M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Les lignes à grande vitesse entraînent indiscutablement des préjudices socio-économiques pour les communes traversées.

Toutefois, je m’interroge sur la pertinence d’une nouvelle taxe supportée par les concessionnaires de ligne à grande vitesse alors même que l’on souhaite relancer l’activité ferroviaire en France.

C’est pourquoi je sollicite l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Ce problème de la compensation est actuellement étudié par Éric Woerth, qui travaille sur d’éventuelles adaptations des mesures d’assujettissement à la taxe professionnelle d’un partenaire privé.

Par ailleurs, mener une concertation sur chaque projet pourrait, nous semble-t-il, considérablement ralentir la procédure. Nous préférons avoir un dispositif national.

Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Teston, l’amendement n° 291 rectifié est-il maintenu ?

M. Michel Teston. J’ai bien entendu l’argumentation de Mme la secrétaire d’État. La question est de savoir dans quel délai la réflexion intense de M. Woerth aboutira ! (Sourires.) Si cette réflexion ne doit durer qu’un temps, si possible bref, cela nous conviendra très bien. Nous pourrions alors renoncer à soumettre notre amendement au vote du Sénat.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. M. Teston veut une réflexion à grande vitesse !

M. Michel Teston. Madame la secrétaire d’État, pouvez-nous nous rassurer et nous fixer un délai ? Si vous nous dites que cela prendra un certain temps…

Mme Évelyne Didier. Un temps certain !

M. Michel Teston. … cela ne sera pas de nature à nous satisfaire...

M. le ministre d’État semble réfléchir tout aussi intensément que son collègue Éric Woerth… Que va-t-il nous dire ? (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. J’ai réfléchi ! (Nouveaux sourires.)

C’est nous qui avons demandé une étude sur cette question. En effet, aujourd’hui, dès lors que l’on veut réaliser de nouvelles infrastructures, les choses ne sont pas simples ; on doit en permanence gérer des contradictions, nous le savons tous.

Ce sujet a clairement émergé dans le cadre du Grenelle de l’environnement et nous avons demandé au Premier ministre de saisir le ministre du budget pour qu’il y ait une étude globale sur les compensations. En effet, si l’on doit mener une discussion commune par commune, alors qu’il y a par ailleurs des discussions sur la contribution d’un certain nombre de territoires, le problème deviendra impossible à résoudre ! Or nous souhaitons faire avancer ces projets.

Telle est la raison pour laquelle nous avons demandé au ministère du budget d’étudier la question de façon globale. Je ne peux vous donner une date maintenant, monsieur Teston, mais je vous propose de le faire en deuxième lecture. Nous souhaitons que ce sujet soit clarifié avant l’été ; il y va de l’intérêt de tout le monde. En l’occurrence, ce n’est pas une étude dilatoire puisque l’initiative avait déjà été prise auparavant. Je serai peut-être même en mesure de vous apporter une réponse à votre question avant la fin de la discussion en première lecture au Sénat.

M. le président. Voilà qui est enthousiasmant, monsieur Teston ! Quelle est, maintenant, votre décision ?

M. Michel Teston. En effet, c’est enthousiasmant, monsieur le président !

Nous avons bien noté les propos de M. le ministre d’État. Nous attendons effectivement sa réponse dans un délai très rapide et je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 291 rectifié est retiré.

Monsieur le ministre d’État, si votre réflexion n’est pas terminée, le Parlement pourra vous aider à la mener à son terme, car plusieurs propositions de loi ont été déposées, dans les deux assemblées, visant précisément à ce que, comme pour les autoroutes, il y ait des indemnisations pour les lignes à grande vitesse.

L'amendement n° 128 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Pillet, Mayet, Doligé et Pinton, Mme Rozier et MM. Dériot et Juilhard, est ainsi libellé :

Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du III de cet article, remplacer les mots :

Paris–Clermont-Ferrand–Lyon

par les mots :

Paris–Orléans–Clermont-Ferrand–Lyon

La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Il s’agit d’un amendement de précision, en cohérence avec le texte du projet de loi.

