M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. L’amendement n° II-52 rectifié a pour objet de permettre aux tribunaux d’instance de faire face à la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs et d’affecter aux maisons de justice et du droit, les MJD, les effectifs dont elles ont besoin pour fonctionner.

Je rappelle que la loi du 5 mars 2007 fait obligation à l’ensemble des tribunaux d’instance de revoir tous les dossiers de protection juridique des majeurs d’ici à 2012. Or pratiquement aucun tribunal d’instance n’a pu se mettre à la tâche, car ces juridictions sont débordées par les autres missions qu’elles doivent accomplir.

Pour entrer dans le détail, il s’agit de prélever 1 786 278 euros du programme « Administration pénitentiaire », plus précisément de l’action « Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice », pour alimenter le programme « Justice judiciaire ». La majoration de crédits de ce programme est imputée de la façon suivante : 1 281 350  sur l’action 01, « Traitement et jugement des contentieux civils », pour créer dix emplois de magistrats et vingt emplois de greffiers qui renforceraient les effectifs des tribunaux d’instance ; 504 928 euros sur l’action 08, « Support à l’accès au droit et à la justice », pour la création de seize emplois de greffiers de catégorie B, destinés à compléter les effectifs des maisons de justice et du droit qui, selon les indications de la Chancellerie, sont actuellement déficitaires.

Les crédits sont prélevés sur le programme « Administration pénitentiaire » – je conviens que ce n’est pas tout à fait dans l’air du temps… –, plus particulièrement sur les dépenses liées à la sécurisation des établissements pénitentiaires, dans l’action 01 « Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice ». En effet, le taux d’évasion de ces établissements est, en France, l’un des plus faibles d’Europe, et il ne paraît pas indispensable d’appliquer de façon indifférenciée à tous les détenus d’un établissement pénitentiaire les règles de sécurité visant une minorité d’entre eux.

L’amendement n° II-53 rectifié a également pour objet de renforcer les moyens alloués à l’accès au droit et à la justice en transférant 213 722 euros du programme « Administration pénitentiaire » au programme « Accès au droit et à la justice ».

Ces crédits sont prélevés, pour les mêmes motifs que précédemment, sur l’action 01, « Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice », et affectés au programme « Accès au droit et à la justice », à l’action 02, « Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité », afin d’assurer l’ouverture de nouvelles maisons de justice et du droit et d’améliorer l’équipement des MJD existantes. Certes, le projet de loi de finances prévoit l’ouverture de nouvelles maisons de justice et du droit, mais on sait qu’un certain nombre des MJD déjà existantes ne fonctionnent pas, ou seulement à temps partiel ou encore avec des moyens mis à disposition par les collectivités locales.

L’adoption de ces deux amendements déplacerait des crédits d’un montant total de 2 millions d’euros et permettrait de « boucler » le dispositif des MJD, si vous me permettez l’expression, notamment dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire qui rend leur rôle d’autant plus important.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roland du Luart, rapporteur spécial. J’ai beaucoup de considération pour mon collègue et ami Yves Détraigne…

M. Jean-Pierre Sueur. Ça commence mal ! (Sourires.)

M. Roland du Luart, rapporteur spécial. Je voulais affecter 2 millions supplémentaires à l’administration pénitentiaire, mais les deux amendements déposés par M. Détraigne tendent à prélever 2 millions d’euros sur les crédits de cette même administration. Si nos amendements avaient tous été adoptés, leur effet aurait donc été nul !

Sur le fond, la loi d’orientation et de programmation pour la justice a permis – il faut le reconnaître en toute honnêteté intellectuelle – un rattrapage des crédits affectés aux emplois de magistrats sur la période 2003-2007. Mais, nous l’avons souligné, les effectifs de greffiers restent en revanche très insuffisants, comme l’illustre le ratio actuel de 2,5 greffiers par magistrat.

La réforme de la protection juridique des majeurs est assurément à l’origine d’une montée en charge des tâches pesant sur les tribunaux d’instance, mais cet accroissement des charges reste difficilement mesurable aujourd’hui.

La question posée au détour de l’amendement de notre éminent collègue est bien celle, essentielle, de l’évaluation en amont de l’impact budgétaire d’une réforme de la justice avant son vote par le Parlement.

