Mme la présidente. La parole est à M. Robert Tropeano.

M. Robert Tropeano. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette année encore, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », que nous sommes chargés d’examiner, sont en baisse.

Ce budget est malheureusement dans la lignée des précédents. Une réduction de 3 % hors inflation équivaut à une baisse de 5 % à 6 %. Avec une telle diminution, ce budget ne corrigera pas les injustices accumulées depuis des années. Au contraire, il les accentuera. La projection contenue dans la programmation pluriannuelle confirme cette tendance à la baisse pour les années 2010 et 2011.

Justifier cette réduction en avançant l’idée que la dotation par ressortissant augmente en raison de l’évolution démographique revient à faire abstraction du nombre de ressortissants de l’Office national des anciens combattants et du fait que la veuve d’un ancien combattant décédé devient à son tour ressortissante de l’ONAC.

Maintenir le budget précédent aurait permis de répondre favorablement aux attentes des anciens combattants. Monsieur le secrétaire d’État, il s’agit là d’une occasion manquée.

Les engagements qui ont été pris en vue d’améliorer la situation des anciens combattants ne doivent pas se limiter au devoir de mémoire. Ils doivent se concrétiser dans les faits.

Monsieur le secrétaire d’État, lorsqu’il était candidat à l’élection présidentielle, l’actuel Président de la République avait promis, et votre prédécesseur a relayé cet engagement, de poursuivre l’augmentation de l’indice de deux points par an pour les trois prochains budgets, c'est-à-dire les projets de loi de finances pour 2009, 2010 et 2011, et de trois points en 2012, pour arriver à l’indice 48 en fin de législature. Ces engagements ne seront pas tenus.

L’année dernière, une revalorisation de deux points au 1er janvier nous avait été annoncée. Dans la réalité, elle n’est entrée en vigueur qu’au 1er juillet. Comme les pensions sont payées à terme échu, une revalorisation au 1er juillet n’est versée qu’au 1er janvier de l’année suivante, ce qui sera le cas pour 2009. Ce glissement est fort préjudiciable aux anciens combattants. Aussi serait-il souhaitable que le dispositif puisse entrer en application dès le 1er janvier 2009.

Aujourd'hui, la retraite du combattant s’élève à 526,89 euros par an. Un point représente 13,51 euros par an. Une augmentation au 1er janvier de deux points correspondrait à 27,02 euros par an. Convenez-en, au regard des milliards que l’État apporte pour sauver le système bancaire de ses dérives ultralibérales, les sommes qu’une telle décision engagerait sont extrêmement faibles.

Les anciens combattants nous interpellent très souvent sur la revalorisation des pensions militaires, qui est uniquement indexée sur le traitement des fonctionnaires hors primes.

Or, vous le savez, les fonctionnaires, comme d’ailleurs une très large majorité de nos concitoyens, souffrent de la baisse continuelle de leur pouvoir d’achat. Alors que dire du pouvoir d’achat des anciens combattants, en baisse de 6 % au cours de ces cinq dernières années !

Depuis longtemps, les anciens combattants demandent une juste revalorisation de leur retraite, cette retraite qui constitue l’une des traductions les plus symboliques du droit à la réparation et de la reconnaissance de la nation. Il s’agit de la transcription financière de cette reconnaissance envers ceux qui ont combattu pour notre pays.

Monsieur le secrétaire d’État, il est un autre sujet qui devrait, je pense, vous interpeller. Je fais référence à l’allocation différentielle, qui est destinée aux conjoints survivants les plus démunis. Son montant a été augmenté, passant de 681 euros en cours d’année à 750 euros. Si un effort a été réalisé – il a été décidé de ne plus prendre en compte l’aide personnalisée au logement dans le calcul de l’allocation, ce dont nous prenons acte –, il faut aller plus loin. Je suggère de ne pas prendre en compte non plus l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA.

Enfin, reconnaissons-le, il serait normal de porter ce montant à 817 euros, ce qui correspond au seuil de pauvreté reconnu au niveau européen. Je vous le rappelle, pour l’INSEE, le seuil de pauvreté s’élève à 887 euros. À budget constant, il aurait été tout à fait possible d’augmenter le montant de cette allocation différentielle de solidarité.

