M. Alain Gournac, rapporteur. Il s’agit simplement de prendre en compte le cas des salariés à temps partiel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 169, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, remplacer les mots :

d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche

par les mots :

de branche étendu ou, à défaut, d'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Cet amendement a été défendu avec l’amendement n° 168.

M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, supprimer les mots :

, à défaut,

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Une fois de plus, avec cet amendement, nous espérons vous convaincre de renoncer à inverser la hiérarchie des normes et de redonner sa place à l’accord de branche.

L’accord de branche, à notre sens, est un régulateur de la négociation sociale. Ce régulateur est d’autant plus important que les difficultés économiques sont grandes. Comme la semaine dernière, je voudrais vous montrer que, si l’accord de branche est très intéressant pour les salariés, il est aussi extrêmement important pour les entreprises, notamment pour les PME.

L’accord de banche est une référence qui permet bien souvent le règlement de différends au sein de l’entreprise. En effet, pouvoir faire appel à l’accord de branche, tant pour le salarié que pour le responsable de l’entreprise, est souvent un bon moyen pour sortir d’une difficulté.

Je crains fort qu’en inversant cette hiérarchie des normes vous ne nous fassiez aborder, monsieur le ministre, en terre inconnue, là où régnera beaucoup plus la loi de la jungle que celle d’une société organisée et contractualisée !

Comme l’ont dit mes collègues avant moi, je crois que nous allons de fait, non pas vers des accords d’entreprise, mais vers des accords de gré à gré. Je voudrais insister à mon tour sur le risque de détérioration de la vie des personnes qui en résultera.

Monsieur le ministre, votre collègue de l’éducation nationale a annoncé qu’il n’y aurait plus d’école le samedi matin. Cela signifie qu’il y aura davantage de temps libre pour les enfants. Mais comment marier cette politique de l’éducation nationale avec ce que vous êtes en train de faire, c’est-à-dire des rythmes de travail très fluctuants que l’on ne peut pas obligatoirement prévoir à l’avance ?

Sous la pression des événements, comment ces temps libres de l’enfant pourront-ils être gérés par des parents qui ne sauront pas s’ils travailleront ou pas ? Comment, dans ces conditions, ces parents pourront-ils programmer pour l’ensemble de l’année les activités sportives, musicales ou autres de l’enfant, alors que c’est une nécessité quand bien même il ne s’agirait que de s’assurer que l’enfant sera accompagné ?

Il y a là une incohérence, et je crains fort que ce que l’on décide aujourd’hui ne détruise la vie des personnes et ne se mette en place qu’au détriment de la cellule familiale, sans même parler des effets désastreux que cela risque aussi d’avoir au sein des entreprises.

C’est la raison pour laquelle nous persistons à dire que l’accord de branche était certainement la meilleure solution. Rien ne nous obligeait à y toucher.

Si les accords de branche étaient aussi difficiles à passer que le prétend M.  Raffarin, il me semble qu’il appartenait au Gouvernement de reprendre la main ! Vous n’avez pas manqué de le faire auparavant : si vous vouliez vraiment des accords de branche, il fallait reprendre la main, monsieur le ministre !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. Concernant l’amendement n° 169, monsieur Muller, vous poursuivez dans votre logique, nous, dans la nôtre !

Donc, comme pour les amendements nos 96 et 168 que nous avons déjà examinés, nous sommes défavorables.

En ce qui concerne l’amendement n° 98, là encore, nous souhaitons, et nous prenons nos responsabilités, donner la priorité à l’accord d’entreprise.

Nous sommes donc défavorables aux deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 98.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 170, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

En cas de réduction de ce délai, des contreparties au bénéfice du salarié sont prévues dans la convention ou l'accord.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. L’article 18 prévoit qu’en cas de changement de durée ou d’horaires le délai de prévenance fixé à sept jours peut être réduit aux termes de l’accord.

Cette disposition est déjà présente dans l’article L. 3122 -14 du code du travail. Cependant, l’un de ses alinéas précise que des contreparties au bénéfice du salarié sont alors prévues dans la convention ou l’accord, en cas de réduction du délai de prévenance de sept jours.

Ces dispositions ont disparu. Il me semble indispensable de les rétablir. La modification des horaires d’un salarié a en effet des conséquences sur l’organisation de sa vie privée, et ce d’autant plus qu’il est averti dans un délai inférieur à une semaine : il peut avoir des enfants à garder ou bien travailler par exemple jusqu’à des heures où il n’y a plus de transports collectifs. Ses projets personnels et sa vie privée se trouvent donc ainsi perturbés.

