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Les zones Natura 2000, que nous, élus locaux, connaissons tous, sont des zones identifiées à haute valeur patrimoniale faunistique et floristique.

M. Jean-Louis Carrère. Le stade Mayol ! (Sourires.)

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Le stade Mayol est une zone protégée, monsieur le sénateur, vous le savez très bien ! Il nous est cher à tous, notamment à celles et ceux qui y sont accueillis – toujours avec grand plaisir –, même s’il est vrai que l’accueil d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier. (Nouveaux sourires.)

Pour en revenir aux zones Natura 2000, à l’évidence, ce ne sont pas des sanctuaires où l’activité humaine serait interdite. Les activités économiques ou de loisirs y sont autorisées : la chasse, la pêche, l’agriculture, l’élevage, etc.

Les zones Natura 2000 font l’objet d’un document d’objectifs qui fixe la définition du bon état de conservation et précise la nature et les modalités de réalisation des activités humaines comme la chasse, sujet sur lequel le Sénat a d’ailleurs débattu il y a quelques jours. Ces objectifs sont déclinés de manière opérationnelle dans un document de gestion, et des contrats sont passés avec les agriculteurs, les fédérations départementales de chasseurs, de pêcheurs, sans oublier les propriétaires forestiers.

L’objet du présent amendement est d’indiquer de manière explicite et concrète que le régime d’évaluation environnementale des incidences Natura 2000 peut s’appliquer non seulement à des « documents de planification », mais également à des « interventions et activités humaines ». Cette rédaction permet aussi, à la veille de la présidence française de l’Union européenne, de respecter la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, qui a été saisie le 27 juin 2007 sur ce point. Il est souhaitable que la France soit également un bon élève dans ce domaine !

Cela revient à formaliser l’évaluation environnementale sans remettre en cause, bien évidemment, les documents d’objectifs et de gestion existants.

Le régime d’évaluation des incidences constitue une réelle opportunité pour de nombreux projets ou interventions, car il permet de démontrer leur absence d’effet significatif sur les sites Natura 2000, voire leurs bénéfices environnementaux.

Dans un site Natura 2000, on souhaite « seulement » éviter la détérioration des espèces et des habitats ; on ne veut pas interdire les activités qui utilisent durablement ces sites. Je le répète, car on a toujours l’impression que l’on ne peut rien faire dans ces zones, les pratiques agricoles, de pêche et de chasse sont ainsi souvent indispensables et définies dans un cadre de gestion, qui les sécurise. Ce cadre est élaboré localement, en totale concertation, dans des comités présidés par des élus locaux.

On est là au cœur du projet de gestion durable des sites, intégrant les pratiques économiques, sociales et culturelles en les formalisant.

En ce qui concerne l’évaluation des incidences des projets réalisés sur les sites, ce régime est déjà en place. L’amendement conserve la structure du régime avec des listes positives permettant d’assurer la sécurité juridique des citoyens ou le renvoi à des listes élaborée localement. Le Gouvernement examinera, avec tous les acteurs concernés, ce qu’il est nécessaire d’inclure dans ces listes nationales positives.

Je conclus en prenant solennellement l’engagement, au nom du Gouvernement, d’élaborer les dispositions réglementaires d’application dans un cadre partenarial et transparent, selon la même logique que l’élaboration du projet législatif qui a permis à tous les acteurs concernés d’en comprendre les enjeux et les principes, et d’y souscrire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Bizet, rapporteur. Les mesures proposées visent à répondre à un défaut de transposition de la directive de 1992 dite directive « Habitat ».

Cet amendement concerne un sujet particulièrement sensible, puisqu’il s’agit de la transposition en droit français des dispositions relatives à Natura 2000. Il tend à répondre à un avis motivé de la Commission européenne, qui estime, sur le fondement d’un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes de 2007, que la France a mal transposé les articles de la directive de 1992 sur l’évaluation des incidences Natura 2000. Récemment, les Pays-Bas ont été très lourdement condamnés pour un défaut de transposition similaire.

Sur le fond, la commission comprend les préoccupations du Gouvernement. Toutefois, il s’agit de mesures particulièrement sensibles, dont les conséquences, notamment pour les collectivités locales et tous les acteurs locaux, sont importantes.

La commission a estimé qu’elle ne disposait pas d’éléments d’appréciation suffisants pour évaluer précisément l’impact des dispositions proposées. C’est pourquoi elle a souhaité qu’un délai supplémentaire de réflexion soit laissé aux parlementaires.

La commission est très inquiète de l’extension à toutes les interventions et activités humaines. Il n’existe en effet aucune mesure de l’effet de l’élargissement ainsi proposé de l’obligation d’évaluation des incidences au titre de Natura 2000. De même qu’avec le sous-amendement n° 129 rectifié, la commission marque sa profonde inquiétude.

Pour toutes ces raisons, à moins que le Gouvernement ne propose de rectifier son amendement, j’émets un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État. J’ai entendu les réserves et les interrogations exprimées par M. le rapporteur. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de modifier son amendement n° 98.