Il vise à ajouter la capitale régionale du Centre dans la liste des capitales régionales desservies par la ligne Paris–Clermont-Ferrand–Lyon et à s'inscrire ainsi dans l'esprit du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement.

En effet, dans le domaine des transports, l'une des mesures phares de celui-ci consiste à poursuivre le maillage du territoire par le développement de lignes ferrées à grande vitesse, avec l'objectif de relier les capitales régionales à la région parisienne, de permettre des liaisons rapides entre elles et d'assurer la connexion du réseau français au réseau européen.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Monsieur Pointereau, le tracé de la future ligne Paris–Clermont-Ferrand–Lyon n’est pas encore arrêté. Par conséquent, il peut être prématuré d’imposer le passage de cette ligne par Orléans. Permettez-moi de vous faire remarquer que, pour relier Paris à Lyon, on peut également passer par Chaumont et Dijon.

Sur cette question épineuse, nous sollicitons de nouveau le Gouvernement.

M. le président. Le bouclage financier de tout cela va être assez compliqué !

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Monsieur Pointereau, nous avons déjà eu ce débat à l’Assemblée nationale, où siège d’ailleurs le maire d’Orléans.

La grande inquiétude de l’Orléanais, c’était son éventuel contournement. Ce problème me semble réglé. Reste celui de la ville même, qui nécessite des études complémentaires. C’est ce qu’avait admis le député-maire d’Orléans qui, sous le bénéfice des engagements pris par ailleurs, avait accepté de retirer son amendement.

La grande inquiétude du contournement ayant été levée, je vous demande également de retirer votre amendement. Cela étant, son adoption ne me poserait pas de problème majeur.

M. le président. Monsieur Pointereau, l’amendement n° 128 rectifié est-il maintenu ?

M. Rémy Pointereau. Je le maintiens, car on peut aussi faire une ligne Paris-Lyon à côté de la ligne existante. À ce moment-là, on ne fait plus d’aménagement du territoire, on choisit le plus simple en sacrifiant des zones qui, complètement exclues des lignes à grande vitesse, se verront ainsi privées de ce facteur essentiel de développement économique. Car on sait très bien que les zones où passe le TGV se développent.

Puisque la liaison des capitales régionales entre elles est inscrite, je tiens absolument à ce que cette deuxième ligne soit conforme à ce principe et serve à l’aménagement du territoire. C’est indispensable à la vie économique de nos territoires qui sont aujourd’hui exclus.

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.

Mme Mireille Schurch. Je m’associe à mon collègue Rémy Pointereau et je soutiens cet amendement, que j’aurais pu cosigner. En effet, on peut craindre que la ligne LGV ne soit parallèle à la ligne existante, ce qui serait très regrettable au regard du Grenelle, qui a mis en avant la nécessité d’un maillage territorial.

Si la ligne passe par Orléans, on fait un arc Ouest et on alimente le nord du Massif central, ce qui me satisfait.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bruno Sido, rapporteur. Je suis tout à fait d’accord avec M. Pointereau et Mme Schurch pour dire que, théoriquement, là où passe le TGV, le développement économique suit. Mais il est évident que, a contrario, là où il ne passe pas, il n’y a pas de développement économique. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous recommande la plus grande sagesse sur cet amendement, qui n’a rien à faire dans le Grenelle I.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 128 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 258, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du III de cet article, remplacer les mots :

ainsi qu'un barreau Est-Ouest

par les mots :

ainsi qu'une branche vers l'Atlantique se greffant sur la ligne Paris-Clermont-Ferrand-Lyon dans l'Allier pour constituer un barreau est-ouest mixte, intégrant Poitiers-Limoges et formant un pont ferroviaire entre la péninsule ibérique occidentale et l'Italie

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Je remercie mes collègues d’avoir voté l’amendement précédent, ce qui m’épargnera dans quelques années, je l’espère, de faire deux cents kilomètres en deux heures.