En prévoyant des contreparties, le code du travail prenait la juste mesure des problèmes causés par la réduction du délai de prévenance.

Par ailleurs, la réduction de ce délai, certes difficile à vivre pour l’ensemble des salariés, risque de pénaliser encore davantage les femmes, notamment celles qui ont un ou plusieurs enfants à charge.

Comment vont-elles s’organiser, soit pour faire garder leurs enfants non scolarisés, soit pour trouver quelqu’un qui aille chercher ces derniers à l’école et les garde jusqu’à ce qu’elles rentrent chez elles ?

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, votre majorité, qui a fait voter voilà peu la loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, ne prend-elle pas la mesure de la régression que cet article entraîne mécaniquement pour le droit des femmes ?

Telles sont les deux raisons pour lesquelles je vous propose, mes chers collègues, de maintenir dans la loi la nécessité de négocier des contreparties au bénéfice du salarié en cas de réduction du délai de prévenance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. Nous pensons, pour notre part, que nous devons faire confiance aux partenaires sociaux. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Annie David. Ce n’est pas contradictoire !

M. Alain Gournac, rapporteur. Oui, mes chers collègues, c’est un état d’esprit différent, je le reconnais !

Les contreparties en question seront naturellement prévues par les partenaires sociaux dans le cadre de leurs négociations.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, permettez-moi d’ajouter quelques mots aux arguments développés par mon collègue Jacques Muller.

J’ai essayé de vous expliquer tout à l’heure à quel point la disposition proposée pouvait être déstabilisante. Dès l’instant où la répartition des horaires fera l’objet d’une discussion de gré à gré dans un certain nombre d’entreprises,…

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est impossible !

M. Jean-Pierre Godefroy. …. imaginez ce que seront les conséquences pour les familles monoparentales.

Comment les hommes ou les femmes dans une telle situation pourront-ils s’organiser avec les délais de prévenance que vous proposez ? Vous allez véritablement déstructurer toute leur vie quotidienne !

Pourquoi tout cela ? Est-ce pour donner plus de liberté au travail, comme l’affirme M. le rapporteur ? La liberté au travail existe aujourd’hui, dans le cadre des rapports de force entre les salariés et les employeurs.

En réalité, vous songez non pas à la liberté au travail, mais bien à la liberté de faire travailler les gens lorsqu’ils ne le souhaitent pas, ce qui est tout à fait différent !

J’insiste beaucoup sur ce point, car je veux appeler l’attention de l’ensemble de nos collègues, au-delà des membres de la commission des affaires sociales, sur la nécessité de soulever le problème de la famille, qui est complètement absent de notre débat d’aujourd'hui sur l’organisation du temps de travail. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. À l’évidence, la réduction du délai de prévenance est source de difficultés pour tous les salariés. Mais elle risque de toucher encore plus durement les femmes, surtout celles qui élèvent seules leurs enfants. C’est un aspect qu’il importe de ne pas négliger.

On peut imaginer les conséquences pour ces femmes d’apprendre seulement deux ou trois jours à l’avance que leurs horaires de travail sont modifiés : elles sont confrontées à des problèmes d’organisation considérables.

Chacun sait – et j’ai pu le constater moi-même pour avoir représenté un canton où vivent nombre de familles monoparentales – que les femmes qui exercent un emploi partent travailler très tôt le matin.

Dès lors, le principal problème qu’elles doivent résoudre est celui de la garde de leurs enfants : comment s’organiser soit pour faire garder leurs enfants non scolarisés, soit pour trouver quelqu’un allant chercher ces derniers à l’école et les gardant jusqu’à ce qu’elles rentrent chez elles ?

Dans ces conditions, ne pas reprendre dans le texte les contreparties qui existent, c’est aller à l’encontre du travail des femmes dans les entreprises, comme l’a excellemment dit et répété notre collègue Martine Billard à l’Assemblée nationale.

Pourtant, la majorité a fait voter, voilà peu, la loi relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Il ne faudra donc pas s’étonner si aucun progrès n’est accompli en la matière avec le texte qui nous est soumis aujourd'hui.

Le problème du travail des femmes est un des points qui appellent notre vigilance, comme le travail des seniors et celui des jeunes, car, dans tous ces domaines, le présent projet de loi va à l’encontre des objectifs affichés par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Monsieur Godefroy, je suis heureuse de vous voir défendre activement la politique familiale.

