responsabilités dans la disparition d'un militant tchadien des droits de l'homme

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 318, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.

M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite interroger M. le ministre des affaires étrangères sur les conditions de la disparition, le 3 février 2008 à N’Djamena, d’Ibni Oumar Mahamat Saleh, militant des droits de l’homme, responsable politique très important du Tchad, ancien recteur, ancien ministre et docteur en mathématiques de l’université d’Orléans.

Sa disparition a suscité beaucoup d’émotion dans la communauté mathématique mondiale ; de nombreuses personnes se mobilisent sur cette question, en particulier au Sénat, où cinquante sénateurs et sénatrices, appartenant à tous les groupes politiques, ont apporté leur soutien à la cause de ce militant et homme politique.

Comme vous le savez, un rapport officiel a récemment évoqué son décès possible. II s’agit du rapport de la commission d’enquête sur les événements survenus en République du Tchad du 28 janvier au 8 février et leurs conséquences, rendu public le 3 septembre 2008.

Ce rapport indique que ce militant « étant la seule victime à ne pas être réapparue, il est en effet permis de penser qu’il serait désormais décédé : soit en succombant aux mauvais traitements qu’il aurait subis – coups, tortures, manque de soins et de médicaments, etc. –, soit en ayant été assassiné, s’agissant en l’occurrence d’un “assassinat politique” ».

Les investigations concernant la disparition de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh ont été menées, au sein de cette commission, par un groupe restreint composé de cinq personnes, dont quatre experts internationaux, qui ont auditionné plus de quarante témoins. Le rapport établit la responsabilité de l’État tchadien dans les termes suivants : « ces disparitions sont survenues au moment où l’armée gouvernementale avait repris le contrôle de la situation dans la ville de N’Djamena. Par conséquent, d’une part ces actes sont imputables à l’État tchadien et [...] il en est de même d’autre part des arrestations et détentions arbitraires et d’enlèvements des personnalités politiques dont il est question dans le rapport ».

Ce rapport estime aussi que « la “preuve parfaite” du sort » de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh « sera vraisemblablement impossible à trouver sans une volonté des plus hautes autorités de l’État. L’implication d’un service étatique, en l’occurrence l’armée nationale tchadienne, étant parfaitement démontrée, seule cette volonté de l’État tchadien serait susceptible de permettre la manifestation de la vérité, l’identification des auteurs et leur traduction devant la justice ».

Par ailleurs, les observateurs de l’Organisation internationale de la francophonie, l’OIF, et de l’Union européenne ont considéré, quant à eux, dans une déclaration publique, que « la manifestation de la vérité n’a pu être faite sur certaines affaires, en particulier sur le cas emblématique de la disparition » de cet opposant politique.

Ils « le regrettent et réaffirment leur attachement profond à ce que toute la lumière soit faite sur ces faits graves, estimant que les travaux de la commission d’enquête ne doivent constituer qu’une première étape de cette recherche de la vérité et de la justice ».

J’ajoute un élément nouveau, apparu depuis le dépôt du texte de la présente question. Le 20 septembre 2008, un arrêté a été pris par le gouvernement tchadien. Cet arrêté met en place un sous-comité technique auprès du comité de suivi du rapport d’enquête sur les événements survenus en République du Tchad du 28 janvier au 8 février 2008 et sur leurs conséquences.

J’ai ici la composition de ce sous-comité technique. (L’orateur brandit un document.) Il comprend onze personnes, parmi lesquelles figurent dix membres du gouvernement et le secrétaire général de la présidence de la république tchadienne ! Il me semble que cela démontre, à l’évidence, que les conditions ne sont pas réunies pour que cette instance ait une quelconque indépendance par rapport aux autorités tchadiennes, et en particulier au pouvoir exécutif ; c’était le cas de la commission ayant établi le rapport d’enquête et du comité de suivi.

Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, beaucoup de Français sont attentifs à cette question et sont très préoccupés du sort réservé à M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, de même que de nombreux Tchadiens résidant en France et en Europe, mais aussi, bien sûr, au Tchad.

