M. le président. La parole est à M. Georges Patient.

M. Georges Patient. Depuis la crise provoquée en Guyane par le coût excessif du carburant, vous ne cessez, madame la ministre, ainsi que M. le secrétaire d’État chargé de l'outre-mer, d’avancer que le taux de la taxe sur les carburants appliqué en Guyane est trop élevé et qu’il devrait être ramené au niveau du taux qui est appliqué dans les autres départements d’outre-mer, seule solution pour parvenir à une réelle baisse et à un prix supportable pour les consommateurs de Guyane.

M. le secrétaire d’État chargé de l'outre-mer a carrément jeté en pâture aux médias locaux les élus du conseil régional et du conseil général de Guyane, qualifiés « d’irresponsables », car ils refuseraient, selon lui, de prendre leurs responsabilités, alors que vous, vous auriez pris les « vôtres ».

Quelles responsabilités avez-vous prises, madame la ministre ?

Vous avez fait pression sur la SARA, société qui détient le monopole de la distribution, pour l’obliger à baisser son prix de trente centimes d’euros, prix administré entre cette dernière et vos services, mais que vous-même jugez suspect puisque vous vous êtes engagée à dépêcher sur place une « mission vérité des prix ».

S’exprimer ainsi témoigne déjà d’un manque flagrant de respect à l’égard d’élus dont le seul tort serait peut-être de ne pas être du même bord politique que vous. Mais c’est aussi révélateur d’une méconnaissance de la question des finances locales de Guyane, voire d’une totale indifférence à l’égard de la situation financière de nos collectivités.

Pourtant, le chef de l’État lui-même l’avait bien compris quand il déclarait à Cayenne, il n’y a pas si longtemps, en janvier 2008 : « Les collectivités locales doivent jouer pleinement leur rôle en matière d’aménagement du territoire et d’accompagnement des projets structurants [...] Mais je sais parfaitement qu’en Guyane, les collectivités locales connaissent des difficultés matérielles importantes.

« Au cours des dernières années, des mesures spécifiques ont été prises, notamment pour adapter les critères d’attribution de certaines dotations. Mais visiblement cela ne suffit pas [...] ».

Ces phrases sont la reconnaissance explicite, au plus haut niveau, que les dotations de l’État en faveur de la Guyane doivent être revues à la hausse. En effet, celles-ci ne représentent que 20 % des recettes de fonctionnement, contre 29,5 % en moyenne hexagonale.

Par ailleurs, les recettes fiscales directes sont, elles aussi, beaucoup plus faibles : 22 %, contre 39 % en moyenne hexagonale, en raison non seulement de la faiblesse des bases d’imposition due à la situation économique de la Guyane, mais aussi des exonérations particulières concernant le domaine privé de l’État – il est propriétaire de 90 % du territoire – et une partie du secteur spatial. Il faut le savoir et en tenir compte !

La fiscalité indirecte est donc devenue la variable d’ajustement, la recette qui permet aux collectivités de suivre tant bien que mal le rythme élevé des dépenses publiques : 6,30 % en moyenne annuelle pour les recettes, contre 8,3 % pour les dépenses, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé et des équipements.

Cet effet de ciseau a entraîné de fait une dégradation du taux de couverture des dépenses : de 119 % en 2002, on atteint à peine 100 % aujourd'hui, un niveau insuffisant pour participer aux cofinancements exigés pour mobiliser des ressources extérieures ; un problème se posera quand il faudra mobiliser les 10 millions d’euros que vous vous êtes engagés à nous accorder, sur les 16 millions d’euros de crédits de paiement du fonds exceptionnel d’investissement destiné à tout l’outre-mer. Tant mieux pour la Guyane si la « promesse » est tenue !

Un rééquilibrage des sections de fonctionnement semble donc nécessaire pour redonner des marges d’autofinancement suffisantes aux collectivités. Or, en leur demandant de diminuer le taux de la taxe sur le carburant, vous les contraignez à aggraver une situation déjà fragile et à accroitre, pour certaines d’entre elles, leur déficit.

La taxe sur les carburants ainsi que l’octroi de mer sont pour l’heure et à leur niveau indispensables à ces collectivités tant sur le plan budgétaire que sur celui de la trésorerie en raison des versements mensualisés y afférents. Diminuer ces produits, c’est les entraîner vers la chambre régionale des comptes, quand elles ne sont pas déjà sous tutelle.