Or cet amendement est gagé sur des crédits – 1,7 million d’euros – prélevés sur l’administration pénitentiaire, et l’on connaît les besoins cruciaux de cette administration face à la crise de la surpopulation carcérale.

Aussi, vous comprendrez que je sollicite l’avis du Gouvernement avant de me prononcer sur cet amendement.

J’en viens à l’amendement n° II-53 rectifié.

Les maisons de justice et du droit tiennent, certes, une place importante dans la justice dite de proximité. Elles constituent un lieu où le justiciable peut bénéficier d’un accueil, d’une écoute, d’une information sur ses droits et obligations et, le cas échéant, d’une orientation vers un service compétent.

Toutefois, le projet annuel de performances pour 2009 témoigne déjà d’un niveau excellent de satisfaction pour les usagers des maisons de justice et du droit puisque l’enquête de satisfaction fait ressortir que 95 % des personnes sont satisfaites de la qualité du service rendu.

Mais l’amendement étant également gagé sur des crédits prélevés à l’administration pénitentiaire, j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement avant de me prononcer définitivement.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le projet de loi de finances prévoit la création de cinquante-neuf emplois de magistrats et de cinquante-neuf emplois de greffiers. L’essentiel de ces emplois sera consacré aux tutelles et aux aménagements de peine.

En effet, la réforme des tutelles, qui sera en vigueur à compter du 1er janvier 2009, nécessitera des emplois de magistrats supplémentaires, de même que les aménagements de peine puisque nous avons engagé une politique volontariste en ce domaine.

Il faut aussi rappeler que nous ne recourons plus aux grâces collectives, qui ont longtemps été un outil de régulation de la population carcérale, avec d'ailleurs des effets désastreux en termes de sortie. Le caractère automatique des réductions de peine et les lois d’amnistie, qui étaient utilisées comme variables d’ajustement sur la population carcérale, ne jouent plus.

Nous avons misé sur l’aménagement des peines justement pour faire diminuer la récidive et pour faciliter la réinsertion des personnes détenues.

Cent cinquante postes de secrétaires administratifs sont prévus, et cette augmentation permettra aux greffiers de se concentrer sur leurs vraies missions.

La réforme de la carte judiciaire, qui sera déjà en grande partie mise en œuvre à compter du 1er janvier 2009, permettra de libérer des emplois, lesquels pourront être redéployés.

Ainsi, 247 emplois de fonctionnaires seront libérés par la réduction du nombre de tribunaux de commerce et de centres provisoires d’hébergement, les CPH, ainsi que dix emplois de magistrats. Ces effectifs seront donc redéployés dans le cadre des juridictions en fonction des besoins.

Une nouvelle génération de maisons de justice et du droit va voir le jour, avec la création de cinq nouvelles maisons, dotées des derniers perfectionnements technologiques, puisqu’on y trouvera des bornes interactives. Il sera possible d’y déposer des requêtes pénales et même des dossiers aux affaires familiales, qu’il s’agisse d’une demande en divorce ou de mesures concernant des enfants.

On y disposera d’un accès au greffe du tribunal de grande instance compétent dans le ressort, et la visioconférence permettra une meilleure compréhension des affaires traitées. Un guichet universel de greffe sera également créé.

Par ailleurs, il est prévu dans le projet de loi de finances une augmentation de plus de 85 % des crédits en faveur de l’accès au droit. Ces crédits ont été doublés depuis 2007. En 2009, 2,3 millions d’euros seront destinés à l’ouverture de ces maisons de justice et du droit de nouvelle génération.

Monsieur Détraigne, une réduction de 2 millions d’euros des crédits consacrés à l’administration pénitentiaire empêcherait l’ouverture d’un certain nombre d’établissements pénitentiaires, car ce montant correspond à 85 emplois de surveillants. Peut-être serions-nous obligés de fermer la prison du Mans, monsieur le rapporteur spécial ! Dans le contexte actuel, on ne peut pas se permettre de réduire les crédits de l’administration pénitentiaire, en particulier ceux qui sont destinés à l’ouverture de nouveaux établissements.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Madame Borvo Cohen-Seat, l’administration pénitentiaire comprend l’insertion et la probation, qu’il faut aussi maintenir dans le contexte actuel.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je suis d’accord avec vous, il ne faut pas diminuer ces crédits !