Au vu de ces éléments, quelles dispositions et initiatives concrètes le gouvernement français entend-il prendre pour que toute la lumière soit faite sur les conditions dans lesquelles M. Ibni Oumar Mahamat Saleh a disparu et sur l’attribution des responsabilités effectives et précises dans le sort tragique qui a été le sien ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Lors de l’offensive menée au Tchad, au début de l’année 2008, à partir du territoire soudanais, par des groupes armés, trois opposants tchadiens ont disparu.

Nous en avons été alertés dès le 3 février et nous avons immédiatement pris contact avec les plus hautes autorités tchadiennes pour nous enquérir de la situation de ces personnes.

Deux d’entre elles sont rapidement réapparues. Malheureusement, M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, porte-parole de la Coordination des partis politiques pour la défense de la constitution, la CPDC, fondée en 2004, et président du parti pour les libertés et le développement, est toujours introuvable.

Depuis que nous avons eu connaissance de sa disparition, nous avons constamment eu à cœur d’obtenir des informations sur son sort. D’ailleurs, à la suite de la visite du Président Sarkozy au Tchad à la fin du mois de février, la France a vivement encouragé la création d’une commission d’enquête chargée de faire la lumière sur cette affaire.

Nous avons participé à cette commission en tant qu’observateurs, au titre de la troïka européenne, et nous avons appuyé ses travaux par l’envoi d’un expert technique.

Conformément aux engagements pris, cette commission a rendu son rapport le 5 août dernier au chef de l’État tchadien. Les autorités tchadiennes l’ont publié rapidement.

En ce qui concerne le cas emblématique d’Ibni Oumar Mahamat Saleh, le rapport constate effectivement qu’aucune information ou élément de preuve n’a pu être obtenu sur son lieu et ses conditions de détention, ainsi que sur son sort.

Néanmoins, la commission a établi un « faisceau de présomptions graves […] qui permettent de conclure, “au-delà de tout doute raisonnable”, à l’implication de l’armée nationale tchadienne » dans « une action concertée et organisée », réalisée sur ordre de la hiérarchie militaire ou « des instances supérieures de l’État tchadien ».

Par ailleurs, le rapport recommande de poursuivre les investigations policières et judiciaires, notamment s’agissant de l’enlèvement et de l’arrestation des dirigeants de l’opposition.

Nous réaffirmons notre attachement profond à ce que toute la lumière soit faite sur le sort réservé à M. lbni Oumar Mahamat Saleh, en particulier par le lancement des procédures judiciaires et des enquêtes internes, en vue de l’identification et de la comparution devant la justice des personnes accusées des actes les plus graves.

Le ministre des affaires étrangères et européennes a de nouveau exprimé cette position de la France à Mme Saleh, épouse de l’opposant disparu, qu’il a reçue le 30 septembre dernier. Cette rencontre a également été l’occasion pour M. le ministre de redire la disponibilité de la France pour aider la famille de Mme Saleh, actuellement installée à Orléans, ville dont vous êtes l’élu, monsieur Sueur.

Dans ce cadre, le gouvernement tchadien a déjà entrepris un certain nombre d’actions que vous avez rappelées. Un comité de suivi des recommandations du rapport de la commission d’enquête a été créé ; il s’est réuni à plusieurs reprises. De même, un sous-comité technique a été instauré, qui comprend quatre cellules chargées respectivement de la sécurité, de la justice, du soutien psychologique et matériel, et, enfin, de l’investigation économique et financière.

C’est sur ces instances de suivi que nous allons pouvoir appuyer notre action. Le gouvernement tchadien s’est encore récemment engagé à ce que les poursuites judiciaires débutent rapidement.

Nous menons actuellement une réflexion, en relation avec l’Organisation internationale de la francophonie et la Commission européenne, qui vise à proposer un appui coordonné au gouvernement tchadien. Plusieurs formules sont possibles : il peut s’agir d’établir un groupe de contact des observateurs, ou encore d’envoyer des experts techniques, à l’instar de ce qui s’est fait pour la commission d’enquête.

Mais notre action visera également à soutenir une approche compensatoire, nécessaire pour les victimes des arrestations et des viols.

