M. Roland Courteau. Je n’insisterai pas davantage sur la nécessité absolue d’adopter ces amendements identiques.

Nous aurions dû d’ailleurs voter cette disposition voilà trois ans,…

M. Gérard Delfau. C’est vrai !

M. Roland Courteau. …lorsque je l’avais proposée dans cette enceinte, en vain, hélas !

Les conséquences de délais de paiement très longs sont redoutables pour nos vignerons, frappés de surcroît par une crise sans précédent et beaucoup plus inquiétante que celle de 1907 et les événements tragiques qui l’avaient accompagnée.

Certes, quelques dispositions ont été prises récemment – tant mieux ! –, mais c’était le moins que les pouvoirs publics pouvaient faire. D’autres mesures d’urgence restent à mettre en œuvre, telles que des aides directes de trésorerie en faveur des viticulteurs les plus en difficulté.

Il faut savoir que, au cours des quatre dernières années, la chute des revenus de certains vignerons atteint 40 % en moyenne, pour avoisiner 50 %, voire 60 %, notamment en Languedoc-Roussillon.

Résultat : pour survivre, les viticulteurs ont recours à l’arrachage, ce qui est un véritable crève-cœur ! C’est ainsi que la crise est en train de rayer des pans entiers de la viticulture languedocienne, avec les conséquences sociales et économiques que l’on devine.

Je profite de l’occasion pour souligner qu’il faut aider les viticulteurs les plus en difficulté à franchir ce cap difficile, sauf à les voir disparaître. En effet, que deviendront ces terres arrachées, sinon des friches ?

Quant aux mesures à moyen terme qui sont à prendre, monsieur le secrétaire d’État, vous les trouverez énoncées dans les préconisations du rapport sénatorial sur l’avenir de la viticulture française, rédigé, après un an de travail, par Gérard César, Gérard Delfau, Gérard Le Cam et moi-même.

Que l’on mette en place les quinze propositions que nous avons émises, et peut-être pourra-t-on enfin sauver notre viticulture ! (Mme Bariza Khiari ainsi que MM. Gérard Delfau et Gérard Le Cam applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.

M. Dominique Mortemousque. Certes, réduire les délais de paiement est une bonne chose – et nous sommes unanimes sur ce point –, mais la filière viticole ne dépend pas uniquement de cela ! De deux choses l’une : ou bien elle est performante, et ce jusqu’au consommateur, c’est-à-dire celui qui boit la bouteille, ou bien elle ne l’est pas, auquel cas les viticulteurs se cassent la figure !

M. le président. Boire la bouteille, c’est beaucoup ! Abus d’alcool nuit, ne l’oublions pas ! (Sourires.)

Je mets aux voix les amendements identiques nos 262 rectifié bis et 773 rectifié.

Mme Anne-Marie Payet. Je vote contre.

(Les amendements sont adoptés. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Gérard Delfau applaudit également.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 772 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Rainaud, Tropeano, Madrelle, Dussaut, Journet, Sutour, Rouvière, Delfau et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le dernier alinéa (4°) de l'article L. 443-1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour les boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du code général des impôts, un acompte représentant au moins 15 % du montant du prix de la commande doit être réglé par l'acheteur au vendeur ou à son subrogé, dans un délai de 10 jours francs, suivant la signature du contrat. »

II. - Ce même article est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ces dispositions s'appliquent, à défaut d'accords interprofessionnels rendus obligatoires, dans les conditions prévues par le chapitre II du titre III de la loi n°        du            de modernisation de l'économie.

« Dans le cas où l'acompte n'est pas versé, dans le délai de dix jours, le vendeur peut demander au président du tribunal compétent statuant en la forme des référés de lui adresser une injonction à payer. »

III. - La perte de recettes résultant pour le budget de l'État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de me réjouir du vote quasi unanime qui vient d’avoir lieu. Il s’en est fallu d’une voix pour qu’il soit unanime : c’est dommage ! Mais ce vote constitue un signal fort adressé à notre viticulture, qui en a bien besoin.