L’amendement n° 258 vise à préciser le tracé du barreau Est-Ouest.

Depuis longtemps, le Massif central, avec un territoire dont la superficie équivaut à celle du Portugal, est tenu à l’écart des projets TGV à l’horizon 2015-2020. Dès lors, il est appréciable que l’on ait prévu dans le projet de loi, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale, et ce grâce à la mobilisation des élus locaux de tous bords et des citoyens – une pétition a recueilli 80 000 signatures –, la mise à l’étude d’un barreau Est-Ouest. Une disposition plus précise nous paraît néanmoins s’imposer.

Le Massif central est mal relié aux bassins de vie et d’activités pourtant proches, l’Arc atlantique et la région Rhône-Alpes notamment. Il faut donc un désenclavement à l’est et à l’ouest du Massif central qui, pour le moment, en termes d’infrastructures LGV, apparaît comme une vaste zone blanche.

Le barreau Est-Ouest mixte tel que nous le proposons, c’est-à-dire une branche vers l’Atlantique se greffant dans l’Allier sur la ligne Paris-Clermont-Fernand-Lyon, préserve le Paris-Clermont-Ferrand par Orléans, ainsi que le Poitiers-Limoges. Il concilie trois transversalités : Rennes-Lyon, Rennes-Bordeaux et Bordeaux-Lyon.

Ce barreau Est-Ouest permet un aménagement équilibré du territoire, avec de nouveaux schémas permettant une accessibilité de tous les territoires. La dimension européenne est affirmée, ce qui peut régler une partie de la question du financement, le projet étant intégré aux projets déjà programmés comme le Poitiers-Limoges, Rhin-Rhône ou encore Lyon-Turin.

En offrant le maximum de fonctionnalités pour un minimum de LGV à construire, le barreau Est-Ouest passant dans l’Allier contribue à l’accélération des relations Auvergne- Paris et au doublement du Paris-Lyon et surtout crée des réseaux interrégionaux autour d’une plateforme aéroportuaire de niveau européen.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. L’idée est séduisante, comme tous les projets de LGV, notamment en termes d’aménagement du territoire, mais elle n’a pas fait l’objet d’une expertise suffisante. Une réflexion devrait avoir lieu dans le cadre de l’élaboration du futur schéma national des infrastructures de transport.

Par conséquent, la commission souhaiterait, une fois de plus, connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Le principe d’un barreau Est-Ouest est clairement inscrit dans la loi, mais les études portant sur la définition de ce barreau n’ont pas encore débuté. L’hypothèse de tracé que vous avez retenue, madame la sénatrice, est celle qui est défendue par l’association ALTRO, mais on ne peut pas d’ores et déjà préjuger les tracés qui seront définitivement choisis.

M. le président. Madame Schurch, l'amendement n° 258 est-il maintenu ?

Mme Mireille Schurch. Je crois comprendre que le Gouvernement porte une attention très appuyée sur le barreau Est-Ouest en plein cœur du Massif central.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Absolument !

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. C’est nous qui l’avons proposé !

Mme Mireille Schurch. En conséquence, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 258 est retiré.

L'amendement n° 129 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Pillet, Mayet, Doligé et Pinton, Mme Rozier et MM. Dériot et Juilhard, est ainsi libellé :

Avant le dernier alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Si certains projets figurant dans la liste des premiers 2 000 kilomètres prennent du retard par rapport à l'échéance de 2020, et dès lors qu'un projet figurant dans la liste des 2 500 kilomètres supplémentaires est prêt, ce dernier pourra être avancé à l'horizon 2020 et les travaux correspondants engagés.

La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement de l’amendement n° 127 rectifié, en en précisant l’objet et en soulignant la fongibilité du dispositif, sans revenir sur l’équilibre financier de l’ensemble.

On a parlé d’une relance à court terme de la mise en place de quatre TGV prioritaires, ce dont nous pouvons nous réjouir. Toutefois, au titre de la fongibilité, en termes d’équipements structurants, il est également souhaitable de faire des prévisions à long terme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Certes, on peut porter ceinture et bretelles, si je puis dire, mais cet amendement est déjà satisfait par l’amendement que nous avons voté tout à l'heure.