La France n’oublie pas et n’oubliera pas M. Ibni Oumar Mahamat Saleh. Nous estimons donc que les travaux de la commission d’enquête ne doivent constituer qu’une première étape dans la recherche de la vérité et de la justice, et nous serons attentifs à l’application effective des recommandations émises dans le rapport.

Tels sont les éléments de réponse que je pouvais vous apporter, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Je voudrais vous remercier, monsieur le secrétaire d’État, pour cette réponse précise.

Deux points sont en effet fondamentaux. En premier lieu, bien sûr, il y a l’aide aux victimes. Il est important que M. Bernard Kouchner ait reçu personnellement Mme Saleh. Celle-ci y a été très sensible et, à cet égard, tout ce que la France pourra entreprendre sera évidemment précieux.

En second lieu, il y a la recherche de la vérité et les procédures judiciaires qu’il convient d’engager à l’encontre de ceux qui sont responsables de la disparition du grand militant politique de l’opposition tchadienne et des droits de l’homme qu’est M. Ibni Oumar Mahamat Saleh.

De ce point de vue, j’ai dit tout à l’heure que le sous-comité mis en place ne donnait peut-être pas – et vous comprendrez qu’il s’agit là d’un euphémisme ! – tous les gages d’indépendance nécessaires. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, il m’apparaît très important que les engagements que vous avez pris dans la dernière partie de votre réponse se concrétisent, de manière que la France, s’appuyant sur les instances internationales et agissant avec l’Organisation internationale de la francophonie et l’Union européenne, fasse en sorte que la présence sur place d’intervenants et d’experts indépendants représentatifs de la communauté internationale soit clairement assurée.

Ainsi, les conditions pour que l’on connaisse la vérité pourront se trouver réunies. À cet égard, le rapport existant ne constitue qu’un premier élément. Il convient surtout que les responsabilités soient établies et que, par conséquent, les coupables soient sanctionnés par la justice.

modalités de fixation du prix du lait

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, auteur de la question n° 304, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Bizet. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’agriculture et de la pêche sur la filière laitière française. Je tiens à exprimer, d’une part, mon incompréhension au sujet de la remise en cause de la mission du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière, le CNIEL, qui a permis, depuis 1997, de donner satisfaction à tous les partenaires de la filière, et, d’autre part, mon inquiétude à propos de l’évolution du revenu des producteurs de lait, qui ont vu leurs charges augmenter de près de 15 % en un an.

La mission du CNIEL consistait à fournir des éléments d’appréciation sur le prix des produits laitiers. Ces cotations étaient exogènes à la filière laitière française. En d’autres termes, celle-ci n’avait pas la capacité d’influer directement sur le niveau des cotations.

À une époque où l’on assiste en Europe du Nord à une restructuration importante des entreprises de transformation aboutissant à une vraie position monopolistique, je comprends mal la position de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, qui, au moyen d’une lettre en date du 21 avril 2008, enjoignait le CNIEL de mettre un terme à l’émission de recommandations nationales d’évolution – à la hausse ou à la baisse – du prix du lait, jugeant cette pratique anticoncurrentielle.

Si la volonté du Gouvernement est de « casser un outil » qui a permis de mettre fin, au cours des années 1995-1996, à la « guerre du lait » pour faire baisser le prix du lait au niveau du consommateur, j’estime que le Gouvernement se trompe. En effet, entre 2004 et 2006, lorsque le prix du lait a baissé de 10 %, il n’y a pratiquement pas eu de répercussions sur les prix auprès des consommateurs.

De plus, l’autre mérite de la mission du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière était de permettre d’éviter la volatilité des prix et de donner une meilleure lisibilité à tous les partenaires de la filière, confortant ainsi les 400 000 emplois directs liés à cette filière.

Par conséquent, je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir me préciser votre position sur ce sujet essentiel pour préserver l’équilibre de l’économie laitière française, secteur d’activité particulièrement important, notamment dans mon département de la Manche.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Monsieur le sénateur, Michel Barnier se trouvant actuellement au Conseil des ministres de l’agriculture et de la pêche à Luxembourg, il vous prie de l’excuser de ne pas être présent aujourd'hui au Sénat pour répondre lui-même à votre question.