Afin de garantir la pérennité des crédits destinés à l’allocation différentielle et de donner des gages au monde des anciens combattants, il serait judicieux que l’inscription de ces crédits fasse l’objet d’une ligne budgétaire bien distincte. Monsieur le secrétaire d’État, un tel geste aurait toute sa signification.

L’année dernière, j’avais interrogé votre prédécesseur sur la question du plafonnement de la retraite mutualiste. Cette rente doit être revalorisée. Il faut le reconnaître, pour un certain nombre d’anciens combattants, il est parfois difficile d’atteindre le plafond de cotisation, par manque de pouvoir d’achat.

Par conséquent, il apparaît urgent d’augmenter le montant des retraites et de baisser de 75 à 70 ans l’âge d’accès à la demi-part fiscale accordée aux anciens combattants.

Quand réglerez-vous définitivement la question de la reconnaissance de la campagne double ? Le Conseil d’État, qui a pris connaissance du rapport Gal, après de longs mois, a émis un avis favorable. Voilà un an, votre prédécesseur avait annoncé que des études juridiques complémentaires étaient nécessaires. Ont-elles débuté ? Quand seront-elles rendues ? Il est temps d’aboutir enfin. Vous en conviendrez, le débat ne date pas d’hier ! Il a pour objet de rétablir l’égalité de traitement entre les générations du feu.

Qu’en est-il du dossier de la décristallisation des pensions civiles et militaires des retraités qui ont servi la France et sont devenus étrangers après la décolonisation ? Il est souhaitable de décristalliser l’ensemble des pensions pour que la France ait l’honneur de donner à ces personnes une juste reconnaissance de leur engagement et leur dévouement.

Je voudrais évoquer un point qui inquiète fortement les anciens combattants : la réorganisation des structures qui doivent accueillir, aider et accompagner les anciens combattants dans nos départements. Si l’on maintient le maillage tout en élargissant ses attributions, il est indispensable que ces structures aient les moyens humains, matériels et financiers de fonctionner. Quelles garanties législatives – car les engagements verbaux sont loin d’être suffisants – pouvez-vous nous apporter à cet égard ?

La révision générale des politiques publiques inquiète également le monde combattant, car elle conduit à la disparition de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, pour transférer ses attributions à l’ONAC.

Bien qu’il ne s’agisse pas d’une question budgétaire, je souhaite réitérer la demande que j’avais déjà formulée l’an dernier. La date du 19 mars doit être retenue pour célébrer la journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes de la guerre d’Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie, en lieu et place du 5 décembre.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Robert Tropeano. Les anciens combattants y sont profondément attachés. Ayant moi-même effectué mon service militaire pendant vingt-huit mois en Algérie, je tiens également à la défense de cette date du 19 mars, qui marque véritablement la fin de la guerre d’Algérie.

Enfin, au cours de ces dernières semaines, il a été fait allusion à une journée unique ou nationale du souvenir. Comme certains de mes collègues, je m’y opposerai fortement. La politique de mémoire est indispensable à la transmission de notre histoire, notamment pour les jeunes générations.

Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d’État, vous comprendrez qu’il ne me sera pas possible de voter votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Je remercie les rapporteurs, Janine Rozier, qui a ouvert ces discussions, dans un esprit à la fois raisonnable, combatif et efficace, ainsi que Jean-Marc Todeschini, bon connaisseur du dossier s’il en est. Je salue également, je leur répondrai chemin faisant, les autres orateurs de leurs interventions intéressantes et bien étayées.

Puisque nous sommes entre bons connaisseurs de ce dossier, je vous présenterai les grands axes de la politique mise en œuvre pour le monde combattant et je vous préciserai le cap qui a été fixé pour les trois prochaines années, ce qui me semble une innovation intéressante.