Par le présent amendement, dont nombre de signataires sont présents sur ces travées, notamment Marcel Rainaud ou Daniel Raoul, le groupe socialiste souhaite qu’il soit mis fin aux pratiques de certains acheteurs, négociants ou autres, qui ne respectent pas les engagements qu’ils ont pris lors de la conclusion du contrat de vente.

C’est ainsi que les vignerons se voient parfois imposer des réductions de prix auxquelles ils peuvent difficilement se soustraire, sachant que, en cas de refus de leur part, le négociant promet de ne plus revenir, menace qui n’est pas rare.

Il y a pire : comme dans le cas précédent, sous le prétexte qu’une baisse des cours serait intervenue entre la conclusion du contrat et la date de livraison, certains négociants résilient purement et simplement les contrats, n’hésitant pas à mettre les producteurs dans une situation critique. En effet, une telle attitude n’est pas sans conséquences financières graves pour les viticulteurs.

C’est la raison pour laquelle nous proposons qu’un acompte représentant au moins 15 % du montant de la commande soit réglé par l’acheteur au vendeur, ou à son subrogé, dans un délai de dix jours francs suivant la signature du contrat. Je sais que Gérard Delfau soutient également cette proposition. (M. Gérard Delfau opine.)

Il s’agit, on l’aura compris, de protéger nos producteurs contre de telles pratiques particulièrement condamnables, de fidéliser les parties contractantes et, donc, de sécuriser la relation contractuelle entre viticulteurs et négociants. Bref, il faut que la loi, à défaut d’accords interprofessionnels, protège le producteur.

Nous avions déposé et défendu le même amendement en 2005, à deux reprises.

En premier lieu, lors de l’examen du texte en faveur des petites et moyennes entreprises, le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales, tout en admettant que le problème était réel, avait émis un avis défavorable, et le Sénat l’avait hélas ! suivi.

En second lieu, en novembre de la même année, lors de l’examen de la loi d’orientation agricole, le ministre de l’agriculture et de la pêche, la commission des affaires économiques et le Sénat avaient rejeté l’amendement, sans aucun état d’âme.

Aussi, je suis aujourd’hui tout particulièrement impatient de connaître l’accueil que le Sénat réservera, cette fois, à notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 1019 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article L. 664-7 du code rural, il est inséré un article L. 664-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 664-8 - L'acheteur de boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du code général des impôts doit verser au vendeur ou à son subrogé, lors de la conclusion du contrat de vente, un acompte représentant au moins 15 % du montant de la commande. Le solde est réglé dans les conditions prévues au 4° de l'article L. 443-1 du code de commerce.

« Les dispositions du précédent alinéa s'appliquent à défaut d'accords interprofessionnels rendus obligatoires dans les conditions prévues par le chapitre II du titre III.

« Lorsque l'acheteur ne verse pas l'acompte auquel il est tenu, le vendeur peut demander au président du tribunal compétent statuant en la forme des référés de lui adresser une injonction de payer, le cas échéant sous astreinte. »

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cet amendement s’inscrit dans la même ligne que l’amendement n° 772 rectifié bis. Toutefois, ce dernier n’ayant pas sa place dans le code de commerce, l’amendement du Gouvernement intègre la disposition dans le code rural,…

M. Roland Courteau. Pourquoi pas dans le code de commerce ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. …en la modifiant par le sous-amendement n° 1051 rectifié, sur lequel j’émets par avance un avis favorable.

Dans ces conditions, monsieur Courteau, je sollicite le retrait de l’amendement n° 772 rectifié bis, la disposition proposée trouvant sa place naturelle dans l’amendement gouvernemental, sous-amendé par vous-même.

M. le président. Le sous-amendement n° 1051 rectifié, présenté par MM. Courteau, Rainaud, Tropeano, Madrelle, Dussaut, Journet, Rouvière, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 1019 rectifié pour l'article L. 664-8 du code rural, remplacer les mots :

lors de la conclusion du contrat de vente

par les mots :

dans un délai de 10 jours francs suivant la conclusion du contrat de vente

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez parfaitement expliqué le lien qui existe entre les amendements nos 772 rectifié bis, 1019 rectifié et le sous-amendement n° 1051 rectifié.