Il faut donc revoir votre approche des finances des collectivités locales de Guyane. Si celles-ci doivent nécessairement passer par un rééquilibrage de leur section de fonctionnement, la solution ne doit pas consister uniquement dans les prêts de restructuration, qui sont déjà octroyés à certaines d’entre elles.

S’agissant de « prêts » – j’insiste sur ce terme –, certaines communes ne pourront pas en bénéficier, car elles connaissent une situation de déficit structurel et ne disposent pas, en conséquence, de l’épargne nécessaire pour rembourser un prêt.

La véritable solution passe, comme le laissait entendre le Président de la République, par une révision des mécanismes de garantie qui assortissent plusieurs dotations et qui sont fondés sur des critères peu opérants pour la Guyane. Il faudrait insister davantage que ne le font les dotations actuelles sur des critères relatifs aux charges des collectivités, pour autant que celles-ci soient structurelles, comme le revenu moyen par habitant, le nombre d’élèves scolarisés sur le territoire, la longueur de la voirie, le nombre de logements sociaux, la situation sociodémographique – la pyramide des âges des populations guyanaises, avec sa base très élargie, n’a rien à voir avec les standards nationaux –, la superficie du territoire commercial, l’enclavement, les particularités géographiques, le nombre de constructions scolaires chaque année, qui atteint en Guyane des sommets exceptionnels, l’éloignement par rapport au chef-lieu.

Le Comité des finances locales, saisi par le Gouvernement d’une demande d’avis et de propositions dans le cadre de la DGF, tout en prenant la bonne mesure de la situation, a préféré éluder la question des critères spécifiques dans son rapport rendu en mai 2004. Il arguait du fait qu’il ne paraissait pas envisageable de complexifier la répartition de l’ensemble de la DGF en retenant des critères particuliers pour le calcul de l’enveloppe globale outre-mer elle-même.

Mais ce même comité s’est montré favorable à la proposition du ministère de l’outre-mer de l’époque de créer une dotation spécifique outre-mer, en dehors du cadre de la DGF, qui permettrait de mieux prendre en compte certaines particularités ultramarines. Il serait intéressant que cette bonne proposition soit retenue.

J’ai d’ailleurs noté avec satisfaction qu’un engagement avait été pris dans le protocole d’accord de fin de conflit, signé entre le préfet et les responsables des collectivités territoriales de Guyane, pour la constitution d’un groupe de travail, avec l’objectif de trouver, d’ici à juillet 2009, des ressources pérennes adaptées à nos collectivités.

Il est en effet du devoir de l’État de veiller à corriger les disparités de conditions et de moyens des institutions locales, afin de tendre vers une plus grande égalité des citoyens devant le service public sur tout le territoire.

Le cinquième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution dispose : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales. » En ce sens, les réponses ne sont pas seulement techniques : elles sont aussi politiques et la péréquation doit être un facteur essentiel de maintien de la cohésion.

Par les recettes fiscales, directes et indirectes, en 2006 – ce sont malheureusement les derniers chiffres dont je dispose – les Guyanais ont participé aux dépenses publiques locales à hauteur de 1713 euros, montant largement supérieur à la moyenne nationale de 1232 euros par habitant.

Si l’État veut réellement et rapidement agir de son côté pour l’amélioration des finances locales en Guyane, il peut déjà réparer une injustice en supprimant le plafonnement de la dotation superficiaire, mesure qui frappe uniquement la Guyane, alors même que cette dotation a été majorée jusqu’à 5 euros pour des communes de métropole.

Cette dotation superficiaire est un élément qui, pourtant, colle parfaitement à la réalité de la Guyane, prenant en compte pour une fois son trait le plus caractéristique, l’immensité de son territoire. Elle était censée rapporter 27 millions d’euros à la Guyane. Malheureusement, on a nié la réalité de sa superficie, la ramenant à 26 480 kilomètres carrés, soit moins du tiers de sa superficie réelle, qui est de l’ordre de 90 000 kilomètres carrés, nous faisant ainsi perdre plus de 18 millions d’euros.

Rétrocédez cette somme aux communes de Guyane, à leurs intercommunalités, voire à un fonds de péréquation réservé à toutes les communes de Guyane : cette somme doit leur revenir !