Mme Gisèle Printz. Ce n’est pas nouveau !

Mme Marie-Thérèse Hermange. Mme Rozier et moi-même nous réjouissions d’ailleurs mezzo voce de constater que vous vous rapprochiez de nos idées en matière de politique familiale ! (M. Guy Fischer s’exclame.)

M. Robert Bret. On n’a pas de bonne à la maison !

Mme Marie-Thérèse Hermange. Lors des prochains débats que nous aurons sans aucun doute sur les modes de garde, voilà un futur point de convergence, mes chers collègues ! (Applaudissements sur les travées de lUMP – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Paul Girod. Très bien !

M. Jean-Pierre Godefroy. C’est aujourd'hui qu’il faut le mettre en application !

M. Guy Fischer. Le texte va à l’encontre de la politique familiale !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Mélenchon. Madame Hermange, vous vous méprenez totalement ! Nos points de vue sont en train non pas de se rapprocher, mais de s’éloigner ! Nous, nous allons voter un amendement au nom de la protection des droits de la famille, et vous, vous allez voter contre.

Mme Annie David. C’est vous, madame Hermange, qui vous éloignez !

M. Jean-Luc Mélenchon. Vous nous dites que nous verrons cela après. Peut-être, mais vous pouvez commencer tout de suite ! Il y a bien des sujets, madame, où vous montez en ligne avec l’énergie que l’on vous connaît ! Pourquoi pas celui-là ?

Il s’agit de protéger de pauvres diables pour leur donner la possibilité d’avoir une vie de famille normale.

Mme Catherine Procaccia. « De pauvres diables » ! Mais il n’y a pas que les pauvres diables qui travaillent !

M. Jean-Luc Mélenchon. Vous dites que l’on verra demain ! Mais c’est aujourd’hui qu’il faut le faire ! Votez avec nous ! (Mme Marie-Thérèse Hermange et Mme Janine Rozier rient.) Nos points de vue ne se rapprochent pas, et votre vote aujourd'hui vous éloignera de vos propres convictions !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 170.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Guy Fischer. Ils s’éloignent !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 171 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 271 est présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail.

La parole est à M. Jacques Muller, pour présenter l’amendement n° 171.

M. Jacques Muller. Le projet de loi, tel qu’adopté par l’Assemblée nationale, allège de manière considérable le contenu obligatoire de l’accord collectif, en offrant le choix à ses signataires de définir ou non, aux termes de cet accord, les modalités et l’organisation de la répartition de la durée du travail.

Au contraire, le texte actuellement en vigueur, beaucoup plus complet, impose de négocier le programme indicatif de la répartition de la durée du travail sur l’année.

Par conséquent, il est impensable qu’un simple décret puisse fixer la répartition des horaires, qui se doit, en effet, d’être décidée par le seul accord collectif !

Par ailleurs, je veux vous faire remarquer que cette disposition mentionne une répartition des horaires de travail par décret sur plus d’une semaine, sans poser de limite, ce qui peut donc aller jusqu’à l’année entière !

Je vous rappelle que le préambule de la Constitution de 1946 affirme ceci : « Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail […] ».

Quant au code du travail, son article L. 131-1 reconnaît « le droit des salariés à la négociation collective de l’ensemble de leurs conditions d’emploi, de formation professionnelle et de travail et de leurs garanties sociales ». Ce n’est donc pas à l’État de détenir ou d’accaparer le monopole de la production des normes sociales !

Dans un souci de préservation de la place accrue faite depuis des années à la négociation collective et au dialogue social, et pour ne pas rayer d’un trait ces acquis, déjà très malmenés par le présent projet de loi, je vous invite, mes chers collègues, à adopter mon amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 271.

Mme Annie David. Avec cet amendement, nous voulons affirmer que les modalités et l’organisation de la répartition de la durée du travail sur plus d’une semaine ne relèvent pas du domaine réglementaire, mais doivent être renvoyées à la négociation des accords collectifs.

Ainsi, nous revenons à la question du recours au pouvoir réglementaire sur ce point.

Nous l’avons vu précédemment, l’article 18 vise concrètement à favoriser un recours accru à la modulation des horaires de travail, recours pouvant aller jusqu’à l’annualisation.