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Je vous demande donc, monsieur le rapporteur pour avis, de bien vouloir retirer ces amendements.

M. le président. Quel est, en définitive, l’avis de la commission ?

M. Roland du Luart, rapporteur spécial. Même Mme Borvo Cohen-Seat soutient le garde des sceaux ! Je suis maintenant convaincu que M. Détraigne devrait retirer ses amendements. (Sourires.)

M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, les amendements nos II-52 rectifié et II-53 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. Même si mon collègue Roland du Luart ne s’était pas exprimé aussi clairement, j’aurais compris qu’il penchait plutôt vers le retrait, compte tenu des explications qui ont été données par Mme le garde des sceaux.

J’insiste bien évidemment sur le fait que ces maisons de justice et du droit doivent réellement fonctionner, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui. Il est inutile d’annoncer la création de nouvelles maisons de la justice et du droit si c’est pour qu’elles ne soient pas opérationnelles !

M. Jean-Pierre Sueur. Il faut des greffiers !

M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis. Par ailleurs, je souligne que le ratio entre les magistrats et les greffiers n’est pas adéquat. M. le rapporteur spécial a même commencé son propos en insistant sur le fait que la charge de travail des greffiers était trop importante.

Enfin, j’ai bien noté que les maisons de justice et du droit de nouvelle génération allaient être équipées de moyens de visioconférence, de bornes informatiques qui permettront de communiquer avec le greffier en chef du tribunal de grande instance auquel ces maisons seront rattachées. Toutefois, comme je l’ai déjà souligné dans mon intervention à la tribune tout à l’heure, je ne suis pas certain qu’un point visio-public permette de clarifier les choses. Ce ne sera peut-être pas une aide suffisante pour une personne qui n’est pas juriste, qui veut prendre contact avec des professionnels du droit sur un dossier qui la préoccupe mais qui ne sait pas formuler ses questions en termes juridiques, ni même de manière claire.

Il faudra donc être très vigilant dans la mise en œuvre de ces maisons de justice et du droit de nouvelle génération afin de s’assurer qu’elles apportent bien le service qu’on est en droit d’attendre d’elles. Si le taux de satisfaction de 95 % qu’a rappelé mon collègue M. du Luart chute dangereusement, il faudra revoir le format et le mode de fonctionnement. Sinon, les justiciables risquent de ne voir, dans la réforme de la carte judiciaire, qu’un recul de l’accès au droit, ce qui n’est assurément pas notre but.

Bien entendu, si l'amendement n° II-1 de la commission des finances avait été maintenu, un parfait équilibre entre les crédits de la justice judiciaire et ceux de l’administration pénitentiaire aurait été trouvé. Dans le contexte actuel, j’aurais des remords à maintenir mes amendements qui sont financés par 2 millions d’euros prélevés sur le programme de l’administration pénitentiaire. Par conséquent, je les retire.

M. Jean-Pierre Sueur. À titre exceptionnel ! (Sourires.)

M. le président. Les amendements n° II-52 rectifié et II-53 rectifié sont retirés.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les deux plateaux de la balance des amendements étaient également chargés de manière à assurer un parfait équilibre et une totale neutralité.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Puisqu’on a évoqué la performance des greffes, je voudrais revenir, madame le garde des sceaux, sur les systèmes d’information mis en place dans les juridictions, et plus globalement au sein de votre ministère.

Voilà quelques semaines, nous avons pris connaissance d’un rapport de la Cour des comptes qui faisait suite à une requête de M. Roland du Luart sur le fonctionnement des CARPA, les caisses autonomes des règlements pécuniaires des avocats.

À cette occasion, nous avons pu constater que des marges de progression assez significatives existaient dans les interfaces entre les différents systèmes, ceux qui sont mis en œuvre au sein des CARPA et ceux qui sont mis en œuvre au sein des greffes.

Voilà peu, la commission des finances était en mission de contrôle sur pièces et sur place dans l’importante juridiction du tribunal de grande instance du Mans, et le constat a été fait de l’existence de ruptures de chaînes.