Par conséquent, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir le retirer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Le Gouvernement a le même avis.

M. le président. Monsieur Pointereau, l'amendement n° 129 rectifié est-il maintenu ?

M. Rémy Pointereau. Je le maintiens, monsieur le président, parce qu’il tend justement à préciser la portée de l’amendement n° 127 rectifié.

M. Bruno Sido, rapporteur. Sagesse !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Sagesse également !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 292, présenté par Mme M. André, MM. Teston, Ries et Repentin, Mme Herviaux, MM. Raoul, Raoult, Guillaume et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Compléter le III de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'effort et la participation financière complémentaire à celle de l'État des collectivités locales au programme d'investissement et de création de lignes à grande vitesse seront modulés en fonction des capacités financières de ces dernières, et ce, au titre des objectifs de solidarité et de cohésion nationale. Un indice de fragilité des territoires sera élaboré en concertation avec les collectivités locales pour déterminer la meilleure clé de répartition des financements entre État et collectivités locales.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Cet amendement prévoit une modulation de la participation financière des collectivités locales à la création des lignes grande vitesse.

Cet amendement vise à tenir compte des capacités financières des différentes collectivités locales au programme d’investissement en infrastructures ferroviaires, qui, je le rappelle une nouvelle fois, relève d’abord de la compétence de l’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Monsieur Teston, sur le fond, je partage tout à fait votre sentiment et vos préoccupations. Toutefois, je souhaiterais que vous le rectifiiez en remplaçant l’expression « collectivités locales » par celle de « collectivités territoriales ».

Sous réserve de cette rectification, la commission s’en remettra à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Tout en comprenant la philosophie qui sous-tend cet amendement, la méthode proposée me pose problème.

L’adoption de cet amendement laisserait supposer qu’une clé de répartition obligatoire s’impose aux collectivités. Or le principe de la libre administration des collectivités locales prévaut. L’intérêt d’un tel programme peut, à un moment donné, être absolument crucial pour une collectivité quelconque. D’ailleurs, les discussions se situent non pas entre l’État et les collectivités, mais plutôt entre les collectivités. Aujourd'hui, personne n’impose quoi que ce soit à quiconque. (M. Michel Teston manifeste son scepticisme.)

Par ailleurs, on peut aussi élaborer un indice d’aménagement du territoire ou un indice de désenclavement, que sais-je encore ?...

Sincèrement, je souhaite que ces débats puissent rester totalement libres.

Certains critères présentent vraiment un intérêt vital pour certaines collectivités à un certain moment, et je ne crois donc pas qu’il faille privilégier un critère par rapport à d’autres.

Ne prévoyons pas une clé de répartition obligatoire et ne mettons pas en avant tel ou tel indice. C’est uniquement pour cette raison que le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Je le répète, c’est une réflexion beaucoup plus large qui doit être engagée.

Si une clé de répartition était déjà prévue et si le principe de la libre administration des collectivités n’était pas posé, on pourrait discuter de l’indice à retenir. Mais le problème ne se pose pas de cette façon. Cet amendement est dangereux, car il peut conduire à exercer une certaine pression sur une collectivité plus riche, par exemple, qui ne souhaiterait pas participer au financement d’un tel programme.

Même si l’argumentation de M. Teston peut sembler séduisante, je suis extrêmement réservé sur le fond.

M. le président. Monsieur Teston, quelles conclusions tirez-vous des avis donnés par la commission et par le Gouvernement ?

M. Michel Teston. Tout d’abord, je souhaite dire à M. le ministre d’État qu’il n’est nullement question, dans notre esprit, de remettre en cause le principe de la libre administration des collectivités.

Je vais rectifier mon amendement dans le sens proposé par M. le rapporteur, en remplaçant « collectivités locales » par « collectivités territoriales ».