Comme vous l’avez rappelé, le budget s’élève à 3,365 milliards d’euros, hors programme 158. Il est effectivement en diminution d’un peu plus de 2,5 % par rapport à 2008, en raison, hélas ! de l’évolution de notre population d’ayants droit. Mais il augmente là où il doit augmenter, j’y reviendrai.

La modernisation et la rationalisation du service rendu se traduisent par la réorganisation des établissements et des directions. Nous travaillons avec leurs équipes dirigeantes dans un bon esprit. D’ailleurs, la directrice de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion, la DSPRS, et le directeur général de l’office national des anciens combattants, l’ONAC sont aujourd’hui à mes côtés dans cet hémicycle.

Ainsi, l’ONAC, auquel le monde combattant – je salue ses représentants présents dans les tribunes – est extrêmement attaché, se trouve pérennisé et renforcé par le maillage départemental. Il reprendra progressivement d’ici à 2011 les fonctions que la DSPRS, appelée à disparaître, n’exercera plus. L’ONAC deviendra ainsi un opérateur unique, dans l’esprit que je viens de rappeler.

Mon prédécesseur, Alain Marleix, dont je salue l’excellent travail à cette fonction, de même que celui de ses propres prédécesseurs, s’était engagé dans cette réforme. Comme je l’ai dit souvent au conseil d’administration de l’ONAC et devant les représentants des associations du monde combattant, cette démarche mérite un suivi quotidien.

Nous avons effectué des études dans cinq départements types de nature différente pour observer comment les nouvelles mesures pourraient fonctionner. Vous le savez, le diable est dans les détails et l’enfer est pavé de bonnes intentions ! Nous devons donc être attentifs à toutes les conséquences, sachant que la RGPP s’impose à nous comme à tous. Cette réforme est aussi l’occasion d’une modernisation et d’une rationalisation.

Tout au long de cette réforme, nous devrons être attentifs au monde combattant – nous en aurons l’occasion lors des prochains rendez-vous, tel celui que nous aurons à la fin du mois de janvier avec l’ONAC – la réforme ne se fera pas contre, mais avec lui. Il nous faut être réactifs, savoir nous remettre en question et corriger le tir en cas d’éventuelles erreurs dans la mise en œuvre. Tel est mon état d’esprit pour cette réforme.

Le budget de l’ONAC progresse de près de 3,5 %, vous l’avez rappelé. L’enveloppe consacrée à l’action sociale également. Mais tout ne peut pas relever de l’action sociale. Le deuxième contrat d’objectifs et de moyens sera présenté à l’approbation du conseil d’administration du 27 janvier, après discussion, dès lundi, avec le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Je vais maintenant apporter quelques éléments complémentaires en réponse aux questions plus précises que vous avez posées, mesdames, messieurs les sénateurs.

Les maisons de retraite et les écoles de reconversion font l’objet d’une réflexion approfondie. Plusieurs associations s’interrogent sur leur propre évolution : doivent-elles se regrouper dans une ou plusieurs fondations ? Nous menons ces réflexions ensemble et dans un bon esprit.

Plusieurs d’entre vous, notamment M. Fischer, ont fait allusion au devoir de mémoire.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis. Moi aussi !

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. En effet, et je ne veux surtout pas vous oublier, madame le rapporteur, dans mes réponses sur cette question importante que nous avons évoquée également en commission et qui nous tient à cœur.

Il s’agit d’une question cruciale, nous l’avons vu récemment. Le Président de la République y attache d’ailleurs beaucoup d’importance –  il l’a montré à plusieurs reprises – et les parlementaires s’en préoccupent à juste titre.

Nous proposons trois niveaux de réponse à cette exigence de mémoire.

D’abord, les directeurs départementaux de l’ONAC seront confortés dans leur rôle de promotion de la mémoire combattante, dans le cadre des commémorations et de l’animation du réseau des acteurs de la mémoire, c’est-à-dire des associations et des collectivités qui sont de plus en plus engagées. Nous tiendrons d’ailleurs compte, dans les critères de recrutement des futurs directeurs, de leur capacité à appréhender ces questions.