Vous l’interrogez sur l’incompréhension ressentie quant à la remise en cause de la mission du CNIEL et vous l’alertez sur l’inquiétude à propos de l’évolution du revenu des producteurs de lait.

Le retournement du marché des produits laitiers, s’agissant en particulier du beurre et de la poudre de lait, rend difficiles les discussions du quatrième trimestre de l’année 2008. Michel Barnier est conscient de ces difficultés. Nous mettons tout en œuvre pour faciliter les discussions professionnelles actuelles tout en respectant leur caractère privé. Il nous faut aussi préparer l’avenir.

Les actions du Gouvernement sont les suivantes.

En premier lieu, il s’agit de clarifier le cadre des discussions interprofessionnelles.

Michel Barnier a mis en place, en octobre, un groupe de travail, conjointement avec le ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, pour redéfinir un cadre clair de discussions interprofessionnelles tout en répondant au contexte de plus grande volatilité des prix induisant inévitablement des tensions sur le terrain.

La DGCCRF avait rappelé à l’interprofession nationale laitière, le CNIEL, qu’il ne devait pas y avoir de recommandation sur le prix du lait dans le cadre des relations interprofessionnelles. Ce rappel ne remet pas en question l’engagement du Gouvernement à soutenir la démarche interprofessionnelle. Les interprofessions sont essentielles pour renforcer l’organisation économique des filières agricoles et pour participer ainsi au maintien des activités agricoles sur l’ensemble de nos territoires.

Le groupe de travail a confirmé le rôle central de l’interprofession dans le suivi du marché. Le système qui sera mis en place pour la prochaine campagne laitière, à compter du deuxième trimestre de 2009, sera fondé sur des indicateurs élaborés par l’interprofession à l’échelon national et répondant à la nécessité d’une plus grande réactivité par rapport aux évolutions du marché. Sur la base de ces indicateurs, les producteurs réunis au sein des interprofessions régionales, les CRIEL, ou centres régionaux interprofessionnels de l’économie laitière, négocieront avec les transformateurs.

En attendant la mise en place du nouveau système et afin de faciliter en particulier les négociations difficiles du quatrième trimestre, un dispositif souple, par publication d’indicateurs fiables, visant à orienter les prix du lait à l’échelon national sera géré par le CNIEL. Ce dispositif assurera une continuité satisfaisante avec le système pratiqué jusqu’à présent.

En deuxième lieu, il s’agit de donner un signal clair à la production.

L’offre doit être maîtrisée pour éviter un effondrement des prix. Michel Barnier a souhaité donner un message clair aux éleveurs sur la nécessité de maîtriser la production dans le cadre de la gestion des quotas.

Le ministre de l’agriculture et de la pêche a invité les producteurs à ne pas dépasser de plus de 2 % leur quota à ce stade de la campagne, leur rappelant également le maintien des pénalités en cas de dépassement. Ces rappels devaient donner des signaux clairs quant à la nécessité de limiter la production.

En troisième lieu, il s’agit de s’assurer de la transparence des prix.

Une baisse des prix au niveau des producteurs doit se traduire au final par une baisse des prix à la consommation. Le Gouvernement restera vigilant sur ce point. L’observatoire des prix et des marges de la DGCCRF permet d’assurer le suivi de ces évolutions.

En quatrième lieu, il s’agit de préparer l’avenir dans le cadre des négociations du bilan de santé de la politique agricole commune et des réflexions sur la contractualisation

Nous devons préparer la filière au nouveau contexte incluant une plus grande volatilité des cours et une sortie programmée des quotas. Les discussions tenues dans le cadre du bilan de santé confirment, en effet, qu’une majorité d’États membres reste en faveur de la sortie des quotas après 2013.

Nous devons trouver les moyens de limiter les fluctuations de marché et de sécuriser la production laitière dans la diversité de nos territoires.

Les conclusions du bilan de santé de la PAC devront donc prévoir le maintien des outils d’intervention et permettre aux États membres qui le souhaitent d’apporter un soutien particulier à la production laitière en zones difficiles – Michel Barnier pense en particulier à la production en zone de montagne.