Cela étant, il est vrai que bon nombre de collectivités territoriales ont été amenées à participer, à des niveaux particulièrement élevés par rapport à leur capacité contributive, au financement de certains projets, qui sont, par ailleurs, essentiels en matière de désenclavement d’un territoire.

C'est la raison pour laquelle nous tenons à clarifier la situation en faisant au moins admettre le principe selon lequel on ne peut demander une participation financière importante à des collectivités qui ont peu de moyens. À mon avis, c’est un principe fondamental de notre droit et du fonctionnement d’une démocratie.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 292 rectifié, présenté par Mme M. André, MM. Teston, Ries et Repentin, Mme Herviaux, MM. Raoul, Raoult, Guillaume et les membres du groupe Socialiste et apparentés, et ainsi libellé :

Compléter le III de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'effort et la participation financière complémentaire à celle de l'État des collectivités territoriales au programme d'investissement et de création de lignes à grande vitesse seront modulés en fonction des capacités financières de ces dernières, et ce, au titre des objectifs de solidarité et de cohésion nationale. Un indice de fragilité des territoires sera élaboré en concertation avec les collectivités territoriales pour déterminer la meilleure clé de répartition des financements entre État et collectivités territoriales.

La M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bruno Sido, rapporteur. L’argumentation de M. le ministre est particulièrement pertinente.

Il fut un temps, ne l’oubliez pas, monsieur Teston, où des LGV ont été construites sans la participation des collectivités desservies.

M. Michel Teston. Il y en a eu deux !

M. Bruno Sido, rapporteur. Certes, mais ce n’est pas négligeable.

Or votre amendement tendrait à graver dans le marbre le fait que les collectivités territoriales participent obligatoirement à ces programmes, fût-ce avec une modulation de leur contribution en fonction de leur richesse.

De plus, comme l’a souligné M. le ministre, le principe de la libre administration des collectivités est quelque peu mis en cause.

Pour toutes ces raisons, j’émets personnellement un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Je tiens à insister, monsieur le sénateur : tel qu’il est rédigé, votre amendement signifie qu’aucun nouveau projet d’infrastructure ne pourra être mis en place tant que les collectivités territoriales n’auront pas élaboré un indice de fragilité. Lesquelles ? Où ? Quand ? Comment ? Et en cas de désaccord, que se passe-t-il ?

Cela étant dit, au cours de la navette, je suis prêt à réfléchir à une proposition visant à prendre en compte la fragilité financière de certains territoires dans certains cas. Mais, je le répète, il est extrêmement dangereux de poser aujourd'hui comme préalable à tout projet l’élaboration d’un indice en concertation avec toutes les collectivités territoriales de France.

Il est évident que toutes les collectivités ont envie d’être desservies, j’en suis bien conscient, mais il nous faut trouver un autre moyen de prendre en compte la situation financière d’un certain nombre de collectivités.

M. le président. Monsieur Teston, l'amendement n° 292 est-il maintenu ?

M. Michel Teston. Il est vrai que les deux premières lignes à grande vitesse – la LGV Sud-Est et la LGV Atlantique – ont été réalisées avec des crédits d’État. Toutefois, depuis lors, les collectivités ont été chaque fois appelées à apporter un financement complémentaire. Il ne s’agit pas non plus de faire l’autruche !

On le sait parfaitement, les collectivités territoriales seront, à l’avenir, systématiquement sollicitées. Il faut donc fixer des règles pour faire en sorte qu’elles contribuent selon une juste répartition de l’effort et en tenant compte de leurs capacités financières. Tel est l’objet principal de cet amendement.

Cela étant, M. le ministre vient d’indiquer qu’il était prêt, dans le cadre de la navette parlementaire, à trouver une formule visant à inscrire dans le texte l’objectif que je soutiens, à savoir ne pas pénaliser certaines collectivités territoriales.

Compte tenu de cet engagement, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 292 rectifié est retiré.