Pour l’heure, je ne vois dans votre budget aucune évolution notable pour les finances locales de Guyane, madame le ministre. En l’état, je ne le voterai donc pas. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, soyons clairs : aujourd'hui, État et collectivités locales sont confrontés aux mêmes défis.

M. Pierre-Yves Collombat. À cause de qui ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Le défi de la mondialisation…

M. Pierre-Yves Collombat. Qui a voulu la mondialisation ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … implique l’adaptation de notre économie, nationale ou locale, à la nouvelle donne mondiale.

Par ailleurs, nous devons tous relever le défi de la crise financière, …

M. Pierre-Yves Collombat. Qui l’a créée ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … car nous sommes confrontés à une restriction des liquidités et à une défiance qui exigent la mobilisation de tous.

Nous sommes également confrontés, aux niveaux local et national, au défi du vieillissement démographique. Le poids des dépenses en matière de santé et de retraite devrait croître d’un peu plus de trois points de PIB entre 2005 et 2050.

Face à ces défis – car il faut envisager l’avenir ! –, nous avons fait le choix, avec ce projet de loi de finances pour 2009, de la lucidité, du pragmatisme, de la responsabilité, mais aussi du travail en commun.

Il ne s’agit pas, madame Mathon-Poinat, de stigmatiser de quelque manière que ce soit les collectivités territoriales. Encore une fois, nous sommes tous dans le même bateau ! Je le sais aussi bien en tant qu’élue locale que comme membre du Gouvernement.

Agir ensemble implique une action commune pour maîtriser l’évolution des finances publiques, qu’il s’agisse des dépenses nationales ou de celles des collectivités. Tel est d’ailleurs le sens des mesures que vous avez adoptées, mesdames, messieurs les sénateurs, dans la première partie du projet de loi de finances pour 2009.

Cela exige aussi que nous modernisions ensemble la vie publique locale ; c’est l’objectif que j’ai retenu pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Cela passe par un partenariat d’avenir, en élaborant un avenir commun qui soit empreint non seulement de solidarité, mais également de responsabilité et, bien entendu, de confiance. Car il ne saurait y avoir de partenariat sans confiance.

Un partenariat d’avenir suppose une plus grande solidarité. Je ne reviendrai pas sur l’évolution d’ensemble des concours financiers qui ont déjà été votés, M. Jarlier l’a rappelée tout à l'heure. Je rappellerai simplement que ces concours évolueront de 2 % en 2009, soit 276 millions d’euros de plus que l’inflation annoncée ; c’est la seule référence que je connaisse et ce n’est pas moi qui en fixe le taux !

Dans cette évolution d’ensemble, j’ai fait le choix de soutenir particulièrement l’effort de solidarité envers les collectivités qui en ont le plus grand besoin. C’est ainsi que le pouvoir d’achat de la DGF sera préservé, puisque celle-ci reste indexée sur 2 %, même si la prévision de l’inflation a été ramenée à 1,5 % en 2009. Cela représente 200 millions d’euros de plus par rapport à l’inflation prévue – pas par moi, encore une fois –, alors que nous avions annoncé l’année dernière un alignement de la DGF sur l’inflation prévisionnelle.

Les dotations de solidarité seront les premières à bénéficier de la progression de la DGF. Les aménagements de la dotation forfaitaire des communes permettront d’augmenter de 107 millions d’euros les dotations de solidarité, ce qui n’est pas rien !

L’indexation de la DGF permettra de prendre en compte le recensement de la population.

Les collectivités locales dont la population a augmenté verront leur DGF augmentée en conséquence. C’est vrai pour les communes comme pour les départements, ainsi que pour l’intercommunalité, qui bénéficie, elle aussi, directement des effets du recensement. Comme la dotation de l’intercommunalité dépend du nombre d’habitants, celle-ci bénéficiera l’an prochain de 32,4 millions d’euros supplémentaires, du seul fait de l’augmentation de la population.

Évidemment, des difficultés se posent à plusieurs niveaux.

Pour les communes dont la population baisse de 10 % ou plus, le Gouvernement a soutenu l’amendement proposé par la commission des lois et la commission des finances de l’Assemblée nationale, tendant à permettre une adaptation progressive des budgets grâce à une baisse plus graduelle de la dotation forfaitaire.