La commission émet un avis favorable sur les deux dispositions qu’ils prévoient pour tenir compte de la spécificité viticole, à savoir le paiement d’un acompte représentant au moins 15 % du montant de la commande et la dissociation du versement de cet acompte et de la conclusion du contrat de vente.

M. le président. Monsieur Courteau, l’amendement n° 772 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Non, monsieur le président, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 772 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 1051 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l’amendement n° 1019 rectifié.

M. Gérard Le Cam. Voilà tout juste une semaine, entre 5 000 et 12 000 vignerons – 5 000 selon la police, 12 000 selon les organisateurs, pour employer une formule consacrée – ont manifesté à Montpellier pour alerter sur la crise de leur profession. Malgré une récolte un peu plus faible en volume en 2007, la crise perdure. Des revendications qui ne sont pas nouvelles, comme vient de le souligner mon collègue Roland Courteau, connaissent des avancées que nous soutenons, qu’il s’agisse des délais de paiement ou de l’acompte de 15 %.

Pour autant, les problèmes de la viticulture sont loin d’être réglés, car ils ne se limitent pas aux délais de paiement, comme l’a souligné M. Mortemousque. Ils concernent aussi le foncier non bâti, l’allégement de cotisations sociales réclamé par les vignerons, les normes phytosanitaires non harmonisées avec les normes européennes et, enfin, la hausse du prix du gazole, qui aggrave la situation.

Si ces amendements constituent un pas en avant, d’autres restent à franchir. Nous avons eu dans cette enceinte de multiples débats sur la viticulture et, sur de trop nombreux points, le Gouvernement reste malheureusement sourd.

Aussi, mes collègues et moi-même continuons à réclamer un sommet de la viticulture et un plan de sauvetage pour la profession. (Mme Odette Terrade applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Je tiens à vous remercier, monsieur le secrétaire d'État, de votre avis favorable sur notre sous-amendement n° 1051 rectifié. Merci à l’ensemble du Sénat pour le vote qu’il vient d’émettre. Ce dernier confortera votre amendement n° 1019 rectifié, identique à celui que nous avons retiré. Certes, le vôtre vise à compléter le code rural tandis que le nôtre s’inscrivait dans le code de commerce, mais ils visaient le même objectif.

Cela étant dit, sans vouloir gâcher la fête, je ferai une petite remarque : il aura fallu vous y prendre à deux fois pour présenter cet amendement.

En effet, si vous vous en souvenez bien, monsieur le secrétaire d'État, une première version visait à imposer le versement d’un acompte au moment de la réception de la facture, c’est-à-dire après la retiraison du produit, autrement dit dans des délais incertains, pouvant s’étendre de six mois à dix mois. Un vigneron m’indiquait récemment qu’entre la signature du contrat et la retiraison, donc l’émission de la facture, dix-huit mois s’étaient écoulés !

Le dispositif que vous aviez envisagé dans la première version de votre amendement était totalement inopérant ; il ne réglait en rien les problèmes qu’il est impératif de résoudre, c’est-à-dire la remise en cause par le négociant des engagements pris lors de la conclusion du contrat de vente.

Bref, vous ne consolidiez nullement la relation contractuelle entre producteurs et négociants. Aussi, j’avais déposé un sous-amendement visant à ce que le versement ait lieu dans un délai de dix jours francs suivant la conclusion du contrat.

Peut-être vous en êtes-vous inspiré ? Si tel est le cas, je m’en réjouis : ce n’est pas la paternité d’une action qui est importante, c’est son résultat !

M. Jean-Paul Emorine. La paternité importe un peu ! (Sourires.)

M. Roland Courteau. En tout cas, le résultat me satisfait totalement !

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.