Nous avions été impressionnés par l’encombrement d’un bureau du greffe où étaient enregistrées les affaires pénales. On nous a expliqué que deux mois au moins étaient nécessaires pour enregistrer ces affaires compte tenu de l’incompatibilité entre, d’une part, les logiciels utilisés par les officiers de police judiciaire, gendarmes et policiers, et, d’autre part, les logiciels du greffe.

On peut faire les mêmes observations sur la notification des jugements et sur les liens entre la trésorerie générale et le ministère pour la mise en recouvrement d’amendes.

Madame le garde des sceaux, de notre point de vue, il y a donc un immense effort d’investissement à accomplir pour unifier et rendre compatible l’ensemble des systèmes d’information. Cela donnerait certainement aux greffiers une plus grande efficacité dans leurs travaux, et sans doute y gagnerait-on également en termes de délais.

Sur ce point, pouvez-vous nous confirmer que votre ministère a inscrit des crédits suffisants, en termes d’investissement, qu’il s’agisse des équipements, de la formation des greffiers et, dans certains cas peut-être, de celle des magistrats ? La question dépend sans doute moins du nombre d’agents que de l’efficience des systèmes d’information.

Votre ministère, à une époque déjà ancienne, avait tenté de préserver son indépendance en demandant aux magistrats de devenir informaticiens ; on a constaté qu’il valait mieux recourir aux compétences des uns et des autres. On peut rester indépendant tout en faisant appel à de bons praticiens de l’informatique.

M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Monsieur le président de la commission des finances, vous avez raison de le rappeler, lors de ma prise de fonctions, j’ai voulu développer l’informatisation. Les greffiers ou les fonctionnaires qui font fonction de greffiers passent leur temps à faire les photocopies nécessaires à la constitution de dossiers et d’archives, et l’oubli d’une seule pièce les oblige à tout recommencer le lendemain !

Par conséquent, le premier respect que l’on doit à ces fonctionnaires tient à l’amélioration de leurs conditions de travail. J’ai donc souhaité la numérisation des documents, la dématérialisation des procédures, de manière que les greffiers n’aient plus d’archives à gérer et ne passent plus des journées entières à photocopier les pièces de dossiers d’instruction qui peuvent comporter jusqu’à quarante-sept tomes, voire cent vingt pour certains dossiers très lourds.

On m’a alors expliqué qu’une telle réforme était compliquée à mettre en place rapidement. Déjà, en 1999, puis en 2005, me semble-t-il, un décret avait rendu possible cette informatisation. Mais cette dernière n’avait jamais pu être mise en œuvre compte tenu du fonctionnement autonome de chaque direction au sein de la Chancellerie. Chaque direction possédait en effet des services informatiques, des services immobiliers, l’ensemble des fonctions « support » étant dispersées dans chacune d’entre elles. C’est d'ailleurs l’une des raisons qui ont justifié la réorganisation des directions.

Je me suis rendu compte qu’il s’agissait en fait d’un problème de communication entre personnes, les directeurs étant réticents à s’entendre afin de faire progresser cette informatisation. On m’a alors expliqué qu’il fallait leur laisser un peu de temps, afin qu’ils se parlent et puissent mettre leurs services en commun. Un peu d’autorité a fait avancer les choses, et j’ai voulu qu’au 1er janvier 2008 tous les services soient équipés de matériels de numérisation et de dématérialisation.

J’ai passé une convention avec la Caisse des dépôts et consignations, qui est une fonction support pour le ministère de la justice. Cela permet de former non seulement les magistrats, mais également les greffiers à l’utilisation de ces outils.

Depuis le 1er janvier 2008, toutes les juridictions sont équipées en matériel de numérisation et de dématérialisation. L’expérimentation a été lancée à Angoulême, et s’est poursuivie à Narbonne. Aujourd'hui, tous les TGI sont équipés du matériel de numérisation et de dématérialisation, et plus d’une cinquantaine d’entre eux l’utilisent de manière totalement opérationnelle. Les greffiers ne passent plus leur temps à faire des photocopies et à chercher dans les archives, mais donnent des CD-Rom et consultent leurs microfiches.