L’année dernière, déjà, j’avais proposé que la dotation globale de fonctionnement progresse au même rythme que les années précédentes, soit la prise en compte de l’inflation augmentée d’une croissance de 0,5 %. En effet, je sais parfaitement, pour avoir moi-même à gérer des budgets, qu’il est particulièrement difficile de devoir s’adapter en l’espace de deux mois, surtout lorsque les revenus sont moindres à cause d’une diminution de la population.

J’entends bien les inquiétudes exprimées par les maires, qui souhaiteraient que l’on tienne compte des recensements complémentaires réalisés après 2006.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Messieurs Jarlier, Dallier et Jégou, je comprends vos préoccupations, car il s’agit souvent de populations supplémentaires disposant de faibles moyens. Mais il n’est pas facile de trouver une solution. De toute façon, ce que l’on donne d’un côté, on le reprend de l’autre !

Sur le plan des principes, on ne peut faire coexister des estimations différentes pour un même critère : 2006, pour certaines communes ; 2007 ou 2008, pour d’autres. Ce ne serait pas très lisible, d’autant que se poserait alors un problème d’égalité, selon que les communes auraient eu ou pas un recensement intermédiaire.

De plus, le Comité des finances locales a rappelé que le fait d’accorder un avantage à certaines collectivités se ferait au détriment des dotations de péréquation. Bref, la situation n’est pas simple ! Ce comité devant se prononcer sur les critères retenus pour la DSU, on pourrait aussi lui demander de réfléchir à la manière de mieux prendre en compte l’augmentation de la population qui intervient, notamment, après les recensements complémentaires.

Au-delà de la prise en compte générale des augmentations ou des baisses de population, l’effort de solidarité doit être mieux ciblé ; c’est la condition de son efficacité. Le saupoudrage n’aboutit pas à grand-chose !

Le Président de la République a souhaité engager une réforme ambitieuse de la dotation de solidarité urbaine. J’ai proposé de concentrer les aides sur les communes qui en ont le plus besoin, car en couvrant les trois quarts des communes, on n’aide pas vraiment celles qui sont le plus en difficulté.

Certains élus ont considéré que leurs dotations allaient diminuer de manière importante avec les nouveaux critères retenus et ont estimé qu’ils seraient dans une situation financière impossible si ces derniers étaient appliqués dès 2009.

J’ai donc proposé des aménagements, qui ne remettent en rien la réforme en cause, mais qui permettent de la mettre en place plus progressivement, de manière à tenir compte des situations les plus difficiles. Ces propositions ont été acceptées à l’unanimité par les associations d’élus.

Dès 2009, une première étape sera franchie en faveur des 150 villes les plus en difficulté : elles bénéficieront de l’essentiel de la progression des 70 millions d’euros, une progression qui a d’ailleurs toujours été prévue ! Contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, il n’a jamais été question de diminuer la DSU.

Pour les autres villes, 2009 sera une année de transition, tant pour celles qui connaîtront une augmentation de leur dotation que pour celles qui sortiront du dispositif.

Ainsi, 327 communes appartenant à la première moitié des communes les plus défavorisées bénéficieront d’une augmentation de 2 %, soit un taux supérieur à l’inflation. Pour les autres, le montant de la DSU sera garanti à hauteur de celui de l’an dernier. J’ai déposé un amendement en ce sens, qui vous sera soumis tout à l'heure.

Pour les départements, j’ai proposé de renforcer la solidarité exercée par le biais de la dotation de péréquation urbaine, la DPU : elle est aujourd'hui perçue par les 33 départements urbains, dont deux départements ont un potentiel fiscal plus important. Le projet de loi de finances prévoit d’aider davantage les départements les plus défavorisés.

Monsieur Gouteyron, je sais votre attachement, que je partage, aux départements ruraux. La péréquation pour les départements ruraux n’est pas oubliée. Elle bénéficiera des aménagements apportés à la DGF : le Comité des finances locales pourra choisir une indexation forte pour la péréquation.

S’agissant de la Haute-Loire, je tiens à vous assurer que ce département n’est pas pénalisé par la réforme de 2005 : il perçoit une dotation de fonctionnement minimale de 43 euros par habitant, contre une moyenne de 28 euros.