Nous souhaitons donc supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l’article L. 3122-2 du code du travail, qui dispose ceci : « À défaut d’accord collectif, un décret définit les modalités et l’organisation de la répartition de la durée du travail sur plus d’une semaine. »

Une telle rédaction soulève évidemment des interrogations. Qui va tenir la plume du ministre quand il s’agira de définir les modalités d’application de la modulation ? S’agira-t-il des organisations syndicales représentatives de salariés, dont vous nous dites vouloir respecter la responsabilité et la légitimité, ou bien des cercles les plus fermés du patronat, qui inspirent depuis plus de quinze ans l’essence même de la législation du travail, version UMP ?

La proposition qui nous est faite est d’ailleurs un peu contradictoire : elle affirme la nécessité du dialogue social, et voilà qu’apparaît, au détour d’un alinéa, le recours au juge de paix réglementaire…

Au demeurant, pourquoi ces questions essentielles des modalités propres à la modulation relèveraient-elles du seul domaine réglementaire ? Craindrait-on de créer une controverse législative qui viendrait contrecarrer l’objectif de flexibilité débridée que vous vous fixez ?

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons évidemment que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Gournac, rapporteur. La commission, ne partageant pas du tout le point de vue des auteurs des deux amendements identiques nos 171 et 271, émet un avis défavorable. En effet, le décret mentionné à l’article 18 du projet de loi est un élément utile et important pour pallier l’absence d’accord.

Le Gouvernement pourra sans doute nous donner quelques précisions quant au contenu du décret.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Tout d’abord, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements identiques nos 171 et 271.

Ensuite, monsieur le rapporteur, je vous indique de façon très claire qu’il n’est certainement pas dans nos intentions de prévoir une annualisation d’accès direct, par décret, sans négociations. Il s’agira, comme le précise le texte, d’une variation sur quelques semaines, avec le cycle de travail, comme aujourd’hui. L’accès direct à l’annualisation est un fantasme !

Certains pays optent peut-être pour l’accord individuel s’ils ont le choix entre ce dernier et l’accord collectif. En France, nous privilégions l’accord collectif.

Enfin – je le dis à l’adresse de M. Mélenchon –, lorsqu’il n’y a pas de garantie à cet égard dans l’entreprise, c’est la loi qui s’applique.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 171 et 271.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 99 est présenté par M. Godefroy, Mmes Demontès et Printz, M. Desessard, Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 272 est présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-3 du code du travail.

La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, pour défendre l’amendement n° 99.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Avec l’article 18, la dynamique de régression sociale que vous imposez aux salariés et à leur famille est de nouveau à l’œuvre.

Il est inacceptable que l’employeur puisse de manière unilatérale moduler le temps de travail, pour ne pas dire l’imposer, comme ce sera le cas dans la plupart des situations.

La bonne marche de l’entreprise nécessite que le rapport de subordination qui caractérise le contrat de travail connaisse des limites. Tout employeur raisonnable vous le dira. En effet, comment voulez-vous que le salarié se voyant imposer des modifications continuelles de son rythme de vie et, par conséquent, de celui de sa famille s’investisse réellement dans son travail ?

N’allons-nous pas assister à l’explosion d’existences caractérisées par des rythmes totalement désynchronisés ? Ne créez-vous pas des sources de conflits supplémentaires ? N’allez-vous pas être à l’origine d’une détérioration du climat au sein des entreprises ? Ne craignez-vous pas que la concurrence, qui va se faire jour entre les salariés, ne débouche sur un moins-disant social accompagné de performances détériorées ?

Étant persuadés que de telles conséquences se manifesteront assez rapidement, nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 272.

Mme Annie David. Cet amendement vise à supprimer le texte proposé pour l’article L. 3122-3, qui est ainsi rédigé : « Par dérogation aux dispositions de l’article L. 3122-2 dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l’organisation du temps de travail peut être organisée sur plusieurs semaines par décision de l’employeur. »

Voilà qui montre l’extrême confiance que les auteurs du texte ont à l’égard de la négociation collective ! Ainsi, à peine venons-nous de voter l’article L. 3122-2, qui manifeste un recul sensible par rapport au contenu actuel du code du travail, qu’apparaît déjà l’article L. 3122-3, modifié, qui tend tout simplement à introduire des dérogations à l’application de l’article précédent. En poursuivant cette logique, nous passerions d’un encadrement de la modulation fondé sur des impératifs économiques à une application large, sans contrainte.