L'amendement n° 290, présenté par MM. Teston, Ries et Repentin, Mme Herviaux, MM. Raoul, Raoult, Guillaume et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - D'ici 2015, les points noirs de bruit les plus dangereux pour la santé liés à des infrastructures routières, autoroutières ou ferroviaires seront supprimés.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Il s’agit là de répondre à une demande sociale forte.

D’une manière générale, concernant le bruit, nous pensons que le texte est bien en deçà des propositions formulées par le COMOP, le comité opérationnel du Grenelle de l’environnement, qui allait jusqu’à proposer d’étendre le principe pollueur-payeur aux pollutions sonores.

Les parties prenantes du Grenelle considèrent que la résorption des points noirs de bruit liés aux infrastructures de transports terrestres et aériens devrait être une priorité sanitaire. Elles avaient recommandé de les résorber en cinq ans ou en sept ans – 400 000 logements environ sont concernés –, la France étant très en retard, dans ce domaine, sur les impératifs réglementaires communautaires.

Lors d’une intervention précédente, j’ai déjà rappelé que, en matière de bruit, il faudrait faire évoluer notre législation, qui s’en tient pour l’instant à la notion de bruit moyen constaté sur une période de vingt-quatre heures. Il conviendrait de prendre en compte les bruits réels et analyser chaque bruit. Mais il s’agit là d’un travail important, qui ne pourra pas être réalisé dans l’immédiat.

Cela étant, je vous le dis très clairement, même si la commission est défavorable à notre amendement, nous le maintiendrons, car il nous paraît essentiel d’affirmer cette volonté d’avancer résolument dans la suppression des points noirs de bruit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bruno Sido, rapporteur. Il n’aura pas échappé à M. Teston, qui a travaillé sur le projet de loi et donc lu son article 36, que l’amendement n° 290 était plus que satisfait.

Monsieur Teston, votre proposition est très restrictive puisque vous mentionnez les « infrastructures routières, autoroutières ou ferroviaires », alors que, dans le deuxième alinéa de l’article 36, aucune distinction n’est faite entre les nuisances.

Par conséquent, monsieur Teston, je vous suggère de retirer votre amendement au profit de la rédaction qui nous vient de l’Assemblée nationale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Le Gouvernement a le même avis que la commission.

De plus, il faut savoir que les financements sont d’ores et déjà alloués.

M. le président. Monsieur Teston, l'amendement n° 290 est-il maintenu ?

M. Michel Teston. Il est précisé à l’article 36 que « les points noirs du bruit seront inventoriés » et que « la lutte contre le bruit des transports aériens [...] sera renforcée ». Au-delà de ces intentions louables, il ne me semble pas que les dispositions de cet article soient de nature à répondre à l’ensemble des préoccupations que j’ai exposées.

Par conséquent, monsieur le président, je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Teston, il existe des indices qui permettent de mesurer les perturbations engendrées par les bruits.

Le deuxième paragraphe de l’article 36 précise bien : « Les points noirs du bruit seront inventoriés. Les plus préoccupants pour la santé feront l’objet d’une résorption dans un délai maximal de sept ans. »

Cela s’applique d’ailleurs déjà pour les autoroutes. Dans une commune de mon département située à côté de l’autoroute A6, des mesures ont été effectuées et des dispositions ont ensuite été prises.

Soyez donc rassuré par l’article 36 !

M. Bruno Sido, rapporteur. Et aussi par l’article 40 !

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Absolument !

Toutes les assurances qui vous sont données devraient vous permettre de retirer votre amendement !

M. le président. Monsieur Teston, accédez-vous finalement à la demande de M. le président de la commission ?

M. Michel Teston. Si M. le président de la commission des affaires économiques nous donne toutes les assurances que, d’ici à sept ans, tous les points noirs bruit seront supprimés, nous ne pouvons que le croire !

Nous verrons ce qu’il en sera dans sept ans, si nous sommes toujours là ! Et nos concitoyens pourront également juger de la véracité de cet engagement. Alors, rendez-vous dans sept ans, peut-être même avant, pour faire un point précis !