Enfin, à l’échelon national, une réflexion est menée avec les professionnels sur les modalités de contractualisation qui permettraient de sécuriser dans le temps des volumes et des prix déterminables sur la base d’indicateurs fiables.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Monsieur le secrétaire d'État, je me réjouis des excellents propos que vous venez de me rapporter émanant de Michel Barnier, concernant trois points, à savoir la maîtrise de la production, essentielle au maintien du prix du lait, la nécessaire contractualisation pour fixer un certain nombre de bassins, notamment dans des régions les plus fragiles, et – réponse dont je me félicite tout particulièrement – le retour de l’interprofession clarifiée, notamment à l’échelon régional.

Il importe, en effet, de donner un éclairage économique pertinent lors de la fixation du prix du lait au moment où la filière est en train de connaître une profonde évolution, avec la mise en œuvre en 2003 de la réforme de la PAC qui donnera lieu très prochainement à un bilan de santé, mais aussi du fait de l’interaction avec la loi de modernisation de l’économie, ou LME.

Pour ma part, je souhaite que l’on veille à ce que, au travers de cette loi, qui est globalement bonne, les distributeurs ne mettent pas les producteurs en grande difficulté précisément par la compression du prix au niveau de la production.

Je regrette tout simplement l’attitude adoptée par la DGCCRF voilà quelques mois, qui a provoqué quelques turbulences, du fait de la position prise par certaines entreprises, notamment Entremont, entraînant une baisse globale du prix du lait à un moment délicat pour les producteurs.

Cependant, je me réjouis que la raison l’ait emporté malgré tout et qu’il y ait un véritable retour de l’interprofession s’agissant de l’éclairage des différents indicateurs pour fixer le prix du lait.

situation financière des communes forestières de meurthe-et-moselle touchées par la tempête de 1999

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 283, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

M. Daniel Reiner. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer de nouveau l’attention du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur la situation financière des communes forestières de Lorraine et, en particulier de mon département de Meurthe-et-Moselle, touchées par la tempête de 1999, chacun s’en souvient.

Depuis le dépôt de cette question en juin dernier, une réponse a été apportée par le ministère au préfet de Meurthe-et-Moselle sur ce sujet. Néanmoins, je souhaite compléter la question, car elle me paraît toujours d’actualité.

Je rappellerai les faits pour que les choses soient claires.

L’équilibre budgétaire d’un certain nombre de communes rurales de Meurthe-et-Moselle s’appuyait majoritairement sur les bénéfices liés à l’exploitation des forêts communales.

À la suite de la tempête de 1999, ces communes ont bien sûr été confrontées à une situation financière très délicate. En effet, certaines d’entre elles ont vu près des deux tiers de leur forêt mités, voire rasés, provoquant un manque à gagner annuel allant jusqu’à 200 000 euros, ce qui est évidemment très important pour ces petites communes.

Aussitôt, la mise en place d’un dispositif national d’aide exceptionnelle a amorti cette perte nette de recettes communales.

Cependant, une circulaire en date du 9 novembre 2007, soit huit ans après les faits, a mis fin à ce dispositif, considérant qu’il avait globalement rempli son objectif de solidarité nationale.

Or ce n’est pas le cas. En effet, si les communes qui disposaient de forêts de résineux, je pense notamment à nos voisins des Vosges, sont aujourd’hui quasiment tirées d’affaire, celles qui possédaient des forêts de feuillus n’en sont qu’au début de la régénération. On sait que les hêtres et les chênes mettent évidemment plus de temps à pousser que les pins et les sapins.

Ainsi, sur la centaine de communes – et c’est beaucoup ! – qui ont pu bénéficier de ce dispositif en Meurthe-et-Moselle, il reste aujourd’hui soixante communes qui connaissent une situation budgétaire extrêmement difficile, laquelle risque de devenir inextricable au fil du temps.

C’est la raison pour laquelle nous considérions que l'État devait poursuive son accompagnement financier pendant quelques années encore, par le biais d’un dispositif transitoire.