M. Gérard Delfau. Nous allons donc assainir,…

M. Gérard Delfau. …je dis bien « assainir », une situation telle que, aussi étonnant que cela paraisse, une partie du négoce ne respectait pas l’engagement écrit qui avait été pris envers les vignerons. Voilà la réalité ! Il est heureux que nous décidions, probablement à la quasi-unanimité, d’y mettre fin par l’adoption de cet amendement.

Notre collègue Roland Courteau, qui a toujours été en pointe dans cette bataille, a bien expliqué la différence qui existe entre l’obligation de verser l’acompte de 15 % dans un délai de dix jours francs après la conclusion du contrat de vente et la position initiale du Gouvernement, aux termes de laquelle ce versement devait être effectué après la retiraison, à réception de la facture. Ce système permettait effectivement de prélever une sorte d’impôt indu sur le vigneron, puisque certains négociants – je ne les vise pas tous – pouvaient utiliser ou vendre le produit sans en avoir payé la moindre part.

Ce moment est important pour l’établissement de relations contractuelles sur le marché du vin. Comme nos collègues Roland Courteau et Gérard Le Cam l’ont dit, cet amendement n’apportera pas une solution définitive aux crises actuelles. Le rapport que nous avions présenté ensemble au nom de la commission des affaires économiques, dont les conclusions ont été validées à l’unanimité de ses membres, était beaucoup plus ambitieux. Néanmoins, il s’agit d’un signal. S’ajoutant à des mesures d’urgence encore insuffisantes – je dis cela à l’adresse de M. le ministre de l’agriculture – et aux mesures qui devront être prises en matière de foncier non bâti ou de prix du gazole, ce signal confortera les vignerons dans leur volonté de surmonter les difficultés qu’ils rencontrent actuellement et de continuer à exercer une activité dans laquelle la France est un grand exportateur.

Au surplus, compte tenu de son poids économique et de sa capacité à préserver les paysages, la viticulture permet aux élus que nous sommes de maîtriser le foncier. Aussi, nous ne pourrions que regretter sa disparition ou son affaiblissement.

M. Gérard Longuet. Très bien !

M. Gérard Delfau. Je souhaite que nos collègues suivent la position du Gouvernement et de la commission spéciale, que je remercie. Ainsi, nous voterons tous ensemble cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.

M. Dominique Mortemousque. Je ne gâcherai pas la fête, moi non plus ! (Sourires.)

L’adoption de cette disposition sera une bonne chose. N’oublions pas qu’il sera toujours possible de déroger à cette règle grâce aux accords interprofessionnels. Nous plaçons simplement un garde-fou.

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 1019 rectifié.

Mme Anne-Marie Payet. Je vote contre, monsieur le président !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6

Je constate que cet amendement a été adopté à la quasi-unanimité des présents.

L'amendement n° 267, présenté par M. Doligé, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un  article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le a de l'article 1601 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« a) d'un droit dû par chaque ressortissant, égal à la somme des droits arrêtés par la chambre de métiers et de l'artisanat, la chambre régionale de métiers et de l'artisanat et l'assemblée permanente des chambres de métiers dans la limite d'un montant maximum fixé respectivement à 0,306 %, 0,030 % et 0,047 % du montant annuel du plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année d'imposition.

« Pour les chambres de métiers et de l'artisanat de la Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de la Réunion, le montant maximum du droit est fixé à 0,333 % du montant annuel du plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année d'imposition.

« Les dispositions du présent a) relatives aux taux entreront en vigueur au 1er janvier 2009. »

II. - La perte de recettes pour les chambres de métiers et de l'artisanat, les chambres régionales des métiers et de l'artisanat et l'assemblée permanente des chambres de métiers résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. Après ce débat quelque peu enivrant (Sourires), j’en reviens à des considérations plus terre à terre.

Cet amendement aurait pu être défendu en son temps par M. le secrétaire d'État, lorsqu’il était député ; aussi, je suppose qu’il m’apportera son appui… (Nouveaux sourires.)

En apparence compliqué en raison de sa technicité, cet amendement est en réalité assez simple.

En tant que rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Développement et régulations économiques », j’ai eu à suivre la question des droits fixes perçus par les chambres de métiers.