Certes, il ne faut pas ignorer les difficultés spécifiques à certains départements ruraux, qui cumulent un certain nombre de handicaps, notamment en matière de voirie ou de climat. Je pense que le Comité des finances locales tiendra compte de certaines réalités

Monsieur Jarlier, le groupe de travail avec l’Association des régions de France n’est pas parvenu à dégager des conclusions dans les délais de préparation du projet de loi de finances. Je regrette que les régions n’aient pas abouti à un consensus, mais nous continuons d’y travailler.

En outre, des dispositifs nouveaux seront mis en place pour répondre aux problématiques particulières de certaines communes.

Ainsi, les communes les plus fragiles connaîtront une baisse moindre de leur dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP.

Par ailleurs, une dotation de développement urbain est créée pour aider à financer des équipements ou des actions de première importance.

Monsieur Sueur, j’ai bien entendu votre critique concernant les modalités d’attribution de la DGF. Mais nous voulons précisément favoriser un certain nombre d’actions prioritaires, comme nous le faisons pour la DGE. Je vous rappelle que, concernant la DGE, les critères d’attribution procèdent d’une discussion entre les élus locaux et le préfet, lequel les transmet ensuite. Dans la même logique, nous proposons un partenariat. Je ne savais pas que la DGE représentait, dans ses modes d’attribution, une recentralisation au bénéfice de l’État.

M. Jean-Pierre Sueur. Pour la DGF, on ne discute pas !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je vous parle non pas de la DGF, mais de la DGE, qui ressemble beaucoup plus à ce que l’on veut faire avec la dotation de développement urbain dans la mesure où elle est essentiellement destinée à des investissements et, éventuellement, à quelques actions spécifiques !

Je vous rappelle tout de même que le montant de la DDU s’élève à 50 millions d’euros, une somme non négligeable.

Monsieur Saugey, je souhaite qu’un partenariat réel soit établi avec la centaine de communes prioritaires, qui seront identifiées en fonction de leurs ressources et de leurs charges.

Un fonds d’accompagnement de 5 millions d’euros est créé pour les communes qui, du fait des restructurations de la Défense, perdront une part importante de leur population. Il ne s’agit évidemment pas d’une compensation des départs mise en place par le ministère. Nous voulons simplement accompagner les communes pour leur permettre d’adapter leur budget à leur nouveau périmètre. Il s’agit donc d’une aide supplémentaire !

Monsieur Patient, vous souhaitez que les collectivités de Guyane bénéficient d’une aide plus soutenue. Vous avez eu l’honnêteté de le reconnaître : tel est le sens de la démarche engagée par Yves Jégo et moi-même au travers des dispositions inscrites dans le protocole d’accord sur le prix du carburant. Nous poursuivrons notre réflexion. Yves Jégo a d’ailleurs proposé la constitution d’un groupe de travail sur les finances des collectivités locales, spécifiquement en Guyane.

Mesdames, messieurs les sénateurs, un partenariat d’avenir passe par plus de responsabilité et de confiance.

La responsabilité consiste à clarifier aujourd’hui les compétences. Nous le savons tous, il est illusoire de dire qu’il ne faut rien modifier.

Notre système est devenu complexe et coûteux. Redondances et confusion des compétences sont une source d’inefficacité et d’illisibilité pour nos concitoyens et pour certains de nos élus.

Le Comité pour la réforme des collectivités locales présidé par Édouard Balladur examine diverses voies, dans un souci d’ouverture et de pluralisme.

Cela a été dit, les compétences clarifiées devront s’accompagner de ressources réajustées.

Ma conviction profonde, je vous l’ai toujours dit, c’est qu’il faut simplifier le système fiscal pour qu’il corresponde mieux aux compétences exercées. Dès lors que nous clarifierons les compétences lors des discussions menées au terme du comité Balladur, il faudra adopter un système fiscal plus simple, plus lisible et plus responsabilisant, garantissant mieux l’autonomie financière et la visibilité des ressources des collectivités, car ce sont elles qui doivent avoir la maîtrise de l’essentiel des financements. Monsieur Sueur, c’est ainsi qu’il y aura une vraie responsabilité ! Dès que le comité Balladur aura rendu ses conclusions, nous y travaillerons.

La réforme des valeurs locatives sera examinée dans le cadre de cette réflexion d’ensemble. Voilà trente ans que l’on en parle, sans rien faire !