Sur l’initiative de l’Association des maires de notre département, un groupe de travail, associant les services de la préfecture de Meurthe-et-Moselle, l’Office national des forêts, la Trésorerie générale, la Direction départementale de l’agriculture et de la forêt, a travaillé longuement pour analyser finement la situation de l’ensemble de ces communes sinistrées. Ce groupe a rendu un document s’appuyant sur l’exemple d’une commune pour illustrer le cas de l’ensemble des communes. Objectivement, toutes ces communes étaient confrontées au problème.

Telle est donc la situation à ce jour.

Comme je l’ai dit, vos services ont répondu au préfet de Meurthe-et-Moselle. Ils ont indiqué que l’exemple de la commune qui avait été donné n’était pas bon et que, au fond, les communes pouvaient faire des efforts.

La réponse indiquait, en substance, que le ministère était amené à penser que les communes bénéficiaires de l’aide exceptionnelle l’ont utilisée comme une ressource de fonctionnement ordinaire leur évitant par là même de modérer leurs évolutions de dépenses courantes.

Naturellement, si l’on s’en tient uniquement aux chiffres, c’est bien ce qui apparaît en première lecture. Je reviendrai sur le cas particulier que j’ai cité si vous vous y référez, mais je précise que, à l’évidence, ces communes utilisaient ces recettes forestières pour leur propre fonctionnement.

L’équilibre des dépenses forestières de fonctionnement ne résume pas l’ensemble du budget, puisque ce dernier comporte aussi des dépenses d’investissement.

Nous pensons donc qu’il importe de réétudier la circulaire et de se pencher sur les dossiers des soixante communes en question, afin d’envisager la possibilité de mettre en place un dispositif transitoire pour que la solidarité nationale leur permette de sortir définitivement de l’impasse dans laquelle elles se trouvent neuf ans après cette terrible tempête.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé Mme le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur la situation financière de certaines communes forestières de votre département touchées par la tempête de 1999.

Je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Mme Alliot-Marie, qui est retenue à l’Assemblée nationale.

Je vous réponds donc, monsieur en sénateur, en soulignant que les aides budgétaires mises en place en 2000 avaient pour objectif de favoriser un retour rapide à l’équilibre financier des communes les plus touchées. Elles n’avaient donc pas vocation à être pérennes.

Je rappelle d’ailleurs que le soutien financier de l’État apporté à ces communes entre 2000 et 2007 s’est élevé à 75,2 millions d’euros, ce qui représente, vous en conviendrez, un montant de crédits très significatif et à la hauteur de la catastrophe.

De plus, si la loi de finances initiale pour l’année 2008 a supprimé ce dispositif, c’était – vous vous en souvenez – sur la base des conclusions d’une mission interministérielle d’inspection générale menée en 2007, qui ont montré que les aides allouées entre 2000 et 2007 avaient permis de rétablir la santé financière de la quasi-totalité des communes touchées.

Pour autant, le Gouvernement a souhaité poursuivre un effort spécifique en faveur des quelques communes dont la situation financière restait difficile, au travers des aides spécifiques au secteur sylvicole, comme le plan chablis, ou encore le fonds d’épargne forestière.

Enfin, concernant vos inquiétudes relatives à votre département de Meurthe-et-Moselle, je vais demander aux services du ministère de se rapprocher du préfet du département afin de faire un point de situation précis avec lui dans les meilleurs délais.

En tout état de cause, le ministère souhaite que la circulaire en question soit réétudiée afin d’envisager éventuellement la révision du dispositif qui avait été mis en place à titre transitoire.

M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Je suis satisfait que la situation de ces quelques communes forestières soit réétudiée, monsieur le secrétaire d'État.

La réponse apportée initialement par le ministère nous avait quelque peu choqués, je ne vous le cache pas. On a raisonné sur la base d’une commune qui paraissait exemplaire de la situation de l’ensemble de ces communes. Or, en réalité, elle ne l’était pas, car des circonstances particulières ont fait qu’elle avait dû augmenter ses charges de fonctionnement en dehors de l’aspect forestier.

En revanche, certaines de ces communes forestières souffrent beaucoup. Il s’agit souvent de très petites communes, qui comptent entre 100 et 200 habitants. Une éventuelle augmentation des impôts n’apporterait pas des sommes équivalant à ce que pouvaient rapporter 200 ou 300 hectares de forêt.

Je vous remercie donc de votre réponse.