Les barreaux se sont attelés à mettre en place cet outil avec un peu de retard, car ils ont d’abord laissé passer la réforme de la carte judiciaire. Aujourd'hui, tous les barreaux rattachés à la cinquantaine de TGI équipés sont connectés. Par exemple, à Narbonne, on mobilisait auparavant des greffiers, des fonctionnaires et des magistrats pendant des demi-journées entières pour des audiences de mise en état qui servaient à insérer les pièces au dossier et à vérifier que les conclusions avaient bien été remises. Dorénavant, tout est transféré informatiquement, ce qui permet de boucler le dossier et de le renvoyer pour audiencement, sans passer par cette audience de mise en état. On gagne du temps et on améliore la qualité du travail effectué !

Nous allons continuer ce travail, notamment grâce à la généralisation du logiciel Cassiopée en 2009. L’un des aspects de la réforme de la carte judiciaire était de permettre aux avocats de ne plus avoir à se déplacer : ils peuvent désormais vérifier à distance, en un seul clic, l’état d’avancement de la procédure. Aujourd'hui, notre souhait est que tous les jugements civils et pénaux puissent être accessibles en ligne à compter de 2009.

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Justice », figurant à l’état B.

J’ai été saisi d’une demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite, de la part de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaitais intervenir !

M. le président. Je vous rappelle que, s’agissant de l’examen du projet de loi de finances, les demandes d’explication de vote doivent être communiquées la veille de la séance !

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je voterai contre les crédits de la mission « Justice », mais l’intervention de Mme le garde des sceaux m’incite à expliquer mon vote.

Madame le garde des sceaux, vous défendez avec fougue la politique que vous menez et à laquelle, bien évidemment, vous croyez, mais cela ne vous autorise pas pour autant à dire des inexactitudes.

Tout à l’heure, j’ai mis en cause non pas le rôle du Parquet, mais les pressions exercées sur ce dernier, et vous savez parfaitement ce que je veux dire…

J’aurais qualifié, selon vous, votre politique de « sécuritaire ». Mais la sécurité est à double tranchant. C’est, de mon point de vue, un droit fondamental pour tous les citoyens. Quant à vous, vous privilégiez une politique d’enfermement – vous ne pouvez tout de même pas dire le contraire ! –, que je déplore. Nous sommes donc malheureusement très loin de ma vision des choses, et nous pourrions sans doute discuter longtemps de nos conceptions respectives des causes de l’insécurité.

Par ailleurs, j’ai voté des deux mains en faveur de la création d’un contrôleur général des lieux de privation de liberté, poste confié à M. Delarue, que je réclamais depuis de nombreuses années. Le problème réside dans les moyens dont il dispose. J’espère en tout cas qu’il ne sera pas absorbé par le futur défenseur des droits, pour la création duquel je n’ai pas voté, malgré mon amour des droits, ses fonctions me paraissant être pour l’instant complètement floues.

En ce qui concerne les jeunes, vous n’êtes pas la première à dire, madame le garde des sceaux, que les jeunes d’aujourd'hui ne sont pas ceux d’hier. Mais cette constatation est valable pour tout le monde : ainsi, le garde des sceaux d’aujourd’hui n’est pas celui de la Libération…

Mais les enfants sont toujours des enfants, en application des droits qui leur sont reconnus au niveau international. Que ce soit clair, je m’oppose à leur enfermement. Je constate d’ailleurs que les enfants de la bourgeoisie restent enfants de plus en plus tard : ils vivent jusqu’à un âge très avancé chez leurs parents, lesquels les protègent et les nourrissent, alors qu’on voudrait que les enfants du peuple soient adultes de plus en plus tôt ! Cette différence de traitement serait, selon moi, très préjudiciable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Monsieur Sueur, un document rappelant les règles de la discussion du projet de loi de finances pour 2009 a été transmis à chaque groupe. Il est ainsi prévu…

M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas nécessaire, monsieur le président ! Pas de moyens, pas de cohérence, pas confiance ! C’est clair !

M. Pierre Fauchon. Il y a la responsabilité !

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Justice ».

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Justice ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.)