Il s’agit d’un réel problème puisque, chaque année, le Parlement est amené à en débattre. C’est pourquoi il m’a semblé qu’il serait plus judicieux d’indexer les droits perçus pour leur fonctionnement par les chambres de métiers départementales ou régionales et par l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat, l’APCM, sur le montant annuel du plafond de la sécurité sociale en vigueur l’année d’imposition.

Un tel mécanisme, par son caractère automatique, serait plus équilibré et offrirait des perspectives.

Aussi, mes chers collègues, je suis certain que mon amendement retiendra toute votre attention. S’il est adopté, les quelques instants qui m’ont été nécessaires pour sa présentation seront compensés par le temps que nous économiserons chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances grâce à la simplification qu’il aura rendue possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Le principe de cet amendement est intéressant, d’autant que notre collègue Éric Doligé s’est souvent agacé, en tant que rapporteur spécial de la mission « Développement et régulation économiques », de la revalorisation rituelle du droit fixe perçu par les chambres de métiers et de l’artisanat.

Toutefois, cet amendement nous paraît prématuré pour deux raisons. D’une part, il relève plutôt, par sa nature, d’une loi de finances. D’autre part, il est permis de se demander si les pourcentages proposés tiennent compte des réformes en cours des réseaux consulaires dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

C’est pourquoi il nous semblerait raisonnable, après que nous aurons entendu les explications du Gouvernement, que M. Doligé accepte de retirer son amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Voilà un amendement intéressant, ce qui ne m’étonne pas de la part du sénateur Doligé, compte tenu de ses qualités. (Sourires.)

M. Bruno Sido. Comme toujours !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous nous proposez de remplacer le montant maximal du droit fixe, exprimé en euros, perçu chaque année par chaque niveau de chambre de métiers et de l’artisanat par une indexation automatique du droit maximal sur le plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l’année d’imposition.

En clair, vous souhaitez que soit actualisé le montant maximal du droit fixe auquel les chambres peuvent prétendre pour leur financement.

En apparence, cet amendement est logique.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Peut-être, du temps où j’étais député, l’aurais-je approuvé, parce que, à l’époque, la révision générale des politiques publiques n’existait pas encore.

Le Premier ministre m’a demandé d’engager une concertation avec les deux réseaux consulaires afin d’étudier les éléments leur permettant de gagner en productivité et en efficacité, et ce pour le bénéfice du contribuable, en l’occurrence l’entreprise.

Je voudrais attirer votre attention sur deux chiffres : aujourd’hui, les entreprises versent une contribution d’environ 150 millions d’euros pour le financement des chambres de métiers ; pour les chambres de commerce et d’industrie, le montant est beaucoup plus important puisqu’il atteint 1,2 milliard d’euros.

C’est la raison pour laquelle, avec l’assentiment des unes et des autres, nous cherchons actuellement les moyens de les rendre sinon plus efficaces, à tout le moins aussi performantes, et ce à moindres frais. Or, si nous décidions le principe d’une indexation automatique du droit fixe perçu par les chambres, ainsi que vous le proposez, cet effort resterait vain, car son indexation entraînerait évidemment son augmentation, à périmètre constant des activités des chambres de métiers.

Tel n’est pas notre souhait. Nous voulons engager une réflexion sur l’amélioration des réseaux, sur une meilleure productivité de ceux-ci, sur la mutualisation d’un certain nombre d’actions conduites par les chambres départementales vers le niveau régional. En résumé, nous voulons améliorer le fonctionnement du réseau. L’indexation automatique des droits perçus par les chambres ne serait pas le meilleur moyen de continuer et de conclure la négociation que nous avons engagée.

Bien que j’eusse voulu vous être agréable, monsieur Doligé, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement. Cependant, je prends l’engagement de travailler avec le réseau consulaire des chambres de métiers à la question de leurs ressources. Mais, avant d’agir, donnons-nous le temps de réfléchir à la meilleure manière de modérer leurs dépenses. Je souligne que j’ai obtenu que les éventuelles économies qui seront réalisées à efficacité constante soient reversées aux entreprises de notre pays.