Ensuite, nous proposons la mise en place de « pôles mémoire ». De manière générale, nous aurons, dans le cadre de la réorganisation de l’ONAC, des pôles de traitement mutualisés. Le niveau départemental, que j’évoquais tout à l’heure, sera au contact et au service du monde combattant. Mais il n’est pas interdit naturellement de mutualiser la démarche sur un espace plus large.

Ces « pôles mémoire » supra-départementaux, d’envergure spécifique ou encore à vocation thématique constitueront un soutien pour les directeurs, dont j’ai évoqué le rôle tout à l’heure.

Enfin, dans un certain nombre de départements, beaucoup plus engagés sur ces questions ou qui possèdent des lieux de mémoire importants, les délégués pourront être maintenus. Ce dispositif est en effet à géométrie variable. Nous avons étudié ces mesures de près afin de nous assurer que cela fonctionne.

L’Institut national des invalides, l’INI, continuera à se moderniser tout en préservant sa singularité. Je profite de l’occasion pour saluer son directeur, qui est parmi nous, dans les tribunes. Je suis ce dossier de très près, peut-être y reviendrons-nous au cours des débats. L’accueil personnalisé me semble important, y compris sur les questions chirurgicales.

Cela vaut aussi pour la mission d’appareillage. Je connais bien ce sujet, y compris d’un point de vue familial. Je tiens à ce que cette mission reste proche du monde combattant. Elle sera confiée au service de santé des armées en liaison avec la caisse nationale militaire de sécurité sociale.

La réforme sera mise en œuvre en lien avec le monde combattant mais aussi, monsieur Tropeano, avec les agents concernés, auxquels j’ai d’ailleurs rendu visite à Caen. Certaines situations pourront se résoudre facilement. D’autres nécessiteront un peu plus d’attention et nous y veillerons.

Les dispositifs relatifs à la reconnaissance et à la réparation que la nation doit à ses militaires seront préservés. Plusieurs d’entre vous m’ont interpellé à ce sujet, qui vous préoccupe tous et sur lequel nous avançons ensemble. J’ai proposé au Premier ministre un amendement prévoyant une augmentation de 2 points de l’indice de la retraite du monde combattant, le portant ainsi à 41 points, à compter du 1er juillet. Après débat, cet amendement a été adopté par l’Assemblée nationale.

Certes, cette mesure pourrait être mise en place plus tôt, dès le 1er janvier. Nous en avons discuté. Mais il faut rappeler le contexte du débat de l’an dernier. Si j’ai salué l’action de mon prédécesseur et des parlementaires, c’était également à cet égard. Sur ce sujet, nous devons tous balayer devant nos portes ! Durant vingt-huit ans, tous gouvernements confondus, la situation n’a pas beaucoup évolué ! Puis, depuis 2006, les retraites des anciens combattants ont augmenté de près de 29 %.

On est encore loin du compte, mais les engagements réitérés du Présidents de la République sont respectés. Cela nous importe à tous. Bien sûr, la date du 1er janvier aurait été idéale. Mais soyons pragmatiques ! Nous sommes engagés dans une démarche de 1er juillet en 1er juillet, et au fond, à l’arrivée, le résultat sera le même, c’est ce qui compte ! Dans les congrès des anciens combattants, cette décision est d’ailleurs perçue comme une avancée qui témoigne du respect des engagements. Nous pouvons donc tous en être fiers.

Cet effort sera poursuivi pour respecter totalement les engagements jusqu’en 2012, voire au-delà, et ne pourra être déconnecté de la situation économique et budgétaire globale. Chaque année, nous aurons ce débat.

Je lancerai d’ailleurs, dès le début de l’année 2009, en concertation avec les associations, une discussion approfondie avec mon collègue Eric Woerth portant sur l’évolution à moyen terme de la politique d’intervention de l'État en faveur du monde combattant, pour pérenniser cette démarche.

Plusieurs d’entre vous m’ont interrogé sur les moyens que nous avons mis en œuvre pour le financement du dispositif d’allocation différentielle en faveur des conjoints survivants et des veuves de guerre, auquel je faisais allusion tout à l'heure en évoquant le budget social. La commission des affaires sociales m’avait également demandé des précisions à ce sujet lors de mon audition voilà quelques jours.