Une application sans contrainte signifie, nous l’avons vu, qu’elle sera susceptible d’être localisée – « sanctuarisée » – à une entreprise ou un établissement, et réalisée éventuellement sous le bénéfice d’un décret, qui imposera la modulation dans les entreprises où rien ne justifie qu’elle soit mise en œuvre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Ce que vous dites est entièrement faux ! À tenir de tels propos, madame David, vous risquez de rester longtemps dans l’opposition ! Vous cherchez à détourner les termes du débat !

M. Alain Gournac, rapporteur. En effet, le projet de loi ne remet aucunement en cause la consultation du comité d’entreprise prévue par le code du travail !

Mme Annie David. Monsieur le ministre, plutôt que d’affirmer à l’emporte-pièce que mes propos sont faux et de vous contenter d’émettre un lapidaire avis défavorable sur nos amendements, il serait plus utile que vous nous donniez quelques explications circonstanciées.

Certains articles de ce texte sont incompréhensibles…

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais non, vous avez parfaitement compris !

Mme Annie David. …et les non-dits y abondent. Nous venons de procéder à une nouvelle rédaction de l’article L. 3122-2 du code du travail ; or l’article L. 3122-3, dans sa rédaction prévue par le projet de loi, serait contradictoire avec cet article L. 3122-2. Du moins est-ce notre interprétation. Dès lors, libre à vous, monsieur le ministre, de prétendre que tout cela est faux et que nous n’avons rien compris ; mais alors expliquez-nous pourquoi !

Aux termes de l’article L. 3122-3 du code du travail que vous nous proposez d’adopter, dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l’employeur ne sera désormais plus tenu de consulter le comité d’entreprise sur l’organisation du temps de travail sur plusieurs semaines. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de le supprimer.

Monsieur le ministre, vous affirmez que, en de pareils cas, l’obligation de consulter le comité d’entreprise continuera de s’appliquer. Soit, mais en vertu de quels textes ? S’il s’avère que cette obligation demeure, peut-être retirerons-nous notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 273, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-3 du code du travail :

« Art. L. 3122-3. - Dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l'organisation du temps de travail peut être organisée sur plusieurs semaines si la proposition formulée par l'employeur emporte l'approbation du Comité d'Entreprise.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Il s’agit d’un amendement de repli qui se situe dans la suite logique de notre position de fond sur l’article L. 3122-3 du code du travail.

Il s’agit de donner sens à la démocratie sociale, monsieur le ministre, et il vous faut donc être cohérent. Au-delà du discours, nous savons comment les choses se passent quand l’entreprise veut absolument voir ses objectifs aboutir. En tout cas, il est indispensable, à notre avis, que l’organisation du temps de travail fasse partie du champ de la négociation collective. Si tel n’était pas le cas, on pourrait se demander pourquoi il a été question, au travers du titre Ier du projet de loi, de légitimer l’action syndicale, pour ensuite porter un véritable coup de poignard dans le dos des organisations syndicales avec le titre II, qui dénote le réel mépris dans lequel ces dernières sont tenues.

Rien ne peut justifier, en 2008, que les salariés se voient imposer, sans aucune discussion, des conditions de travail d’un autre temps, quoi que vous prétendiez, monsieur le ministre. Comme nous l’avons dit au cours de la discussion générale, ce projet de loi remet en cause tout notre héritage social, élaboré au cours du siècle précédent, et annonce une déréglementation dont la réforme des heures supplémentaires et des conventions de forfait sont les prémices.

Prenons l’exemple de Bosch. Sur le marché de Vénissieux, dimanche dernier,…

M. Guy Fischer. …j’ai rencontré un délégué syndical qui doit prendre part, cette semaine, à une réunion des instances européennes de Bosch, où il sera notamment question de la négociation de la convention de forfait en jours pour les cadres. Ce délégué syndical était parfaitement informé de la possibilité, prévue par le projet de loi, de porter la convention de forfait à 235 jours. À ma question portant sur la situation chez Bosch., il a répondu que la convention de forfait était jusqu’à présent de 212 jours de travail, mais qu’il était prévu de porter ce forfait au socle minimal de 218 jours.

M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, avec ce texte, vous ouvrez véritablement les vannes et, si je puis dire, vous prenez plusieurs années d’avance. Telle est la réalité. Vous pourrez demander à vos collaborateurs de vérifier ce que j’ai pu moi-même constater sur le marché dominical de Vénissieux-centre ! (Sourires.)