M. Jean-Pierre Sueur. Quarante ans !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Au demeurant, une telle réforme ne peut être séparée de celle de la fiscalité. Nous ferons ce travail ensemble ! D’ores et déjà, un groupe de travail s’est réuni avec les associations d’élus pour avancer très concrètement sur ce sujet, dès la remise des conclusions du comité Balladur.

Il ne peut y avoir de vrai partenariat sans confiance ni de confiance sans transparence. Pour ma part, j’ai cette volonté de transparence. J’ai entendu certains propos, que je qualifierai d’habituels…

M. Pierre-Yves Collombat. Il est dommage qu’ils soient habituels !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Ma devise, c’est bien faire et laisser dire ! Certains propos sont outranciers, polémiques…

M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas outrancier, c’est la vérité !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Je ne suis pas là pour polémiquer ! je suis là pour avancer et pour établir un véritable partenariat et une réelle transparence !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. La transparence suppose de mieux associer les collectivités territoriales dans les instances de pilotage et de décision. Je vous ferai remarquer que, depuis dix-huit mois, il n’a jamais été autant fait en ce sens. C’est l’enjeu de la Conférence nationale des finances publiques et de la Conférence nationale des exécutifs ; c’est l’objectif de la Commission consultative d’évaluation des normes, présidée par M. Alain Lambert, dont j’avais souhaité la création dès ma première intervention au Sénat.

Monsieur Chevènement, c’est aussi dans le souci d’associer les collectivités que j’avais proposé au Comité des finances locales une réflexion sur le fonctionnement du FCTVA. J’entends en effet un certain nombre de personnes regretter un manque de clarté en la matière, concernant notamment les critères retenus. Pour ma part, je souhaite que l’on puisse mieux soutenir l’investissement des collectivités. Il y a toujours intérêt à discuter ! On peut ne pas être d’accord, mais nous devrions être capables de dresser un bilan commun, afin de réfléchir sur la manière d’améliorer la situation.

La politique de croissance implique la participation des collectivités. Le Président de la République a totalement intégré cette idée, monsieur Fourcade, dans le plan de relance pour notre économie qu’il a annoncé hier. Premiers investisseurs publics, les collectivités territoriales y ont toute leur place.

Les actions des collectivités qui accepteront d’investir plus seront soutenues par le biais d’un remboursement anticipé et définitif du FCTVA, estimé à 2,5 milliards d’euros, ce qui n’est pas négligeable.

Monsieur Chevènement, cet engagement fort du Gouvernement en faveur de l’investissement local devrait être reconnu.

La réforme de la taxe professionnelle, souhaitée par le Président de la République, s’inscrit aussi dans la perspective de mieux soutenir l’activité de nos entreprises et les investissements. L’exonération des investissements réalisés entre octobre 2008 et le 1er janvier 2010 aura un effet immédiat sur l’économie.

Monsieur Chevènement, vous avez sans doute raison de critiquer la contradiction qu’il peut y avoir entre un projet de loi de finances « restrictif » – c’est votre propre terme ! –, pour ce qui concerne les concours aux collectivités locales, et le plan de relance tel qu’il est aujourd’hui présenté.

Au-delà des effets de rhétorique, ce qui importe, dans les circonstances actuelles de crise financière, devenue crise économique, c’est que le Gouvernement garantisse 5 milliards d’euros de concours aux collectivités locales, via les banques et la Caisse des dépôts et consignations.

Ce qui importe, c’est que le Gouvernement ait veillé au risque des « produits toxiques » dans l’endettement des collectivités. Je vous rappelle la rencontre que j’ai organisée avec Mme Lagarde, pour aider les collectivités qui en avaient besoin et veiller à ce qu’elles ne manquent pas de financement, en cas de repli des banques sur elles-mêmes. Tout cela fait l’objet d’un suivi permanent ; une réunion s’est encore tenue hier à ce propos.

Ce qui importe, c’est que le Gouvernement ait mis en œuvre un plan de relance facilitant, notamment par le biais du FCTVA, un plan massif et immédiat d’investissement.

Le Président de la République et le Gouvernement ont réagi vite et fort, face à une situation effectivement préoccupante, et c’est ce qui compte ! C’est ce qu’attendent les Français ! Il est bien dommage, dans ce débat, de n’entendre aucune autre proposition, émanant notamment de l’opposition.

M. Pierre-Yves Collombat. On peut en faire !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. J’aimerais les entendre !