Certes, madame Printz, même revalorisé à 750 euros, le plafond de cette allocation reste inférieur à la moyenne européenne, mais nous souhaitons poursuivre notre progression. L’évaluation du montant des ressources permettra de renouveler la démarche et d’envisager une nouvelle hausse de ce plafond. Ainsi, vous le voyez, nous ne souhaitons pas en rester là et nous essayons d’avancer de manière pragmatique et raisonnable.

Un effort important a été fait en faveur du financement de la majoration des crédits destinés aux rentes mutualistes, puisque ces crédits bénéficient d’un abondement de 15 millions d’euros. Cela signifie que le dispositif fonctionne bien.

Je l’ai dit devant l’Assemblée nationale, je ne souhaite pas, dans la conjoncture actuelle, que l’on ouvre des boîtes de Pandore avec des débats sur le plafonnement, les niches, etc. Nous avons réussi à tenir notre position, à préserver le dispositif. Continuons ainsi ! Chacun est naturellement libre de demander des améliorations et de présenter des propositions en ce sens, mais j’ai le sentiment, en tant que membre du Gouvernement engagé sur ce dossier, que toute surenchère n’aboutirait qu’à desservir la cause des bénéficiaires du dispositif à l’heure actuelle.

J’ai signé, le 16 octobre dernier, l’arrêté précisant les modalités d’application du décret de 1953 concernant les anciens appelés au service du travail obligatoire, le STO. Ils recevront une carte avec la mention « personne contrainte au travail en pays ennemi, victime du travail forcé en Allemagne nazie ». Ce texte fait l’objet d’un consensus auprès de toutes les associations d’internés et de déportés et il met fin à une tension ancienne. Il a été publié au Journal officiel du 5 novembre.

En revanche, la question de la reconnaissance des réfractaires au STO est toujours pendante, monsieur Fischer. J’ai donc relancé l’étude relative à l’extension de l’attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires, mais aussi aux patriotes résistants sous l’occupation, les PRO, dont certains d’entre vous connaissent les légitimes revendications, pour régler définitivement le dossier qui concerne les ayants droit très âgés.

Je suis en train de m’assurer que les choses sont techniquement possibles, pour mener ensuite la négociation interministérielle qui s’impose, dans l’espoir de trouver une solution à cette question, comme aux autres problèmes qui se posent et que je tente de régler chaque fois que c’est possible.

C’est le cas des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes RASD et KHD et des « Malgré Elles », qui, ayant fini par obtenir gain de cause après un combat légitime de tant d’années, recevront une indemnité unique d’un montant de 800 euros. Je remercie ceux d’entre vous qui l’ont souligné.

Je pourrais être intarissable sur le combat qui a été mené – un jour, j’écrirai sur le sujet ! Nombre de parlementaires de toutes sensibilités, notamment dans les régions concernées, s’y sont engagés depuis des années. Plusieurs étapes ont été nécessaires. Certains de mes prédécesseurs ont permis d’avancer sur ce dossier ; un engagement a été pris par le Président de la République lors d’un Conseil des ministres décentralisé à Strasbourg en septembre dernier ; M. Marleix a confié un travail au préfet Mahdi Hacène, qui a effectué un travail remarquable de vérification juridique, de préparation des esprits, de dialogue, notamment avec le président de la fondation Entente franco-allemande, André Bord, que j’ai moi-même rencontré à plusieurs reprises. Je vous ferai grâce du détail des différentes étapes ayant conduit à la signature d’une convention entre l'État et la fondation.

Je vous indique néanmoins que, depuis le 17 juillet 2008, date de la signature de cette convention, 4 889 demandes ont été reçues à ce jour – 28 novembre –, dont 4 600 sont saisies et 3 316 seront mises en paiement à partir du 1er décembre, c'est-à-dire lundi prochain.

Vous le voyez, nous avançons vite dès lors que nous disposons des moyens. Comme le prévoit la convention, nous avons versé à la fondation la moitié de l’allocation aux incorporés de forces par prélèvement sur notre propre budget.