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.

M. Philippe Marini. Cet amendement révélateur revient toujours dans nos débats. Qu’attendent les entreprises des chambres de commerce et qu’attendent les artisans des chambres de métiers ? Ne serait-il pas plus logique, dans la vision d’une économie libérée, que l’on confie le soin à ces entreprises et à ces artisans d’arbitrer le niveau de dépenses qui leur semble être le bon pour l’intérêt général de leurs professions ?

Cette question est analogue à celle qui se pose dans le cadre du débat sur la décentralisation.

Les compagnies consulaires sont des organes d’intérêt commun qui tirent leur légitimité de la loi, mais qui tirent leurs ressources de leurs adhérents, de leurs affiliés, de leurs assujettis. Or les services rendus ont une dynamique propre, à savoir la dynamique des dépenses et des charges, lesquelles, selon la loi inhérente à toute structure administrative, ont tendance à croître.

Leurs ressources, quant à elles, proviennent de leurs ressortissants, affiliés non pas librement, mais dans le cadre d’un système administré. La loi définit ce que les entreprises doivent payer pour des services communs.

Périodiquement, il est demandé au législateur d’intervenir, par exemple pour permettre le renflouement de telle chambre de commerce ou de telle chambre de métiers confrontée à des difficultés.

À cet égard, je me souviens que, voilà quelques années, nous avions dû voter, dans le projet de loi de finances, une augmentation extrêmement importante du droit perçu par un organisme consulaire du département des Landes afin de lui permettre d’équilibrer ses comptes.

De fait, comme le fait opportunément notre collègue Éric Doligé, je me suis toujours interrogé sur le caractère hybride de ce système. Ces services sont-ils utiles ou ne le sont-ils pas ? Les plus aptes à juger de leur utilité ne sont-ils pas les commerçants, les artisans, voire les agriculteurs dans le cas des chambres d’agriculture ?

M. Philippe Marini. Dans le cadre d’une loi de modernisation de l’économie, ne serait-il pas opportun de réfléchir à ces questions ? Vous nous dites que vous négociez, et vous avez raison, monsieur le secrétaire d’État, dans le souci de réduire les frais généraux qui sont imposés aux entreprises mais que finalement elles s’imposent à elles-mêmes. Ne vaudrait-il pas mieux traiter ces entreprises et ces affiliés comme des acteurs économiques responsables ? Ne serait-t-il pas temps de passer d’une vision à moitié administrée, à moitié autonome et à moitié étatique à une vision libérée, celle d’une économie véritablement modernisée ?

L’amendement de mon collègue Doligé a au moins le mérite de faire rebondir ce débat, parce que dans chaque loi de finances, il faut adapter, alors que l’on pourrait se dire, ma foi, ne perdons pas notre temps, il y a tant de sujets à évoquer : que l’indexation soit donc automatique ! Après tout, cela semble relever du bon sens. (Mmes Nathalie Goulet et Esther Sittler ainsi que M. Paul Blanc applaudissent.)

M. le président. Monsieur Doligé, l’amendement n° 267 est-il maintenu ?

M. Éric Doligé. Je vais faire durer un peu ! Mme Lamure m’a dit : « Il est trop tôt. » et M. le secrétaire d’État, « Il est trop tard, compte tenu de la RGPP. »

Si j’ai bien compris, nous allons prochainement mettre en place une loi de modernisation des chambres de commerce et des chambres de métiers. Mais M. le secrétaire d’État a pris un engagement, c’était important.

Il était important aussi que le rapporteur général s’exprime sur ce sujet, parce que c’est un vrai sujet, et je ne souhaite pas qu’on ait à nouveau des agacements d’année en année pour revenir sur ces textes.

M. le secrétaire d’État a pris un engagement. Sur mes amendements, j’en ai souvent entendu, des engagements et ils n’ont pas toujours été tenus ! Mais comme je fais confiance à M. le secrétaire d’État, je retire mon amendement.