D’autres questions restent pendantes, concernant notamment les anciens « malgré-nous », ceux qui n’étaient pas internés dans le camp de Tambow et ses annexes, ceux qui ont beaucoup souffert au cours de détentions en « régime sévère », ceux qui étaient détenus dans des camps à l’ouest de la ligne Curzon.

Je dois avouer que je n’ai pas de réponse à apporter dans l’immédiat à ces questions. Le dispositif ayant été défini par les anciens combattants eux-mêmes à l’issue du second conflit mondial, nous avons quelques réticences à rouvrir ces discussions. Quoi qu’il en soit, nous allons étudier de nouveau ce dossier, toutes les questions que vous posez, mesdames, messieurs les sénateurs, méritant écoute, attention et vérification.

Le rapport commandé au préfet Jean-Yves Audouin, que j’ai rencontré à plusieurs reprises et qui a effectué un travail remarquable, est en voie de finalisation.

Une commission composée de représentants de l’État, d’associations du monde combattant et d’associations des orphelins de guerre va être très rapidement mise en place pour étudier les modalités de mise en œuvre de ce rapport.

Cette commission pourrait rendre ses travaux, après concertation avec les parlementaires, vous en particulier, chère Joëlle Garriaud-Maylam, mais aussi Claude Biwer, qui m’a communiqué des éléments sur le sujet, et vous tous qui êtes intervenus sur ce point, dans le courant du premier semestre de 2009.

Il ne s’agit pas de reculer l’échéance aux calendes grecques, car il va falloir traiter le sujet un jour, chiffres à l’appui. Toutefois, dès lors qu’il s’agit d’un dossier difficile, extrêmement lourd de conséquences, il importe d’avancer prudemment, mais avec franchise et dans la transparence. Il faut que les choses soient dites, que les mesures soient prises si elles sont possibles, mais que ce qui est impossible soit clairement évoqué.

Le sujet n’est donc pas clos, et nous avançons.

Au titre de la décristallisation, une enveloppe de 100 millions d'euros est dégagée en 2009. Ce montant comprend une dotation de 24 millions d'euros pour permettre l’entrée dans le dispositif des veuves mariées après les dates d’indépendance, dont les droits à pension ont été ouverts dès 2007, mais pour lesquelles il a été estimé que les demandes arriveraient progressivement. Nous avançons donc sur ce dossier, vaillamment mais raisonnablement, compte tenu de ses implications financières lourdes.

Vous avez été plusieurs à évoquer l’actualisation des critères d’attribution de la carte du combattant au titre des opérations extérieures, rendue nécessaire pour permettre de prendre en compte les représentants de ce que l’on appelle « la quatrième génération du feu ». Ces critères remontent en effet à la guerre d’Algérie et ne sont plus adaptés aux conditions actuelles d’emploi des forces dans les opérations extérieures, les OPEX. Je compte aboutir assez rapidement sur ce dossier.

Ensuite, comme je l’ai dit récemment à une association d’anciens combattants, s’agissant de l’attribution de la carte du combattant pour ceux qui étaient présents en Algérie après le 2 juillet 1962, la réflexion se poursuit. Je ne suis pas opposé à des avancées sur ce sujet. Toutefois, ma méthode consiste d’abord à avancer dans le domaine des OPEX, puis, sur le fondement des éléments recueillis, à étudier cette situation spécifique.

On sait que les situations à examiner de près concernent la période allant du deuxième semestre de 1962 jusqu’au début de 1963, même si certaines demandes vont jusqu’en 1964.

Madame le rapporteur pour avis, suivant votre idée qui m’a convaincu, j’ai demandé à mes services que soit étudiée la création d’une médaille d’honneur du monde combattant pour récompenser les bénévoles.

Certes, il existe déjà une médaille des porte-drapeaux, comme M. le rapporteur spécial, l’a rappelé – nous la connaissons tous, nous qui sommes des élus locaux – mais une telle reconnaissance est insuffisante.

Vous avez évoqué les associations, madame Rozier, en particulier le Souvenir français. Pour ma part, j’ai fait vivre la manifestation du 11 novembre grâce aux trois cents jeunes qui avaient été mobilisés, préparés avec les établissements scolaires, et ce sous l’égide précisément du Souvenir français. Ses membres sont admirables, comme ceux de nombreuses autres associations similaires, qui méritent toutes d’être saluées.

Cette médaille est donc attendue. J’ai écrit au Grand Chancelier des ordres nationaux, au Grand Maître, le Président de la République. L’idée semble faire son chemin, et nous allons continuer dans cette voie.

Tout a été dit sur le rapport Kaspi, très intéressant, que je vais diffuser auprès de l’ensemble des parlementaires. Il est riche en propositions de rénovation, visant à rendre plus vivantes les commémorations dans un monde où la transmission de la mémoire est importante.

Parfois, on passe de la mémoire à l’histoire, comme lors de la commémoration récente de la Grande Guerre.

Cette mémoire, souvent partagée avec les ennemis d’hier – c’est l’Europe d’aujourd’hui –, avec les soldats venus de tout l’Empire d’autrefois morts pour la France – les tirailleurs sénégalais, marocains, d’Asie – constitue un élément du ciment national et donc de l’esprit de défense.

C’est pourquoi il importe de faire vivre ces commémorations.

Pour ce faire, nous devons nous appuyer également sur les moyens modernes de communication, les archives qui sont sources de documentaires magnifiques, ainsi que sur les nouveaux médias qui offrent des possibilités extraordinaires, comme nous avons pu le voir à propos de la guerre de 1914, mais aussi sur les écoles que j’évoquais tout à l’heure en citant l’exemple de ma ville.

Le rapport Kaspi nous aide dans ce domaine. Pour le reste, nous avons été très clairs dès sa publication, le 12 novembre, en déclarant que nous ne retenions pas ses propositions en matière de dates. Le Premier ministre a confirmé que toutes les commémorations nationales étaient maintenues.

À l’évidence, il serait stérile d’ouvrir une polémique sur les commémorations. N’oublions pas le travail très intéressant effectué par le président de l’Assemblée nationale, M. Accoyer, sur les questions de mémoire et d’histoire.

Vous avez évoqué la date de commémoration de la guerre d’Algérie. Nous ne toucherons à aucune date nationale, nous ne toucherons donc pas au 5 décembre. À cette date, je serai d’ailleurs présent aux côtés du ministre de la défense, Hervé Morin. Je me suis exprimé à plusieurs reprises au sujet du 19 mars et je souscris à ce qu’André Marleix a pu dire ou écrire aux préfets avant les commémorations.

La commémoration de la guerre d’Algérie a toute sa place, comme beaucoup d’autres commémorations qui ne sont pas nationales, mais qui représentent des moments importants pour une grande partie de la population.

C’est ainsi que nous avancerons et non pas en entretenant des querelles mémorielles. C’est un point de vue que nous partageons tous.

Il convient également de noter l’augmentation des crédits pour les sépultures de guerre.

Je ne m’étendrai pas sur la Journée d'appel de préparation à la défense, la JAPD, et le budget des réserves qui pourtant me tiennent à cœur. Si nous entendons rationaliser l’organisation de ces journées et réaliser des économies d’emplois budgétaires, nous ne pouvons pas amputer la moitié du budget des JAPD et donc priver de ces journées des centaines de milliers de jeunes pour servir d’autres chapitres, si légitimes soient-ils.

Nous menons une réflexion sur la réserve militaire, tant opérationnelle que citoyenne. C’est un dossier auquel j’attache une grande importance. J’ai demandé à l’état-major des armées de voir comment on peut encore améliorer la gouvernance, le lien avec les entreprises, le financement des réservistes dont la sociologie a profondément changé avec la modernisation des armées.

Notre budget se veut à la fois audacieux dans la prise en compte des réformes touchant au monde des anciens combattants, solidaire envers celles et ceux qui en ont le plus besoin et sensible aux enjeux de mémoire qui forgent notre identité collective et notre capacité à vivre ensemble. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)